Fiches analytiques

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Pénitenciers

Contrôle judiciaire de deux décisions rendues par le président indépendant siégeant pour le tribunal disciplinaire de l’établissement Archambault relatives à la condamnation du demandeur en vertu de l’art. 40k) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20 (la Loi) — Le demandeur avait produit un échantillon d’urine dans le cadre du Programme de prise et d’analyse d’échantillon d’urine du Service correctionnel du Canada (SCC) [9,6]— Le laboratoire Gamma-Dynacare (Dynacare), soit le seul laboratoire au Canada certifié par la Substance Abuse and Mental Health Services Administration (SAMHSA), a procédé à l’analyse de l’échantillon et a conclu qu’il était positif au tétrahydrocannabinol (THC) acide carboxylique — Le demandeur a reçu un rapport d’infraction disciplinaire pour avoir « introduit dans son corps une substance intoxicante » contrairement à l’art. 40k) —La gestionnaire du Programme a refusé de produire un échantillon de l’urine du demandeur initialement prélevée pour une contre-expertise dans un autre laboratoire — La Directive du commissaire 566-10 – Prise et analyse d’échantillons d’urine (Directive 566-10) prévoit la possibilité de demander qu’une « seconde analyse » soit faite [15], pourvu que ce soit dans un laboratoire certifié par la SAMHSA — Au final, le demandeur n’a pas demandé une seconde analyse — Après en avoir fait la demande, le demandeur a reçu le rapport de Dynacare indiquant le taux quantitatif de THC constaté dans son échantillon d’urine — Vu le refus de la gestionnaire du Programme de lui produire un échantillon d’urine afin qu’il puisse charger un autre laboratoire d’une contre-expertise indépendante, le demandeur a demandé le rejet du rapport d’infraction au motif que ses droits fondamentaux n’avaient pas été respectés — Le tribunal disciplinaire a rendu une décision interlocutoire dans laquelle il a conclu entre autres que : la procédure établie dans le cadre du Programme assure le respect du droit des détenus à l’équité procédurale; l’autorisation d’une contre-expertise en dehors des mécanismes prévus et le plein contrôle des contre-expertises des analyses d’échantillon d’urine irait au-delà de ce qu’exige l’équité procédurale; le SCC n’est pas tenu de produire systématiquement les taux quantitatifs en cas d’accusations disciplinaires portées aux termes de l’art. 40k) de la Loi — Le tribunal disciplinaire a reconnu le demandeur coupable d’avoir introduit une substance intoxicante dans son corps — Il s’agissait principalement de déterminer si le tribunal disciplinaire a commis une erreur de droit : en concluant que le SCC n’est pas tenu de produire systématiquement les taux quantitatifs en matière d’accusations disciplinaires portées en vertu de l’alinéa 40k); et en concluant que permettre au demandeur de procéder à une contre-expertise, autrement que par les voies de recours consacrés par la Loi et les règlements irait au-delà de ce qu’exige l’équité procédurale — La non-communication du taux quantitatif au détenu sans demande spécifique de sa part ne constitue pas un manquement au droit de préparer une défense pleine et entière — Le détenu a le droit de se faire communiquer « tous les renseignements entrant en ligne de compte » dans « la prise de décision » — Par contre, la portée de la communication doit être déterminée au regard du contexte, des circonstances et du moyen de défense qui pourrait être invoqué par le détenu — De plus, le texte de l’art. 27(1) de la Loi ne justifie pas la communication de renseignements qui n’ont pas été pris en compte par le décideur lorsqu’il a pris sa décision — Conformément à l’art. 69 du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620, un résultat positif à un test fait jouer la présomption portant que le détenu a introduit la substance interdite dans son corps, et le certificat d’analyse prévu par l’article 68 du Règlement, attestant que l’échantillon est positif, est suffisant pour démontrer qu’il a commis l’infraction réprimée par l’art. 40k) — Les taux quantitatifs peuvent être pertinents en ce qui concerne la nature de l’analyse entreprise, mais la pertinence n’est pas le critère de communication d’informations prévu par l’article 27 de la Loi — Il n’y a aucun manquement à l'équité procédurale dans le cadre des audiences disciplinaires lorsqu’il est exigé des détenus de justifier la nécessité de recevoir des informations qui n’ont pas été prises en compte dans une décision d’inculpation — L’absence d’obligation de communiquer systématiquement les taux quantificatifs évite des stratégies où le détenu peut tenter d’élaborer un système de défense aléatoire fondé sur la communication du taux précis afin d’éviter une pénalité — La décision du tribunal disciplinaire n’était entachée d’aucune erreur susceptible de contrôle judiciaire sur ce point — La décision du président indépendant de refuser la demande de contre-expertise du demandeur afin de contester les résultats de la première analyse constitue une « limite raisonnable […] de présenter des éléments de preuve » en défense dans le cadre d'une audience disciplinaire relative au Programme — La certification de la SAMHSA reflète la norme la plus élevée de l’industrie — La compétence exclusive des laboratoires approuvés ne favorise ni le détenu ni le SCC — Ces directives en matière de laboratoire constituent une limite raisonnable au droit de présenter une contre-expertise — Exiger que tout laboratoire extérieur utilisé en relation avec le Programme soit certifié par la SAMHSA est une mesure raisonnable — Le fait qu’un détenu n’ait pas le plein contrôle de la contre-expertise n’est pas indûment préjudiciable en soi — Il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale dans la décision du président indépendant — Demande rejetée.

Perron c. Canada (Procureur général) (T-494-19, 2020 CF 741, juge Pamel, motifs du jugement en date du 2 juillet 2020, 48 p.)

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