NOTE DE L’ARRÊTISTE : Ce document fera l’objet de retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le Recueil des décisions des Cours fédérales.
FORCES ARMÉES
Sujets connexes : Pratique; Compétence de la Cour fédérale; Couronne; Anciens combattants
Requête visant à faire autoriser comme recours collectif la réclamation du demandeur contre les Forces armées canadiennes (FAC) conformément à la règle 334.16 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 — Le demandeur a cherché à représenter les membres du groupe, à savoir les anciens membres et les membres actuels des FAC dont les troubles de santé mentale se sont aggravés pendant leur service en raison de la stigmatisation de la part des FAC dont ils ont été victimes — Le défendeur s’est opposé à l’autorisation de l’instance comme recours collectif pour les raisons suivantes : la Cour n’avait pas compétence parce qu’il existe d’autres recours législatifs, notamment au sein des FAC; le demandeur n’a pas établi un certain fondement factuel à l’égard de quatre des cinq conditions d’autorisation prévues à la règle 334.16 — Le défendeur a ensuite cherché à modifier son mémoire des faits et du droit pour faire valoir que le demandeur ne satisfaisait pas aux conditions d’autorisation — Questions en litige — A. La Cour devait-elle décliner compétence à l’égard du recours collectif proposé? — B. Le défendeur devait-il être autorisé à revenir sur une admission faite dans son mémoire? — C. Le demandeur a-t-il satisfait aux cinq conditions de certification en vertu du paragraphe 334.16(1)? — Analyse — A. La Cour pouvait exercer sa compétence pour autoriser le recours collectif — Le demandeur a présenté suffisamment de preuves pour fournir un certain fondement factuel que les mécanismes internes de résolution des différends des FAC sont inefficaces pour offrir la réparation demandée dans le cadre du recours collectif — Le manque d’indépendance du processus interne invoqué allait au cœur de l’allégation d’inadéquation de ces mécanismes — De plus, les processus internes des FAC sont limités aux membres actuels des FAC, tandis que le recours collectif envisagé vise à offrir une réparation aux membres actuels et aux anciens membres — Quant à savoir si l’article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, L.R.C. (1985), ch. C-50 (LRCECA), empêche la réclamation du demandeur et des membres du groupe en raison de la disponibilité des prestations d’invalidité d’Anciens Combattants Canada (ACC), la réparation sollicitée par le demandeur au nom des membres du recours collectif va au-delà de ce que peut offrir ACC — Bien qu’ACC puisse indemniser les membres du recours collectif pour le développement de troubles de santé mentale diagnostiqués pendant leur service, il n’indemnise pas de façon indépendante les préjudices allégués séparément, comme les abus, le harcèlement et la discrimination — Par conséquent, l’article 9 de la LRCECA ne s’applique pas de manière à exonérer la Couronne de toute responsabilité et empêcher la requête en autorisation de progresser — B. Le défendeur ne pouvait pas « simplement s’écarter » de la position formelle qu’il a communiquée à la Cour et au demandeur dans son mémoire — Une admission formelle ne peut être retirée sans l’autorisation de la Cour ou sans avoir obtenu le consentement de l’autre partie — Ici, il n’y avait pas de consentement, et le défendeur n’a pas obtenu l’autorisation de revenir sur son admission — C. Le demandeur a présenté à la satisfaction de la Cour les éléments requis énoncés à la règle 334.16 — 1) Il a fait état des faits substantiels nécessaires pour conclure qu’une cause d’action valable dans un cas de négligence systémique est avancée — Ainsi, la réclamation avancée en vertu des dispositions analogues du Code civil du Québec, RLRQ ch. CCQ-1991 pouvait également être autorisé — Il a également établi une cause d’action valable sur le fondement du paragraphe 15(1) de la Charte canadienne des droits et libertés ainsi que des disposition apparentées de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, RLRQ ch. C-12 — 2) Il a fourni un fondement factuel suffisant pour établir qu’il existe un groupe identifiable — 3) Les allégations soulevaient des points de droit ou de fait communs, c’est-à-dire que la question de la responsabilité du défendeur était commune à tous les membre du groupe — 4) Un recours collectif était la procédure préférable — En particulier, les tribunaux ont conclu que le recours collectif est la meilleure procédure pour traiter des réclamations qui sont présentées contre des institutions et qui sont axées sur des torts systémiques — 5) Le demandeur était un représentant demandeur approprié — Requête en autorisation de l’instance comme recours collectif accueillie.
Thomas c. Canada (Procureur général) (T-791-21, 2024 CF 655, juge Zinn, motifs de l’ordonnance en date du 9 mai 2024, 53 p.)