Judgments

Decision Information

Decision Content

Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA THE MINISTER OF NATIONAL } REVENUE AND LA SOCIÉTÉ COOPÉRATIVE AGRI- COLE DE LA VALLÉE D'YAMASKA RevenueIncome taxProducer Codperative—"Allocations to patronage"—Members' crops sold by CooperativeNet proceeds less partial crop payments placed in reserve fund created to year's operationExcess distributed among membersWhether fund income in cooperative's handsWhether proportion to patronage"—Income War Tax ss. 8, 5(1)(b), 5(8), 5(9)—The Income Tax ss. 11(1)(c), 68Cooperative Agricultural Associations Act, R.S.Q. 1941, c. 120, s. 25. The respondent was incorporated in 1911 under the Cooperative Agricultural Associations Act (now R.S.Q. 1941, producer with limited share liability to promote of tobacco for the benefit of its members. Under scheme each shareholder agreed to deliver his tobacco crop for a period of three years to the respondent to be processed and graded and that the respondent should decide when and for what amount should be sold and the sum it should pay him for his crop. following the delivery the respondent estimated would bring and paid a percentage of such estimate to the shareholder as a payment on account. At the close of its financial year it submitted a balance sheet to a shareholder's general rÉteeting setting out the amount for which the crop sold, deductions for advance payments and operating costs and, as operating surplus, the balance remaining. At the outset it was found the amount of capital raised by share subscriptions was not sufficient to finance the operation. thereupon entered into a further contract with the, he agreed that it should retain out of profits, made of the fixed price paid him, such necessary to set up a general reserve fund that would tinuance of the operation on a stable basis be deemed an asset of the respondent pursuant to In 1941 it was decided the amount accumulated was sufficient and no further additions were by direction of the shareholders at each ings it was directed that the crop surplus be the "Plantera' Reserve Fund" and that each member be against it for the balance owing on hip crop amount be retained in the fund sufficient to finance the operations and any sum in excess thereof be used to pay non-members the balance owing them on the crop among members pro rata to their respective credits. In assessing the respondent for the years 1947, 1948 under the Tas Act and for 1949 under the Income Tax the amount of the crop surplus plus the interest credits to its 82260-2a 65 1956 A PPELLANT; Mar. 28 1957 Feb. 7 RESPONDENT. f in proportion finance next distributions "allocations in Act, R.S.C. 1927, c. 97, Act, S. of C. 1948, c. 52, c. 120) as a cooperative the growing and sale the cooperative the crop The spring the price the crop Each shareholder respondent whereby deduction having been part as the respondent deemed assure the conand that such reserve fund s. 25 of the Act. in the reserve fund made to it. Thereafter of their annual general meetpaid into what was called given a credit plus interest, that an next year's and the remainder distributed Ineome War Act, the Minister added taxable
66 EXCHEQUER COURT OF CANADA 1957 income. The respondent appealed from MINISTER Tax Appeal Board which allowed its OF NATIONAL from the Board's decision. REVENUE Held: That the amounts in suit could not LA SOCIÉTÉ respondent's taxable "income" within COOPÉRATIVE defined by the relevant income AGRICOLE to realize a profit or gain on its own behalf but on that of its members. DE LA VALLÉE It took delivery of the crop as consignee D'YAMASKA agent in the subsequent operations. 2. That the "Planter's Reserve", or working capital maintained out of the members own belonged to them and not the respondent. 3. That the sum distributed to shareholders out of the were not "allocations in proportion Income Tax Acts but the return of the required for the processing and sale of their tobacco. 4. That the amounts improperly referred to as sheet were derived from the proceeds been included in, and must be operating surplus. Inland Revenue Commissioners y. Eccentric Club at 414;. Minister of National Revenue y. Saskatchewan ducers, [1930] S.C.R. 402; Robertson y. Minister [19541 Ex. C.R. 551 at 559 and Horse tion Ltd. y. Minister of National Revenue, referred to. APPEAL from a decision Board (1) . The appeal was heard before Mr. Montreal. Maurice Paquin, Q.C. and Roger Letourneau, Q.C. respondent. FOURNIER J.:—Dans cette affaire, il s'agit d'un appel d'une décision rendue le 19 janvier 1954 par la Commission d'Appel de l'Impôt sur le revenu, accueillant l'appel de l'intimée, La Société Coopérative de la Vallée d'Yamaska, de cotisations d'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1947, 1948 et 1949. La Commission d'Appel de l'Impôt sur le revenu a main-tenu l'appel de l'intimée et a ordonné à l'appelant d'amender l'avis de cotisation quant à chacune des années d'imposition 1947, 1948 et 1949, afin que leà sommes (1) (1954) 10 Tax. [1957] the assessment to the Income appeal. The Minister appealed be considered part of the the meaning of that term as tax acts. The respondent did not act and acted as the members' fund, was created and taxable incomes and consequently operating surplus to patronage" under the relevant members own money no longer "interest" in the balance of crop sales and should have considered to form part of, the Ltd., [19241 K.B. 390 Wheat Proof National Revenue, Cooperative Marketing Associa[19561 Ex. C.R. 393 of the Income Tax Appeal Justice Fournier at H. P. LeMay for appellant. and François Jobin for A.B.C. 1; 54 D.T.C. 66.
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 67 créditées par l'intimée au fonds de "Réserveplanteurs" 1957 et l'intérêt payé sur ladite réserve soient accordés en déduc- MINISTER o NREA TNIOAL tion du revenu de l'intimée pour ces années. VENUE L'intimée est une corporation régie par la Loi des coopéra- LA SoVe.dTù tives agricoles de la province de Québec, S.R.Q. 1941, c. 120, COOPÉRATIVE et amendements, et elle se conforme aux dispositions de DE LGARvicA°.iLflE cette loi dans l'exécution de ses fonctions, devoirs et D'YA' obligations. Fournier J. La Société se compose d'au moins vingt-cinq personnes qui ont signé une déclaration à l'effet qu'elles sont devenues membres d'une société agricole à responsabilité limitée; son capital est constitué d'actions qui ne peuvent être émises qu'à ses membres, ceux-ci s'engageant à en faire l'acquisition. La Coopérative a été formée dans le but de promou-voir la culture de tabac et d'en retirer le plus haut prix possible du marché dans l'intérêt de ses membres planteurs. En vertu de la loi, elle doit exiger que les membres action-naires s'engagent par contrat vis-à-vis leur coopérative agricole, pour une période d'au moins trois ans, à livrer, vendre ou acheter, par son entremise, certains produits déterminés, savoir, leur récolte de tabac. Elle doit aussi exiger le même engagement des producteurs affiliés. L'alinéa (a) du paragraphe 1 de l'article 13 de la loi stipule ce qui suit: . . . Il (le bureau de direction) doit exiger que les producteurs action-naires s'engagent par contrat vis-à-vis leur coopérative agricole, pour une période d'au moins trois années, à livrer, vendre ou acheter, par son entremise, certains produits déterminés. Il doit aussi exiger le même engagement des producteurs affiliés. Conformément à cette disposition de la loi, un contrat a été exécuté entre la Coopérative et ses membres par lequel chaque producteur actionnaire s'est engagé à livrer à cette dernière, pendant trois années consécutives, sa récolte de tabac ; la Coopérative devra préparer et vendre ce tabac, les producteurs acceptant d'avance le prix à être fixé par l'intimée. Ce contrat se lit en partie comme suit: . . . LA PARTIE DE DEUXIÈME PART, monsieur . . . s'oblige et oblige tous les membres de sa famille dépendant de lui, sur sa ferme, ou sur toute autre ferme, qu'il détient à titre de propriétaire, locataire ou occupant, et s'engage de confier à la PARTIE DE PREMIÈRE PART, livrer en les entrepôts de cette dernière, chaque année, pendant TROIS ANNÉES consécutives y compris celle de l'année courante, le tabac qu'elle récoltera ou aura récolté. Cette livraison devant être faite à la réquisition de LA PARTIE DE PREMIÈRE PART, laquelle devra alors préparer, 82260--na
68 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 travailler, classifier et vendre ce produit aux personnes ou compagnies, MINISTER OP prix, clauses et conditions que son Bureau de Direction ou tout officier NATIONAL ou représentant autorisé d'icelui trouvera avantageux, sans que la PARTIE REVENUE DE DEUXIÈME PART puisse émettre objection ou opposition, acceptant v. LA SOCIÉTÉ d'avance le prix à lui être payé, lequel sera fixé par LA PARTIE DE COOPÉRATIVE PREMIÈRE PART ou tout représentant ou officer autorisé de par icelle. AGRICOLE DE LA VALLÉE Selon la clause précitée du contrat, seul le bureau de D'YAMASICA direction de la Coopérative ou son représentant ou officier Fou r nier J. autorisé a l'entière discrétion de déterminer le prix auquel le tabac reçu des producteurs sera vendu et aussi le prix à leur être payé. Par ailleurs, en vertu de la loi, seule l'assemblée générale des membres peut déterminer le montant des surplus d'opération et en effectuer la disposition. L'article 25(1) se lit ainsi: 25. L'assemblée générale, se basant sur ce compte rendu, détermine le montant des bénéfices dont elle fait la répartition. Je crois utile de considérer la procédure suivie par la Coopérative dans ses opérations et de résumer ce qui a été fait pendant l'année d'imposition 1947, comme illustration de ce qui a été fait pour les trois années qui nous intéressent. Pendant cette année d'opération, l'intimée a reçu de ses membres la livraison du tabac provenant de la récolte de l'automne de 1946 et en a fait l'entreposage, le séchage et la classification. L'année financière de l'intimée commence le ler novembre et se termine le 31 octobre de l'année suivante. C'est dire que l'année d'imposition 1947 a trait aux opéra-tions concernant la récolte de 1946. Au printemps de 1947, l'intimée a communiqué avec des acheteurs éventuels afin de conclure avec ceux-ci des marchés pour la vente du tabac de ses membres. Après enquête, ayant une idée du prix que rapporterait la vente de la récolte de 1946 mais ne connais-sant pas le montant exact des déboursés à encourir, le bureau de direction, le 28 avril 1947, a décidé de faire un ajustement et de payer un montant à ses membres pour le tabac reçu. La résolution se lit comme suit: Proposé par Eddy Paquette, secondé par Hervé Robert, que la secré-taire fasse un ajustement de 37% sur la récolte 1946 et que chèque soit fait payable le 1" mai 1947 et envoyé à qui de droit. Adoptée. Ce premier paiement était considéré comme versement (acompte ou avance) sur le prix à être fixé par la Coopéra-tive. Vers la fin de l'exercice financier, l'intimée, connais-
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 69 sant le prix net de la récolte, détermina le montant du sur-1957 plus de ses opérations et passa, le 6 octobre 1947, la résolu- MINISTER OF tion suivante : NATIONAL REVENUE Proposé par Euclide Beaudry, secondé par J. Dollard Brisson que les SOIGTATÙ surplus de la récolte 1946 soient portés au crédit du Fonds de réserve CooPARATiv» Planteurs au nom de chaque membre planteur et calculés au pourcentage AGRICOLE , et que la part des surplus appartenant aux non-membres sur la dite récolte DE4A A VALUE soit payée immédiatement à, la clôture de l'exercice financier. Adoptée. D MAS Fournier J. Le montant de $31,661.60, surplus des opérations de 1947, fut crédité par l'intimée au poste "Réserve pour planteurs" au nom des membres planteurs, ainsi que la somme de $4,882.37 pour intérêt sur la dite réserve. Ces montants ne furent pas payés en argent aux membres, mais furent retenus par l'intimée pour le compte des mem-bres et crédités et individualisés au nom de chacun des membres qui y avaient droit, de façon à constituer un fonds de roulement ou fonds d'opération. L'intimée tenait une comptabilité spéciale et le nom de chaque membre était inscrit sur une feuille distincte sur laquelle apparaissaient les montants qui lui étaient crédités chaque année à la fin de son exercice financier, soit le ou vers le 31 octobre. Cette résolution et la procédure suivie indiquaient que l'intimée était débitrice envers ses membres planteurs des sommes retenues dans la "réserve pour planteurs". Quant aux transactions avec les non-membres, ces derniers recevaient paie-ment en espèces du prix fixé pour leur tabac. La "réserve pour planteurs" constituait un fonds de roulement nécessaire aux opérations de réception, prépara-tion et vente de leurs produits. Aucun montant fixe n'était établi, mais le montant de ce fonds était déterminé par les besoins des opérations. Il variait très peu d'année en année. La preuve m'a convaincu que, règle générale, à la fin de l'année financière de la Société, si le montant dépassait le chiffre jugé nécessaire ù la continuation de ses activités, l'excédent, ou à peu de chose près, était distribué aux mem-bres planteurs au prorata des montants crédités à leurs comptes respectifs à la "réserve pour planteurs". Pour l'année financière 1947, le surplus des opérations fixé à $31,661.60 fut approuvé par l'assemblée générale. Toute-fois, le montant payé aux membres planteurs ne fut que de $30,455.61. Quant à l'année 1948, le surplus fut fixé à $9,720.06 et le montant payé $9,497.43 et pour l'année
70 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 1949, le surplus $30,164.29 et le montant payé $31,527.48. MINISTER OF Les montants payés furent établis de manière à ne pas NATIONAL REVENUE dimi nuer le fonds de roulement ou d'opération. LA SOCIÉTÉ Les sommes versées au fonds des planteurs et décrites aux COOPÉRATIVE comptes d'opérations de profits et pertes, à l'item frais de AGRICOLE DE LA VALLÉE finances, comme "intérêt payé au fonds de réserve", DTAMASKA provenaient des opérations des années financières qui nous Fournier 3. intéressent. Elles étaient payées au fonds de roulement et créditées aux membres avant la fixation du montant du surplus des opérations. Dans ses déclarations de revenu pour fins d'impôt, l'intimée a indiqué qu'elle n'avait aucun revenu imposable pour son année financière 1947, mais qu'elle en avait pour les années 1948 et 1949. L'appelant a cotisé comme revenus imposables les revenus provenant des opérations de l'intimée pour les trois années sous considération, sur la base de 3% de son capital employé. L'intimée a appelé de ces cotisations devant la Commission d'Appel de l'Impôt sur le revenu, qui a accordé l'appel et a référé le tout à l'appelant, afin qu'il amende ses cotisations. C'est de cette décision que le Ministre du Revenu national interjette appel devant cette Cour. Il ne semble pas y avoir de dispute quant aux montants des surplus d'opérations et aux montants versés aux mem-bres actionnaires pour les années d'imposition qui nous intéressent. De plus, les montants versés à la réserve-planteurs à titre d'intérêts sont exacts. Si nous prenons l'année 1947 comme exemple, il appert que le surplus des opérations, soit $31,661.60, a été crédité au poste réserve pour planteurs. L'appelant soumet que ce surplus est un revenu de l'intimée et qu'il n'est pas déductible pour fins d'impôt. Par contre, il admet que le montant de $30,455.61 versé par l'intimée à ses membres planteurs, qu'il considère comme répartition proportion-nelle à l'apport commercial, est déductible. Quant au montant de $4,882.37 payé à titre d'intérêt à la réserve pour planteurs, il prétend qu'il ne peut être admis en déduction du revenu de cette année-là, parce que ce montant ne con-stitue pas un intérêt sur argent emprunté ou utilisé dans l'entreprise pour gagner le revenu. Par conséquent, il con-clut que la différence entre $31,661, surplus d'opération, et $30,455.61, montant payé aux membres planteurs, soit
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 71 $1,205.99, et le montant d'intérêt de $4,882.37 versé à la 1957 réserve-planteurs, formant un total de $6,088.36, sont des MINISTER OF revenus imposables de l'intimée en vertu de la Loi de N REVENUE l'Impôt de guerre. Il applique le même raisonnement v_,. LA SOCIÉTÉ quant aux revenus de l'intimée pour les deux autres années COOPÉRATIVE sous étude, sauf que le revenu de l'année 1949 serait DE ler,AG;7.ArLÉE imposable en vertu de la Loi de l'Impôt sur le revenu, 1948. D' Y A MASSA D'autre part, l'intimée prétend que le surplus des opéra- Fournier J. tions déposé à la réserve pour planteurs et crédité aux mem-bres planteurs est un revenu de ces membres, qu'il n'est retenu que pour établir un fonds de roulement ou d'opéra-tion et que les montants versés aux membres planteurs, à l'expiration de l'année financière, n'étaient pas une répartition du surplus, mais une remise des montants appartenant aux membres, que ceux-ci avaient laissés au fonds de roulement ou d'opération et qu'ils retirent lors-qu'ils ne sont plus nécessaires aux opérations. Quant aux montants décrits comme intérêts, ce sont des sommes qui, si elles n'étaient pas versées à la réserve pour planteurs sous cette appellation, seraient payées au fonds comme partie du surplus d'opération. Elle conclut que ces montants ne sont pas un revenu au sens de la loi. Les parties ont admis que la question en litige est la même pour les trois années d'imposition. La question à déterminer est de savoir si les montants crédités à la réserve pour planteurs, tant pour les surplus des opérations que pour les sommes décrites comme intérêts sur ces surplus, constituent un revenu de l'intimée ou des membres planteurs. Dans le présent cas, il n'y a pas de doute qu'il s'agit d'une coopérative de producteurs. Par contrat, les membres actionnaires s'engagent à livrer chaque année à la Coopéra-tive, pendant trois années consécutives, le tabac qu'ils récolteront ou auront récolté. La livraison devra se faire aux entrepôts de la Coopérative à sa réquisition. Elle devra alors préparer, travailler, classifier et vendre ce tabac aux prix et conditions que son bureau de direction trouvera avantageux. Dans le contrat, il n'est nullement question de vente de tabac par les membres ou d'achat de tabac par la Coopérative. Si elle n'en fait pas l'acquisition ou ne le reçoit pas comme don, elle ne peut le posséder que pour ceux qui le lui livrent. Elle le reçoit donc comme manda-
72 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 taire, agent ou consignataire, et ce, aux conditions stipulées MINISTER OP au contrat et aux décisions prises par le bureau de la NATIONAL REvENuE Coopérative et approuvées par les membres en assemblée générale. Ceci n'implique pas que l'intimée n'a pas réalisé LA SOCIÉTÉ COOPERATIVE de profits ou gains, par suite de certaines de ses activités, AGRICOLE DE LA VALLÉE qui peuvent être considérés comme revenus imposables. D'YAMASKA Elle a produit des déclarations de revenus imposables, pour Fournier .1". lesquels elle a été cotisée. Nous n'avons pas à nous pré- - des revenus imposables de l'intimée qui ont été déclarés, amendés ou cotisés et taxés et au sujet desquels il n'y a pas de débat. Au moment de son incorporation, vers 1911, et par la suite, la Coopérative a émis des actions et en a vendu à ses membres planteurs, chaque membre ne pouvant souscrire et acquérir plus d'un certain nombre maximum d'actions. Si j'ai bien compris la preuve et l'argument, les membres n'ont jamais touché de dividendes sur ces actions. Le capital souscrit et payé, tel qu'il appert aux bilans de 1947, 1948 et 1949, s'élève à une somme variant entre $33,000 et $34,000 et forme partie de son actif. Ce montant étant insuffisant pour opérer, il n'y a pas de doute qu'elle a emprunter pour exercer ses pouvoirs et remplir ses obligations. Elle a ensuite passé un contrat avec chacun de ses membres actionnaires lui permettant de se créer une réserve générale. Les paragraphes 11 et 12 du contrat se lisent comme suit: 11. Il est expressément convenu par les présentes que LA PARTIE DE DEUXIÈME PART consent à ce que la PARTIE DE PREMIÈRE PART conserve et retienne une partie des profits provenant de la manipulation, préparation et vente de son produit, déduction faite du prix fixé à elle payé, cela dans le but de créer ou augmenter un fonds de réserve au profit de la Société Coopérative Agricole de la Vallée d'Yamaska, afin de permettre sa subsistance et sa stabilité. LA PARTIE DE DEUXIÈME PART consentant et acceptant que le pourcentage de cette ristourne soit fixé par le bureau de direction de la Société ou tout employé ou officier autorisé par icelle. 12. Lequel fonds de réserve sera réputé un actif propre de la Société de la Coopérative Agricole de la Vallée d'Yamaska, le tout conformément à l'article 25 Chap. 57 S.R.Q. 1925. . . . Une réserve a donc été créée et augmentée au profit de la Coopérative, conformément aux dispositions de la loi et des paragraphes 11 et 12 du contrat. Cette réserve est devenue un actif propre de la Coopérative, qui s'en est servie pour acquérir des meubles, immeubles, camion, draineuse, outil-lage et tout ce qui était matériellement nécessaire à ses
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 73 activités. De plus, elle s'est portée acquéreur d'actions 1957 la Coopérative Fédérée de Québec et d'obligations du T _ y I r N ISTER 0F TIO NAL Gouvernement. L'actif de l'intimée a été ainsi constitué NR et a servi, avec les retenues annuelles, à couvrir les frais LA SOCIÉTi d'opération de l'entreprise. COOPÉRATIVE AGRICOLE Je suis d'opinion que le capital-actions et une réserve DE LA VALLÉE créée et augmentée dans le but de constituer l'actif propre D 'AMASXA d'une coopérative à responsabilité limitée et qui lui sert à Fournier J. faire des profits ou gains comme résultat de ses propres activités industrielles, commerciales, financières ou autres de même nature, commissions, etc., réalise un revenu impo-sable au sens de l'article 3 de la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu et de la Loi de l'impôt sur le revenu. Est-ce le cas qui se présente dans la question qui nous occupe? Ici, le litige est basé sur des faits, des chiffres et des bilans, et aussi sur des articles bien précis de la loi. L'appelant base ses cotisations sur la proposition que les surplus des opérations de disposition des produits des mem-bres planteurs et les montants décrits comme intérêts versés à la réserve pour planteurs, moins les montants payés aux membres planteurs, constituent un revenu imposable de l'intimée basé sur 3% de son capital employé. Se servant de cette formule, il établit le revenu imposable de l'intimée à $6,088.36 pour l'année 1947 et prélève un impôt de $1,521.26; pour l'année 1948, un revenu de $6,503.36 et un impôt de $1,891.61; pour l'année 1949, un revenu de $5,586.47 et un impôt de $745.38. De plus, prenant pour acquis que ces montants sont des revenus imposables de l'intimée, il soutient qu'il faut appliquer, quant aux surplus, les dispositions des para-graphes 8 et 9 de l'article 5 de la Loi de l'Impôt de guerre sur le revenu (1947) et, quant aux sommes décrites comme intérêt, l'alinéa (b) du paragraphe (1) du même article 5. Pour l'année 1949, il demande l'application des dispositions de l'article 68 et de l'article 11, paragraphe (1), alinéa (c), de la Loi de l'Impôt sur le revenu, 1948. Va sans dire que si j'en arrivais à la conclusion que les surplus d'opération et les intérêts versés à la réserve pour planteurs étaient un revenu imposable au sens de la loi, les articles ci-haut mentionnés, concernant les répartitions
74 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 proportionnelles à l'apport et les intérêts, s'appliqueraient MINISTER OF à ces montants. Dans le cas contraire, ils ne seraient Das NATIONAL REVENUE considérés. LA SOCIÉTÉ Les paragraphes 11 et 12 du contrat, concernant la créa- C.Rr1GIC OLE tion et l'augmentation d'une réserve qui formerait partie de DE LA VALLÉE l'actif de l'intimée, ont cessé d'opérer vers 1941. Ceci ressort D'YAMAS KA de la preuve verbale. En étudiant les bilans ou rapports Fournier J. d'opérations de l'intimée pour les années 1947, 1948 et 1949, j'ai constaté que la réserve est bien mentionnée mais ne montre pas d'augmentation suffisante pouvant provenir du surplus d'opération pour me permettre de conclure que l'intimée continuait à augmenter sa réserve, c'est-à-dire son actif, aux dépens du surplus d'opération. Comme question de fait, cette réserve se chiffrait ainsi: en 1946, à $45,857.27; en 1947, à $45,953.12; en 1948, à $46,085.30, et en ajoutant le trop-perçu de l'exercice et le revenu net d'une draineuse elle s'élève à $47,206; en 1949, à $46,943.80, et en y ajoutant le trop-perçu de l'exercice et le revenu net de la draineuse elle se chiffre à $48,162.93. Il semble donc que l'augmentation de cette réserve provenait du revenu imposable de l'intimée et non du surplus d'opération. J'en suis arrivé à la conclusion que, dès avant 1946, le surplus d'opération avait cessé de servir de source d'alimentation pour cette réserve générale. De plus, l'actif de l'intimée est demeuré presque stationnaire pendant ces années. Il semblerait que l'intimée ayant décidé que son actif était devenu suffisant pour permettre sa subsistance et sa stabilité, aurait discontinué d'augmenter sa réserve. A compter de ce moment, comment les surplus d'opéra-tion furent-ils employés? A la fin de l'année financière, le surplus, après avoir été déterminé par le bureau de direction et approuvé par l'assemblée générale des membres actionnaires planteurs, était versé à une réserve pour plan-teurs dans le but de créer ou d'augmenter un fonds de roule-ment ou d'opération. Les sommes payées à ce fonds étaient créditées et individualisées à chaque membre au prorata de la quantité et de la qualité du tabac livré. Puis, l'assemblée générale, sur la recommandation du bureau de direction, déterminait le montant requis pour procéder aux opérations de l'année suivante et décrétait que l'excédent non requis du fonds serait payé aux membres planteurs. Le fonds
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 75 variait suivant les besoins de l'opération effective de l'entre-1957 prise. Ce fonds ou réserve appartenait aux membres, et M INISTER OF NATIONAL non à l'intimée. REVENUE Je ne puis accepter la prétention de l'appelant que la LA sovc*IÉTÉ réserve pour planteurs ou fonds de roulement constitue un cciFÉRATIVE AGRICOLE actif de l'intimée et que le surplus des opérations versé à DE LA VALLÉE cette réserve est un revenu imposable de la Coopérative. DrnmAsKA Je crois plutôt que l'intimée est une Coopérative de produc- Fournier J. teurs de tabac qui reçoit à titre de consignataire le produit de ses membres, leur verse un montant initial après livraison et prépare, classifie et vend le produit au meilleur compte possible; elle déduit le montant de ses frais ou dépenses, verse le surplus à un fonds de roulement et remet à ses membres l'excédent du fonds non requis pour la continuation de l'opération. Dans mon opinion, cette réserve pour planteurs ou fonds de roulement a été constituée et est maintenue avec les revenus propres et imposables des membres; par con-séquent, elle appartient à ces derniers, et non à l'intimée. Les montants reçus par les membres ne sont pas des réparti-tions proportionnelles d'apport prévues par la loi, mais des remises de sommes leur appartenant et non nécessaires à la préparation et à la vente effective de leur tabac. Quant aux montants décrits comme intérêt au bilan de l'intimée, ils proviennent du produit de la vente des récoltes et devraient former partie du surplus d'opération de l'année. Ils ne sont pas pris à même le revenu imposable de l'intimée et ne peuvent pas être considérés comme dépenses pour gagner son revenu. L'examen que j'ai fait des bilans m'a convaincu que l'entrée de ces sommes au compte de dépenses est inutile, parce qu'en réalité elles sont intégrées dans le surplus d'opération à chaque année et devraient être con-sidérées comme surplus. Le surplus étant la propriété des membres, ceux-ci n'ont aucun intérêt à s'en servir pour se payer des intérêts. Si vous enlevez l'entrée des intérêts versés à la réserve pour planteurs, vous devrez immédiate-ment l'ajouter au surplus d'opération, qui sera versé au fonds de roulement. Une entrée irrégulière dans les livres de comptes ou bilans, et qui n'est pas conforme aux faits établis, ne peut, à mon avis, avoir l'effet de changer un revenu non imposable en un revenu imposable.
76 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 C'est la réalité des faits et le caractère des transactions MINISTER OF entre l'intimée et ses membres qui doivent servir à déter-NATIoNA tLr. REvEN miner si les montants en litige sont des revenus imposables v. LA S OC de la Coopérative ou de ses membres. Cette règle a été IÉTÉ COOPÉRATIVE appliquée dans un grand nombre de causes. L'honorable AGRICOLE DE LA VALLÉE juge Lamont, de la Cour suprême du Canada, dans la D'YAMASKA cause Minister of National Revenue et The Saskatchewan, Fournier j. Co -operative Wheat Producers Ltd. (1), en fait mention dans ses remarques aux pages 409 et 410. Je cite: In revenue cases it is a well recognized principle that "regard must be had to the substance of the transactions relied on to bring the subject within the charge to a duty and the form may be disregarded". (Pollock M.R. in Inland Revenue Commissioners y. Eccentric Club Ltd. (2).) Il faut donc que les faits établis servant de base aux cotisations de l'appelant soient tels qu'ils puissent entrer dans le cadre des termes de la définition des mots "revenu imposable" de l'article 3 de la Loi de l'Impôt de guerre sur le revenu, S.R.C., 1927, c. 97, dont voici la partie pertinente: 3. For the purposes of this Act, "income" means the annual net profits or gain or gratuity, . . . as being profits from a trade or commercial or financial or other business . . . directly or indirectly received by a person from ... any trade, manufacture or business, ... Je suis d'opinion que les montants en litige ne peuvent être considérés comme revenu imposable de l'intimée au sens de la définition précitée. L'intimée n'agissait pas pour son propre compte, dans le but de réaliser des profits ou gains; elle agissait pour les membres et dans l'intérêt de ceux-ci. L'intimée recevait livraison de leur produit comme consignataire; elle procédait, comme mandataire ou agent, aux opérations nécessaires à la disposition de leur tabac, à la perception du prix de vente, au dépôt du surplus de l'opération à la réserve pour planteurs, et, plus tard, à la remise aux membres de la partie du fonds non requise pour les opérations futures. En d'autres mots, je ne crois pas que, pour les raisons que j'ai déjà mentionnées, l'intimée était engagée dans une entreprise commerciale, industrielle, financière ou autre dans le but de réaliser des profits; elle opérait plutôt pour les membres. Elle avait un actif propre qui ne provenait aucunement du surplus d'opération pour les années sous étude. Les profits ou revenus imposables réalisés prove-naient de ses transactions avec les non-membres et ils sont en conséquence étrangers au présent débat. (1) [19307 S.C.R. 402. (2) [1924] 1 K.B. 390 at 414.
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA La règle suivie constamment lorsqu'il s'agit de déter-miner si un revenu est imposable est à l'effet que le droit à ce revenu doit être absolu et ne peut être soumis à aucune restriction contractuelle ou autre quant à sa jouissance, son LAsv usage et sa disposition. Ce principe a été énoncé et COO appliqué dans les causes suivantes: missioners y. Eccentric Club Ltd. Revenue et The Saskatchewan Co ducers Ltd. (supra); Robertson y. Revenue (2); Canadian Fruit Distributors Ltd. of National Revenue (3). Pour que les montants en litige soient considérés "revenu imposable" de l'intimée, il fraudrait que son droit à ce revenu soit absolu. Les faits que nous connaissons ne pourraient justifier une semblable conclusion. Comme il s'agit de réserve dans cette cause, je crois utile de me référer de nouveau à la cause de Minister Revenue et Saskatchewan Co-operative Wheat Producers Ltd. (op. cit.). A la page 402 du rapport il est dit: . . . The primary ;abject of its incorporation-was to enable its members, who were Saskatchewan grain growers, to market their grain co-operatively. It was assessed for income under the Income c. 97) in respect of certain sums which it retained, from of sale of grain, as a "commercial reserve" It objected to the assessment on the ground that did not constitute income within the Income War Tax Le jugé se lit ainsi: that it was not assessable in respect of the said sums. chargeability to income tax is the operation of a trade or business givilig rise to a profit. The respondent in respect of machinery for collecting contributions from the growers, not holders but as subscribers to the fund, and for growers' benefit and handing them back longer required and thence the reserves could not be or gains" of respondent. L'intimée ici n'a été que l'instrument des membres plan-teurs pour recevoir, préparer et vendre leur produit et créer ou augmenter une réserve pour planteurs ou fonds de roulement. Il n'y a que les membres planteurs qui ont contribué à cette réserve, dont la mise leur a été créditée individuellement et qui ont droit de participer à sa distribution. Or, les membres planteurs qui ont formé la réserve (1) [1924] 1 K.B. 390 at 414. (3) [1954] Ex. C.R. 551 77 1957 MINISTER OF NATvIEONNAL crE T E PÉRATIVE Inland Revenue Com- DE2CR-ZLE, E (1); Minister of National D' Y _ AMASSA -operative Wheat Pro- Fournier J. Minister of National y. Minister of National War Tax Act (R.S.C. 1927, the gross returns and as an "elevator reserve". the sums so retained Act. . . . The basis of said reserves was merely as its shareusing those moneys for the in S'orne form or other when no said to be "profits (2) [1944] Ex. C.R. 170. at 559.
78 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 ou fonds sont aussi des actionnaires, et c'est en cette qualité MINISTER OF qu'ils choisissent les directeurs qui administrent leur NATIONAL REVENUE Société; ils ont donc le contrôle de cette réserve et de sa disposition. Dans de telles circonstances, je suis d'opinion LA SOCIÉTÉ COOPÉRATIVE qu'il est impossible de conclure que cette réserve a été RIC OLE DE A L G VALLÉ E créée et augmentée par des revenus de l'intimée et que le D'YAMASKA surplus des opérations décrites dans ces remarques soit Fournier J. "revenu imposable" de l'intimée. Enfin, dans la cause de The Horse Co-operative Marketing Association Ltd. y. Minister of National Revenue (1), l'honorable juge J.-T. Thorson, Président de cette Cour, résume ainsi les faits: The appellant was incorporated under the Co-operative Marketing Association Act, R.S.S., 1940, c. 180. Its members associated themselves together as an incorporated association on a non-profit co-operative plan for the purpose of disposing of their surplus horses by collective and co-operative action. At first the appellant sold live horses, but later it processed horse meat and sold it largely in Belgium. The appellant was not in the ordinary business of buying horses. Its members delivered horses to it as instructed and in such delivery received an initial payment per pound, the balance of the payment being dependent on the years operations. At the end of the year 1947 the appellant credited its members with two amounts, which it styled equalization allotment and further allotment, the totals of which came to $102,917.84 for the former and $742,66523 for the latter. In assessing the appellant the Minister added these two amounts to the amount of taxable income reported by it. The appellant objected and appealed to the Income Tax Appeal Board which dismissed its appeal and the appellant appealed against this decision. Voici la teneur du jugé: 4. That what the members really did in associating themselves together in the appellant association was to establish it as the means or machinery for accomplishing by co-operative action the purpose which they could not achieve individually, namely, the advantageous disposal of their surplus horses. When they delivered their horses to the appellant they did not sell them to the appellant in the ordinary sense but delivered them to it for marketing or processing by it on their behalf and for them. 5. That when the appellant received the horses it did so as agent for the members and was accountable to them for the net proceeds from their marketing or the sale of the processed product. The initial payments to the members were really advances to them on account of the total to which they were severally entitled and the surplus of the appellant's receipts, over its expenditures did not belong to the appellant as its profits or gains but belonged to the members in their own individual rights and was held by it on their behalf and for them. Je crois opportun de faire remarquer qu'il y a similarité entre la cause immédiatement précitée et celle qui nous occupe, sauf qu'en ce qui concerne celle-ci les surplus sont (1) [19561 Ex. C.R. 393.
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA crédités aux membres au prorata de la quantité et qualité de tabac livré par chacun d'eux et le montant qui excède les besoinspour opérations futures leur est versé en argent. Ayant décidé que les surplus des opérations de l'intimée quant à la venté du tabac de ses membres et les montants décrits comme intérêts ne constituaient pas un revenu imposable de l'intimée, je ne puis accepter la prétention de l'appelant que les articles de la Loi de l'Impôt de guerre sur le revenu et de la Loi de l'Impôt sur le revenu concernant les répartitions proportionnelles à l'apport commercial et les intérêts doivent être appliqués dans la présente cause. Pour les raisons ci-dessus mentionnées, l'appel est rejeté avec dépens. Jugement en conséquence. 79 1957 MINISTER OF NATIONAL REVENUE LA SOCIÉTÉ COOPÉRATIVE DEAIAGRVCAOLI,EÉE D'YAMASKA Fournier J.
 You are being directed to the most recent version of the statute which may not be the version considered at the time of the judgment.