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Whirlpool Corp. c. Camco Inc.

T-2028-95

juge Cullen

18-8-97

68 p.

Le litige porte sur des brevets correspondant à différentes variantes et à divers perfectionnements d'un agitateur à double effet pour machines à laver les vêtements-Les demanderesses allèguent que, en 1995, à l'expiration de leurs brevets américains portant sur l'agitateur à double effet, les défenderesses ont lancé un nouvel agitateur copiant le leur-Des laveuses munies de l'agitateur ont été offertes sur le marché sans l'autorisation ou le consentement des demanderesses, alors que le brevet canadien 803 n'avait pas encore expiré-La Cour doit (i) interpréter le brevet pour déterminer en quoi consiste l'invention qu'il divulgue, (ii) déterminer s'il est valide compte tenu de la présomption légale de validité, l'opposant étant donc tenu de réfuter la validité jusqu'à un certain point et (iii) se pencher sur la question de la contrefaçon-(1)(i) Le «caractère amovible» de la chemise supérieure constitue-t-il l'invention visée par le brevet 803?-Lorsqu'elle est appelée à interpréter un brevet, la Cour se penche en premier lieu sur les revendications-Le titre du brevet n'est pas, en lui-même, un indice suffisant de l'essence du brevet-Les revendications décrivent un agitateur en deux pièces doté d'un embrayage unidirectionnel situé entre celles-ci-Elles sont claires et non équivoques-Le «caractère amovible» est un avantage de l'invention, et non l'essence de celle-ci-La substance de l'invention ressort de l'intention de l'inventeur-La Cour doit considérer le brevet dans son ensemble en tenant pour acquis que ce sont les revendications qui définissent avant tout l'invention-Il n'est pas évident que l'intention de l'inventeur était de créer seulement un accessoire d'agitation, à savoir une chemise supérieure amovible ou un agitateur complet se composant d'une chemise supérieure amovible ainsi que d'une partie inférieure oscillante et des accessoires-Lorsque plus d'une interprétation raisonnable est possible, la Cour retient celle qui est de nature à valider le brevet-Le résumé de l'invention, qui figure dans le brevet lui-même, dit clairement et sans équivoque que l'invention du brevet 803 correspond au mécanisme unique d'entraînement reliant la partie inférieure de l'agitateur à la chemise supérieure en l'absence d'un arbre d'entraînement, et non à un manchon amovible-Le caractère amovible ne constitue pas l'invention-(ii) La validité du brevet 803 au Canada n'ayant été contestée que 16 ans après l'octroi du brevet, après l'expiration de celui-ci aux États-Unis, la preuve d'invalidité avancée par la partie défenderesse doit être très probante-Toutefois, il incombe au breveté d'établir la validité du brevet une fois que la partie qui la conteste offre une certaine preuve à l'appui de sa thèse, selon la prépondérance des probabilités-Les défenderesses n'ont fourni aucun élément de preuve qui montre, même selon la prépondérance des probabilités, que le brevet 803 est invalide-La présomption de validité prévaut-(iii) Il incombe aux demanderesses d'établir la contrefaçon suivant la prépondérance des probabilités-Le seul fait que l'agitateur des défenderesses ne soit pas amovible ne permet pas de repousser l'allégation de contrefaçon-La chemise non amovible des défenderesses constitue une «variante mineure»-Le caractère amovible n'a pas une incidence importante sur le fonctionnement de l'invention dans le cas des grosses lessives-Bien que l'agitateur des défenderesses ne soit pas muni de l'élément appelé «manchon» dans les revendications du brevet 803, la chemise supérieure de l'agitateur des défenderesses est néanmoins visée par le brevet 803-Cela ne constitue toutefois pas un facteur déterminant quant à la contrefaçon-Le fait que l'agitateur des défenderesses soit muni d'ailettes flexibles sur sa partie inférieure oscillante constitue un facteur déterminant quant à la contrefaçon-Le brevet 803 est muet sur le type d'ailettes devant être utilisé-Un agitateur à double effet doté d'ailettes flexibles ne peut pas constituer l'invention divulguée dans le brevet 803 parce que, au moment de l'invention de l'agitateur à double effet, l'utilisation d'ailettes flexibles avec ce type d'agitateur n'était pas envisagée-Seules des ailettes rigides étaient envisagées dans le brevet 803-Bien que le brevet 803 n'exclue pas expressément l'agitateur à ailettes flexibles, il ne l'englobe pas-L'agitateur des défenderesses ne contrefait pas le brevet-(2)(i) Le libellé des revendications du brevet 734 étant clair, non équivoque et facile à comprendre, il n'est pas nécessaire d'aller au-delà des revendications pour faciliter l'interprétation du brevet-Le brevet porte sur la chemise supérieure unidirectionnelle et la partie inférieure oscillante d'un agitateur muni d'ailettes flexibles et actionné par un embrayage unidirectionnel-Les caractéristiques particulières énoncées dans le brevet 734 se rapportent principalement au caractère flexible des ailettes de la partie inférieure de l'agitateur, sans aucune mention de leur alignement coaxial par rapport à celle-ci, et à la transmission continue ou par intermittence d'un mouvement dans une direction donnée par le mécanisme d'entraînement-(ii) Les questions en litige qui demeurent non résolues sont la nouveauté et le caractère inventif de l'invention divulguée dans le brevet 734, et le fait de savoir si la preuve d'invalidité suffit à repousser la présomption légale de validité-Les défenderesses n'ont pas présenté un élément de preuve qui, selon la prépondérance des probabilités, tende à réfuter la nouveauté de l'ajout d'ailettes flexibles à l'agitateur à double effet-La présomption de nouveauté du brevet 734 prévaut en l'absence de preuve à l'effet contraire-En ce qui a trait au caractère ou à l'esprit inventif, la question qui se pose est de savoir si, en rassemblant tous les éléments du brevet 734, le breveté a produit une «combinaison» qui est inventive, ou s'il s'agit d'une simple juxtaposition d'éléments bien connus-Si la combinaison n'est pas une simple juxtaposition, une deuxième question se pose, celle de savoir si l'ajout d'ailettes flexibles était évident-L'adjonction de la chemise supérieure ou des ailettes flexibles à l'agitateur crée un nouveau résultat commun-Les éléments s'unissent en vue d'un résultat unitaire-Le progrès divulgué dans le brevet 734 n'est pas qu'une simple juxtaposition d'éléments déjà connus-Les défenderesses n'ont pas présenté d'éléments de preuve qui réfutent l'existence de tout esprit inventif-L'utilisation d'ailettes flexibles de pair avec un agitateur à double effet n'était pas évidente-Le fait qu'il ait fallu six mois pour mettre l'idée au point est l'indice d'une réflexion, d'une recherche ou d'une expérimentation sérieuse-Pour être brevetable, le perfectionnement d'une invention brevetée doit présenter le caractère de la nouveauté, de l'utilité et de l'invention-Le brevet 734 n'étant pas simplement la juxtaposition d'éléments déjà connus, il est impossible d'isoler les ailettes flexibles du reste de l'invention-L'invention ne consiste pas uniquement à remplacer les ailettes rigides par des ailettes flexibles-Il n'est pas nécessaire de déterminer si la substitution était évidente-Le contenu du brevet n'entre dans le domaine public qu'après la délivrance du brevet-Vu les dates de délivrance des trois brevets, les connaissances que renfermaient les brevets 401 et 803 étaient dans le domaine public depuis seulement deux ans lorsque le brevet 734 a été délivré-Ces connaissances n'étaient pas dans le domaine public lorsque l'invention visée par le brevet 734 a vu le jour-La règle générale veut que les brevets faisant l'objet de demandes en même temps ne puissent être invoqués à titre d'antériorité-C'était le cas en l'espèce-Même si les brevets 401 et 803 sont énumérés au nombre des antériorités dans le brevet 734, il ne s'agit pas d'antériorités, car ils faisaient l'objet de demandes contemporaines au moment de l'invention-Les défenderesses n'ont pas présenté quelque élément de preuve qui tende à prouver, selon la prépondérance des probabilités, que les brevets 401 et 803 peuvent être considérés comme des antériorités du brevet 734-Le brevet 734 ayant pour objet une invention totalement différente de celles divulguées dans les brevet 401 et 803, il n'y a pas double brevet-Les défenderesses n'ont pas établi, suivant la prépondérance des probabilités, que l'invention divulguée dans le brevet 734 ne revêt aucun caractère nouveau ou inventif-Aucune preuve ne tend à réfuter la présomption de validité-Le brevet 734 est donc valide-(iii) L'agitateur des défenderesses correspond à la substance des revendications du brevet 734-Les défenderesses sont donc coupables de contrefaçon.

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