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[2013] 3 R.C.F. F-6

IMPÔT SUR LE REVENU

Calcul du revenu

Régimes enregistrés d’épargne-retraite—Fonds enregistrés de revenu de retraite—Appels d’une décision (2011 CCI 536) de la Cour canadienne de l’impôt (C.C.I.) rejetant des appels interjetés par les appelants contre de nouvelles cotisations, y compris des montants inclus dans le revenu des appelants en vertu des art. 146(9) ou 146.3(4) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. 1, au motif que la fiducie régie par le régime enregistré d’épargne-retraite (REER) ou le fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) des appelants avait fait l’acquisition d’actions de certaines sociétés fermées et que la juste valeur marchande de ces actions était nulle—Bien que les conditions à respecter en vertu des articles 146(9) et 146.3(4) soient identiques, les conséquences découlant de leur application sont très différentes—En vertu de l’art. 146(9) de la Loi, si les fonds d’un REER sont utilisés, le montant qui doit être inclus dans le calcul du revenu est la différence entre la contrepartie payée pour le bien et la juste valeur marchande de celui-ci; en vertu de l’art. 146.3(4), si les fonds d’un FERR sont utilisés, le montant qui doit être inclus dans le calcul du revenu équivaut à deux fois la différence entre la contrepartie et la juste valeur marchande—La question principale portait sur l’interprétation appropriée des art. 146(9) et 146.3(4)—L’intimée soutenait que les dispositions doivent être interprétées et appliquées telles quelles, alors que les appelants alléguaient que les dispositions ne s’appliquent que si l’acquisition de biens au moyen de REER ou de FERR fait partie d’un mécanisme visant à permettre aux rentiers de retirer des fonds du REER ou du FERR sans avoir à payer d’impôt sur ces sommes—Cependant, il est clair que les articles susmentionnés ne s’appliquent que si un REER ou un FERR aliène ou acquiert des biens—L’interprétation de ces articles n’a pas été examinée, étant donné que les REER et les FERR en cause n’ont pas fait l’acquisition de biens sur lesquels les nouvelles cotisations étaient fondées—Les appelants, d’innocentes victimes, ont perdu de l’argent dans leurs régimes enregistrés respectifs lorsque les montants qu’ils avaient prévu investir ont été subtilisés par des tiers à leur insu—Les appelants étaient persuadés d’avoir acquis des actions de Sonnum Capital Leasing Corp. (Sonnum) ou de Cuatro Corp. (Cuatro), deux sociétés—La juste valeur marchande des actions des deux sociétés a été nulle, tout au long de la période en cause—Il s’agissait de savoir si les REER et les FERR des appelants avaient fait l’acquisition d’actions—La C.C.I. a erré en concluant notamment que les parties avaient convenu que les régimes enregistrés avaient acquis les actions en question sans avoir analysé la situation en vue de déterminer si les actions avaient bel et bien été acquises—Le premier appelant (M. St. Arnaud), a conclu une convention d’achat d’actions avec Sonnum, en vertu de laquelle Sonnum était le porteur inscrit de ses propres actions—Cependant, le REER du premier appelant ne pouvait pas faire l’acquisition d’actions de Sonnum aux termes de la convention, étant donné que la loi de l’Alberta en vertu de laquelle Sonnum était régie interdisait à celle-ci de détenir ses propres actions—En dehors du cadre de la convention, les actions de Sonnum ne pouvaient, non plus, être considérées comme des actions de trésorerie valablement émises—La valeur des actions de Sonnum et de Cuatro était nulle à toutes les périodes pertinentes—La période pertinente, aux termes de l’art. 146(9), s’entend du moment où le bien a été acquis—Par conséquent, si le REER du premier appelant a fait l’acquisition d’actions à la date en question, la juste valeur marchande de celles-ci était nulle—Compte tenu de la preuve, Sonnum n’a jamais reçu le montant du paiement des actions pour son propre compte—En vertu des lois de l’Alberta qui régissent Sonnum, celle-ci ne peut pas émettre d’actions avant que la contrepartie ne lui ait été entièrement payée; les actions de Sonnum n’ont donc pas pu être émises valablement, étant donné que Sonnum n’a jamais reçu de paiement—Puisque la preuve contredisait l’hypothèse de l’intimée selon laquelle le REER du premier appelant avait acquis des actions de Sonnum, la nouvelle cotisation ne pouvait tenir quant au premier appelant—Quant au deuxième appelant (M. Patenaude) et au troisième appelant (M. Braun), ils ont tous deux conclu des conventions d’achat d’actions avec une autre société désignée comme le vendeur d’actions de Cuatro—Cuatro est aussi constituée en société en vertu des lois de l’Alberta—La preuve n’a pas démontré que la société vendeuse en question détenait des actions de Cuatro—Étant donné qu’on ne peut pas vendre ce qu’on ne possède pas, les REER et les FERR des deuxième et troisième appelants ne pouvaient pas acquérir d’actions de Cuatro auprès de la société vendeuse—Compte tenu de la preuve selon laquelle Cuatro n’a jamais rien reçu des sommes payées par les divers investisseurs pour acquérir des actions, rien ne permettait de conclure que les REER et les FERR des deuxième et troisième appelants ont acquis des actions de Cuatro de la trésorerie—Une disposition de la législation de l’Alberta prévoyant que des actions ne peuvent être émises avant que la contrepartie n’ait été entièrement payée s’appliquait aussi aux actions de Cuatro—La nouvelle cotisation établie par l’intimée au deuxième et au troisième appelants ne pouvait tenir—Appels accueillis—La juge Sharlow, J.C.A. (souscrivant à ces motifs) : l’argument subsidiaire des appelants relativement à l’interprétation des art. 146(9) et 146.3(4) de la Loi a été examiné—L’interprétation littérale de l’intimée à cet égard a été rejetée—Les appelants ont soutenu qu’on peut raisonnablement penser que le législateur a supposé que si des REER ou des FERR sont autorisés à aliéner un bien pour un produit inférieur à la juste valeur marchande ou à acquérir un bien pour un montant supérieur à la juste valeur marchande, ce doit être parce que le rentier ou une personne qui a un lien avec celui-ci a pris des dispositions pour recouvrer la perte qui en découle au moyen d’accords accessoires—Les appelants alléguaient ainsi appelants a été retenue—Il existe un fondement rationnel permettant de conclure que l’impôt exigé aux termes des arts. 146(9) et 146.3(4) vise à prévenir les opérations d’évitement fiscal—Le fondement rationnel fait pencher en faveur de l’interprétation donnée par les appelants—Par conséquent, les art. 146(9) et 146.3(4) ne s’appliquaient pas en l’espèce.

Braun c. Canada (A-463-11, A-464-11, A-465-11, 2013 CAF 88, juges Webb et Sharlow, J.C.A, jugement en date du 22 mars 2013, 26 p.)

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