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Contenu de la décision

Chalifoux c. Première nation de Driftpile

T-1738-98

juge Campbell

21-5-99

8 p.

Contrôle judiciaire de la décision par laquelle un arbitre a accordé à la demanderesse une indemnité pour congédiement injuste, mais a refusé d'ordonner une réintégration-L'art. 242(4) du Code canadien du travail confère à l'arbitre un pouvoir discrétionnaire étendu d'accorder une indemnité, une réintégration ou toute autre mesure équitable-L'arbitre a conclu qu'il n'y avait aucun motif de s'écarter de la proposition générale selon laquelle, dans la plupart des cas de congédiement injuste, une décision calculant l'indemnité qu'un employé aurait reçue s'il avait obtenu un préavis suffisant est équitable et appropriée-Il a commis une erreur de droit en ne remplissant pas la condition énoncée dans l'arrêt Énergie atomique du Canada Ltée c. Sheikholeslami, [1998] 3 C.F. 349 (C.A.), voulant que les facteurs relatifs à une réintégration soient examinés-L'arrêt Énergie atomique fait jurisprudence même si la démarche qu'il convient de suivre pour exercer le pouvoir discrétionnaire d'accorder une réintégration en vertu de l'art. 242(4)b) ne fait pas l'unanimité: d'une part, par exemple, Ball et Stacey Reginald dans Canadian Employment Law (Aurora (Ontario): Canada Law Book, 1996) sont d'avis que la réintégration est la norme et ne sera pas ordonnée seulement si la relation entre les parties s'est à ce point détériorée qu'elle est irréparable; d'autre part Grosman (Grosman et M. Norman) a exprimé le point de vue contraire dans Federal Employment Law in Canada (Toronto: Carswell, 1990), à savoir que la réintégration ne devrait être ordonnée que dans les cas bien précis oú une relation de travail viable entre les parties est réellement envisageable-Dans l'arrêt Énergie atomique, le juge Marceau affirme que les dispositions du Code canadien du travail qui concernent le congédiement injuste des employés non syndiqués énoncent simplement que la réintégration est une réparation pouvant être accordée dans les cas opportuns-Le juge Létourneau déclare qu'une conclusion de congédiement injuste signifie que la relation de travail n'aurait pas dû être rompue et qu'il existe donc une présomption en faveur de la réintégration, sauf lorsque la preuve indique manifestement le contraire-Ces passages posent le principe que, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire prévu à l'art. 242(4)b), l'arbitre doit peser le pour et le contre d'une réintégration, y compris, ainsi que le juge Marceau l'a fait remarquer, évaluer la nature de la relation entre l'employeur et l'employé au moment oú la réintégration est envisagée-L'arrêt Énergie atomique ne se limite pas aux faits de cette affaire (dans laquelle on plaidait la réintégration de l'employée qui, ainsi qu'il a été constaté, avait fait montre de malhonnêteté) parce que les remarques des juges Marceau et Létourneau sont formulées en tant que déclarations de principe à caractère général-Comme la demanderesse doit accepter un poste d'enseignante en dehors de la réserve de Driftpile, elle est obligée de travailler et d'habiter dans une autre collectivité et est de ce fait séparée de sa famille qui vit encore dans la réserve de Driftpile; de plus, en tant qu'Indienne inscrite, elle est assujettie à l'impôt sur le revenu parce qu'elle a dû accepter un emploi en dehors de la réserve-L'arbitre n'a pas examiné ces considérations réelles et importantes et, mises à part les conclusions de fait selon lesquelles l'évaluation dont la demanderesse a fait l'objet en 1996 était excellente, il a passé sous silence la relation entre les parties; la demanderesse n'a jamais fait l'objet d'une évaluation négative en tant qu'enseignante et, malgré tout, on n'a pas recommandé que son emploi se poursuive-Les seules considérations ayant été directement examinées concernant la réintégration étaient que la demanderesse avait trouvé du travail ailleurs et que la défenderesse devrait congédier un enseignant si la demanderesse devait être réintégrée dans son emploi-S'abstenir de faire l'analyse requise constitue une erreur de droit manifestement déraisonnable-La décision de l'arbitre est annulée concernant la réintégration seulement-La question lui est renvoyée pour qu'il procède à un nouvel examen en tenant compte de tous les facteurs favorables et défavorables à une réintégration et notamment de l'octroi d'une indemnité-Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L-2, art. 242(4).

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