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Canada c. Paxton

A-513-94

juges Strayer, Robertson, J.C.A., et McDonald, J.C.A., dissident

12-12-96

25 p.

Appel d'une décision de la Cour canadienne de l'impôt mettant en cause l'application de l'art. 73(5) de la Loi de l'impôt sur le revenu-Cette disposition visait à faciliter le roulement entre générations de corporations exploitant une petite entreprise en autorisant le report de gains en capital lors d'un transfert entre un parent et un enfant-En 1986, le contribuable a décidé de prendre sa retraite et de vendre la part de 50 p. 100 qu'il détenait dans une corporation exploitant une petite entreprise, Ronlar Investments Ltd.-Les enfants du contribuable n'étaient pas intéressés à exploiter l'entreprise-Le contribuable a convenu de vendre, et les enfants ont convenu d'acheter, les actions de Ronlar-Avant de mettre par écrit ces ententes, le contribuable a accepté de vendre les actions à Tandet Management Inc. dans le cadre d'un accord signé le 6 novembre 1986-Aux termes de la clause 3.3 de la convention relative à Tandet, le contribuable avait le droit de choisir de «transférer provisoirement» à des membres de sa famille les actions de Ronlar qu'il possédait-Ce choix était toutefois soumis à la condition que tout transfert effectué à des membres de la famille ne serait valide que si ces derniers procédaient à la vente et transféraient les actions à Tandet en accord avec les dispositions de ladite convention-Le 24 novembre 1986, le contribuable a avisé Tandet qu'il désirait se prévaloir de son droit de transférer les actions à sa famille-Le 27 novembre suivant, le contribuable et les enfants concluaient des ententes d'achat et de vente des actions de Ronlar-À la même date, les actions ont été dûment transférées aux enfants en échange d'une somme d'argent d'un montant inférieur à celui que Tandet avait convenu de payer-Les enfants ont transféré leurs actions à Tandet-Par suite de cette opération, chaque enfant a touché 10 000 $-Le solde du produit de la vente est revenu au contribuable-Appel accueilli, le juge McDonald, J.C.A., étant dissident-Le juge Robertson, J.C.A.: la vente des actions de Ronlar aux enfants du contribuable avait pour objet de permettre à ce dernier de différer le paiement des gains en capital résultant de la vente à Tandet-Il importe de déterminer si le transfert des actions de Ronlar aux enfants du contribuable constituait un transfert au sens de l'art. 73(5)-La convention relative à Tandet du 7 novembre 1986 donnait lieu à un transfert des actions de Ronlar-Il s'agissait d'un contrat obligatoire et exécutoire-Le mot «transfert», qui est employé à l'art. 73(5), ne pourrait pas être interprété de manière étroite comme voulant dire un «transfert effectif» similaire à celui qui a lieu quand des actions sont enregistrées au nom d'un nouveau propriétaire-Un contrat exécutoire assujetti à l'accord d'une tierce partie n'en est pas moins obligatoire-Dans le cadre d'un contrat exécutoire visant la vente d'actions, un acheteur a droit à ce que le contrat soit exécuté intégralement-Soutenir qu'un acheteur comme Tandet n'avait aucun droit de propriété sur les actions avant la clôture effective de l'opération et le transfert des actions irait à l'encontre des principes juridiques établis-En excluant les contrats exécutoires de la portée du mot «transfert», l'interprétation que donne le juge de la Cour canadienne de l'impôt à ce mot est bien trop stricte et n'est certainement pas en accord avec la jurisprudence-La présente Cour ne se soucie pas de la forme sous laquelle se présentent les transferts dans le contexte des dispositions de la Loi qui s'appliquent aux cas de roulement-Le contribuable a effectivement transféré les actions de Ronlar à Tandet-Le type de transferts qu'englobe l'art. 73(5) permet à l'acheteur d'exercer le degré de contrôle voulu pour déterminer quel sera le sort ultime de l'entreprise familiale-Ce critère n'a pas été satisfait en l'espèce-La convention relative à Tandet privait les enfants du droit de décider si l'entreprise serait vendue ou gardée-Les enfants n'avaient pas le droit d'utiliser les actions ou d'en jouir, sinon que pour les transférer en moins de vingtquatre heures à Tandet, et conserver une petite partie du produit de la vente-Ce droit restreint et l'incapacité juridique de décider si l'entreprise familiale devrait se poursuivre constituent des motifs suffisants pour soutenir qu'un transfert au sens de l'art. 73(5) n'a pas eu lieu le 27 novembre 1986-Il est impossible de souscrire au prétendu argument du rôle de mandataire-La preuve n'étaye pas l'existence d'un contrat verbal au sujet de la vente des actions Ronlar aux enfants ni d'un contrat exécutoire entre le contribuable et ses enfants avant la signature de la convention relative à Tandet-Dans le meilleur des cas, la preuve étaye la conclusion que le contribuable avait conclu une entente non officielle et non obligatoire afin que les enfants puissent toucher une part du produit reçu de Tandet-L'argument du rôle du mandataire donne lieu à une allégation de frime-La définition d'une «frime» sous-entend que les parties à une opération ont entrepris délibérément de présenter sous un faux jour la situation véritable-La tromperie constitue la pierre angulaire de la doctrine de la frime-Les parties à l'opération n'avaient pas l'intention commune de tromper le ministre-Les faits donnent lieu à ce que j'appellerais une «frime inverse», qui déborde le cadre de la doctrine classique de la frime-Il y a une différence entre la doctrine de la frime et la théorie des opérations incomplètes-En l'espèce, le contribuable fait valoir que les choses ne sont pas ce qu'elles semblent être-Dans la convention relative à Tandet, le contribuable garantit qu'il est le propriétaire des actions, mais il soutient que cela n'est pas la situation véritable, car, en fait, il agissait comme mandataire pour ses enfants, lesquels doivent, à leur tour, être considérés comme des commettants non nommés-Il semble que ce soit Tandet et non le ministre qui ait été trompé-Ce n'est pas la preuve documentaire qui donne lieu à une allégation de frime; c'est plutôt l'argument du rôle de mandataire du contribuable qui contredit la preuve documentaire-Les fiscalistes doivent être prudents lorsqu'ils invoquent des arguments juridiques qui représentent une menace à la véracité d'une preuve documentaire qu'ils ont rédigée-Une allégation de frime inverse oblige le contribuable à expliquer comment il se fait que des choses sont différentes de ce qui ressort à première vue d'une telle preuve-Aucune opération de planification fiscale ne peut être reconnue à des fins fiscales à moins d'avoir été établie valablement selon les règles du droit général-Les planificateurs fiscaux sont tenus de veiller à ce que les opérations de nature fiscale soient pleinement exécutées et soigneusement documentées-En l'espèce, il y a eu une opération inefficace ou incomplète attribuable au fait de n'avoir pas documenté convenablement la vente des actions de Ronlar aux enfants avant que la convention relative à Tandet ait été signée-Le juge McDonald, J.C.A. (dissident): Pour déterminer s'il y a eu transfert effectif et complet aux enfants, il est utile d'établir qui était le propriétaire bénéficiaire des actions au moment de leur transfert à Tandet-Les enfants étaient les propriétaires bénéficiaires des actions au moment oú la vente à Tandet a été effectuée-La question est de savoir s'ils étaient les propriétaires nominaux des actions au moment oú celles-ci ont été transférées à Tandet-Après que la convention de vente à Tandet a été négociée, le contribuable a transféré la propriété nominale des actions aux enfants-Ce transfert est devenu tout à fait effectif et complet lorsque les enfants se sont acquittés de l'entente convenue et ont transféré leurs actions à Tandet-Le transfert du contribuable à ses enfants était tout à fait effectif et légal-L'allégation de frime est sans fondement aucun-Il n'y a, en l'espèce, aucune preuve de tromperie-L'opération enfreint-elle l'objet et l'esprit de l'art. 73(5) de la Loi?-Les contribuables sont libres de structurer leurs affaires de manière à atténuer le plus possible leur assujettissement à l'impôt-L'intention du législateur n'a pas été enfreinte parce que l'intimé s'est prévalu des dispositions de l'art. 73(5)-Au moment de rédiger ce dernier, le législateur n'a pas exigé que les enfants conservent les actions transférées pendant un temps quelconque-Même si le seul but de la transaction était de réduire l'impôt, elle est valable si son résultat n'est pas incompatible avec la Loi dans son ensemble ou avec l'intention du législateur-L'opération était légalement effective et complète, et n'enfreignait pas les dispositions de la Loi-Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, ch. 63, art. 73(5) (abrogé par S.C. 1986, ch. 6, art. 36(1)).

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