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[2016] 4 R.C.F. F-11

Accès à l’information

Demandes réunies présentées en vertu de l’art. 44 de la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. (1985), ch. A-1 (la Loi) relativement aux décisions de Santé Canada de communiquer de l’information à la suite d’une demande d’accès à l’information — Le demandeur contestait la communication de certains documents, telle que proposée par le Bureau de l’accès à l’information et de la protection des renseignements personnels (AIPRP) de Santé Canada au nom du défendeur, au motif des exceptions prévues aux art. 17, 19(1), 20(1)b) et c) de la Loi — Les événements visés en l’espèce ont eu lieu lorsqu’un résident canadien (le moniteur d’études) a rendu visite au demandeur aux États-Unis afin de le consulter au sujet des résultats d’un essai clinique que le demandeur effectuait sur des enfants atteints de déficience développementale, dont était également atteint le fils du moniteur d’études — L’essai clinique nécessitait l’utilisation externe d’une solution (solution traitement) — Le moniteur d’études a ramené la solution traitement pour son fils malade au Canada — Le demandeur a apparemment été informé par Santé Canada que lorsqu’ importés par une personne à des fins personnelles, les instruments médicaux ne sont pas réglementés par des lois ou des règlements précis — D’autres parents canadiens ont commencé à participer à l’essai clinique du demandeur et se prévalaient de l’exception relative à l’utilisation « à des fins personnelles » applicable au moniteur d’études — Le moniteur d’études a lancé un site Web au Canada afin de fournir de l’information aux parents participants et de leur offrir l’occasion d’échanger leurs histoires — Si certaines parties du site Web étaient accessibles au public, d’autres pages n’étaient accessibles que par un mot de passe donné aux parents participants et au demandeur — Par la suite, le traitement a cessé de fonctionner et certains enfants ont subi des effets médicaux indésirables — Santé Canada a lancé une enquête sur l’essai clinique en cause, a plus tard reçu des demandes d’accès à l’information, dont l’une portait sur l’essai clinique du demandeur aux États-Unis, et en a avisé ce dernier — Le demandeur a refusé de communiquer certains dossiers demandés par Santé Canada, au motif que ceux-ci contenaient des renseignements personnels et confidentiels, mais Santé Canada a soutenu que les documents proposés pouvaient être communiqués puisque l’information relevait déjà du domaine public — Le demandeur a présenté une demande de contrôle judiciaire de la décision en cause — Santé Canada a également désigné d’autres documents comme étant pertinents dans le cadre de la demande d’accès à l’information, mais le demandeur a refusé de les communiquer — Lorsque Santé Canada a décidé de communiquer les documents en question malgré les objections du demandeur, celui-ci a déposé une autre demande de contrôle judiciaire de la décision en question — Il s’agissait de savoir si les dossiers ou des parties de ceux-ci concernant l’essai clinique du demandeur, tel que désignés par Santé Canada dans sa réponse à la demande d’accès à l’information, étaient soustraits à une communication en vertu des art. 17, 19(1) et 20(1)b) et c) de la Loi — En ce qui concerne l’exception prévue à l’art. 17 relative à une menace pour la sécurité des individus, si la partie qui refuse la communication veut se prévaloir de l’exception, elle doit être capable de démontrer qu’il y a un lien direct entre la communication des documents et le préjudice allégué et fournir des éléments de preuve convaincants et détaillés pour établir que les résultats sont raisonnablement probables — D’après les éléments présentés, le demandeur ne satisfaisait pas à la norme de preuve nécessaire pour établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il faisait face à une attente raisonnable de préjudice probable — En outre, le demandeur n’a pas su établir de lien entre l’identité du parent mécontent, l’identité de la personne ayant fait la plainte initiale à Santé Canada ou la personne qui a déposé la demande d’accès à l’information — Bien que le demandeur soit sincère lorsqu’il dit craindre pour sa sécurité, il n’a pas présenté de preuve qui satisfaisait au critère permettant d’établir l’exception relative à la sécurité personnelle prévue à l’art. 17 de la Loi — Quant aux « renseignements personnels », l’art. 19(1) de la Loi interdit la communication de dossiers contenant des « renseignements personnels » visés à l’art. 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. (1985), ch. P-21 — L’intention de l’art. 19(1) de la Loi, qui incorpore l’art. 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, est interprétée de manière à protéger la vie privée ou l’identité des personnes susceptibles d’être mentionnées dans des documents qui pourraient autrement être communiqués — Un décideur administratif qui cherche à communiquer des renseignements personnels en vertu de l’art. 19(2)c) de la Loi doit être en mesure de démontrer que l’information en question était accessible de façon continue par la population générale au moment où la décision a été prise — Le défendeur n’a pas réussi à démontrer que les renseignements personnels étaient accessibles au public de façon continue au moment où Santé Canada a pris les décisions contestées — D’après la preuve, une grande partie des renseignements personnels en question n’étaient accessibles que par le demandeur, le moniteur d’études et les parents participant à l’essai clinique sur des pages protégées par un mot de passe sur le site Web — Même si l’information en question était rendue publique, la décision discrétionnaire de Santé Canada de la communiquer était déraisonnable — Il est clair d’après le régime législatif établi par la Loi et par la Loi sur la protection des renseignements personnels que dans une situation où il est question de renseignements personnels à propos d’un individu, le droit à la vie privée l’emporte sur le droit d’accès à l’information — Dans la mesure où la documentation à communiquer contenait des dossiers pertinents quant au rôle que joue Santé Canada dans l’exécution des lois et des règlements liés aux essais cliniques au Canada, de tels dossiers étaient pertinents à la demande vu l’objectif de la Loi — Par contre, pour ce qui est des documents communiqués qui contenaient des renseignements personnels concernant le demandeur, le moniteur d’études et les parents ou les enfants participant à l’essai, la décision de Santé Canada de communiquer les dossiers ne tenait pas compte des protections quasi constitutionnelles accordées à la vie privée par la Loi sur la protection des renseignements personnels — Quant à l’exception prévue à l’art. 20(1)b) de la Loi relativement aux renseignements confidentiels, le demandeur s’est opposé à la communication de ceux-ci, car ils contenaient des renseignements précis, détaillés et techniques sur les ingrédients de la solution traitement et le protocole utilisé dans le cadre de l’essai clinique — L’information en question a été communiquée à Santé Canada principalement par le demandeur, sous le sceau de la confidence et selon une attente raisonnable qu’elle ne soit pas communiquée — D’après la preuve, la plupart des renseignements que Santé Canada voulait communiquer n’étaient pas accessibles par la population générale et ne pouvaient donc pas être considérés comment relevant du « domaine public » — On ne pouvait dire que l’information aurait pu être facilement obtenue par observation ou par étude indépendante par un simple citoyen agissant de son propre chef, comme l’exige le critère juridique — Par conséquent, la Cour a désigné quelques dossiers, ou parties de ceux-ci, comme étant soustraits à une communication en vertu de l’art. 20(1)b) de la Loi — Enfin, en ce qui concerne la demande du demandeur visant à soustraire certains documents en vertu de l’art. 20(1)c) de la Loi, car il s’agissait de renseignements préjudiciables, le demandeur n’a pas fourni suffisamment d’éléments de preuve pour démontrer que les exigences étaient remplies — Le tiers qui invoque une exception prévue à la Loi doit démontrer qu’il existe beaucoup plus qu’une simple possibilité qu’un préjudice soit causé, mais il n’est pas tenu d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que le préjudice sera effectivement subi – Il doit y avoir un lien clair et direct entre la communication des renseignements en particulier et le préjudice allégué — En l’espèce, il existait peu d’éléments de preuve, outre la preuve par affidavit du demandeur — En conséquence, aucun document ne pouvait être soustrait à une communication pour ce motif — Demandes accueillies en partie.

Martin c. Canada (Santé), (T-1835-13, T-806-14, 2016 CF 796, juge McVeigh, jugement en date du 12 juillet 2016, 47 p.)

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