Citoyenneté et Immigration
Exclusion et renvoi
Personnes interdites de territoire
Détention et mise en liberté
Contrôle judiciaire de la décision de la Section de l’immigration (SI), qui a ordonné la libération du défendeur — Le défendeur, un citoyen des Philippines, a obtenu la résidence permanente au moment de son entrée — Il a perdu son statut à la suite d’une déclaration de culpabilité — Une mesure d’expulsion a été prise contre lui en 2012 — Au terme de sa peine au criminel, il a été transféré en détention aux fins de l’immigration au motif qu’il représentait une menace pour la sécurité publique et qu’il se soustrairait vraisemblablement à son renvoi — Il a reçu, à l’égard de son examen des risques avant renvoi (ERAR) en suspens, une décision favorable — À la suite de cette décision, les préparatifs en vue de l’exécution du renvoi ont été suspendus — La mesure de renvoi a été maintenue, mais elle a fait l’objet d’un sursis par effet de la loi — Lors du contrôle des motifs de détention des 30 jours, le demandeur a sollicité le maintien de la détention du défendeur en attendant l’élaboration d’un plan de mise en liberté adéquat — La SI a conclu que la détention actuelle portait atteinte aux art. 7 et 9 de la Charte canadienne des droits et libertés (Charte); que les critères énumérés à l’art. 248 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 (Règlement) jouaient en faveur de la mise en liberté du défendeur — Elle a conclu également que l’absence d’une mesure de renvoi exécutoire était suffisante pour établir que la détention du défendeur était arbitraire et en contravention de l’art. 9 de la Charte — Il s’agissait de savoir si la décision de la SI était déraisonnable — Le fait au cœur de la décision de la SI était la décision favorable relative à l’ERAR du défendeur, quoique restreinte — Le caractère exécutoire d’une mesure de renvoi n’est pas une condition préalable à la détention, mais il requiert l’existence d’une ordonnance valide — La législation ne prévoit pas d’exigence selon laquelle une mesure de renvoi doit être exécutoire pour que la détention ait lieu — La simple existence d’une mesure de renvoi, accompagnée d’un avis de danger, peut suffire à justifier le maintien en détention — S’il est supposé qu’il existe une mesure de renvoi valide, l’une des circonstances énoncées à l’art. 58(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, peut justifier le refus de mettre en liberté le détenu — Le renvoi est un élément déclencheur dans le mécanisme de contrôle de l’immigration — Le danger est un deuxième élément déclencheur qui peut exiger une détention — L’interprétation de la SI s’est déraisonnablement écartée de la jurisprudence de la Cour, notamment la décision Canada (Sécurité publique et Protection civile) c. Samuels, 2009 CF 1152 — Lorsque les termes de l’art. 58(1) sont lus selon leur sens ordinaire et grammatical, il est impossible de sous-entendre que la mesure de renvoi est implicitement « exécutoire » — La décision de la SI de considérer que le terme est implicite équivaut à une déclaration d’invalidité constitutionnelle — Sans contestation constitutionnelle appropriée, il n’y avait aucune raison de s’écarter de l’interprétation faite dans la décision Samuels — Le défendeur est demeuré assujetti à une mesure de renvoi valide — En se livrant à une analyse relative à l’art. 9 de la Charte pour juger la détention illégale en raison de son caractère arbitraire, la SI a déraisonnablement décidé d’avance du résultat de l’appréciation en ce qui concerne la détention ou la mise en liberté prescrite par l’art. 248 du Règlement — La SI a commis une erreur en déterminant le point final de la durée prévue de la détention au titre de l’art. 248c) — La SI aurait pu et aurait dû se prononcer simplement sur le maintien de la détention ou sur la mise en liberté en se fondant sur la boîte à outils qui lui était fournie par la loi, soit l’art. 248 du Règlement, plutôt que de décider d’avance en procédant à une analyse relative à la Charte — Les principes de droit administratif et d’interprétation des lois étaient bien établis et auraient pu être utilisés pour en arriver à la conclusion qu’elle a tirée, à savoir que le défendeur devrait être mis en liberté dans des conditions qui permettaient de faire face aux risques qu’il présentait — Les conditions de mise en liberté du défendeur imposées par la SI étaient déraisonnables — L’affaire a été renvoyée à la SI — Demande accueillie.
Canada (Sécurité publique et Protection civile) c. Taino (IMM‑1495‑20, 2020 CF 427, juge Diner, motifs du jugement en date du 25 mars 2020, 42 p.)