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208 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1944 1942 BET W hEN : ~-,r--- Feb.23. MIGUEL ZAMACOIS PLAINTIFF; 1943 AND Mar.1. RAYMOND DOUVILLE ET AL DEFENDANTS. CopyrightPartiesReproduction of text in entirety—"Fair dealing"— Good faithInfringementInjunction. Held: That the reproduction by the press of an article on a current economic, political or religious topic is authorized by article of the Berne Convention, unless the reproduction thereof be expressly reserved. 2. That the article given below atlength treating of the supposed experiences of animals in war-time, being of a fanciful and whimsical character, is not such as may be reproduced without the permission of the author in virtue of article 9 of the Berne Convention. 3. That the reproduction in a newspaper of the said article in its entirety, with critical comments upon it, is not "fair dealing" with the article, as authorized by 17 (1) of Copyright Act, R.S.C. (1927), c. 32, and constitutes an infringement of the copyright therein. 4. That an agent authorized under an unrevoked power of attorney, given by a foreign society of which plaintiff is a member, may legally bring action in the name of such plaintiff, though it does not clearly appear that the said plaintiff was aware of the action being instituted. 5. That where a defendant, in good faith, believes he was not infringing, plaintiff is not entitled to punitive or exemplary damages. 6. That in the case of a single and isolated act of infringement (such as reproducing an article in one issue of a newspaper) and which is not likely to be repeated, an order for Injunction will not be granted.
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 209 7. That where, in an action for infringement of copyright by reproducing 1943 an article in a newspaper, it appears that the defendant has in his possession only a few infringing copies of the paper whioh form part ZnMAcors of the archives of the .paper and are not for sale the defendant v. should not be ordered to surrender them to. the plaintiff, pursuant Douvr uu to section 21 of the Copyright Act. ET AL. ' ACTION for a declaration that the Defendants have infringed the Copyright of the Plaintiff, for an injunction and for damages resulting from the infringement. The action was tried before the Honourable Mr. Justice Angers, at Ottawa. - Jean Genest, K.C. for plaintiff. Alexandre Taché, K.C. for defendants. The facts and questions of law raised are stated in the reasons for judgment. ANGERS J. now (March 1, 1943) delivered the following j udgment: Il s'agit d'une action en violation de droit d'auteur. Le demandeur, qui est citoyen français, est écrivain et homme de lettres et il a son domicile à Paris, France. Les défendeurs sont les directeurs-propriétaires d'un journal hebdomadaire intitulé Le Bien Publie qu'ils publient dans la cité des Trois-Rivières, province de Québec. Le journal des défendeurs circule dans ladite cité et ailleurs dans la province de Québec ainsi que, quoiqu'en quantité plus restreinte, dans les provinces avoisinantes. Le demandeur publie dans Candide, hebdomadaire litté-raire publié à Paris, France, des articles et nouvelles sous le titre "Vérités et Bobards". Il en a publié, entré autres, dans les numéros des 20 et 27 décembre 1939, des 3, 10, 17 et 24 janvier 1940, du 7 février 1940 et du 29 mai 1940; des copies de chacun de ces numéros ont été produites comme pièces A, C et 2 (1 à 6), les deux premières par le demandeur et les six autres par les défendeurs. Le demandeur a' produit comme pièce 1 une copie du journal Le Bien Public du 8 février 1940, dans lequel a paru, sous la signature de Léon Dufrost, un article intitulé "Vérité et Bobards" que je crois à propos de reproduire textuellement:
210 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1944 1943 Vérités et Bobards ZAMACOIs J'étais en chemin de fer, lisant un journal de France, Candide, quand V. mon oeil fut attiré par un nom, celui de Zamacoïs. DouvILLE ET AL. Zamacoïs, ce n'est plus un jeune, hélas, mais comme son esprit est resté plein de fraîcheur! Je me suis hâté de parcourir les dix paragraphes Angers J. de son article, "Vérités et bobards", et j'en suis encore tout amusé! Si bien, qua je voudrais essayer de vous faire partager ma joie. Nous sommes tellement sérieux, tellement graves, tellement austères! C'est peut-être par que nous ressemblons le moins aux Français, nos pères, et que nous nous rapprochons le plus des Anglais sans avoir acquis, malheureusement, le sens si aigu de l'humour qui les caractérise. Perte, d'un côté, imitation, de l'autre, de ce qui est naturel à nos amis anglo-saxons et nous rend ridiculement solennels puisque leur humour si spécial n'est pas imitable, en somme recul sur toute la ligne. Rire, sourire, s'amuser, blaguer, ne pas s'en faire, c'est si bon, si sain et si naturel! Prendre au sérieux les choses sérieuses, c'est parfait, et voilà qui est dans le droit fil de la tradition et du caractère français. Mais savoir aussi, à l'occasion, -en parler avec détachement, avec aisance; voir ce qui est amusant et s'en amuser; chercher et trouver ce qui fait sourire et détend, c'est peut-être encore la meilleure façon d'en venir à traiter sérieusement les choses sérieuses. La France est en guerre. Une menace plus grave, je pense, que toutes celles qui ont pesé sur cette nation au cours de sa longue et glorieuse histoire, prend à la gorge tous et chacun de ses fils. Zamacoïs est un écrivain de renom: C'est un fantaisiste ailé. Comme tous les autres, il ne peut penser qu'à une chose: la guerre. Comme tous les autres il lui faut en parler! Mais comme il y mettra de finesse et de discrétion, et de verve, et de souplesse, et d'ingéniosité, et d'esprit. Son sujet, d'abord: que deviennent les animaux dans la tourmente? Mais parfaitement, les animaux ne sont pas épargnés! Et tandis qu'on y pense, qu'on en parle, d'un ton léger, dégagé, amusé, on pense moins et on parle moins de ceux auxquels on ne peut penser pour en parler, sans un tressaillement au coeur. C'est une façon de soutenir le moral. Au front, les soldats vont se gondoler des mots, des à-peu-près, que le rappel incessant de la guerre provoque sous la plume de Zamacoïs, et, à l'arrière, on va se défatiguer aussi, si l'on peut dire, en souriant à cette façon de répondre à la "guerre des nerfs" du Sieur Adolf... Le Bien Public reproduit ailleurs "Vérités et bobards" de M. Miguel Zamacoïs. Nos lecteurs voudront bien s'y reporter. Ils trouveront plaisir à le lire, un plaisir d'une qualité exceptionnelle, que le journal est heureux de leur procurer. Ils sont menacés de tant de discours électoraux... L'article de Dufrost commence sur la première page du journal et se termine sur la seizième. L'article de Zamacoïs est reproduit sur la page 12; il me semble convenable de le citer ici intégralement, afin d'en faire voir le genre:
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 211 Vérités et Bobards 1943 Et les animaux?... que deviennent-ils dans la tourmente? ZAMACOIs Eh t bien, comme les hommes, ils ont des destins plus ou moins V. enviables. Douvu.Le ET Al,. Les Britanniques, dont on connaît le penchant sentimental à l'égard des bêtes, ont créé, à Londres, des postes de secours, en cas de bombarde-ments, pour les chiens et les chats. On ne nous a pas dit si on impose Angers J à ces animaux le port du masque à gaz. Ce qu'il y a de certain c'est que le premier chien qui a vu un homme avec cette adjonction sur le museau a penser: Tiens! lui aussi? Mais son cerveau n'a .pas été jusqu'à la perception de cette vérité, à savoir, que si nous portons des muselières c'est, paradoxalement, parce que ce sont nos voisins qui sont enragés. Comme jusqu'à présent, Dieu merci, il n'y a pas eu de bobo, les infirmiers et les infirmières préposés aux postes de secours zoologiques sont demeurés inoccupés, et réduits, pour se maintenir en état d'entraîne-ment, à meubler leurs loisirs en jouant exclusivement à pigeon-vole, chat-perché et saute-mouton. * * * * On a annoncé dans les journaux qu'un chien avait été fait prisonnier sur un navire allemand capturé. Le toutou ayant à point aboyé "kama-rade!" aux arraisonneurs, fut emmené généreusement en Angleterre. Mais on sait qu'un individu de la race canine n'entre pas facilement outre-Manche. Le prisonnier est en train de subir une quarantaine sévère dans une niche de concentration, en attendant qu'ayant opté pour un pays il y a encore du sucre à volonté, il soit dressé à faire le beau en l'honneur des alliés, et à grogner férocement au seul nom prononcé d'Adolf. * * * * Un chat nommé Fawny, engagé à bord du chalutier Caldew, pour faire filer les rats avant la voie d'eau, a, lui aussi, connu de fortes émotions. Le Caldew torpillé n'a pas manqué d'embarquer avec lui dans une chaloupe Fawny terrorisé à l'idée du contact avec l'eau, son ennemi numéro un. Recueillis par un bateau suédois qu'un destroyer allemand arrêta bientôt, les rescapés furent finalement emmenés prisonniers. Fawny eut la chance inouïe que lesdits AIIemands n'ayant pas réalisé sa qualité d'ersatz du lapin, il fut adopté par une mémère sensible. Que de souvenirs impressionnants à aller miauler sur vne gouttière, un beau soir de printemps! Et quelle chatte demeurera indifférente au prestige d'un amoureux s'il sait jouer au cabotin et au Matou-vu? Parmi les chevaux, deux catégories: les éprouvés et les privilégiés. Il y a ceux qui triment durement dans la zone militaire, et puis les embusqués des écuries de courses, abusivement accapareurs des bandes molletières en flanelle. Couchés dans le foin avec les lads et les entraî-neurs pour témoins, ils attendent la reprise des courses annoncée pour le 31 décembre. Qui aurait cru qu'en pleine guerre, il pourrait être glorieux pour une quelconque créature d'arriver le premier au poteau de Vin-cennes?... Après Vincennes, ce sera Auteuil, puis Longdhamps, non seulement parce qu'il ne faut pas laisser les nobles coursiers tourner à la fois en rond et en bourriques dans des paddoks, sans profit pour personne mais aussi parce qu'il ne faut pas empêcher le pari mutuel d'apporter sa contribution de petit ruisseau à l'énorme rivière dont M. Reynaud a besoin. 14998-3a
212 EXCHEQUER COURT OF CANADA [ 1944 1943 Profitons de l'occasion pour rappeler que l'Agha Khan, une tête de turf des plus sympathiques, vient de vendre les chevaux de coursespro- Zerancors v noncez yearlingsqu'il possédait de l'autre côté du channel. L'idée que Douvu r.E l'Agha Khan était un peu gêné n'est venue à aucun de ceux qui savent ET AL" qu'il n'a qu'à rentrer dans son pays il est prophète exceptionnellement Angers J. pour toucher son propre poids en or, ce qui, entre parenthèses, doit l'inciter à négliger les cures amaigrissantes. Non, croyons plutôt que, ami des alliés, L'Agha Khan aime mieux tenir que de faire courir. En dépit des circonstances défavorables, un de ces chevaux a été payé 200,000 francs, un autre, 600,000... Tout porte à croire qu'ils ne sont pas, pour le moment, voués à la boucherie. Les moutons, eux, n'en mènent pas large. Non seulement ils conti-nuent à contribuer intensément, malgré eux, au ravitaillement, mais jamais on ne les a si précipitamment débarrassés de leur laine, en dépit des rigueurs de la saison, ce qui autorise à affirmer qu'ils passent un mauvais cardeur. Il faut bien fournir de matière première le zèle tricoteur de tant de mères, épouses, soeurs, fiancées, de tant de cousines dont la vie a son secret, de tant de petites poules dont la liaison a son mystère. En tricotant, les femmes et fillettes Sont, malgré tout, un peu moins inquiètes: Grâce à leurs soins bientôt un combattant Va recevoir l'envoi réconfortant: Le coton souple et les laines douillettes Sont transformés en plastrons, en manchettes, Et c'est un peu de son coeur palpitant Qu'on glisse dans les mailles et chaînettes, En tricotant. C'est une sorte de fièvre manufacturière qui a saisi d'innombrables femmes. L'une d'elles n'a-t-elle pas écrit à son journal pour demander que l'on réservât dans chaque train de banlieux un compartiment aux tricoteuses de guerre, avec, la nuit venue, lumière et fenêtres calfeutrées, histoire de ne pas interrompre la production laineuse intensifiée? C'est le type de la pétition à adresser à l'Administration des Réseaux, service des aiguilles. Il y aurait un chapitre à consacrer aux tricoteurs, depuis la solitaire qui en met, qui en met, multipliant les mailles avec la foi touchante qui fait égrener les chapelets, jusqu'aux participantes aux tricotage-parties l'on cause, brodant aussi les sujets de conversation les plus variés, et examinant les faits et gestes des amies et connaissances sur toutes les coutures. Le tricotage lui-même est prétexte à éclosion d'énormes bobards. Un malin stratège de café ayant lu dans sa feuille que l'on recommandait surtout l'envoi de passe-montagnes) Comprenez? disait-il mystérieusement à ses copains de belote... On demande., d'urgence, des passe-montagnes... Clair comme le jour t C'est qu'on prépare une grande offensive par une chaîne montagneuse... Ça crève les yeux... Mais chut t ... A qui â jouer?
Ex. C.R.1 EXCHEQUER COURT OF CANADA 213 Dans l'espèce ovine on n'aperçoit qu'un personnage qui ait de la 1943 chance: c'est un certain bélier que des soldats marocains ont amené de ZA ncois leur pays à titre de mascotte. Il leur rappelle le temps ils gardaient v. les moutons avant d'aller chasser les loups. - Douvua1 Voici donc des combattants de 1939 qui, en dépit des fantastiques ET `L. perfectionnements apportés aux armements, font encore la guerre avec Angers J. un bélier. N'abandonnons pas les ruminants sans signaler que le Transvaal a décidé d'envoyer aux troupes alliées du biltong, viande salée et séchée, excellente, paraît-il. N'en ayant jamais goûté, même au fameux déjeuner de la Société d'acclimatation de France, nous n'en pouvons rien dire, sinon que fabriqué avec de l'antilope et de la gazelle, le biltong ne peut être qu'une nourriture particulièrement légère. Passons à la zoologie à laquelle est nécessaire un copieux espace vital. La femellehippopotame du Zoo de Vincennes vient d'être mère. Sitôt le bébé costaud, la dame a fait grise mine à son époux. C'est un usage très répandu dans le monde animal, certains insectes femelles vont même jusqu'à faire de leur époux le plat de résistance du banquet nuptial... Mais le petit hippopotame est mort. On espère que le malheur rapprochera le couple comme cela se voit dans une espèce supposée par elle-même supérieure, et les sentiments tendres étant rallumés l'espèce hippopotame ne s'éteindra pas. On a fêté les cent cinquante ans d'un éléphant répondant au nom de Siam, animal historique au même titre que le cheval d'Attila, l'âne de Balaam, l'aspic de Cléopâtre, l'oie du Capitole et le chien de Jean de Nivelle. Ce proboscidien avait été offert à Napoléon premier, lequel, allant demander à Vienne la main de Marie-Louise, emmena l'animal. Il est très rare, en Europe, que les fiancés déposent un éléphant dans la corbeille de mariage. Le présent spectaculaire dut faire sensation dans un temps ces grosses bêtes ne couraient pas les zoos, et l'on n'était pas familiarisé encore avec l'aspect de leurs défenses passives. Siam est encore au jardin zoologique de Budapest, et fournit aux philosophes qui le contemplent l'occasion de penser que les empereurs passent et que les éléphants restent,, cette similitude subsistant cependant qu'ils peuvent être trompés tous les deux. * -* * * Et voici le maximum. - Une pauvre baleine de dix-huit mètres de long, touchée par une mine, a échoué en piteux état sur la côte belge. Voyons-y un symbole: le C'est assez! ! ! prochain des neutres. (The learned judge refers to the pleadings and continues.) Il a été produit de la part du demandeur comme pièce 3 une procuration par la Société des Gens de Lettres; de Paris, France, faite et passée par devant Me André Oudard, notaire, à Paris, le 21 novembre 1930, constituant pour 1499&-3a
214 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1g44 1943 fondé de pouvoir et représentant général de ladite société ZAMAcoI6 M. Louvigny de Montigny, hommes de lettres, demeurant Dot U . m 0 m à Ottawa, Canada. Cette procuration lui donne, entre ET AL. autres, le pouvoir de représenter la Société des Gens de Angers .1. Lettres et chacun de ses membres et adhérents en particu-lier pour les fins de la protection des oeuvres leur ressortis-sant dans le Dominion du Canada. Ladite procuration donne en outre à M. Louvigny de Montigny le pouvoir de prendre les mesures et exercer les procédures qu'il jugera nécessaires ou opportunes pour sauvegarder, défendre ou revendiquer les droits de la Société des Gens de Lettres ou des organisations à elle affiliées comme susdit, ou ceux des membres, adhérents ou ayants droit de la Société des Gens de Lettres ou desdites organisations affiliées, et d'exercer tous les recours possibles, d'après les législations nationales et internationales en vigueur au pays, afin d'empêcher la contrefaçon des oeuvres ressortissant aux auteurs en cause ou à leurs ayants droit. D'autoriser ou défendre, selon le cas, la reproduction des ouvrages ressortissant aux auteurs en cause, quel- que soit la forme ou les procédés de reproduction, de formuler et faire valoir des réclamations devant les tribunaux canadiens dans le cas de reproduction non autorisés ou autrement illicite, d'exercer toute action judiciaire pour prévenir pareille reproduction, pour la faire cesser ou pour réclamer les dommages-intérêts auxquels elle pourra donner lieu, d'exécuter tout jugement rendu, et de transiger, s'il y a lieu, soit avant, soit après jugement. Il est stipulé dans ladite procuration qu'elle sera valable tant que la Société des Gens de Lettres, par elle-même ou par son délégué général, ne l'aura pas révoquée par avis de six mois, auquel cas M. Louvigny de Montigny devra remettre la procuration à la Société des Gens de Lettres avant l'expiration des six mois de l'avis de révocation. Le procureur du demandeur durant sa plaidoirie a produit comme pièce 5 une liste des sociétaires et adhérents de la Société des Gens de Lettres pour l'année 1938-1939 dans laquelle apparaît le nom du demandeur. La procuration et la liste des sociétaires et adhérents de la Société des Gens de Lettres me paraissent établir le droit du fondé de pouvoir et représentant général de la Société en Canada, M. Louvigny de Montigny, de prendre au nom de Miguel Zamacoïs, sociétaire de la Société des Gens de Lettres, l'action pendante devant moi. Entendu comme témoin de la part du demandeur, Lou-vigny de Montigny dit qu'il connaît Miguel Zamacoïs et que celui-ci est membre de la Société des Gens de Lettres.
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 215 Il ne peut affirmer qu'au moment du procès, savoir, le 23 1943 ~-- février 1942, Zamacoïs vivait encore, mais il sait bien qu'il 7iAMACOI9 était vivant il y a deux mois, soit le 23 décembre 1941. V. DouvrLl.E Le témoin dit qu'il connaît et lit le journal Candide, qui ET AL. est un hebdomadaire littéraire de Paris. Il produit comme Angers J. pièce 2 (1 à 6) six numéros de Candide, ceux des 20 et 27 décembre 1939, des 3, 10 et 17 janvier et du 7 février 1940. Tous ces numéros contiennent un article intitulé "Vérités et Bobards", portant, sous le titre et sous le texte, le nom du demandeur. Contre-interrogé, de Montigny déclare que Zamacoïs est avant tout un poète et qu'il n'a jamais été journaliste. Depuis quelque temps il est un collaborateur assez régulier du journal Candide. Au dire du témoin, en temps de guerre, des journaux et revues d'un caractère littéraire écrivent des articles ayant trait à la guerre. de Montigny affirme qu'il a été autorisé par la Société des Gens de Lettres et la Société des Auteurs dramatiques de prendre la présente action; il avoue qu'il n'a pas obtenu d'autorisation de Zamacoïs personnellement. Il ne peut dire si celui-ci demeure à Paris actuellement, mais il sait qu'il y demeurait avant la capitulation. Le témoin déclare qu'il n'a pas de preuve officielle que Zamacoïs est citoyen français, mais il ajoute que c'est un fait généralement connu. Le dictionnaire Laroussele Larousse du XXe sièclele mentionne comme tel. Le procureur des défendeurs demande à de Montigny de prendre connaissance d'une lettre en date du 12 janvier 1939, adressée à Raymond Douville, directeur, Le Bien Public, et portant apparemment la signature du témoin. Après avoir lu la lettre (cotée comme pièce B), de Montigny reconnaît _qu'elle est bien de lui. Cette lettre, qui traite divers sujets, contient un passage concernant deux reproductions provenant du journal Candide, évidemment publiées dans Le Bien Public, les-quelles ne sont pas plus amplement désignées; il ne me semble pas hors de propos de citer ce passage, bien qu'à mon avis il n'ait guère de portée sur l'issue du procès, la lettre étant antérieure à la prétendue contrefaçon de plus d'un an: - Il est exact que la reproduction de certains articles est libre, et que les journaux peuvent publier gratuitement des reproductions d'un genre
216 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1944 1943 particulier, à la condition que ces articles aient été publiés pour la première ZnMncois fois sans interdiction de reproduire, et à la seconde condition que la v provenance soit indiquée dans la reproduction. Cette faculté couvre Douvn.,LE seulement les éditoriaux portant sur des questions d'actualité et d'intérêt ET AL. général. Angers J. Or, j'ai cru, et je crois encore, que les deux reproductions provenant de Candide n'entrent pas dans cette catégorie. Le -témoin déclare qu'il n'a pas changé d'opinion depuis qu'il a écrit cette lettre. de Montigny dit qu'il considère la guerre comme un sujet d'actualité et d'intérêt général. Selon lui, la Société des Gens de Lettres ne permet point la reproduction .d'un article isolé. Raymond Douville, l'un des défendeurs, déclare qu'il est copropriétaire avec Clément Marchand, du journal Le Bien Public. Lui-même est journaliste depuis 1927. Avant de publier avec Marchand Le Bien Public, il a écrit dans Le Nouvel-liste, des Trois-Rivières, et La Presse, de Montréal. Le témoin dit que Le Bien Public a reproduit l'article de Zamacoïs intitulé "Vérités et Bobards" dans son numéro du 8 février 1940 et que la direction du journal n'a pas l'intention de le reproduire de nouveau. Douville affirme que le tirage du Bien Public n'a pas augmenté à la suite de l'article de Zamacoïs. Son associé Marchand et lui ont considéré cet article comme un article d'actualité. Selon le témoin, l'article de Léon Dufrost, nom de plume de Louis Durand, avocat des Trois-Rivières, commente l'article de Zamacoïs. Il a lu cet article avant de le reproduire et l'a considéré comme étant article d'actualité de discussion politique ou économique. Il a aussi lu l'article de Dufrost et il dit partager son opinion. En contre-interrogatoire Douville déclare qu'il a publié l'article de Zamacoïs à, cause de son actualité. Il reconnaît volontiers que cet article a une valeur littéraire, mais il croit qu'il n'a qu'un intérêt passager et que dans cinquante ans d'ici il n'offrira plus le même intérêt. Pour lui c'est un article d'actualité de discussion économique ou politique. Charles Gautier, journaliste et rédacteur en chef du journal quotidien Le Droit, publié à, Ottawa, dit qu'il corrobore le témoignage de Douville relativement à la
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 217 nature de l'article de Zamacoïs. Il a lu cet article et le 1943 considère comme un article d'actualité; c'est un article ZAMACOIs traitant un sujet d'actualité de façon légère. DV. oD &LLE Au dire du témoin, Zamacoïs s'est fait journaliste à l'occa- ET AL. sion de la guerre comme Maurice Barrès et Henri Lavedan Angers J. s'étaient faits journalistes durant la dernière guerre, En réponse à une question du procureur du demandeur, Gautier, décrivant l'article de Zamacoïs, déclare qu'il s'agit d'un article fantaisiste traitant un sujet d'actualité. Maurice Desjardins, journaliste au journal Le Droit depuis 1939, dit qu'il a entendu le témoignage de Douville et qu'il est d'opinion comme lui que l'article de Zamacoïs est un article fantaisiste sur un sujet d'actualité. En contre- interrogatoire, il admet qu'il n'y voit pas de but polémique. Clément Marchand, copropriétaire avec Douville du jour- nal Le Bien Public, déclare que Louis Durand, qui est un avocat de plusieurs années de pratique, collabore assez souvent au Bien Public sous le pseudonyme de Léon Dufrost. Le témoin dit que la publication de l'article de Zamacoïs n'a rapporté aucun profit à son journal. Le tirage oscillait entre 2,000 et 2,300 copies. La direction n'a reçu aucun commentaire des lecteurs à propos de l'article de Zamacoïs. Marchand dit que Le Bien Public a eu un contrat avec la Société des Gens de Lettres tant qu'il a pu supporter cette dépense. Un duplicata de ce contrat a été produit comme pièce 4. Quand le journal a mettre fin à ce contrat, il a cessé de publier les articles littéraires paraissant dans les journaux et revues français; il a continué à publier unique- ment les articles d'actualité. Pour lui l'article de Zamacoïs en est un d'actualité, traité de façon légère. Marchand affirme que Le Bien Public n'aurait pas publié l'article de Zamacoïs seul, s'il n'avait été accompagné d'un commentaire de l'un de ses collaborateurs. Il dit qu'il n'y a dans le journal Candide aucune réserve quant à la reproduction des articles de Zamacoïs. Il fait remarquer qu'il y a dans le numéro du 24 janvier 1940 (pièce C) d'autres articles au sujet de la reproduction desquels il y a une réserve. Le fait est que dans ce numéro se trouve une tranche d'un roman inédit de Charles Trenet intitulé "Dodo manières", portant au bas la note d'usage
218 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1944 1943 "Copyright by pourquoi pas Droit d'auteur?—Charles ZAMACOIs Trenet, 1940." J'observerai qu'à mon avis l'absence de Do v. pareille note au bas des articles du demandeur ne peut ET AI" préjudicier à son droit d'auteur. Angers J. Marchand affirme que dans son ensemble l'article de Zamacoïs reproduit dans Le Bien Public est un article d'actualité de discussion économique ou politique qui, dans cinquante ans d'ici, n'offrira plus aucun intérêt. D'après le témoin l'article de Léon Dufrost était d'abord joint à celui de Zamacoïs; comme le tout était trop long pour être publié sur une seule page, les deux articles ont été séparés et publiés sur deux pages différentes. En contre-interrogatoire Marchand dit que le contrat qu'avait Le Bien Public avec la Société des Gens de Lettres a été terminé vers la fin de 1939 ou le début de 1940. Au dire du témoin, c'est sur la clause A faisant suite à l'article 2 du contrat que les défendeurs se sont basés pour reproduire dans leur journal l'article de Zamacoïs. n ne croit pas que cet article tombe sous le coup du premier alinéa de cette clause; selon lui il est régi par le deuxième, qui se lit comme suit: Par "articles de journaux" s'entendent les "éditoriaux": écrits éphé-mères paraissant au jour le jour et non susceptibles d'entrer ultérieurement dans la composition d'un volume ou recueil littéraire ou scientifique. Ces écrits sont caractérisés par l'actualité de leur sujet, par la discussion que ce sujet entraîne et par l'intérêt général qu'il comporte. Ils ne doivent, à aucun égard, être confondus avec des "articles de revues" qui, signés par les auteurs, constituent des oeuvres littéraires et sont protégés comme tels. Marchand déclare qu'à sa connaissance il n'y a pas eu de commentaires au sujet de l'article de Zamacoïs de la part de lecteurs du Bien Public. Marchand dit que Le Bien Public a publié deux ou trois poèmes une fois le contrat terminé, mais que le journal a payé pour ces ouvrages à la demande de la Société des Gens de Lettres. Entendu comme témoin en contre-preuve, de Montigny dit qu'il a lu l'article 9 de la Convention de Berne et qu'il ne croit pas que l'interprétation qu'en a donnée Gautier soit correcte. Il déclare qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'un article éditorial mais d'une oeuvre littéraire. A son avis, l'article
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 219 de Zamacoïs est une chronique; or, la chronique, en vertu ` 1 . 9 , 4 -3 . du contrat intervenu entre les défendeurs et la Société des ZiAMACOIs Gens de Lettres, ne peut être touchée. v. Dotrvu I.E En contre-interrogatoire, de Montigny soutient qu'il n'y ET AL. a ni discussion, ni polémique dans l'article en question; Angers J. il y a tout au plus des allusions. Il dit que Zamocoïs ridiculise les embusqués; il ne sait pas si le journal Candide lui-même le fait. de Montigny affirme qu'il n'y a point discussion parce que Marchand a déclaré qu'il n'y avait pas eu de commentaires de la part des lecteurs du Bien Public. Il ajoute que, pour qu'il y ait discussion, il faut la présence d'au moins deux parties, ce qui paraît assez juste. Egalement juste est la prétention du témoin que, s'il n'y a qu'une partie, il s'agit d'un simple exposé. Rappelé en arrière-contre-preuve, Marchand dit que de Montigny fait erreur quand il affirme qu'il ne peut y avoir discussion résultant du fait qu'un article traite une question. La Convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques du 9 septembre 1886, amendée à Paris le 4 mai 1896 par un acte additionnel, revisée par la Convention de Berlin faite le 13 novembre 1908 et un protocole additionnel fait à Berne le 20 mars 1914 et revi-sée de nouveau à Rome le 2 juin 1928, contient, entre autres, les dispositions suivantes qui me paraissent perti-nentes: ARTICLE 2 (1) Les termes "oeuvres littéraires et artistiques" comprennent toutes les productions du domaine littéraire, scientifique et artistique, quel qu'en soit le mode ou la forme d'expression, telles que: les livres, brochures et autres écrits;... (3) Les pays de l'Union sont tenus d'assurer la protection des oeuvres mentionnées ci-dessus. ARTICLE 4 (1) Les auteurs ressortissant à l'un des pays de l'Union jouissent, dans les pays autres que le pays d'origine de l'oeuvre, pour leurs oeuvres, soit nonn publiées, soit publiées pour la première fois dans un pays de l'Union, des droits que les lois respectives accordent actuellement ou accorderont par la suite aux-. nationaux, ainsi que des droits spécialement accordés par la présente Convention. (2) La jouissance et l'exercice de ces droits ne sont subordonnés à aucune formalité; cette jouissance et cet exercice sont indépendants de l'existence de la protection dans le pays d'origine de l'oeuvre. Par suite, en dehors des stipulations de la présente Convention, l'étendue de la
220 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1944 194.3 protection, ainsi que les moyens de recours garantis à l'auteur pour sauvegarder ses droits, se règlent exclusivement d'après la législation du ZAMACOIS v pays la protection est réclamée. Douvm.LE (3) Est considéré comme pays d'origine de l'oeuvre: pour les oeuvres ET AL. non publiées, celui auquel appartient l'auteur; pour les oeuvres publiées, Angers J. celui de la première publication;... (4) Par "oeuvres publiées" il faut, dans le sens de la présente. Convention, entendre les oeuvres éditées... ARTICLE 7 (1) La durée de la protection accordée par la présente Convention comprend la vie de l'auteur et cinquante ans après sa mort. (2) Toutefois, dans le cas cette durée ne serait pas uniformément adoptée par tous les pays de l'Union, la durée sera réglée par la loi du pays la protection sera réclamée et elle ne pourra excéder la durée fixée dans le pays d'origine de l'ceuvre... ARTICLE 9 (1) Les romans-feuilletons, les nouvelles et toutes autres oeuvres, soit littéraires, soit scientifiques, soit artistiques, quel qu'en soit l'objet, publiés dans les journaux ou recueils périodiques d'un des pays de l'Union, ne peuvent être reproduits dans les autres pays sans le consentement des auteurs. (2) Les articles d'actualité de discussion économique, politique ou religieuse peuvent être reproduits par la presse si la reproduction n'en est pas expressément réservée. Toutefois, la source doit toujours être claire-ment indiquée; la sanction de cette obligation est déterminée par la législation du pays la protection est réclamée. (3) La protection de la présente Convention ne s'applique pas aux nouvelles du jour aux faits divers qui ont le caractère de simples informations de presse. ARTICLE 15 (1) Pour que les auteurs des ouvrages protégés par la présente Convention soient, jusqu'à preuve contraire, considérés comme tels et admis, en conséquence, devant les tribunaux des divers pays de l'Union, à exercer des poursuites contre les contrefacteurs, il suffit que leur nom soit indiqué sur l'ouvrage en la manière usitée. Le Canada a adhéré à la Convention de Berne, telle que revisée par la Convention de Berlin le 13 novembre 1908 et par le protocole additionnel de Berne le 20 mars 1914, au' moyen d'un arrêté en conseil adopté le 27 juillet 1923 (C.P. 1395), publié dans la Gazette du Canada du 10 mai 1924. Le 10 avril 1928 il a, comme pays unioniste contrac-tant, réitéré son adhésion à la Convention de Berne, revisée tel que susdit, comme en fait foi une lettre circulaire du Conseil fédéral suisse du 27 avril 1928, adressée aux membres de l'Union, dont une copie a été transmise au Secrétaire d'Etat pour les Affaires extérieures du Canada par lettre du Secrétaire d'Etat britannique pour les Colonies
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 221 et les Affaires des Dominions du 25 mai 1928. Jusqu'au 1943 ~„--. 10 avril 1928 le Canada faisait partie de l'Union à titre de ZAMACOIB colonie britannique, aux termes de ladite lettre circulaire, V. Douvn.LE ou de fragment de l'empire britannique, selon Lapradelle et ET AL. Niboyet, Répertoire de Droit international (p. 745). Angers J. Le 2 juin 1928 le Canada a signé l'acte de Rome revisant de nouveau la Convention de Berne. Il a donné son adhé-sion à la Convention de Berne ainsi revisée au moyen d'un arrêté en conseil (C.P. 1390) adopté le 12 juin 1931 con-formément à l'article 12 de la Loi modificative du droit d'auteur, 1931 (21-22 Geo. V, chap. 8) sanctionnée la veille. Cet arrêté en conseil n'a pas été publié dans la Gazette du Canada. La ratification du Canada a été déposée à Rome le 27 juin 1931. Ceci apparaît au bulletin n° 3 du Recueil des Traités, 1931, publié en 1933 par l'Imprimeur du Roi au Canada. L'article 3 de la Loi du droit d'auteur (S.R.C. 1927, chap. 32) définit ainsi le droit d'auteur: Pour les fins de la présente loi, le "droit d'auteur" désigne le droit exclusif 'de produire ou de reproduire une oeuvre sous une forme matérielle quelconque, d'exécuter ou de représenter ou, s'il s'agit d'une conférence, de débiter en public, et si l'oeuvre n'est pas publiée, de publier l'oeuvre ou une partie importante de celle-ci;... 2. Pour les fins de la présente loi, l'expression "publication" désigne, par rapport à toute oeuvre, l'édition d'exemplaires rendus accessibles au public;... L'article 4 décrète, entre autres, ce qui suit: Subordonnément aux dispositions de la présente loi, le droit d'auteur existe au Canada, pendant la durée mentionnée ci-après, sur toute oeuvre originale littéraire, dramatique, musicale ou artistique, si, à l'époque de la création de l'oeuvre, l'auteur était sujet britannique, citoyen ou sujet d'un pays étranger ayant adhéré à la Convention et au Protocole additionnel de cette même Convention, publiés dans la seconde annexe de la présente loi, ou avait son domicile dans les possessions de Sa Majesté; et si, dans le cas d'une oeuvre publiée, l'ceuvre a été publiée en premier lieu dans les possessions de Sa Majesté ou dans l'un de ces pays étrangers;... L'article 5 fixe la durée du droit d'auteur; il est en ces termes: A moins de dispositions contraires et formelles contenues dans la présente loi, la durée du droit d'auteur comprendra la vie de l'auteur et une période de cinquante ans après sa mort. L'article 12, ayant trait à la possession du droit d'auteur, contient, entre autres, les dispositions suivantes:
222 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1944 1943 Sous réserve des dispositions de la présente loi, l'auteur d'une oeuvre nr cors sera le premier titulaire du droit d'auteur sur cette oeuvre... Ze e V. Mais lorsque l'ouvrage est un article ou une autre contribution, à un DouvII.LE journal, à une revue ou à un périodique du même genre, l'auteur, . défaut El' AL. d'une convention à l'effet contraire, est censé posséder le droit d'interdire Angers J. la publication de cet ouvrage ailleurs que dans ce journal, dans cette revue ou dans ce périodique. L'article 17, définissant la violation du droit d'auteur, ordonne, entre autres, ceci.: Sera considéré comme ayant porté atteinte au droit d'auteur sur une oeuvre, quiconque, sans le consentement du titulaire de ce droit, exécute un acte qu'en vertu la présente loi seul ledit titulaire a la faculté d'exécuter. Toutefois, ne constituent aucune violation du droit d'auteur: (i) L'utilisation équitable d'une oeuvre quelconque dans un but d'étude privée, de recherche, de critique, de compte rendu ou sous forme de résumé destiné aux journaux; (iv) La publication de courts passages empruntés à des oeuvres litté-raires encore protégées, publiées et non destinées elles-mêmes à l'usage des écoles, dans un recueil qui est composé principale-ment de matières non protégées, préparé de bonne foi pour être utilisé dans les écoles et désigné comme tel dans le titre et dans les annonces faites par l'éditeur;... L'article 20 détermine les recours civils du titulaire du droit d'auteur; les dispositions pertinentes de cet article, tel que modifié par le statut 21-22 Geo. V, chap. 8, article 7, se lisent ainsi: Lorsque le droit d'auteur sur une oeuvre aura été violé, le titulaire du droit pourra recourir, sauf disposition contraire de la présente loi, à tous moyens de réparation, par voie d'ordonnance de cessation ou d'interdiction, de dommages-intérêts, de décomptes (accounts) ou autrement, moyens qui sont ou seront garantis par la loi en vue de la violation d'un droit. (3) Dans toute action en violation de droit d'auteur, si le défendeur conteste l'existence du droit d'auteur ou la qualité du demandeur, en pareil cas: (a) L'oeuvre sera, jusqu'à preuve contraire, présumée être une oeuvre protégée par un droit d'auteur; et (b) L'auteur de l'oeuvre sera, jusqu'à preuve contraire, présumé être le possesseur du droit d'auteur. Toutefois, lorsque la contestation concerne une question de cette nature, et si aucune concession du droit d'auteur ou d'un intérêt dans le droit d'auteur par cession ou par licence n'a été enregistrée sous l'autorité de la présente loi, en pareil cas: (i) si un nom paraissant être celui de l'auteur de l'oeuvre y est - imprimé ou autrement indiqué, en la manière habituelle, la personne dont le nom est ainsi imprimé ou indiqué sera, jusqu'à preuve contraire, présumée être l'auteur de l'oeuvre; (4) Quiconque viole le droit d'auteur sur une oeuvre protégée en
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 223 vertu de la présente loi sera passible de payer, au détenteur du 1943 droit d'auteur qui aura été violé, les dommages-intérêts que ce détenteur du droit d'auteur pourra avoir subis par le fait de cette ZAMACOr$ V. violation, et, en sus, telle proportion, que le tribunal peut juger DouvnLE équitable, des profits que le contrefacteur aura réalisés en comEr AL. mettant cette violation de droit d'auteur. Pour prouver les profits, Angers J. le demandeur ne sera tenu que d'établir les recettes ou les produits provenant de la publication, de la vente ou d'une autre utilisation illicite de l'oeuvre, ou d'une représenta tion, exécution ou audition non autorisée d'une oeuvre restée., protégée; et le défendeur devra prouver chaque élément du coût qu'il allègue. (6) LaCour de l'Echiquier du Canada, concurremment avec les tribunaux porovinciaux, a juridiction pour instruire et juger toute action, poursuite ou procédure civile pouvant être instituée sur motif d'infraction à quelque disposition de la présente loi ou sur réclamation des recours civils que prescrit la présente loi. Vu le témoignage de Louvigny de Montigny, la liste des noms des sociétaires et des adhérents de la Société des Gens de Lettres, les divers numéros du journal Candide contenant des articles, tous intitulés "Vérités et Bobards" et portant le nom de Miguel Zamacoïs et vu la présomption créée par le paragraphe (3) de l'article 20 de la Loi du droit d'auteur, je crois qu'il y a lieu de conclure que le demandeur est l'auteur de l'article "Vérités et Bobards" publié dans le journal Candide et reproduit dans le journal des défendeurs Le Bien Public, que cette oeuvre est protégée et que le demandeur est titulaire du droit d'auteur de ladite oeuvre. Les défendeurs n'ont produit aucune preuve à l'encontre de la qualité du demandeur ni de son droit d'auteur; la présomption établie par l'article 20 demeure donc entière. La loi anglaise sous ce rapport est substantiellement semblable à la nôtre ; dans les circonstances il est intéressant de consulter Copinger on the Law of Copyright, 7e édition, à la page 164, et Bullen & Leake's Precedents of pleadings, 9e édition, page 858, note (p). Le procureur du demandeur a plaidé que la reproduction de l'article de Zamacoïs n'est pas autorisée par le paragraphe (2) de l'article 9 . de la Convention de Berne, vu que cet article n'en est pas un d'actualité de discussion économique ou politique. C'est l'une des questions principales à déterminer. A ce sujet le procureur du demandeur invoque le fait que dans leur défense les défendeurs emploient le mot "nouvelle" à plusieurs reprises pour désigner l'article de Zamacoïs, concluant de que les défendeurs reconnaissent,
224 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1944 1943 au moins implicitement, que la "nouvelle" de Zamacoïs ZAMACOIS n'est pas un article d'actualité de discussion économique v. DOL MILLE ou politique. Je n'attache guère d'importance à l'usage Lr AL de ce mot qui n'a peut-être pas été employé par le procu-AngersJ. reur des défendeurs dans son sens purement littéraire; j'avouerai cependant que l'emploi répété du mot dans le paragraphe 6 de la défense incline à croire que celui-ci aurait pu inopinément lui attribuer cette signification. Le Larousse du XXe siècle donne deux définitions appropriées: 1° "Premier avis d'une chose, d'un événement"; c'est parti-culièrement le récit du fait divers lu dans les journaux ou entendu à la radio; 2° "Récit imaginatif de peu d'étendue et roulant le plus souvent sur des événements d'un genre peu compliqué". Littré, de son côté, fournit entre autres les définitions ci-après: 1° "Le premier avis qu'on reçoit d'une chose, renseignement sur quelque chose de lointain, de caché, d'ignoré"; 2° "Ecrit qui raconte ce qui se passé de nouveau. Nouvelles politiques, littéraires, etc."; 3° "Sorte de roman très court, récit d'aventures intéressantes et amusantes". Le procureur du demandeur fait observer que dans le texte du paragraphe (2) de l'article 9 de la Convention de Berne il n'y a point de virgule entre les mote "articles d'actualité" et les mots "de discussion économique, poli-tique ou religieuse" et il en conclut que pour que ce para-graphe s'applique il faut qu'il y ait à la fois "actualité" et "discussion économique, politique ou religieuse". Cette proposition me paraît bien fondée. Il soutient qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'un article d'actualité de discussion économique ou politique et que conséquemment sa reproduction ne peut être justifiée par les dispositions du para-graphe (2) de l'article 9. Le procureur du demandeur, invoquant l'article 21 de la Loi du droit d'auteur, prétend que les exemplaires contre-faits de l'oeuvre de Zamacoïs publiée dans Le Bien Public doivent être considérés comme étant la propriété du titu-laire du droit d'auteur et lui être remis. Question incidente que je devrai déterminer advenant le cas j'en arriverais à la conclusion qu'il y a eu contrefaçon. A ce propos il me semble opportun de consigner ici la définition du mot "contrefait" contenue dans le paragraphe (b) de l'article 2 de la Loi du droit d'auteur:
Ex.. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 225 (b) "contrefait", appliquée à l'exemplaire d'une oeuvre sur laquelle 1943 subsiste un droit d'auteur, désigne toute reproduction, y compris ~—„-. l'imitation déguisée, faite ou importée contrairement aux disposi-ZAMACOIs V. tions de la présente loi; DOIIVILLE ET AL. Le procureur du demandeur a fait valoir qu'une injonc-Angers J. tion ou ordonnance d'interdiction devrait être accordée pour prohiber la reproduction des autres articles, nouvelles ou chroniques de Zamacoïs. Autre question accessoire à décider pour le cas je conclurais à l'existence d'une violation du droit d'auteur. Le procureur des défendeurs fait observer que la règle 42 des règles et ordonnances de la Cour ne s'applique point, vu que le litige est régi par la Convention de Berne et la Loi du droit d'auteur. Je crois qu'il a raison et je ne sais pourquoi l'on a invoqué en demande les dispositions de cette règle qui sont, en l'espèce, inapplicables, vu les clauses formelles de la Loi du droit d'auteur. Le procureur des défendeurs a prétendu que nous sommes en présence d'une action dont le demandeur n'a pas eu connaissance. La chose est possible; un auteur ne peut se tenir personnellement au courant de toutes les reproductions que l'on peut faire, à travers le monde, de ses oeuvres. C'est l'une des raisons, j'ai lieu de croire, parmi nombre d'autres, qui suscité l'organisation de la Société des Gens de Lettres: la protection des auteurs en faisant partie contre la violation de leurs droits. Je ne crois pas cette objection sérieuse. Le procureur des défendeurs a soutenu que la seule preuve qu'il y ait au dossier que Zamacoïs est vivant et qu'il fait partie la Société des Gens de Lettres est le témoignage de de Montigny et la liste des sociétaires et adhérents de la Société produite comme pièce 5; or, cette liste date de 1939 et l'action a été intentée en 1940. L'exposé de réclamation a été produit au greffe de la Cour le 14 juin 1940. Il y a au dossier un numéro du journal Candide du 29 mai 1940, produit par les défendeurs comme pièce A. Lors du procès, savoir, le 23 février 1942, de Montigny a attesté qu'il ne pouvait dire si Zamacoïs vivait à cette date, mais qu'il savait cependant qu'il vivait il y a deux mois, ce qui nous reporte au 23 décembre 1941. De leur côté les défendeurs n'ont fait aucune preuve sur ce sujet. Dans les circonstances je crois qu'il incombait aux
226 EXCHEQUER COURT OF CANADA [ 1944 1943 défendeurs de prouver que Zamacoïs était mort ou bien ZAMACOIS qu'il ne faisait plus partie de la Société des Gens de Lettres. Dot rt i.F Je suis d'opinion que pour discuter l'existence ou le titre ETA . de Zamacoïs les défendeurs auraient pu procéder par voie Angers J. de motion ou d'exception préliminaire: voir sur ce point Holmested & Langton'ss Ontario Judicature Act, édition, p. 397, " et l'article 174 du Code de Procédure civile de la province de Québec. Le procureur des défendeurs tente naturellement de faire valoir que l'article de Zamacoïs reproduit dans Le Bien Public est un article d'actualité de discussion économique ou politique. C'est l'opinion, non seulement des défendeurs, mais aussi de Gautier et Desjardins, deux journalistes d'expérience. Au surplus le Larousse du XXe siècle définit le mot "discussion" par les mots: "Action de discuter, d'examiner"; puis il ajoute: "L'histoire est une science toute de discussion." C'est l'une des questions princi-pales à résoudre. Le procureur des défendeurs suggère de plus que "discussion" ne veut pas nécessairement dire "polémique". Sur ce point en particulier je suis d'accord avec lui, mais' ceci ne résout pas la question de savoir si l'article de Zamacoïs est bien un article d'actualité de discussion économique ou politique. Le procureur des défendeurs affirme que ses clients ont été de bonne foi, ayant mentionné le nom de l'auteur et la provenance de l'article. De plus, dit-il, ils ont reçu l'article en question accompagné d'un article de Louis Durand, qui est un avocat de plusieurs années d'expérience exerçant sa profession aux Trois-Rivières. Je dirai tout de suite qu'à mon avis la bonne foi des défendeurs ne peut être mise en doute. Ils ont pu se tromper, mais je suis convaincu qu'ils ont agi honnêtement et franchement. Le procureur des défendeurs prétend que la lettré de de Montigny à Raymond Douvelle, l'un des défendeurs, pro-duite comme pièce B, autorise la reproduction d'articles du genre de celui qui fait la base de la présente action. Au soutien de sa prétention il invoque le troisième para-graphe de la lettre qui est reproduit ci-dessus. Je ne crois pas que ce passage de la lettre autorise la reproduction d'articles autres que les "éditoriaux portant sur des ques-
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 227 tions d'actualité et d'intérêt général". Il ne me paraît pas 1943 ~--..-- possible de classer l'article du demandeur dans cette ZAMACOIS catégorie. V. DOUVILLE Le procureur des défendeurs allègue qu'il s'agit d'un acte ET AL. isolé, commis de bonne foi, et qu'il n'y a pas lieu. dans les Angers J. circonstances d'accorder une injonction ou ordonnance d'interdiction. Il soutient en outre que, vu l'absence dans l'exposé de réclamation d'une demande de dommages spécifiques et le manque de preuve que les défendeurs ont réalisé des profits comme conséquence de la reproduction de l'article de Zamacoïs, il ne pourrait être question que d'indemnité pour les dommages généraux subis par le fait de la violation du droit d'auteur, si dommages il y a. A l'appui de sa prétention le procureur des défendeurs a cité la décision de l'honorable juge Joseph Archambault dans la cause de Dame Osmont v. Petit Journal, Inc. (1), dans laquelle le savant juge discute la question des dommages-intérêts telle que déterminée par le paragraphe 4 de l'article 7 de la Loi modificative du droit d'auteur (21-22 Geo. V, chap. 8), modifiant l'article 20 de la Loi du droit d'auteur (S.R.C. 1927, chap. 32) . Le "jugé", qui résume de façon satisfaisante le jugement sur ce point en particulier, énonce, entre autres, ceci: La publication dans un journal d'une oeuvre littéraire telle qu'un roman sans l'autorisation de l'auteur, justifie un recours en dommages-intérêts. Si la publication a été faite de bonne foi, v.g. dans la croyance erronnée que l'auteur faisait partie de la société des gens de lettressociété constituée en Franceet avec l'intention de se soumettre aux conditions prévues par les statuts de cette société, le tribunal, en l'absence de preuve que l'oeuvre a été une source de profits pour le journal, ne doit allouer d'indemnité que pour les dommages généraux subis par le fait de la violation du droit d'auteur. Le procureur des défendeurs fait observer que le sens du mot "nouvelle" employé dans les sous-paragraphes (a) et (b) du paragraphe 6 de la défense est expliqué dans le sous-paragraphe (c) de l'article 6 qui dit, entre autres, que ladite nouvelle constitue "un article d'actualité de discussion économique et politique prévu par l'article 9 de la Convention de Rome". Comme je l'ai déjà dit, je n'attache pas (1) R.J.Q., 73 C.S., 485. 14998-4a
228 EXCHEQUER COURT OF CANADA [19L4 1943 beaucoup d'importance à l'emploi de ce mot dans la défense; ZAMACOIs je ne crois pas que le procureur des défendeurs lui a attribué Do l r LLi un sens purement littéraire. ET AL. Le procureur des défendeurs plaide enfin qu'il n'y a pas Angers J. lieu d'ordonner la remise au demandeur des copies du numéro du journal Le Bien Public, qui sont au nombre de 10 ou 15, vu que celles-ci complètent les quelques séries du journal conservées par la direction pour ses archives. En réponse à la plaidoirie du procureur des défendeurs, le procureur du demandeur représente que le demandeur a droit d'obtenir tous les exemplaires du numéro du Bien Public dans lequel a été reproduit l'article de Zamacoïs ou, s'ils ont été vendus, leur valeur. Le procureur des défendeurs, touchant la question de la nécessité d'une motion pour faire établir si le demandeur était vivant au moment l'action a été intentée et s'il faisait encore partie de la Société des Gens de Lettres, soumet qu'il ne s'agit point de discuter la qualification du demandeur et qu'il n'y a pas lieu en conséquence à une motion ou une exception à la forme. Je me suis déjà prononcé sur ce point et je me contenterai de répéter qu'à mon avis il incombait aux défendeurs, en face de la preuve mise au dossier, d'établir que le demandeur était mort ou qu'il avait cessé de faire partie de la Société des Gens de Lettres. Ces quelques remarques résument, je crois, de façon assez substantielle les plaidoiries des procureurs des parties. Il se présente deux questions principales à résoudre: (a) L'article de Zamacoïs, "Vérités et Bobards", repro-duit dans le numéro du journal Le Bien Public du 8 février 1940 est-il un article d'actualité de discussion économique ou politique au sens du paragraphe (2) de l'article 9 de la Convention signée à Rome le 2 juin 1928 pouvant être reproduit par la presse, étant donné que la reproduction n'en a pas été expressément interdite? (b) Le collaborateur du journal Le Bien Public, Léon Dufrost (de son vrai nom Louis Durand), avait-il le droit en faisant une critique ou un commentaire de l'article de Zamacoïs de le reproduire intégralement?
Ex: C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 229 Comme l'a fait observer le procureur du demandeur, 1943 l'expression "article d'actualité de discussion économique, zAMACOL4 politique ou religieuse" doit être interprétée comme un tout, Do v'LLE en ce sens qu'il faut qu'il y ait un sujet d'actualité et que ET AL. celui-ci ait pour objet une discussion économique,. politique Angers J. ou religieuse. Après avoir lu avec attention l'article dont il s'agit, il m'est impossible de conclure qu'il est compris dans la définition du paragraphe (2) de l'article 9 de la Convention. Il peut y avoir actualité puisque l'auteur y traite du sort des animaux dans la "tourmente", même s'il le fait d'une façon anodine et spirituelle. L'auteur, qui est un poète et dramaturge d'un esprit aisé, fin et gracieux et d'une grande facilité d'expression, ne pouvait traiter un sujet léger et fantaisiste avec lourdeur et monotonie. Il i n'en reste pas moins que la chronique du demandeur ne peut l être considérée comme un sujet d'actualité, au sens strict du mot. A moles qu'un article n'ait pour sujet l'histoire, il est rare qu'il n'y entre point une part d'actualité. A tout I i événement je ne pense pas que l'article contienne une discussion économique ou politique. Le paragraphe (3) de l'article 9 de la Convention, qui déclare que la protection accordée par la Convention ne s'applique pas aux nouvelles du jour ou aux faits divers qui ont le caractère de simples informations de presse, n'offre, il va sans dire, aucun secours aux défendeurs. Il ne s'agit certes pas, dans le cas présent, de nouvelles du jour ou de faits divers ayant le caractère d'informations de presse. Les articles 17 et 18 de la Loi du droit d'auteur ne sont guère explicites sur le sujet; il n'y est fait aucune mention de nouvelles du jour ni de faits divers. Le sous-paragraphe (i) du premier paragraphe de l'article 17 qui contient peut-être les seules dispositions que les défendeurs pourraient invoquer ne me paraît pas s'appliquer à la reproduction intégrale d'un article du genre de celui qui nous occupe. Le sous-paragraphe (y) du premier paragraphe de l'article 17 de la loi qui dispose de la publication dans un journal d'un compte rendu d'une conférence et l'article 18 qui a trait aux rapports dans la presse de discours politiques ne peuvent évidemment être d'aucune assistance aux défendeurs.
230 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1044 1943 Je crois opportun de citer un passage de l'ouvrage de .-..-r ZAMACOrS Copinger (The Law of Copyright, 7e édition, p. 187), qui v. DOIIVILLE a quelque rapport avec la question à l'étude: ET AL. There can be no copyright in news as such, but only in the literary' Angers J. form given to news (Per North, J., Walter v. Steinkopfj, 1892, 3 Ch. 489). The Courts have, nevertheless, in more than one case protected news agencies from having information obtained by them disseminated in breach of faith (Exchange Telegraph Co. v. Gregory, 1896, 1 Q.B. 147; Exchange Telegraph Co. v. Central News, 1897, 2 Ch. 48; ante, p. 37). L'auteur fait ici un exposé des faits et un résumé des plaidoiries dans la cause de Walter v. Steinkopff et il ajoute: North, J., in delivering judgment, said that it was said that there was no copyright in news, but there was or might be in a particular form of language or modes of expression by which information was conveyed, and not the less so because the information might be with respect to the current topics of the day. With _ regard to the quality of the matter copied, the paragraphs pirated were taken in their entirety for the very purpose far which they were used in The Times, viz., to convey information to the readers of the paper. It was nota case of the selection of a part or quotation, or an extract. Comparant ensuite les dispositions de la loi anglaise du droit d'auteur avec celles de la Convention, Copinger écrit ceci (p. 188) : The English law gives a larger protection to newspaper articles than the Rome Convention requires, for under that Convention (article 9) no protection is given to news of the day, and it is provided that articles on current economic, political or religious topics may be reproduced by the Press unless the reproduction is expressly reserved, provided that the source is clearly indicated. Under English law all such matters are protected without conditions if they are the subject of copyright at all. Huard et Mack, dans leur Répertoire de législation, de doctrine et de jurisprudence en matière de propriété litté-raire et artistique (édition de 1909), exposant la doctrine en France qui, ayant également son fondement dans la Convention internationale de Berne, est dans son ensemble semblable à la nôtre, font les commentaires suivants j'omets les références aux arrêts en vue de la brièveté,—qui me paraissent au point (pp. 156 et 157) : 442. Les dispositions de la loi de 1793 s'appliquent aux journaux et feuilles périodiques, comme toute autre oeuvre littéraire. 443. Un journal est une propriété littéraire composée soit d'articles-nouvelles, soit d'articles de politique ou de littérature. Les premiers, par leur nature, et lorsqu'ils ne contiennent que l'annonce des faits, appar-tiennent au domaine public; les seconds, qui sont l'oeuvre de l'esprit et dont la rédaction est pour les journaux l'objet d'une dépense souvent considérable, forment une propriété privée.
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 231 444. La propriété d'un journal se compose non seulement des articles 1943 de rédaction, mais encore de la correspondance étrangère qui, étant le fruit Zn n de travaux rémunérés, ne peut être reproduite sans porter atteinte aux NI cols v. droits du journal. DOUVILLE 445. La reproduction, dans un but de polémique, et pour en faire le ET AL. texte d'une discussion, en dehors de tout but mercantile, d'articles publiés Angers J. dans d'autres feuilles périodiques, ne saurait, surtout en l'absence de toute réserve insérée par elles, motiver une poursuite en. contrefaçon. La repro- duction des articles de polémique étant à bon droit dans les habitudes de la presse, surtout en matière politique, la bonne foi du_journal poursuivi se trouve établie par le fait, et la reproduction ne saurait par suite tomber sous l'application des art. 425-427 du Code pénal. Plus loin Huard et Mack ajoute (p. 166) : 477. Est licite la reproduction, faite par un journal, dans un but de polémique, d'articles politiques parus dans un autre journal. Je crois devoir conclure de ce qui précède que l'on doit répondre à la première question dans la négative et déclarer que l'article de Zamacoïs n'étant pas un article d'actualité de discussion économique ou politique ne pouvait être reproduit par Le Bien Public sans l'autorisation de l'auteur. La seconde question qui se pose est celle de savoir si un rédacteur ou un collaborateur du Bien Public pouvait, en critiquant ou commentant l'article de Zamacoïs, le repro-duire en entier. Copinger n'apporte rien de bien intéressant sur le sujet. Après avoir, dans un paragraphe portant en marge l'indication "Quality taken only slight test", analysé trois déci-sions, les deux premières de lord Cottenham dans les causes de Bramwell v. Halcomb (1) et de Saunders v. Smith (2) et la troisième de la Cour d'appel dans la cause de Hawkes & Son Ltd. v. Paramount Film Service Ltd. (3), lesquelles déterminaient ce, que l'on doit considérer être une partie importante ("substantial") d'un ouvrage aux termes de la Loi du droit d'auteur anglaise "Copyright Act 1911", 1 et 2 Geo. V, chap. 46, conclut dans le paragraphe suivant, intitulé dans la marge "Fair user", en ces termes (p. 113) : It would appear, however, that "substantially" is not to be considered as co-extensive with "fair user" under the old law, since it is expressly provided by section 2, sub -section 1 (i), that "any fair dealing with any work for the purposes of private study, research, criticism, review, or newspaper summary" shall not constitute an infringement of copyright, and it would seem to follow that the Act contemplates that such fair dealing apart from this provision might constitute an infringement of copyright, and that it may be fair dealing to take a substantial part. (1) (1836) 3 My. & Cr. 737. (2) (1838) 3 My. & Cr. 711. (3) (1934) Ch. 593.
232 EXCHEQUER COURT OF CANADA « [1944 1943 Dans le paragraphe suivant ayant en marge la note ZAMACOIS "Section 2, subsection (i)", qui est une référence à la Loi Do v. rx du droit d'auteur, Copinger s'exprime ainsi (p. 114) : ET AL. The principle of this and similar cases has been carried out in that Angers J. proviso by limiting the right to fair user to purposes which in their nature are likely to differ from those of the works from which extracts are taken, but, no doubt, in considering whether a dealing with a particular work was fair, it would have to be considered whether any competition was likely to exist between the two works; a newspaper summary of an article [in a rival paper would probably be restrained. In fact the limitation of purposes in regard to which the defence of fair dealing can be set up has probably not altered the law, but it has prevented any attempt to extend the defence to new purposes. L'auteur commente ensuite la décision du juge Kay dans la cause de Ager v. Collingridge (1), qui n'offre aucun intérêt quelconque en l'espèce, et il termine ses remarques ainsi (p. 115) : If a substantial part of a work is taken therefore, the defendant must show that it was taken for one of the purposes indicated in the proviso. Even this will not be sufficient if the dealing is not fair, Usually, however, these two questions will be intermingled since a publication under the guise of criticism or summary may be found really to be an unfair taking of the complete work for a competitive purpose. The meaning of the expressions "research," "criticism," and "review," seems to require no further consideration. Au point de vue critique littéraire j'avouerai que les commentaires de Copinger sont plutôt minces. Peut-être est-ce au fait que la critique littéraire en Angleterre n'est pas un genre aussi répandu qu'en France. Sous ce rapport il est plus instructif de consulter les auteurs français. Huard et Mack, comme nous l'avons vu, expriment l'opinion, à la page 156 de leur ouvrage précité, qu'un journal est une propriété littéraire composée soit d'articles-nouvelles, soit d'articles de politique ou de litté-rature, dont les premiers, par leur nature, quand ils ne contiennent que l'annonce des faits, appartiennent au domaine public, et dont les seconds, qui sont l'ceuvre de l'esprit, forment une propriété privée. Au soutien de leur opinion les auteurs citent deux arrêts, qu'il est intéressant de consulter. Eugène Pouillet, dans son Traité théorique et pratique de la propriété littéraire et artistique émet la même opinion, quand il dit (p. 45, n° 44) : (1) (1886) 2 T.L.R., 291.
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 233 Articles de journaux.—Il résulte de tout ce qui précède qu'un article 1943 de journal constitue au profit de son auteur une propriété tout aussi légitime, tout aussi respectable qu'un ouvrage de longue haleine. L'étendue, ZAMACOrs V. l'importance de l'oeuvre ne comptent pour rien dans l'appréciation du droit. Douvu.LE Il faut seulement que cet article puisse être considéré comme une produc-ET AL. tion de l'esprit et témoigne d'un effort, d'un travail quelconque. Une Angers J. simple annonce, une dépêche télégraphique, qui n'ont d'autre but et d'autre effet que de faire connaître au public un produit ou une nouvelle, ne semblent pas pouvoir être assimilées à une oeuvre littéraire. Une fois livrées au public, elles lui appartiennent tout entières et le journaliste qui les a émises le premier n'en peut rien retenir. Le paragraphe suivant (n° 45), qu'il serait trop long de reproduire, cite quelques arrêts à l'appui de ces commen-taires. Il est universellement reconnu que la reproduction par un journal dans un but de polémique ou de discussion d'articles parus dans un autre journal est licite; voir Huard et Mack, op. cit., p. 157, n° 445 et p. 166, n° 477. Le droit de citation est permis par la loi; le refuser aurait pour effet de supprimer le droit de la critique littéraire. Cependant un critique ne peut, sans se rendre coupable de contrefaçon, reproduire la totalité de l'oeuvre critiquée, sans autorisation de l'auteur: voir Huard et Mack, op. cit., p. 181, n°R 528 et 531; p. 180, n° 526; p. 193, n° 569; p. 593, n° 569 bis; p. 194, n° 572; Pouillet, nos 511, M2 et 513. Ces notes étant déjà longues, je me bornerai à citer les numéros 528, 531, 569 et 569 bis de Huard et Mack, y compris les références qui se trouvent à la suite de chacun de ces numéros, et le numéro 511 de Pouillet: Huard et Mack 528. Si toute citation ou publication d'extraits d'une oeuvre littéraire ne saurait constituer une atteinte aux droits de l'auteur, cependant il y a contrefaçon lorsqu'une pièce de vers formant par elle-même un tout est extraite d'un ouvrage et insérée dans un recueil composé de morceaux empruntés de la même manière à différents auteurs. Trib. de la Seine, 15 décembre 1882, aff. Ratisbonne c. Gédalge (le Droit, 16 décembre 1882). 531. Un critique ne peut, sans se rendre contrefacteur, reproduire la totalité de l'oeuvre critiquée. C. de Paris, 24 mai 1845, aff. Sagnier et Bray c. Mallet (Blanc, p. 180). Voir également: C. de Paris, 26 décembre 1834, aff. Fayet c. Journal des connaissances usuelles (Gastambide, p. 110). 569. Si l'éditeur d'une revue ou d'un journal périodique peut, sans se rendre coupable de contrefaçon, donner des extraits d'un recueil ou d'un récit publié par un autre, soit pour en faire l'éloge ou la critique soit pour appeler sur lui l'attention du public, il n'en saurait plus être ainsi lorsque l'éditeur de cette revue ou de ce journal reproduit textuellement, dans
234 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1944 1943 l'intérêt exclusif de son oeuvre, soit la totalité, soit les parties notables ou ._„_.. essentielles de cet écrit, de manière à porter préjudice à l'auteur ou à ZAMACOIs V. l'éditeur. L'indication de la source ne suffit pas pour faire disparaître la DOIIVILLE contrefaçon. ET AL. C. de Paris, 24 décembre 1859, aff. Charpentier c. Lecompte (Pat., 1860, p. 31, et 1859, p. 271). Angers J. 569 bis. Le droit de critique littéraire comprend le droit de citation des passages de l'oeuvre critiquée, et le nombre ou l'importance des citations ne modifie pas le caractère de la publication, si celles-ci ne servent qu'à concourir à. la démonstration de la critique entreprise. Mais il y a contrefaçon littéraire ai sous prétexte de critique on s'approprie en tout ou en partie le travail d'autrui, si on publie soit en entier, soit en abrégé les passages les plus saillants du livre critiqué, de manière à en donner une notion plus ou moins complète. Il en est ainsi quand même le nom de l'auteur critiqué serait cité dans l'oeuvre de critique. Par contre, n'est pas une contrefaçon le livre les passages empruntés à l'oeuvre d'autrui sont mêlés les uns aux autres, sans lien ni cohésion, de telle sorte qu'il soit impossible de saisir l'intrigue et les caractères étudiés dans cette oeuvre d'autrui. Trib. corr. Seine, 24 fév. 1897, aff. Fasquelle c. Laporte (le Droit, 25 fév, 1897). Pouillet 511. Quid du droit de citation? Si la loi punit la contrefaçon partielle, elle n'interdit pas le droit de citation. II est clair que citer un passage d'un ouvrage, soit pour le discuter, soit pour en tirer un argument au profit d'une opinion ou d'une doctrine que l'on émet, est légitime et légal. Le droit, réservé à l'auteur, tout exclusif qu'il est, ne saurait aller jusqu'à empêcher cela. La citation non seulement ne cause aucun préjudice à l'auteur cité, mais même ne porte aucune atteinte à sa propriété privative; elle y rend bien plutôt hommage, par cela même qu'elle la reconnaît et la proclame. Refuser le droit de citation, ce serait supprimer le droit, pourtant inviolable, de la critique littéraire. Il va de soi, ,cependant, que, sous prétexte de citation, il n'est pas permis de contrefaire; et ce serait assurément contrefaire que d'abuser des citations au point de copier l'ouvrage tout entier, ou dans sa majeure partie, et de faire, de ces citations ainsi habilement rapprochées, une sorte d'abrégé de l'ouvrage original. 11 peut y avoir quelquefois des questions de fait délicates; c'est aux magistrats à les apprécier; ils doivent toutefois tenir compte, en pareille matière, de la nature de l'ouvrage sont réunies ces citations et du but que l'auteur s'est proposé, indulgents s'ils reconnaissent une oeuvre de critique sérieuse, impitoyables, s'ils ne découvrent qu'un stratagème pour s'approprier le travail d'autrui. MM. Relie et Chauveau disent dans le même sens: `Le critique qui, en annonçant qu'il veut examiner un livre, commencerait par le reproduire et le ferait suivre de ses observations, ne ferait pas une simple citation, mais bien une reproduction préjudiciable (Relie et Chauveau, t. 6, p. 37," L'indication du nom de l'auteur et de la source, si elle peut dans certains , cas démontrer la bonne foi du contre-facteur, ne suffit pas pour faire disparaître la contrefaçon: Huard et Mack, op. cit., p. 193, n° 569.
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 235 Après étude de la loi, des auteurs et de la jurisprudence, 1943 j'en suis venu à la conclusion qu'il faut répondre négative- ZAMACOIS ment à la deuxième question. Le Bien Public n'avait pas, Dovv L à mon avis, le droit de reproduire avec les commentaires ETAL de son collaborateur, Léon Dufrost, le texte complet de Angers J. l'article de Zamacoïs. En ce faisant il outrepassait le droit de citation reconnu par la loi. L'ignorance dans laquelle pouvaient être les défendeurs du fait que l'article de Zamacoïs était protégé par un droit d'auteur ne peut être une excuse pour sa violation: voir Copinger, ip. cit., p. 110; 7 Halsbury's Laws of England, 2e éd., p. 587, n° 911; Ladas, The International Protection of Literary and Artistic Property, t. 2, p. 816; Huard et Mack, op. cit., p. 595, n° 664 bis. L'article 22 de la Loi du droit d'auteur, cependant, décrète ce qui suit: Lorsque, dans une action exercée pour violation du droit d'auteur sur une oeuvre, le défendeur allègue pour sa défense qu'il ignorait l'existence de ce droit, le demandeur ne pourra obtenir qu'une ordonnance de cessation ou d'interdiction par rapport à ladite violation, si le défendeur prouve que, au moment de la commettre, il ne savait et n'avait aucun motif raisonnable de soupçonner que l'oeuvre faisait encore l'objet d'un droit d'auteur. - Toutefois, si lors de la violation, le droit d'auteur sur cette oeuvre était dûment enregistré sous l'empire de la présente loi, le défendeur sera considéré comme ayant eu un motif raisonnable de soupçonner que le. droit d'auteur subsistait sur cette oeuvre. Le droit d'auteur du demandeur n'était pas enregistrée; cette formalité, au reste, n'est pas nécessaire pour l'existence du droit d'auteur. Les défendeurs ont soutenu qu'ils ignoraient l'existence d'un droit d'auteur sur un article du genre de celui du demandeur et qu'ils croyaient qu'en vertu de l'article 9 de la Convention cet article pouvait être reproduit. Etaient-ils justifiables d'ignorer l'existence de ce droit d'auteur? Non, s'il faut s'en tenir à l'interprétation plutôt étroite donnée par les tribunaux à l'article 8 de la Loi du droit d'auteur anglaise (Copyright Act, 1911, 1 & 2 Geo. V, chap. 46) et à l'article 22 de notre loi qui y correspond, avec cette différence cependant que nos législateurs, après avoir copié mot à mot le texte de l'article 8, à l'exception des mots "or interdict" après le mot "injunction" que l'on a retranchés, ont ajouté le deuxième paragraphe commençant clans le texte français 20859-1a
236 EXCHEQUER COURT OF CANADA [ 1944 1943 par le mot "Toutefois" et dans le texte anglais par le mot zA ors "Provided". Cette interprétation de l'article 8 de la loi Dou u anglaise et de l'article 22 de notre loi faite par les tribunaux ET A L . a considérablement restreint la portée de ces articles quant Angers J. à ce qui concerne la libération du contrefacteur du recours en dommages-intérêts; voir à ce sujet les décisions sui-vantes: John Lane, The Bodley Head Ltd. v. Associated Newspapers Limited (1) ; Byrne v. Statist Company (2) ; Gribble v. Manitoba Free Press Co. Ltd. (3) ; Swinstead v. R. Underwood & Sons, Macguillivray Copyright Cases, 39. Voir aussi Copinger on the Law of Copyright, 7e éd., p. 160. Je crois opportun de citer un extrait des notes de l'honorable juge Dennistoun, de la Cour d'appel du Manitoba, dans la cause de Gribble v. Manitoba Free Press Co. Ltd. (p. 579) : Sec. 22 of the Act is the only section behind which the defendants can take shelter, and it is under the provisions of this section that the learned trial Judge has passed in their favour. It says: (Suit le texte de l'article.) Par. 4 of the stated case, which was submitted by agreement of counsel, is as follows: 4. At the time of the publishing of the said article by the defendant, the defendant had received no actual notice that copyright in the said article was claimed by any person, except such notice as may have been effected by the nature of the article and the publishing of the plaintiff's name at the head of the said article as it appeared in The Ottawa Journal. The trial Judge, commenting on this, says: I am satisfied that the publishers of the defendant newspaper were not aware at the time of publication by them of the plaintiff's copyright and had no reasonable grounds for suspecting that copyright existed. Sec. 8 of the Imperial Act of 1911 is the source and origin of our sec. 22 and is inpari materia with it. It is discussed by Copinger (6th ed.) at p. 171 in a way which commends itself as sound reasoning. In what cases can the section apply? What "reasonable ground" can a direct copyist have for not suspecting the work he copies to be the subject of copyright? Copinger suggests, and I agree, that the proper attitude of mind of a copyist toward a work that he copies is that copyright in the latter exists, unless he has evidence to the contrary. The only grounds for not suspecting copyright appear to be either (a) that the period of copyright protection has run out; (b) (1) (1936) 1 All E.R., 379. (2) (1914) 1 K.B., 622. (3) (1931) 3 W.W.R., 579.
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 237 that he thinks that the work is of such a character that it ought 1943 not to be a subject of copyright; or (e) that the work is a foreign ZAMACOIs work. (P. 173.) V. * * * * * DOIIVILLE The article in question is of a literary and biographical character and-ET AL. should have at once suggested to The Manitoba Free Press that it was Angers J. subject to copyright. Despite the finding of the trial Judge, I do not think The Manitoba Free Press can rely on ignorance as a justification, but is fairly and properly testing its right under article 9 of the Berne Convention. Si les défendeurs ont lu la chronique "Vérités et Bobards" dans le journal Candide, portant sous le titre et sous le texte le nom du demandeur, ils auraient savoir que cette oeuvre était protégée par un droit d'auteur. S'ils ont cru que la chronique en question était aux termes du paragraphe (2) de l'article 9 de la Convention un article d'actualité de discussion économique ou politique, ils se sont trompés; ils l'ont fait de bonne foi, comme je l'ai déjà dit,. mais leur bonne foi, malheureusement, ne les excuse point; personne n'est censé ignorer la loi. La prétention des défendeurs que la Convention de Berne est aujourd'hui inexistante à cause de la guerre, sur laquelle, je dois dire, on n'a pas insisté, n'est pas soutenable. Je ne crois pas qu'il y ait lieu d'ordonner la remise au demandeur des quelques exemplaires du numéro du journal Le Bien Public dans lequel a été reproduit l'article du demandeur, qui sont restés en la possession des défendeurs. Comme l'ont déclaré les défendeurs, ces exemplaires ne sont pas en vente et ils font partie des archives du journal., Vu qu'il s'agit d'un acte isolé, qui n'est pas susceptible de se répéter, je ne pense pas qu'il y ait lieu d'accorder une ordonnance d'interdiction. Il est raisonnable de croire que les défendeurs ne projettent point de reproduire de nouveau la chronique du demandeur non plus qu'aucune autre chro-nique publiée par lui dans le journal Candide sous le même titre "Vérités et Bobards". Le motif invoqué pour le refus de semblable ordonnance dans les causes de Gribble v. Manitoba Free Press Co. Ltd. (ubi supra) et Byrne v. Statist Company (ubi supra) me semble s'appliquer en l'espèce. Il me paraît à propos de citer à ce sujet un passage des notes de l'honorable juge Prendergast, juge en chef du Manitoba, dans la cause de Gribble v. Manitoba Free Press Co. Ltd. (p. 576) : 20859-1ia
238 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1944 1943 This only means, however, that the Court is not limited in this case to injunction, not that injunction could not be granted. But I agree with ZAMAcOIS v. the learned trial Judge that this is not a case for such redress. The Douvnau appellant would have to show, which he has not done, that there is a ET AL' probability of future damage (Borthwick v. Evening Post, 1888, 37 Ch. fingers J D. 449, 57 L.J. Ch. 406) or that the defendant is likely to continue the infringement: Baily v. Taylor (1829) 1 Russ. & My. 73, 8 L.J. (O.S.) Ch. 49, and Cox y. Land and Water Journal Co. (1869) L.R. 9 Eq. 324, 39 L.J. Ch. 152. Voir aussi Ladas, op. cit., p. 823. Vu que j'en suis arrivé à la conclusion que le demandeur est titulaire du droit d'auteur de la chronique intitulée "Vérités et Bobards" publiée dans le journal Candide et reproduite dans le journal des défendeurs, Le Bien Public, que les défendeurs ont violé ce droit d'auteur et qu'ils doivent être tenus responsables des dommages que la reproduction de ladite chronique a pu causer au demandeur, si dommages il y a, il y aura renvoi de la cause au registraire, conformément aux dispositions de la règle 177 des règles et ordonnances de cette Cour afin d'établir le montant des profits qu'ont pu réaliser les défendeurs par la reproduction de ladite chronique, si profits il y a eu, de déterminer le quantum des dommages occasionnés par ce fait au deman-deur et de faire rapport à la Cour. Les dépens de ce renvoi sont réservés pour adjudication ultérieure. Je ferai observer incidemment que la seule preuve. concer-nant les profits que les défendeurs auraient réalisés par la reproduction de l'article du demandeur consiste dans les témoignages des défendeurs eux-mêmes. Cette preuve révèle que le tirage de leur journal n'a pas augmenté à la suite de cette reproduction et que celle-ci n'a point rapporté de profits additionnels. Aucune preuve n'a été faite de la part du demandeur pour démontrer que la publication de _ l'article en question avait été une source de bénéfices pour les défendeurs. Il est à peine nécessaire de noter que le demandeur n'a pas droit à des dommages-intérêts exemplaires ou punitifs, ceux-ci n'étant accordés que si la violation du droit d'auteur a été accompagnée de fraude ou de malice, 'ce qui n'est pas le cas en l'espèce. La bonne foi des défendeurs me paraît indiscutable. Relativement aux conditions dans lesquelles des dommages-intérêts de cette nature peuvent être accor-dés, il est intéressant de consulter les arrêts et les auteurs
Th Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA (239, suivants: Shackell v. Drapeau et al. (1) ; Brossoit v. Tur- 1943 cotte (2) ; Noyes v. La Cie d'Imprimerie et de Publication ZAMAcois (3) ; Chalin v. Gagnon (4) ; Girard v. Tremblay (5) ; Ed. Do v ' Fuzier-Herman, Code civil annoté, t. 4, n° 398 et seq.; Colin ET AL. et Capitant, Droit civil français, t. 2, p. 187, n° 198, para. Angers J. A; Salmond on The Law of Torts, 7e éd., p. 144. Vu que le demandeur n'a prouvé ni perte de profits, ni dommages-intérêts et que je doute qu'il réussisse à faire la preuve de l'une ou des autres, je crois à propos de réserver ma décision quant aux frais; le procureur du demandeur pourra revenir devant moi, après avis régulier au procureur des défendeurs, pour demander une adjudication sur les frais, dès que le registraire aura rendu sa décision relative- ment à la perte de profits ou au montant des dommages subis par le demandeur ou dès que le procureur du deman- deur aura décidé de ne pas exercer son recours sur le renvoi de la cause au registraire. Judgment accordingly.
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