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Noyes c. Canada ( Solliciteur général )

T-792-93

juge Cullen

18-1-94

27 p.

Requête en annulation de la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles portant rejet d'une demande de permission de sortir sans surveillance, de semi- liberté et de libération conditionnelle -- Le requérant est détenu à l'établissement Bath, établissement à sécurité minimale de la région de Kingston -- En janvier 1986, le requérant fut déclaré coupable de 19 chefs d'agression sexuelle et de contacts sexuels, les infractions ayant eu lieu entre 1977 et 1985 -- Elles consistaient essentiellement en attouchements sexuels d'enfants, pour la majorité des garçons, âgés de 6 à 15 ans -- Aucune allégation d'usage de force, de violence ou de menaces de violence -- Le requérant fut déclaré délinquant dangereux -- Condamné à la détention pour une période indéterminée -- Le requérant a subi durant sa détention plusieurs programmes de traitement pour ses tendances pédophiles -- A été évalué par de nombreux spécialistes, avec différents résultats et recommandations, bien que les évaluations plus récentes fussent plus favorables -- Le requérant demanda soit un régime de semi- liberté dans un foyer de transition de Hull (Québec) au cours duquel il suivrait un programme de traitement à Ottawa, soit la libération conditionnelle pour habiter dans la région de Madoc/Tweed chez un couple dont il avait fait la connaissance par l'intermédiaire de la communauté mennonite de Kingston -- Le requérant invoque l'arrêt Steele c. Établissement Mountain, [1990] 2 R.C.S. 1385, oú le juge Cory a rappelé les critères de l'admissibilité à la libération conditionnelle sous le régime de l'art. 16 de la Loi sur la libération conditionnelle: (i) l'effet positif maximal de l'emprisonnement a été atteint pour le détenu; (ii) la libération conditionnelle facilitera l'amendement et la réadaptation du détenu; (iii) la mise en liberté du détenu ne constitue pas un trop grand risque pour la société -- Le requérant soutient que la décision de la Commission ne comporte aucune référence aux critères de l'art. 16(1)a)(i) ou (ii) et que la Commission a pris une position déraisonnable face aux preuves (consultations psychanalytiques et psychiatriques) puisque les avis prédominants étaient passés de l'hésitation avant le traitement à recommander la libération conditionnelle à la recommandation unanime de libération conditionnelle à la lumière des trois critères applicables -- Et aussi qu'aucune preuve ne permet à la Commission de conclure que le requérant ne comprend pas, sauf par appréhension essentiellement intellectuelle, la nature et la cause de ses actes ou l'effet si dévastateur de son comportement, et qu'il a acquis une certaine accoutumance au traitement -- L'intimé reconnaît que le requérant satisfait aux critères (i) et (ii) -- Seul reste la question de savoir s'il présente un trop grand risque pour la société -- La Commission cite le caractère superficiel de la compréhension par le requérant des conséquences de son infraction, les preuves établissant que la pédophilie est au fond incurable, le caractère vague des plans de mise en liberté -- Elle constate que le requérant se considère comme quelqu'un qui administre le traitement et non comme quelqu'un qui le reçoit, qu'il se considère comme un expert de sa déviance (en jouant le rôle d'animateur dans certains programmes) -- La Commission n'est pas tenue d'accorder la libération conditionnelle après avoir examiné les faits au regard des critères applicables, mais elle peut le faire -- À tout le moins, elle doit examiner les faits au regard des trois critères de l'art. 16(1)a), mais peut tenir compte d'autres critères encore avant de rendre sa décision -- Elle doit informer le détenu des motifs de sa décision -- La libération conditionnelle ne peut être accordée si le cas du détenu ne satisfait pas au moins à ces trois critères -- S'il est préférable que la Commission mentionne expressément l'art. 16(1)a)(i), (ii) et (iii), cette référence n'est pas obligatoire -- La Commission avait suffisamment de preuves pour conclure que le requérant n'était pas prêt pour la libération conditionnelle et qu'il présentait un trop grand risque pour la société, allant de la nécessité d'une psychothérapie de longue durée à la longue liste des conditions qu'il aurait eu à remplir avant qu'un spécialiste n'acceptât de le traiter -- La conclusion que le requérant a acquis «une accoutumance au traitement» est manifestement déraisonnable -- La Commission a débordé de son domaine de compétence en concoctant la notion d'accoutumance au traitement -- Cette conclusion revient à dire que le requérant a été traité à l'excès et est maintenant immunisé contre le traitement et, par conséquent, qu'il ne pourra plus jamais être remis en liberté -- Rien dans la documentation versée au dossier n'indique que cette notion d'accoutumance ou d'immunité contre le traitement ait jamais existé en termes de traitement psychanalytique ou psychiatrique -- Requête accueillie -- Code criminel, S.R.C. 1970, ch. C-34, art. 688 (maintenant L.R.C. (1985), ch. C-46, art. 753 -- Loi sur la libération conditionnelle, L.R.C. (1985), ch. P-2, art. 13 (mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 35, art. 4), 16, 18 -- Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18.1 (mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 5).

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