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Hashmat c. Canada ( Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration )

IMM-2332-96

juge Teitelbaum

9-5-97

7 p.

Demande de contrôle judiciaire à l'égard d'une décision par laquelle la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a statué que le requérant n'était pas un réfugié au sens de la Convention-Originaire de l'Afghanistan, le requérant craint d'être persécuté par les forces moudjahidines et les forces talibanes, deux factions en guerre, parce qu'il refuse de collaborer avec elles-La Commission devait se prononcer sur l'existence d'une possibilité de refuge intérieur (PRI)-Elle a conclu que le requérant ne serait pas persécuté dans le nord de l'Afghanistan et que, étant donné qu'il avait voyagé par la voie terrestre de Kabul vers le Pakistan (d'oú il est parti pour venir au Canada) avec son épouse et sa fille, il aurait pu faire le même voyage en direction du nord et chercher refuge à l'intérieur du pays-De l'avis de la Commission, le requérant n'aurait pas subi d'épreuve indue au cours de son voyage vers le nord et, même si tel était le cas, ces risques n'étaient pas pertinents maintenant, parce que le requérant pourrait retourner vers une ville du nord en passant par l'État de l'Uzbekistan-Demande accueillie-Application du critère à deux volets énoncé dans l'arrêt Thirunavukkarasu c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1994] 1 C.F. 589 (C.A.) au sujet de l'existence d'une PRI-Les questions à trancher dans ce contexte sont celles de savoir si le requérant serait persécuté dans une autre région du pays et s'il est objectivement déraisonnable de la part du requérant de se rendre vers un refuge sûr-Lorsqu'il a analysé ce qui constitue un risque «objectivement déraisonnable», le juge Linden, de la Cour d'appel, a statué que, «s'il y a des obstacles qui pourraient se dresser entre lui et cette autre partie de son pays, le demandeur devrait raisonnablement pouvoir les surmonter», c'est-à-dire que les demandeurs ne devraient pas être tenus de traverser des lignes de combat alors qu'il y a une bataille-La Commission a commis une erreur en omettant de se demander comment le requérant, accompagné de son épouse et de sa fille, s'exposerait à des épreuves indues au cours du voyage de 220 km de Kabul vers le nord-Il appert de la preuve documentaire que les viols de femmes et d'enfants sont monnaie courante en Afghanistan-Dans Rafizade c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1995), 92 F.T.R. 55 (C.F. 1re inst.), le juge Cullen a rejeté le principe de la persécution indirecte qui avait été établi dans Bhatti c. Canada (Secrétaire d'État) (1994), 84 F.T.R. 145 (C.F. 1re inst.)-La théorie de la persécution indirecte permet d'accorder le statut de réfugié aux personnes qui pourraient autrement être incapables de prouver qu'elles craignent pour elles-mêmes avec raison d'être persécutées-Même si l'analyse de la crainte relative aux risques de persécution doit porter avant tout sur le demandeur, les préjudices que risquent de subir l'épouse et la fille de celui-ci, qui sont en réalité les personnes visées par les menaces de viol, demeurent très pertinents quant à la question de savoir si le requérant s'exposerait à des épreuves indues en se rendant dans le nord et en se prévalant d'une PRI-La Commission a omis de se demander s'il était objectivement raisonnable pour le requérant de courir le risque de voyager vers le nord avec son épouse et sa fille, laquelle question était cruciale-La Commission a mal décrit la preuve documentaire-Même si elle s'est fondée sur une partie de cette preuve pour dire que [traduction] «bon nombre de personnes ont continué à voyager à peu près sans danger», le même texte indique que le requérant aurait été tenu de franchir des mines, des champs de bataille et différents territoires oú se trouvent des chefs de guerre imprévisibles, brutaux et méfiants qui extorquent des pots-de-vin et commettent des meurtres sans être punis-La Commission n'a pas tenu compte de ces faits lorsqu'elle a évalué les risques de préjudice-Quant à la façon dont le requérant pourrait se rendre dans le nord, la Commission a également tiré une autre conclusion déraisonnable en statuant qu'il pourrait maintenant, depuis l'endroit oú il se trouve au Canada, se rendre en Uzbekistan et, de là, se diriger vers le nord de l'Afghanistan, contournant par le fait même les embûches possibles du voyage terrestre de Kabul vers le nord-Aucun élément de la preuve ne permettait à la Commission de conclure que le requérant pourrait obtenir l'autorisation de voyager vers le nord par la voie terrestre et encore moins d'entreprendre son voyage en Uzbekistan-La Loi sur l'immigration ne permettrait pas que le requérant soit renvoyé en Uzbekistan, d'oú il partirait pour aller vers le nord, parce que ce n'est pas son pays d'origine ou de naissance ni un pays oú il résidait auparavant-La Commission a tiré une conclusion de fait absurde qui n'est pas conforme à la preuve-Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2.

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