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Pratt c. Canada ( Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration )

IMM-3043-95 / IMM-3528-95

juge MacKay

30-4-97

21 p.

Demande de contrôle judiciaire de deux décisions qui ont été prises en vertu de la Loi sur l'immigration-La première de ces décisions a été prise par le délégué du ministre intimé en vertu de l'art. 70(5) de la Loi-Par cette décision, le ministre s'est dit d'avis que le requérant constituait un danger pour le public au Canada-La seconde est une décision d'exécuter une mesure d'expulsion prise contre le requérant le 19 décembre 1994-La mesure d'expulsion a été exécutée et le requérant a été renvoyé du Canada le 13 décembre 1995 après que les présentes demandes d'autorisation et de contrôle judiciaire eurent été introduites-Le requérant était un résident permanent du Canada qui était né au Royaume-Uni en janvier 1972-En 1992 et en 1993, le requérant a été déclaré coupable de plusieurs infractions au Code criminel-Pour ses diverses infractions, il a, une fois reconnu coupable, été condamné à des peines d'emprisonnement et a été assujetti à des périodes de probation-Le 19 décembre 1994, l'arbitre a pris une mesure d'expulsion contre le requérant-Le même jour, le requérant a fait appel de la mesure d'expulsion prise contre lui-Cet appel a été interjeté devant la section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié-Le 10 juillet 1995, la Loi modifiant la Loi sur l'immigration, la Loi sur la citoyenneté et modifiant la Loi sur les douanes en conséquence est entrée en vigueur-Le nouvel art. 70(5) prévoit que le résident permanent qui, de l'avis du ministre, constitue un danger pour le public au Canada, ne peut faire appel devant la section d'appel de la mesure d'expulsion prise contre lui-Le 24 octobre 1995, le délégué du ministre a, en vertu de l'art. 70(5), formulé l'avis ministériel suivant lequel le requérant constitue un danger pour le public au Canada-Quatre questions litigieuses ont été soulevées par le requérant en l'espèce-La première question qui est soulevée concerne l'application de l'art. 70(5) à la lumière de l'interprétation législative de l'art. 13(4) de la Loi modificative-Après que des mesures d'expulsion ont été prises à leur égard, les deux requérants, Pratt et Luksicek, ont déposé un avis d'appel par lequel ils cherchaient à contester la mesure d'expulsion devant la section d'appel, aux termes de l'art. 70-Il était loisible au ministre, lorsqu'il examinait le cas des deux requérants, d'exprimer l'avis que chacun constituait un danger pour le public au Canada-Aux termes de l'art. 70(5) de la Loi, une fois que l'avis de danger pour le public avait été exprimé, chacun perdait son droit d'interjeter appel devant la section d'appel, étant donné que l'audition de son appel n'était pas commencée au 10 juillet 1995, date d'entrée en vigueur de cette disposition-Le ministre n'a pas commis d'erreur en outrepassant ses pouvoirs par la formulation de l'avis prévu à l'art. 70(5) au sujet du requérant-Le second moyen invoqué par le requérant est que le ministre n'a pas observé les principes de justice naturelle ou d'équité procédurale en exprimant un avis en vertu de l'art. 70(5) de la Loi en ce qui concerne le requérant-Dans l'arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Williams, [1997] 2 C.F. 646 (C.A.), le juge Strayer qualifie l'avis ministériel comme l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire qui est formulé dans la loi en des termes subjectifs et non en des termes objectifs-Ces décisions subjectives ne peuvent pas être examinées par les tribunaux, sauf pour des motifs comme la mauvaise foi du décideur, une erreur de droit ou la prise en considération de facteurs dénués de pertinence-En l'absence de preuve contraire, une cour de contrôle doit présumer que le décideur a agi de bonne foi en tenant compte des éléments dont il disposait-La procédure prévue par les lignes directrices du Ministère n'entraînait aucune iniquité procédurale et la procédure que le ministre a suivie en l'espèce en conformité avec ces lignes directrices satisfaisait aux exigences de la justice naturelle et de l'équité procédurale-Le fait que le ministre n'a pas motivé sa décision ne porte pas non plus atteinte aux principes d'équité ou de justice naturelle-Compte tenu de l'approbation par la Cour d'appel de la procédure suivie pour le compte du ministre dans l'affaire Williams, les exigences minimales en matière de justice naturelle et d'équité procédurale ont été respectées en l'espèce-La troisième question soulevée par le requérant concerne l'application de l'art. 70(5), compte tenu de la garantie contenue à l'art. 7 de la Charte-L'avis selon lequel le requérant constitue un danger pour le public au Canada ou la décision de formuler celui-ci ne constitue pas une décision qui porte sur la détention et le renvoi ou l'expulsion du requérant-L'avis qui a été exprimé en l'espèce en vertu de l'art. 70(5) n'a pas eu d'incidence sur les droits garantis au requérant par l'art. 7 de la Charte et n'a pas porté atteinte à ceux-ci-Le dernier moyen que fait valoir le requérant concerne le libellé de l'art. 70(5)-Il affirme en effet que le passage «constitue un danger pour le public au Canada» viole l'art. 7 de la Charte parce qu'il ne permet pas au requérant de connaître le critère ou la norme auquel il doit satisfaire pour éviter d'être considéré comme «un danger pour le public»-Les moyens par lesquels le requérant prétend, d'une part, que l'art. 70(5) est d'une imprécision inconstitutionnelle eu égard à l'art. 7 de la Charte et, d'autre part, que l'absence de motifs justifiant l'avis du ministre contrevient aux principes de justice fondamentale protégés par l'art. 7 de la Charte, sont tous les deux mal fondés-La thèse que soutient le requérant dans le dossier IMM-3528-95 est que le ministre n'avait pas le pouvoir d'exécuter la mesure d'expulsion avant que la section d'appel n'ait «rendu sa décision» au sujet de l'appel du requérant-L'appel que le requérant a interjeté devant la section d'appel et que celle-ci a entendu mais au sujet duquel elle n'a pas rendu de décision, a été effectivement rendu inefficace, ou a été effectivement éteint, en raison de la décision du législateur de retirer dans ces circonstances au requérant le droit d'appel conféré par l'art. 70(1)-La formulation de l'avis ministériel prévu à l'art. 70(5) a effectivement fait disparaître la raison d'être même du sursis d'origine législative qui est prévu à l'art. 49(1)b) de la Loi-Le ministre avait le pouvoir, en vertu de la Loi, de décider d'exécuter la mesure d'expulsion après s'être dit d'avis, en vertu de l'art. 70(5), que le requérant constituait un danger pour le public au Canada-Demandes rejetées-Loi modifiant la Loi sur l'immigration, la Loi sur la citoyenneté et modifiant la Loi sur les douanes en conséquence, L.C. 1995, ch. 15, art. 13(4)-Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, art. 49(1)b), 70(5) (édicté par L.C. 1995, ch. 15, art. 13(3))-Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44], art. 7-Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46.

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