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NOTE DE L’ARRÊTISTE : Ce document fera l’objet de retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le Recueil des décisions des Cours fédérales.

<i>Sujets connexes : Compétence de la Cour fédérale; Pratique

</i>Développement économique

Il s’agissait d’une demande pour une ordonnance nommant un arbitre conformément à la clause de règlement des différends (clause d’arbitrage) d’une police d’assurance contre les risques politiques (police) — La demanderesse est une société d’État fédérale et la défenderesse est Suncor Énergie Inc. (défenderesse), une société canadienne constituée en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, L.R.C. (1985), ch. C-44 (la Loi) — En 2006, la demanderesse, un assureur, a émis la police au prédécesseur de la défenderesse, soit Petro-Canada — La police couvre certaines pertes causées par l’expropriation ou la violence politique, selon la définition de ces termes dans la police, relativement à des actifs pétroliers dans un certain nombre de pays à l’extérieur du Canada — La défenderesse a fusionné avec Petro-Canada en 2009 et est devenue assurée en vertu de la police — La défenderesse compte de nombreuses filiales, qui sont également défenderesses en l’espèce (collectivement, les filiales) — En 2015, à la suite d’agitations politiques ayant affecté ses activités pétrolières en Libye, la défenderesse a soumis une réclamation en vertu de la police pour des pertes liées à des actifs pétroliers en Libye — Lors du premier arbitrage, la défenderesse s’est vu accorder plus de 300 millions de dollars (premier arbitrage) pour les pertes réclamées — Avec l’intérêt, la demanderesse a payé 347 millions de dollars et demandait maintenant l’arbitrage d’un différend concernant son droit de recouvrer le paiement (deuxième arbitrage) — Selon la notification d’arbitrage de la demanderesse du 15 mai 2022, les actifs libyens ont toujours une valeur importante et continuent de générer des revenus pour la défenderesse et ses filiales — La demanderesse souhaitait récupérer les montants réalisés en rapport avec les actifs jusqu’à ce que les 347 millions de dollars aient été remboursés en totalité; elle s’est fondée sur deux motifs principaux : a) ses divers droits et recours en vertu de la police (droits de recouvrement); b) les dispositions de la Loi relatives à l’abus — La demanderesse et la défenderesse ont entamé des négociations en vue de constituer le groupe d’arbitrage pour le deuxième arbitrage, mais, ayant abouti à une impasse, la demanderesse a introduit la présente demande conformément à la clause d’arbitrage — Les parties ont convenu que cette Cour a compétence pour agir en tant qu’autorité de nomination — Elles ont demandé à la Cour de déterminer les critères à prendre en compte pour nommer un arbitre unique pour le deuxième arbitrage et de décider qui serait l’arbitre — Bien que la demanderesse ait nommé des filiales en tant que défenderesses dans l’avis d’arbitrage, les filiales ont fait valoir qu’elles n’avaient pas accepté l’arbitrage des différends avec la demanderesse et que la Cour n’avait pas compétence pour nommer un arbitre de manière à les lier – Les filiales ont demandé à la Cour de les retirer en tant que défenderesses dans cette demande — Les questions préliminaires étaient les suivantes : 1) la Cour a-t-elle compétence pour nommer un arbitre unique pour le deuxième arbitrage? 2) les filiales devraient-elles être retirées en tant que parties à la demande ou, subsidiairement, la Cour devrait-elle restreindre la portée de l’ordonnance? — Les questions principales portaient sur le choix des critères appropriés pour la sélection d’un arbitre unique pour le deuxième arbitrage; et sur le choix de la personne qui devrait être désignée comme arbitre unique pour le deuxième arbitrage — Les filiales ont reconnu que la Cour était l’autorité de nomination compétente; cependant, elles ont soutenu que la compétence de la Cour se limite à la nomination d’un arbitre qui tranchera le différend entre la demanderesse et la défenderesse — Il s’agissait de la première fois où la Cour fédérale agissait en tant qu’autorité de nomination — La Cour a compétence pour agir à ce titre — Cette compétence est conférée à la Cour fédérale par la loi; elle doit agir dans les limites des pouvoirs qui lui sont conférés par la loi — Les parties ont soutenu que la compétence statutaire de cette Cour pour agir en tant qu’autorité de nomination découle de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, de la Loi sur l’arbitrage commercial, L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 17 et du Code d’arbitrage commercial, qui constitue l’annexe 1 de la Loi sur l’arbitrage commercial — La Cour a compétence pour nommer un arbitre chargé de trancher l’affaire en arbitrage — Les filiales ont soutenu que les parties à la police étaient la demanderesse et la défenderesse, qu’elles étaient des personnes morales séparées et distinctes de la défenderesse n’ayant aucun droit en vertu de la police, et qu’elles n’étaient pas des parties assurées — La demanderesse a répondu plus particulièrement que les filiales seraient directement touchées par le deuxième arbitrage et ne pourraient pas en être dissociées — Les filiales sont bel et bien des parties à la demande — Le rôle de la Cour dans cette demande était de nommer un arbitre pour le deuxième arbitrage et la décision de la Cour affecterait les filiales — En outre, l’ordonnance de la Cour ne devrait pas empiéter sur le rôle de l’arbitre, notamment sur la nomination d’un arbitre pour trancher le différend entre la demanderesse, la défenderesse et les filiales — L’ordonnance ne devrait pas contenir de termes qui pourraient être perçus comme une déclaration sur des questions qu’il appartient à l’arbitre de trancher, ou qui favoriseraient la position d’une partie sur ces questions — Les filiales ne devraient pas être retirées en tant que parties à la demande — Il n’était pas question pour la Cour de définir des limites de la compétence de l’arbitre ni de déterminer si les filiales étaient bel et bien des parties au deuxième arbitrage — En ce qui concerne les critères de sélection d’un arbitre unique pour le deuxième arbitrage, un arbitre indépendant et neutre ayant qualité pour appliquer les lois de l’Ontario à l’interprétation de la police, ne constituaient pas des « critères de base » — Le paragraphe 11(5) du Code d’arbitrage commercial, exige de la Cour qu’elle « tienne compte » de toutes les qualifications requises de l’arbitre par convention des parties et de toutes les considérations propres à garantir la nomination d’un arbitre indépendant et impartial — Bien que les qualifications dont les parties ont convenu et les considérations d’indépendance et d’impartialité soient importantes, le libellé du paragraphe 11(5) offre une certaine souplesse — La Cour accorde la plus grande priorité aux critères suivants : (i) les qualifications et l’expérience en droit canadien, particulièrement le droit en Ontario; (ii) l’indépendance et l’impartialité — Bien que la clause d’arbitrage n’exige pas explicitement que l’arbitre soit qualifié ou expérimenté en droit ontarien ou canadien, elle s’en rapproche — Le droit ontarien et le droit canadien sont d’une importance capitale pour les questions en litige — Les droits de recouvrement de la demanderesse découlent d’une police qui est régie par les lois de l’Ontario et les lois fédérales du Canada qui s’appliquent en l’espèce — L’expérience de l’arbitrage et du règlement de différends (surtout en tant qu’arbitre unique ou président de tribunal dans des arbitrages complexes) était d’une grande importance — L’expérience en tant qu’arbitre unique ou président de tribunal dans des arbitrages complexes s’est avérée un critère d’importance moyenne — Au moment d’évaluer l’aptitude des candidats, une priorité moyenne a été accordée aux facteurs comme l’expérience des conflits internationaux dans le secteur pétrolier et gazier, des différends commerciaux et des différends en matière d’assurance — La Cour a accordé une faible priorité à la qualification ou à l’expérience du droit civil en général — La Cour a nommé une personne qui est ressortie comme étant le candidat le plus apte à trancher en arbitrage le différend en cause — En conclusion, la Cour a rejeté la demande des filiales d’être retirées en tant que parties à la demande ainsi que leur demande que l’ordonnance précise que l’arbitre est nommé au regard de la demanderesse et la défenderesse — L’ordonnance a été rendue en conséquence.

Exportation et Développement Canada c. Suncor Énergie Inc. (T-2071-22, 2023 CF 1050, juge Pallotta, motifs de l’ordonnance en date du 31 juillet 2023, 37 p.)

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