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NOTE DE L’ARRÊTISTE : Ce document fera l’objet de retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le Recueil des décisions des Cours fédérales.

Pratique

Ordonnances de confidentialité 

Sujet connexe : Concurrence

Requête présentée par le défendeur (Google) au titre de la règle 151 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 pour solliciter une ordonnance de confidentialité afin que soient mis sous scellés certains renseignements dans le dossier de la Cour — Le contexte qui sous-tend la présente requête visait notamment des enquêtes menées aux ÉtatsUnis et au Canada sur des comportements anticoncurrentiels auxquels se serait livrée Google LLC, et des procédures judiciaires intentées contre Google LLC aux ÉtatsUnis — Le commissaire de la concurrence a ouvert une enquête en vertu du sous-alinéa 10(1)b)(ii) de la Loi sur la concurrence, L.R.C. (1985), ch. C-34 (Loi), concernant la conduite de Google relativement à l’affichage publicitaire en ligne — Il a déposé une demande ex parte en vertu de l’article 11 de la Loi afin de solliciter une ordonnance enjoignant à Google de produire des documents et de fournir des déclarations énonçant les renseignements se rapportant à l’enquête — Google a indiqué dans sa requête que le commissaire avait inclus des renseignements confidentiels dans le dossier de la demande fondée sur l’article 11 — La Cour a rendu une ordonnance provisoire de confidentialité en attente de l’instruction de la requête déposée par Google en vertu de la règle 151 —Les renseignements dont Google sollicite la protection ont depuis été restreints de sorte à inclure seulement le nom, le poste et les coordonnées des personnes qui sont des employés de Google, mais qui ne font pas partie de la direction de celle-ci — Depuis le dépôt initial de la présente requête, Google a obtenu six ordonnances de mise sous scellés dans le cadre de procédures judiciaires intentées aux ÉtatsUnis — Dans son avis de requête modifié, Google sollicitait une ordonnance de mise sous scellés des documents qui avaient été ou qui seraient déposés relativement à la demande fondée sur l’article 11 dans la mesure où ces documents ou ces renseignements ont été mis sous scellés dans le dossier de la cour dans le cadre de procédures intentées devant des tribunaux américains — Le commissaire a souligné que les ordonnances des cours de district des ÉtatsUnis ont toutes été rendues après qu’il a déposé ses documents relatifs à la demande fondée sur l’article 11 — Le commissaire a fait valoir qu’aucun élément de preuve produit devant la Cour ne prouve que les noms, les titres et les coordonnées caviardés en application des ordonnances des cours de district correspondaient aux noms, aux titres et aux coordonnées dont Google a demandé la mise sous scellés en vertu de la règle 151  Google a fait valoir que l’intérêt public important qu’elle cherche à protéger consiste en l’intégrité des ordonnances qu’elle a obtenues de tribunaux américains en vertu de la législation américaine — Elle a soutenu qu’il existe un lien entre les affaires visées par l’enquête du commissaire et les questions en litige dans les procédures intentées aux ÉtatsUnis au cours desquelles elle a obtenu les ordonnances de mise sous scellés — Il s’agissait de déterminer si Google devait fournir une preuve convaincante pour justifier qu’une ordonnance soit rendue en vertu de la règle 151 — Google n’a pas établi un intérêt public important aux fins du premier élément du critère défini dans Sherman (Succession) c. Donovan, 2021 CSC 25 et Sierra Club du Canada c. Canada (Ministre des Finances), 2002 CSC 41, [2002] 2 R.C.S. 522 — À la différence de celles introduites devant les cours de district américaines, Google n’a pas désigné l’intérêt en cause comme le droit à la vie privée de ses employés ne faisant pas partie de la direction qui est associé à la protection de leurs noms, titres et coordonnées— En l’espèce, le droit individuel à la vie privée des employés ne faisant pas partie de la direction ne serait pas considéré comme présentant un risque sérieux pour l’intérêt public qui justifierait qu’une ordonnance de confidentialité soit rendue en vertu de la règle 151 — Si les renseignements concernant ces employés faisaient l’objet d’une requête isolée fondée sur la règle 151, cette requête ne serait pas accueillie puisque les intérêts en matière de vie privée soulevés ne satisferaient pas à la norme établie dans Sherman (Succession) — Dans le cas de requêtes fondées sur la règle 151, la Cour devrait accorder une attention respectueuse aux ordonnances de mise sous scellés rendues par des tribunaux étrangers de même qu’aux motifs s’y rapportant — Toutefois, la courtoisie internationale ne contraint pas la Cour à rendre une ordonnance de confidentialité en vertu de la règle 151 tout simplement parce qu’un tribunal étranger a rendu une ordonnance de mise sous scellés visant des renseignements dans ses dossiers — Rendre automatiquement une ordonnance en vertu de la règle 151 contournerait l’application des principes juridiques définis dans Sherman (Succession) et Sierra Club, et priverait la Cour du pouvoir discrétionnaire que lui confère la règle 151 pour déterminer s’il y a lieu de rendre une ordonnance au regard des faits et des éléments de preuve relatifs à l’affaire — Compte tenu de l’importance constitutionnelle que revêt le principe de la publicité des débats judiciaires, la Cour est tenue d’appliquer les critères juridiques établis à la preuve — En l’espèce, la preuve ne montrait pas que les renseignements visés constituaient des renseignements confidentiels de Google — Les éléments de preuve portant sur les lois et les pratiques américaines applicables aux enquêtes en matière d’antitrust n’établissent pas que les noms des employés de Google sont confidentiels en soi — Google n’a fourni aucun élément de preuve qui montre directement que les renseignements mis sous scellés en vertu de ces ordonnances de tribunaux américains correspondent aux noms, aux postes et aux coordonnées des personnes mentionnées dans le dossier de demande déposé par le commissaire — Aux fins de la présente requête, Google ne s’est pas acquittée du lourd fardeau qui lui incombait d’établir l’existence d’un risque de préjudice réel et important qui est bien étayé par la preuve — Les avantages d’une ordonnance de confidentialité rendue en vertu de la règle 151, telle qu’elle était sollicitée, ne l’emportaient pas sur ses effets négatifs — Requête rejetée.

       Canada (Commissaire de la concurrence) c. Google Canada Corporation (T-1551-21, 2023 CF 1038, juge Little, motifs de l’ordonnance en date du 1er août 2023, 27 p.)

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