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NOTE DE L’ARRÊTISTE : Ce document fera l’objet de retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le Recueil des décisions des Cours fédérales.

Citoyenneté et Immigration 

Statut au Canada

Réfugiés au sens de la Convention et personnes à protéger

Contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel des réfugiés (SAR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada qui a rejeté la demande d’asile des demandeurs au motif qu’ils n’ont pas la qualité de réfugiés ou de personnes à protéger au sens des art. 96 et 97 de la Loi sur l'’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR), car ils disposent de deux possibilités de refuge intérieur (PRI) viables au Mexique — Les demandeurs, citoyens du Mexique, se sont réfugiés chez un membre de leur famille à Mexico suite à un vol avec agression et un acte d’extorsion — Après le départ du demandeur principal au Canada, la famille a reçu des appels de menace — La Section de la protection des réfugiés (SPR) a rejeté la demande d’asile logée par les demandeurs — La SPR a conclu que les importantes omissions dans la preuve du demandeur principal ainsi que certaines hésitations dans son témoignage ont miné la crédibilité de la demande d’asile de la famille — La SAR a conclu que la SPR a erré en concluant que le demandeur principal n’était pas crédible — Toutefois, en procédant à l’analyse d’une PRI viable dans les villes de Mérida ou Mexico, la SAR a conclu que la réinstallation de la famille dans ces villes identifiées en tant que PRI n’était pas déraisonnable, puisque la preuve et les circonstances personnelles du demandeur principal et de son épouse ne permettaient pas de conclure que la famille ne pouvait pas recommencer sa vie, trouver un emploi et subvenir à ses besoins dans les PRI — La question en litige était de savoir si les conclusions de la SAR sur les PRI étaient raisonnables — Avant d’aborder cette question, il importait de traiter de la question de crédibilité, abordée tant par les demandeurs que par le défendeur dans leurs soumissions respectives — La SAR ne s’est pas contredite en utilisant les éléments non crédibles du témoignage du demandeur principal pour étayer ses propres conclusions quant aux PRI viables — C’est le poids accordé par la SPR aux incohérences du demandeur principal que la SAR a remis en doute, et non pas la crédibilité même de certains éléments particuliers de son témoignage Le défendeur a affirmé que la SAR aurait erré en déterminant que les incohérences soulevées par la SPR n’étaient pas suffisantes pour entacher la crédibilité générale du demandeur principal— Le défendeur a soutenu cependant que, malgré cette erreur de la SAR, il n’était pas indiqué pour la Cour d’intervenir, puisque le rejet de la demande d’asile des demandeurs demeurait la seule issue possible dans le présent dossier — Les arguments avancés par le défendeur n’étaient pas convaincants — Selon l’arrêt Huruglica c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CAF 93, [2016] 4 R.C.F. 157, la SAR doit intervenir lorsqu’elle détecte une erreur de la SPR — Dans cette affaire, la Cour d’appel fédérale ne dit pas que c’est là la seule façon pour la SAR de se substituer à la SPR; elle affirme plutôt le devoir d’intervention de la SAR dès que cette dernière décèle une erreur commise par la SPR — La SAR n’est pas une instance d’appel ordinaire puisqu’elle doit agir en fonction de la norme correcte, qui exige qu’elle intervienne dès la moindre erreur, par opposition à une instance d’appel régulière, qui n’intervient qu’en vertu d’une norme d’appel plus contraignante — Dans le même ordre d’idées, pour que l’art. 111(2) de la LIPR ait du sens, il faut en comprendre que le législateur a voulu restreindre la compétence de la SAR uniquement lorsque celle-ci veut renvoyer une affaire à la SPR — Autrement, le législateur aurait mentionné à l’art. 111 de la LIPR qu’une erreur est nécessaire dans tous les cas, et non seulement dans le cas d’un renvoi à la SPR — L’art. 111(1) de la LIPR « n’empêche pas la SAR de substituer sa propre décision sur la demande d’asile à celle de la SPR en se fondant sur un élément que la SPR n’avait pas abordé » — Il est vrai que la SAR doit faire preuve de déférence lorsqu’elle intervient sur la crédibilité du demandeur d’asile — En fait, la SAR n’a jamais remis en question l’évaluation de la crédibilité des demandeurs ni la valeur de leur témoignage de vive voix — Elle a simplement souligné qu’à la lumière des incohérences soulevées par la SPR, celles-ci ne pouvaient pas, à elles seules, entraîner une conclusion négative quant à la crédibilité générale des demandeurs et fonder le rejet de leur demande d’asile — Le fait que la SAR a utilisé les conclusions de la SPR quant aux incohérences que celle-ci a soulevées milite également en faveur du caractère raisonnable de la décision de la SAR — La SAR a plutôt validé les conclusions de fait de la SPR quant à la crédibilité, mais a décidé de leur accorder un poids différent vis-à-vis la crédibilité générale des demandeurs — La conclusion de la SAR quant à la crédibilité des demandeurs ne comportait pas des lacunes fondamentales— Il s’agissait plutôt d’une situation où les lacunes ou insuffisances reprochées peuvent être qualifiées de « superficielles ou accessoires par rapport au fond de la décision », ne justifiant pas l’intervention de la Cour — La brièveté des motifs de la décision de la SAR sur la question de crédibilité ne suffisait pas, à elle seule, pour rendre la décision déraisonnable — En ce qui concerne l’existence des PRI viables, la SAR a expressément tenu compte de la situation particulière des demandeurs, et a analysé ses prétentions et ses craintes — Au vu de la preuve devant elle, la SAR pouvait à bon droit conclure que les demandeurs n’avaient pas démontré que ses agents de persécution auraient la motivation et l’intérêt de les poursuivre à Mérida ou dans la ville de Mexico — Au final, les arguments des demandeurs manifestaient plutôt leur désaccord quant à l’appréciation de la preuve faite par la SAR — Ils n’ont soulevé aucune lacune grave dans la décision et, dans une telle situation, la Cour doit faire preuve de déférence envers les conclusions de la SAR — Demande rejetée.

Rodriguez Sanchez c. Canada (Citoyenneté et Immigration) (IMM-2165-22, 2023 CF 426, juge Gascon, motifs du jugement en date du 28 mars 2023, 24 p.)

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