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[2017] 2 R.C.F. 165

T-2368-14

2016 CF 886

Le procureur général du Canada (demandeur)

c.

Le commissaire à l’intégrité du secteur public du Canada (défendeur)

Répertorié : Canada (Procureur général) c. Canada (Commissaire à l’intégrité du secteur public)

Cour fédérale, juge Elliott—Ottawa, 25 novembre 2015 et 29 juillet 2016.

Éthique — Contrôle judiciaire visant une décision du commissaire à l’intégrité du secteur public du Canada selon laquelle l’art. 23(1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (la Loi) ne s’appliquait pas pour l’empêcher de tenir une enquête sur une divulgation touchant la Section de l’air d’Ottawa (SAO) de la Sous-direction des services de l’air (SDSA) de la GRC — L’interprétation de l’art. 24(1) par le commissaire était également contestée — Ce contrôle judiciaire exigeait, pour la première fois, un examen de l’art. 23(1) de la Loi, qui restreint le pouvoir du commissaire de donner suite à une divulgation si une personne ou un organisme est saisi de l’objet de celle-ci au titre d’une autre loi fédérale — En novembre 2014, après avoir examiné une divulgation touchant la SAO de la SDSA, le commissaire a conclu à l’existence d’un acte répréhensible et en a signalé les détails au Parlement dans un rapport d’acte répréhensible — Le demandeur a affirmé, entre autres, que le défendeur n’avait pas le pouvoir d’enquêter sur la divulgation parce que Transports Canada (TC) était déjà saisi de l’objet de la divulgation en vertu d’une autre loi et que par conséquent, selon l’art. 23(1), il n’avait ni le pouvoir ni la compétence d’examiner la divulgation et qu’il a agi sans compétence en vertu de l’art. 24(1) — Il s’agissait principalement de savoir si l’interprétation des art. 23(1) et 24(1) de la Loi par le défendeur était raisonnable — La Loi est une loi sur les lanceurs d’alerte conçue pour permettre aux employés du gouvernement fédéral de signaler des actes répréhensibles dans la fonction publique sans crainte de représailles — Le terme « saisi » à l’art. 23(1) de la Loi doit tirer son sens du contexte et ne peut pas être interprété si largement qu’il frustre l’esprit et l’intention de la loi — Le contexte et le but des activités de TC étaient totalement différents de ceux de l’analyse et de l’enquête sur les allégations contenues dans la divulgation menées par le défendeur au titre de la Loi — TC menait un examen d’ensemble de la SDSA et non un examen propre au SAO — Le défendeur a interprété de façon raisonnable les activités de TC en concluant que TC n’agissait pas au titre d’une autre loi fédérale — En ce qui concerne l’interprétation de l’art. 24(1) de la Loi, cette disposition fournit au défendeur un examen a posteriori des activités d’une autre instance — D’après tous les renseignements disponibles, il était raisonnable pour le défendeur de conclure que TC avait terminé son évaluation en décembre 2013 ou en janvier 2014 et qu’il était libre de décider si le travail avait été fait de manière adéquate — Le défendeur a décidé de ne pas mettre un terme à son enquête compte tenu de la conclusion préliminaire d’acte répréhensible touchant des questions de sécurité publique en aviation — L’art. 24(1)f) de la Loi permet au défendeur d’exercer son pouvoir discrétionnaire s’il estime que cela est opportun pour tout autre motif justifié — Demande rejetée.

Il s’agissait d’une demande de contrôle judiciaire visant une décision du commissaire à l’intégrité du secteur public du Canada selon laquelle le paragraphe 23(1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (la Loi) ne s’appliquait pas pour l’empêcher de tenir une enquête sur une divulgation touchant la Section de l’air d’Ottawa (SAO) de la Sous-direction des services de l’air (SDSA) de la GRC. L’interprétation du paragraphe 24(1) par le commissaire était également contestée. Ce contrôle judiciaire exigeait, pour la première fois, un examen du paragraphe 23(1) de la Loi, qui restreint le pouvoir du commissaire de donner suite à une divulgation si une personne ou un organisme est saisi de l’objet de celle-ci au titre d’une autre loi fédérale.

En novembre 2014, après avoir examiné une divulgation reçue en janvier 2013 touchant la SAO de la SDSA, le commissaire a conclu à l’existence d’un acte répréhensible et en a signalé les détails au Parlement dans un rapport d’acte répréhensible, comme il était tenu de le faire. Il a conclu que des pilotes avaient fait de fausses entrées dans leurs carnets de route d’aéronef. Le commissaire a conclu qu’en raison de l’information incorrecte entrée dans les carnets de route, la GRC ne pouvait garantir que les aéronefs avaient été utilisés en respectant les limites de masse et de centrage et a également conclu, après avoir examiné plusieurs carnets de route, que des aéronefs avaient volé avec un poids excédentaire. Le commissaire a conclu qu’il y avait eu contravention à l’alinéa 602.07a) du Règlement de l’aviation canadien parce que les aéronefs doivent être utilisés conformément aux limites d’utilisation précisées dans le manuel de vol. Son rapport précise qu’il a été satisfait de la réponse de la GRC et que, même si les infractions n’ont pas mis en danger la vie, la santé ou la sécurité de personnes, il y a eu contravention au règlement et il s’agissait d’un acte répréhensible selon la Loi.

Le demandeur a affirmé, entre autres, que le défendeur n’avait pas le pouvoir d’enquêter sur la divulgation parce que Transports Canada (TC) était déjà saisi de l’objet de la divulgation en vertu d’une autre loi et que par conséquent, il n’avait ni le pouvoir ni la compétence d’examiner la divulgation et qu’il a agi sans compétence en vertu du paragraphe 24(1) en n’exerçant pas son pouvoir discrétionnaire de ne pas enquêter sur la divulgation. Pour sa part, le défendeur a fait valoir qu’il avait droit à la déférence dans son interprétation et que son interprétation de la Loi était raisonnable.

Il s’agissait principalement de savoir si l’interprétation des paragraphes 23(1) et 24(1) de la Loi par le défendeur était raisonnable.

Jugement : la demande doit être rejetée.

Les paragraphes 23(1) et 24(1) de la Loi ont été interprétés selon l’esprit et les objets de la Loi. La Loi est une loi sur les lanceurs d’alerte conçue pour permettre aux employés du gouvernement fédéral de signaler des actes répréhensibles dans la fonction publique sans crainte de représailles. Compte tenu de l’importance de la législation sur les lanceurs d’alerte pour [traduction] « dénoncer et punir les actes répréhensibles dans le secteur public », le terme « saisi » doit tirer son sens de ce contexte et ne peut pas être interprété si largement qu’elle frustre l’esprit et l’intention de la loi. Les dispositions sur la divulgation de la Loi visent à découvrir des actes répréhensibles passés, à les porter à l’attention du public et à mettre en place des mesures correctives pour éviter que ces actes ne se reproduisent. Comme l’indiquent le plan de surveillance et l’évaluation de consultation, TC mettait l’accent sur la recherche de lacunes dans les procédures existantes et l’offre de conseils en lien avec la réglementation à venir. Le contexte et le but des activités de TC étaient totalement différents de ceux de l’analyse et de l’enquête sur les allégations contenues dans la divulgation menées par le commissaire au titre de la Loi. TC menait un examen d’ensemble de la SDSA et non un examen propre au SAO. Le fait que le résultat final — les mesures prises par la GRC sur l’avis de TC — a été jugé satisfaisant par le défendeur ne modifiait ni n’affectait la légitimité de son enquête sur les actes répréhensibles. Le dépôt du rapport au Parlement constitue un élément important du processus d’alerte. Le législateur ne peut pas avoir voulu que le paragraphe 23(1) soit interprété de manière tellement large qu’une procédure lancée plusieurs mois après que le défendeur a commencé à donner suite à une divulgation puisse suffire à empêcher le défendeur de déterminer si une allégation grave d’actes répréhensibles passés est avérée et, si c’est le cas, de les rendre publics. Le défendeur a interprété de façon raisonnable les activités de TC en concluant que TC n’agissait pas au titre d’une autre loi fédérale. Même en jugeant raisonnable l’interprétation très large faite par le demandeur, l’interprétation faite par le défendeur l’était tout autant, en raison de la nature importante de ses obligations au titre de la Loi. Il était raisonnable de conclure qu’un rapport privé, commandé par l’auteur des actes répréhensibles allégués, ne peut supplanter le travail du défendeur. Ceci est particulièrement vrai lorsque le rapport privé ne comporte aucun élément de responsabilité publique.

En ce qui concerne l’interprétation du paragraphe 24(1) de la Loi, cette disposition fournit au défendeur un examen a posteriori des activités d’une autre instance. Il fallait établir à quel moment TC a cessé de traiter des questions examinées en vertu du plan de surveillance. Tout indiquait que TC a estimé son travail terminé au moment où l’évaluation de consultation contenant les conclusions et les recommandations a été préparée et présentée. D’après tous les renseignements disponibles, il était raisonnable pour le défendeur de conclure que TC avait terminé son évaluation en décembre 2013 ou en janvier 2014 et qu’il était libre de décider si le travail avait été fait de manière adéquate. Le défendeur a décidé de ne pas mettre un terme à son enquête compte tenu de la conclusion préliminaire d’acte répréhensible touchant des questions de sécurité publique en aviation. Sinon, il était entièrement raisonnable pour le défendeur, compte tenu de son expertise, de déterminer que l’intérêt public commandait de mener l’enquête jusqu’à sa conclusion. L’alinéa 24(1)f) de la Loi permet au défendeur d’exercer son pouvoir discrétionnaire s’il estime que cela est opportun pour tout autre motif justifié.

Une autre analyse des articles 23 et 24 de la Loi a été effectuée, en particulier, puisque les parties n’ont pas abordé le fait que le défendeur était saisi d’une divulgation d’actes répréhensibles à l’endroit du SAO longtemps avant que le demandeur n’invite TC à examiner les opérations de la SDSA. L’article 23 a une application relativement étroite et ne s’appliquait pas dans la situation. Dans ce cas, le paragraphe 24(1) de la Loi indiquait ce que devait faire le défendeur lorsqu’une autre instance commence à donner suite à l’objet après qu’il a lui-même entrepris de l’instruire au titre de l’article 23. Par conséquent, le défendeur a raisonnablement établi son opinion en vertu de l’article 24 après avoir reçu un complément d’information, puis a fourni de bonnes raisons de refuser de mettre fin à l’enquête sur la divulgation.

LOIS ET RÈGLEMENTS CITÉS

Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, art. 12.

Loi sur l’aéronautique, L.R.C. (1985), ch. A-2, art. 4.2, 8.7, 26.

Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, L.C. 2005, ch. 46, préambule, art. 8a), 23, 24, 26.

Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18, 18.1.

Règlement de l’aviation canadien, DORS/96-433, art. 602.07a).

Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, règle 306.

JURISPRUDENCE CITÉE

DÉCISIONS APPLIQUÉES :

Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 R.C.S. 654; Association des universités et collèges du Canada c. Canadian Copyright Licensing Agency (Access Copyright), 2012 CAF 22; Henri c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1141; Air Canada c. Administration portuaire de Toronto, 2011 CAF 347, [2013] 3 R.C.F. 605; Morneault c. Canada (Procureur général), [2001] 1 C.F. 30 (C.A.); Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339; Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190; Conseil des Canadiens avec déficiences c. VIA Rail Canada Inc., 2007 CSC 15, [2007] 1 R.C.S. 605; Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27; Canada (Procureur général) c. Stanford, 2014 CAF 234; Agnaou c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 29, [2016] 1 R.C.F. 322; Detorakis c. Canada (Procureur général), 2010 CF 39.

DÉCISIONS EXAMINÉES :

Canadian Union of Public Employees, Local 2434 v. Port Hawkesbury (Town), 2011 NSCA 28, 301 N.S.R. (2d) 123; McLean c. Colombie-Britannique (Securities Commission), 2013 CSC 67, [2013] 3 R.C.S. 895; Swarath c. Canada (Procureur général), 2015 CF 963.

DÉCISIONS CITÉES :

Decor Grates Incorporated c. Imperial Manufacturing Group Inc., 2015 CAF 100, [2016] 1 R.C.F. 246; Agnaou c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 30; Larny Holdings Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé), 2002 CFPI 750, [2003] 1 C.F. 541.

DOCTRINE CITÉE

Sullivan, Ruth. Sullivan on the Construction of Statutes, 5e éd. Markham, Ont. : LexisNexis Canada, 2008.

DEMANDE de contrôle judiciaire visant une décision du commissaire à l’intégrité du secteur public du Canada selon laquelle le paragraphe 23(1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles ne s’appliquait pas pour l’empêcher de tenir une enquête sur une divulgation touchant la Section de l’air d’Ottawa de la Sous-direction des services de l’air de la GRC, et contestant l’interprétation faite par le commissaire du paragraphe 24(1). Demande rejetée.

ONT COMPARU

Patrick Bendin et Peter Nostbakken pour le demandeur.

Y. Monica Song et James M. Wishart pour le défendeur.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Le sous-procureur général du Canada pour le demandeur.

Dentons Canada, S.E.N.C.R.L., Ottawa, pour le défendeur.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement et du jugement rendus par

La juge Elliott :

I.          Aperçu

A.        Loi en cause

[1]        En 2007, le Parlement a adopté la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, L.C. 2005, ch. 46 (la LPFDAR [ou la Loi]), communément appelée la loi sur les « lanceurs d’alerte ». La LPFDAR a institué le Commissariat à l’intégrité du secteur public pour recueillir les divulgations d’actes répréhensibles dans le secteur public.

[2]        Le commissaire a l’obligation d’examiner les divulgations. Lorsque le commissaire détermine qu’il existe des motifs suffisants pour intervenir, il a l’obligation de mener une enquête sur ces divulgations. Le commissaire a l’obligation de présenter un rapport au Parlement après avoir conclu à l’existence d’un acte répréhensible. Les observations écrites de l’administrateur général de l’organisation ayant fait l’objet de l’enquête sont incluses dans le rapport.

[3]        Le présent contrôle judiciaire exige, pour la première fois, un examen du paragraphe 23(1) de la Loi. Ce paragraphe restreint le pouvoir du commissaire de donner suite à une divulgation « si une personne ou un organisme […] est saisi de l’objet de celle-ci au titre d’une autre loi fédérale ».

[4]        L’expression « tout est dans les détails » s’applique à ce litige. Les parties sont toutes les deux bien intentionnées. Les faits sont majoritairement non contestés, mais chacune des parties adopte une approche très différente de leur signification et de leur application à la législation.

B.        Conclusion d’acte répréhensible

[5]        En novembre 2014, après une enquête sur une divulgation touchant la Section de l’air d’Ottawa (SAO) de la Sous-direction des services de l’air (SDSA) de la GRC, le commissaire a conclu à l’existence d’un acte répréhensible et a, comme il est tenu de le faire dans un tel cas, présenté un rapport au Parlement. Il a conclu que des pilotes avaient fait de fausses entrées dans leurs carnets de route d’aéronef. Le commissaire a conclu qu’en raison de l’information incorrecte entrée dans les carnets de route, la GRC ne pouvait garantir que les aéronefs avaient été utilisés en respectant les limites de masse et de centrage. Il a également conclu, après avoir examiné plusieurs carnets de route, que des aéronefs avaient volé avec un poids excédentaire en 2012.

[6]        Le commissaire a conclu qu’il y avait eu contravention à l’alinéa 602.07a) du Règlement de l’aviation canadien, DORS/96-433 [RAC], parce que les aéronefs doivent être utilisés conformément aux limites d’utilisation précisées dans le manuel de vol. Son rapport précise qu’il a été satisfait de la réponse de la GRC, que celle-ci a pleinement coopéré à l’enquête et que les infractions n’ont pas mis en danger la vie, la santé ou la sécurité de personnes. Il souligne toutefois qu’il y a eu contravention au règlement et que selon la LPFDAR il s’agit d’un acte répréhensible. (Voir l’alinéa 8a) de la LPFDAR en annexe.)

C.        La seule question soulevée par la GRC porte sur la compétence

[7]        La GRC affirme que le commissaire n’avait pas le pouvoir d’enquêter sur la divulgation parce que Transports Canada (TC) était déjà saisi du sujet de la divulgation en vertu de la Loi sur l’aéronautique, L.R.C. (1985), ch. A-2. La GRC plaide donc qu’une interprétation littérale du paragraphe 23(1) [de la LPFDAR] montre que le commissaire n’avait ni le pouvoir ni la compétence d’examiner la divulgation.

[8]        Le commissaire affirme qu’il ne s’agit pas d’une question de savoir s’il avait compétence pour examiner la divulgation. Il s’agit d’une question normale d’interprétation par le commissaire de la loi qui régit ses activités — sa « loi constitutive » — et qu’il a droit à la déférence dans son interprétation. Il a interprété les paragraphes 23(1) et 24(1), et indique que son interprétation dans les deux cas était raisonnable compte tenu du fait que l’activité de TC était une [traduction] « évaluation de consultation » de la nature d’une vérification.

D.        Norme de contrôle

[9]        Il est constant que la norme de contrôle applicable à l’interprétation du paragraphe 24(1) du commissaire est celle de la décision raisonnable, comme cela a été établi dans des décisions antérieures. Le paragraphe 23(1) n’a cependant pas fait l’objet d’une interprétation antérieure et les parties ne s’entendent pas sur la norme de contrôle applicable.

[10]      Dans les motifs qui suivent, j’ai conclu que la présomption d’examen selon la norme de la décision raisonnable lorsqu’un tribunal interprète sa loi constitutive, établie dans l’arrêt Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 R.C.S. 654 (Alberta Teachers’) n’a pas été réfutée. La norme de contrôle applicable à l’interprétation du paragraphe 23(1) par le commissaire est celle de la décision raisonnable.

E.        Le commissaire a soulevé deux questions préliminaires

[11]      Le commissaire a soulevé deux questions préliminaires : 1) savoir si la GRC avait le droit de demander un contrôle judiciaire du rapport d’enquête, puisque les conclusions sont des recommandations non contraignantes; 2) savoir si un poids quelconque devait être accordé à l’affidavit déposé par la GRC dans cette procédure.

[12]      Pour les motifs qui suivent, j’ai conclu que la GRC pouvait demander un contrôle judiciaire.

[13]      J’ai également conclu que l’affidavit ne sera pas pris en considération à l’égard de toute question dont le commissaire n’était pas saisi pas plus que les conclusions ou les analyses juridiques qu’il contient.

F.         Ordonnance sollicitée par la GRC

[14]      Dans l’avis de demande déposé par la GRC un contrôle judiciaire est sollicité relativement à la conclusion tirée par le commissaire le 14 octobre 2014 et modifiée le 31 octobre 2014 (la « conclusion modifiée ») à l’égard du dossier no PSIC 2012-D-0328. Le rapport d’enquête qui a par la suite été déposé au Parlement est joint à la décision modifiée. La GRC sollicite une ordonnance annulant la décision modifiée.

[15]      Si, à l’origine, la GRC alléguait quatre motifs de contrôle, le seul motif invoqué à l’audience a été que le commissaire a agi sans compétence soit en vertu du paragraphe 23(1), en enquêtant sur la divulgation, soit en vertu du paragraphe 24(1), en n’exerçant pas son pouvoir discrétionnaire de ne pas enquêter sur la divulgation.

[16]      Pour les motifs qui suivent, fondés sur les faits précis de l’espèce (les « détails »), j’ai conclu que la décision du commissaire selon laquelle le paragraphe 23(1) ne s’appliquait pas pour l’empêcher de tenir une enquête était raisonnable. Je conclus que son interprétation du paragraphe 24(1) était raisonnable. Je conclus également que le paragraphe 23(1) pourrait ne pas s’appliquer du tout, compte tenu du moment et de la séquence des événements critiques.

[17]      Les extraits pertinents de la loi mentionnés dans ce jugement sont présentés en annexe.

II.         Contexte

A.        Procureur général à titre de demandeur

[18]      Le procureur général, au nom de la GRC, a déposé la présente demande de contrôle judiciaire. Le procureur général a confirmé à l’audience qu’il ne comparaissait pas de plein droit à titre de partie à un litige d’intérêt public. Il comparait uniquement au nom de la GRC. Afin d’éviter toute confusion, les présents motifs désigneront la GRC comme si elle était la demanderesse.

B.        Activités importantes du Commissariat et de TC

[19]      Pour déterminer si le commissaire a interprété le paragraphe 23(1) de façon raisonnable ou s’il a correctement exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 24(1), il convient d’examiner la chronologie des activités importantes de TC et du commissaire à l’égard de la SAO. La chronologie des événements (les « détails ») permettant d’établir « qui faisait quoi et à quel moment » est importante lorsqu’on examine la législation afin d’établir le caractère raisonnable des interprétations faites par le commissaire.

1)         Activités en 2013

[20]      Le 7 janvier 2013, le commissaire a reçu la divulgation de huit actes répréhensibles potentiels de la part d’un employé de la GRC. Ces actes couvraient la période comprise entre 2007-2008 et la date de la divulgation. Une période d’analyse a suivi, au cours de laquelle le Commissariat a examiné différents documents soumis par le divulgateur.

[21]      En août 2013, la GRC a demandé à TC d’examiner les opérations de la SDSA. En réponse, TC a préparé un plan de surveillance indiquant qu’il évaluerait si la réglementation en vigueur était respectée, formulerait des observations là où existaient des lacunes réglementaires, et proposerait des pratiques exemplaires tenant compte du nouveau règlement sur l’aviation devant entrer en vigueur sous peu. Les enquêteurs n’ont jamais vu ce document avant la présente procédure.

[22]      En octobre et novembre 2013, TC a réalisé les activités de surveillance au quartier général de la Sous-direction des services de l’air de la GRC et dans les Sections de l’air à Ottawa, à London, à Montréal et à Vancouver.

[23]      Le 6 novembre 2013, l’analyste du Commissariat ayant examiné la divulgation a préparé une analyse recommandant d’effectuer une enquête et de ne pas donner suite à trois des allégations.

[24]      Le 18 novembre 2013, le commissaire a envoyé une lettre à la GRC afin de l’informer qu’il allait mener une enquête sur des allégations d’actes répréhensibles impliquant un employé de la SAO et la SAO elle-même.

[25]      Le 2 décembre 2013, les enquêteurs ont eu un premier contact avec TC. Les enquêteurs ont été informés que TC déposerait un rapport en janvier 2014.

2)         Activités en 2014

[26]      Le 15 janvier 2014, TC a préparé son rapport à la GRC, intitulé « Private Operator – Advisory Assessment » (« exploitant privé – évaluation de consultation ») (l’évaluation de consultation). TC a formulé des observations et des recommandations selon lesquelles notamment son échantillonnage des carnets de route n’avait révélé aucune non-conformité. D’autres carnets de route semblant indiquer que deux types d’aéronefs avaient volé en surcharge leur ont toutefois été montrés. Ces documents constituent le fondement de la conclusion ultérieure du commissaire. La GRC a accepté de préparer des plans de mesures correctives (PMC) afin de mettre en œuvre les recommandations.

[27]      Le 20 janvier 2014, TC a transmis l’évaluation de consultation aux enquêteurs. Le 21 janvier 2014, TC a entrepris des activités de suivi et de contrôle de la mise en œuvre des PMC par la GRC.

[28]      Le 7 mars 2014, les enquêteurs ont préparé leur rapport d’enquête préliminaire (REP). Ils ont conclu qu’un acte répréhensible au sens de l’alinéa 8a) de la LPFDAR avait été commis par des employés de la SAO en [traduction] « inscrivant de faux renseignements dans les carnets de route d’aéronefs et en effectuant des vols en surcharge pendant plusieurs années ». Suite au REP, le commissaire a conclu que les quatre allégations relatives à l’utilisation d’aéronefs impliquaient plusieurs pilotes et non un seul. Des carnets de route d’aéronefs reçus de la part de TC le 20 janvier 2014 ont été utilisés pour en arriver à cette conclusion.

[29]      Le 10 mars 2014, le commissaire a présenté le REP à la GRC et l’a informée que la SAO, comme entité, serait désignée pour les actes répréhensibles allégués plutôt que l’employé individuellement.

[30]      Le 14 mars 2014, la GRC a terminé la rédaction du PMC de conformité des documents, afin de corriger le problème des carnets de route contenant des renseignements incorrects. La date prévue d’achèvement des travaux était le 30 avril 2014.

[31]      Le 22 mai 2014, la GRC a répondu au REP du 10 mars 2014. Elle a affirmé, pour la première fois, que les paragraphes 23(1) et 24(1) de la LPFDAR s’appliquaient et que le commissaire n’avait pas compétence parce que [traduction] « TC travaillait avec le SAO pour corriger toute déficience » et que [traduction] « le SAO travaille avec les inspecteurs de la Sûreté de l’aviation civile afin de traiter la question de la conformité au moyen de plans de mesures correctives ».

[32]      Le 9 juillet 2014, un REP révisé a été envoyé à la GRC après l’ajout de renseignements fournis par la GRC.

[33]      Le 30 juillet 2014, la GRC a répondu au REP révisé, réitérant son objection à la compétence du Commissariat.

[34]      Le 3 septembre 2014, un enquêteur a ajouté une note au dossier à la suite d’une conversation avec un employé de TC, indiquant que [traduction] « [l’employé] a indiqué très clairement que TC n’avait pas “agi en vertu d’un mode d’évaluation de la réglementation” » et que « l’employé, à la fin, a aussi réitéré que “nous ne travaillons pas en vertu d’un règlement ou d’une loi pour ces PMC — c’est purement sur une base volontaire” ».

[35]      Le 6 octobre 2014, au terme d’un examen interne du rapport modifié des enquêteurs, le commissaire a retenu la recommandation de conclure à un acte répréhensible à l’égard d’une seule des allégations et pas pour les quatre autres allégations.

[36]      Le 14 octobre 2014, le commissaire a remis à la GRC une version préliminaire du rapport d’acte répréhensible, qui devait être déposé au Parlement avant le 5 décembre 2014. Il a demandé à ce que les observations devant être incluses dans le rapport, le cas échéant, soient faites avant le 29 octobre 2014.

[37]      Le 27 octobre 2014, la GRC a écrit au commissaire pour demander la réouverture de l’enquête, réitérer la contestation de la compétence et soulever une question d’équité procédurale. La réponse de la GRC aux recommandations du commissaire était jointe.

[38]      Le 31 octobre 2014, le commissaire a répondu à la GRC et joint l’ébauche de rapport sur le cas qui devait être déposé dans la semaine du 17 novembre 2014. Il a demandé à ce que les dernières observations, le cas échéant, soient communiquées avant le 6 novembre 2014. Une ébauche du communiqué de presse à paraître au moment du dépôt du rapport était également jointe.

[39]      Le 6 novembre 2014, la GRC a transmis sa réponse officielle aux recommandations, aux fins d’inclusion dans le rapport.

[40]      Le 10 novembre 2014, le commissaire a écrit à la GRC afin de traiter certaines questions sans lien avec la présente procédure et réitérer pourquoi il estimait que le paragraphe 23(1) ne s’appliquait pas et pourquoi il n’exercerait pas son pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 24(1) de mettre fin à l’enquête.

[41]      Le 14 novembre 2014, la GRC a déposé son avis de demande en l’espèce.

[42]      Le rapport du commissaire a été déposé devant le Parlement le 2 décembre 2014.

III.        Les deux questions préliminaires soulevées par le commissaire

A.        Un poids quelconque doit-il être accordé à l’affidavit déposé par la GRC?

1)         Thèses des parties

[43]      La GRC a déposé un affidavit de Sean Flatt, assermenté le 19 janvier 2015. M. Flatt était le chef d’équipe de l’évaluation de consultation de TC. La GRC affirme que l’affidavit a été présenté en réponse à la question de la compétence du commissaire. La GRC s’appuie de façon générale sur les [traduction] « affaires assujetties à la règle 306 » des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles), pour affirmer que puisque le paragraphe 23(1) soulève une question de compétence entre deux tribunaux, elle a le droit absolu de déposer l’affidavit.

[44]      La GRC a indiqué à l’audience que l’affidavit avait été déposé pour deux raisons, toutes deux touchant la compétence de TC dans la conduite de l’évaluation. La première visait à démontrer que M. Flatt n’agissait pas à titre personnel, mais à titre d’agent de Transports Canada. La seconde visait à démontrer l’étendue des obligations établies dans la Loi sur l’aéronautique et que, compte tenu de ces obligations, TC pouvait intervenir auprès d’une entité de différentes façons et selon une vaste portée.

[45]      Le commissaire affirme que je ne devrais accorder aucun poids à l’affidavit parce qu’il contient de l’information dont il ne disposait pas au moment de conclure à l’existence d’un acte répréhensible. Constatant les affirmations sur la capacité avec laquelle TC réalisait son évaluation de consultation et son impuissance à faire exécuter les PMC, le commissaire a fait valoir à l’audience que l’affidavit constituait simplement une tentative visant à [traduction] « étoffer » ce que faisait TC en reformulant le processus consultatif volontaire en un exercice de pouvoir législatif.

2)         Analyse et conclusion

[46]      Les affaires assujetties à la règle 306 n’appuient pas la thèse de la GRC. Dans l’arrêt Association des universités et collèges du Canada c. Canadian Copyright Licensing Agency (Access Copyright), 2012 CAF 22 (Access Copyright), la Cour d’appel [fédérale] a reconnu trois exceptions au principe général selon lequel le dossier de preuve faisant l’objet du contrôle doit être le même que celui présenté au tribunal administratif. Ces exceptions sont les suivantes : lorsque l’affidavit contient des renseignements généraux susceptibles d’aider la Cour à comprendre les questions; lorsqu’il est nécessaire pour porter à l’attention de la Cour des vices de procédure qu’on ne peut déceler dans le dossier de preuve; pour faire ressortir l’absence totale de preuve dont disposait le décideur.

[47]      Au cours de l’enquête du commissaire, la GRC a soulevé la question de la compétence en vertu du paragraphe 23(1). Tous les éléments qui n’ont pas été présentés par la GRC dans les lettres du 22 mai et du 30 juillet auraient pu l’être à ce moment-là ou avant le dépôt du rapport sur le cas. L’affidavit ne peut maintenant plus rien ajouter à la thèse de la GRC telle qu’elle a été présentée à l’origine au commissaire. Comme l’a indiqué le juge LeBlanc dans la décision Henri c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1141, au paragraphe 22, le contrôle judiciaire « ne se prête donc pas à une bonification de la matrice factuelle du dossier puisque ce serait là changer la nature fondamentale de ce recours ».

[48]      En ce qui concerne le but déclaré de démontrer que M. Flatt agissait à titre d’agent de TC, l’affidavit est inutile puisqu’il n’existait aucune allégation prétendant autrement. En ce qui concerne le but de présenter l’étendue des obligations et des pouvoirs de TC, ces sujets sont couverts dans les lettres du 22 mai et du 30 juillet 2014 de la GRC. La législation elle-même présente suffisamment les obligations et les pouvoirs du ministre. L’affidavit n’est pas nécessaire pour ces renseignements. À mon avis, l’affidavit ne relève d’aucune des trois exceptions prévues dans l’arrêt Access Copyright.

[49]      Je n’accorderai aucun poids à la partie de l’affidavit déposé qui contient des renseignements qui n’avaient pas été fournis à l’origine au commissaire. De plus, aucun poids ne sera accordé aux arguments juridiques et aux conclusions de droit présentés dans l’affidavit, la personne ayant rédigé l’affidavit n’étant pas qualifiée pour formuler de telles opinions. Lorsque l’affidavit reformule des arguments présentés au commissaire par la GRC, je m’appuierai sur les arguments initiaux. Lorsque l’affidavit se contente d’organiser et de regrouper des renseignements fournis au commissaire à ce moment-là, je pourrais m’y référer, puisqu’il ne s’agit pas de nouveaux éléments de preuve.

B.        La GRC a-t-elle le droit de demander un contrôle judiciaire?

[50]      Les demandes de contrôle judiciaires sont régies par les articles 18 et 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales [L.R.C. (1985), ch. F-7] (LCF). Lus ensemble, ces articles établissent les motifs pour un contrôle judiciaire, les réparations possibles, les pouvoirs de la Cour lors d’un contrôle judiciaire, et déterminent qui peut présenter une demande de contrôle judiciaire.

[51]      En vertu du paragraphe 18.1(3) de la LCF, la Cour est compétente pour contrôler toute « décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte » d’un « office fédéral ». Il est incontestable que le commissaire agissait à titre d’office fédéral lorsqu’il a établi ses conclusions et déposé son rapport devant le Parlement. Le différend porte sur le fait de savoir si la GRC était « directement touché[e] par l’objet de la demande », en particulier compte tenu de la nature non contraignante des recommandations contenues dans le rapport. En d’autres mots, la présente affaire est-elle justiciable?

[52]      L’expression « directement touché » a été longuement interprétée dans la jurisprudence. Dans l’arrêt Air Canada c. Administration portuaire de Toronto, 2011 CAF 347, [2013] 3 R.C.F. 605 (Administration portuaire de Toronto), aux paragraphes 24 et 29, le juge Stratas résume les considérations qui font qu’une question peut faire l’objet d’une demande de contrôle judiciaire. Une « question » pouvant faire l’objet d’un contrôle est beaucoup plus vaste qu’une décision et peut comprendre tout objet « susceptible de donner droit à une réparation », aux termes de l’article 18 de la LCF. Cela inclut également le contrôle de « mesures administratives ». Une question qui ne peut pas faire l’objet d’un contrôle est celle qui n’a « pas pour effet de porter atteinte à des droits, d’imposer des obligations juridiques, ni d’entraîner des effets préjudiciables ».

1)         Thèses des parties

[53]      Comme dans l’arrêt Administration portuaire de Toronto, l’argument des parties est axé sur la question de savoir si la conclusion tirée par le commissaire a eu des effets préjudiciables sur la GRC. Aucun argument n’a été présenté pour dire que la conclusion présentée dans le rapport sur le cas a eu une incidence sur les droits juridiques ou imposé des obligations juridiques. En fait, l’article 26 de la LPFDAR établit clairement que les enquêtes sont menées sans formalisme et qu’elles ont pour objet de porter l’existence d’actes répréhensibles à l’attention des administrateurs généraux et de leur recommander des mesures correctives. La LPFDAR ne contient aucune disposition obligeant un administrateur général à suivre les recommandations formulées.

[54]      La GRC déclare qu’à titre de force de police nationale du Canada, la conclusion d’acte répréhensible par le SAO est très importante pour les membres de la GRC et pour les membres du SAO. La réputation de la GRC est touchée par une telle conclusion. L’aspect hautement public du dépôt du rapport devant le Parlement constitue un autre aspect important. La GRC s’appuie sur la décision rendue dans l’arrêt Morneault c. Canada (Procureur général), [2001] 1 C.F. 30 (C.A.) (Morneault), pour affirmer que s’il y a une incidence sur la réputation, même une question non contraignante peut faire l’objet d’un contrôle en vertu du paragraphe 18.1(1) [de la Loi sur les Cours fédérales].

[55]      Le commissaire répond qu’avant le dépôt du rapport au Parlement, la GRC a demandé une injonction pour empêcher le dépôt, mais que cela lui a été refusé. À ce moment-là, le juge Hughes de la Cour a conclu que tout dommage à la réputation de la GRC était purement spéculatif. À la date de l’audience, aucune preuve de dommage à sa réputation n’avait été présentée par la GRC. Le commissaire déclare que de toute façon, la GRC a admis que le règlement avait été enfreint et a retenu les recommandations formulées dans le rapport du commissaire. Le commissaire s’appuie lui aussi sur l’arrêt Morneault, où la Cour d’appel [fédérale], au paragraphe 45, a dit ce qui suit :

Si les conclusions en cause sont étayées par la preuve, l’intimé ne peut pas réellement se plaindre qu’elles ont peut-être terni sa réputation.

[56]      Enfin, le commissaire indique que seul le divulgateur a le statut de personne directement touchée en vertu de la LPFDAR. Ce statut n’est accordé ni à l’auteur de l’acte répréhensible ni à l’administrateur général. Le seul recours prévu par la LPFDAR est que l’administrateur général de la GRC peut répondre aux allégations dans le rapport s’il est en désaccord avec le commissaire, ce qui a été fait en l’espèce.

2)         Analyse et conclusion

[57]      Le reste du paragraphe 45 de l’arrêt Morneault, cité en partie par le commissaire, contient une conclusion cruciale faite par la Cour d’appel [fédérale]. Bien que le rapport dans cette affaire ait aussi été une opinion non contraignante et non strictement une ordonnance ou une décision, la Cour d’appel [fédérale] a conclu que du tort sérieux pouvait être causé à la réputation du colonel Morneault par des conclusions non étayées par le dossier. Il a été déterminé que l’examen par la Cour était nécessaire pour garantir le respect de la justice naturelle et veiller à ce que la réputation du colonel Morneault ne soit pas ternie d’une façon injustifiée.

[58]      La seule partie des conclusions avec laquelle la GRC est d’accord est que le fait d’inscrire des renseignements incorrects dans le carnet de route des aéronefs contrevient au règlement. Le dossier à cet égard montre que de telles contraventions constituent des infractions de responsabilité stricte n’exigeant aucun degré d’intention ou de négligence de la part du contrevenant. Le dossier montre également que TC, appliquant un régime législatif différent, considère les infractions réglementaires moins graves que le commissaire. Un courriel envoyé aux enquêteurs par TC le 18 août 2014 se termine comme suit : [traduction] « s’attarder sur une réponse punitive à des enjeux de non-conformité passés ne sert qu’à perturber les efforts positifs en cours ».

[59]      La réponse de la GRC dans le rapport sur le cas conteste l’utilisation par le commissaire du mot [traduction] « fausses » pour caractériser les entrées dans les carnets de route des aéronefs, car ce terme sous-entendait qu’il y avait eu tromperie ou malfaisance délibérée. La GRC a également contesté que les carnets de route à eux seuls puissent démontrer qu’un aéronef ait fait une envolée avec un poids excédentaire compte tenu de différents facteurs qu’elle énumère et dont elle dit qu’ils ont une incidence sur la détermination. La GRC reconnaît la conclusion de non-conformité technique, mais pas le fait que les aéronefs font des envolées avec un poids excédentaire.

[60]      Je conclus que la GRC n’a pas souscrit aux conclusions du rapport dans la mesure indiquée par le commissaire. En l’espèce, le degré d’[traduction] « adhésion » n’est pas suffisant en soi pour éviter le contrôle judiciaire.

[61]      La GRC demande réparation en vertu de l’alinéa 18.1(4)a) de la LCF, alléguant que le commissaire a agi sans compétence. Dans l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339 (Khosa), le juge Binnie a conclu au paragraphe 41 que le paragraphe 18.1(4) « autoris[e] la cour à intervenir sans toutefois l’y obliger ». En d’autres mots, je peux exercer mon pouvoir discrétionnaire pour déterminer si je consens à entendre la présente demande de contrôle judiciaire.

[62]      Dans les circonstances, compte tenu de la stature de la GRC à titre de force de police nationale du Canada, de la participation d’une autre instance réglementaire, de l’absence de dispositions de contrôle dans la LPFDAR et de l’absence de jurisprudence sur le paragraphe 23(1), ainsi que des fondements des arguments de la GRC en l’espèce, je conclus qu’il est approprié d’exercer mon pouvoir discrétionnaire et de permettre l’audition de la demande de contrôle judiciaire afin de déterminer si l’interprétation donnée par le commissaire des paragraphes 23(1) et 24(1) de la LPFDAR était raisonnable.

IV.       Norme de contrôle de l’interprétation des paragraphes 23(1) et 24(1) par le commissaire

[63]      Les parties ne s’entendent pas sur la norme de contrôle. Comme je l’ai indiqué plus haut, j’ai conclu que la norme de la décision raisonnable était la norme de contrôle applicable à l’interprétation du commissaire de la LPFDAR. L’explication détaillée de cette décision suit.

A.        Norme de contrôle applicable à l’interprétation du paragraphe 23(1)

1)         Thèses des parties

[64]      Les points de vue différents de la GRC et du commissaire soulèvent la question de la norme de contrôle appropriée pour l’interprétation du paragraphe 23(1) par le commissaire. La GRC dit que la norme est celle de la décision correcte. Le commissaire dit que la norme est celle de la décision raisonnable.

[65]      La GRC fait valoir que la question de savoir si le paragraphe 23(1) interdit au commissaire d’enquêter en raison de la participation de TC soulève une question touchant véritablement à la compétence, de sorte que la norme de la décision correcte doit s’appliquer. À l’appui de sa thèse, la GRC cite un extrait de l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190 (Dunsmuir), au paragraphe 59, voulant qu’une véritable question de compétence nécessite que le tribunal détermine si « les pouvoirs dont le législateur l’a investi l’autorisent à trancher une question ».

[66]      Dans sa plaidoirie, la GRC a affirmé qu’il ne s’agissait pas d’une question de compétences concurrentes entre deux tribunaux, mais plutôt de savoir à quel moment chacun d’entre eux pouvait exercer sa compétence. Elle fait cependant valoir que la norme de contrôle reste celle de la décision correcte, mais que, si je devais conclure que la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable, il ne peut y avoir qu’une seule interprétation raisonnable de la loi et que ce n’est pas celle appliquée par le commissaire.

[67]      La GRC a aussi fait référence à l’arrêt Canadian Union of Public Employees, Local 2434 v. Port Hawkesbury (Town), 2011 NSCA 28, 301 N.S.R. (2d) 123 (Port Hawkesbury), dans lequel la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse a discuté des principes d’examen de la compétence qu’elle a tirés de l’arrêt Dunsmuir. Dans cette affaire, la cour a conclu que la norme de contrôle applicable à la décision sous-jacente de l’Occupational Health and Safety Panel était celle de la décision correcte, même en présence d’une clause privative dans la loi.

[68]      Le commissaire affirme qu’il n’y a pas de question de compétence; il s’agit simplement de déterminer si TC était saisi de l’objet en vertu d’une loi du Parlement. Pour prendre cette décision, il a fallu examiner une question mixte de faits et de droit pour déterminer si le paragraphe 23(1) s’appliquait pour empêcher le commissaire d’enquêter sur les divulgations. Le commissaire affirme qu’il s’agit d’une question mixte de faits et de droits susceptible de révision selon la norme de la décision raisonnable.

[69]      Le commissaire s’appuie sur l’arrêt Alberta Teachers’ et sur l’arrêt McLean c. Colombie-Britannique (Securities Commission), 2013 CSC 67, [2013] 3 R.C.S. 895 (McLean), pour affirmer que puisque le commissaire interprète sa « loi constitutive », il existe une présomption de déférence et que cela implique que la norme de contrôle qui s’applique est celle de la décision raisonnable.

2)         Analyse et conclusion

[70]      Je note que l’arrêt Port Hawkesbury, sur lequel s’appuie la GRC, a été débattu et jugé avant la publication de l’arrêt Alberta Teachers’, de sorte qu’elle n’a pas examiné si la présomption de caractère raisonnable avait été réfutée, puisque cette présomption n’existait alors pas.

[71]      L’interprétation faite par le commissaire du paragraphe 23(1) nécessite d’examiner si les activités entreprises par TC par rapport à la GRC relevaient du paragraphe 23(1). Pour prendre cette décision, il faut appliquer les faits (ce qui a été fait par TC) au droit établi dans le paragraphe 23(1). Une question mixte de faits et de droit appelle la norme de contrôle de la décision raisonnable, à condition qu’il n’y ait pas de principe juridique isolable ou d’erreur de droit : voir l’arrêt Khosa, au paragraphe 89, et l’arrêt Decor Grates Incorporated c. Imperial Manufacturing Group Inc., 2015 CAF 100, [2016] 1 R.C.F. 246, au paragraphe 19.

[72]      En tirant cette conclusion, je suis consciente de la mise en garde donnée dans l’arrêt Dunsmuir, aussi au paragraphe 59, selon laquelle « en cas de doute, il faut se garder de qualifier un point de question de compétence », ainsi que de l’observation faite par la juge Abella dans l’arrêt Conseil des Canadiens avec déficiences c. VIA Rail Canada Inc., 2007 CSC 15, [2007] 1 R.C.S. 605, au paragraphe 89, selon laquelle :

Si chaque disposition de la loi habitante d’un tribunal administratif devait être traitée comme si elle avait des conséquences sur le plan de la compétence qui autoriseraient une cour de justice à substituer ce qu’elle estime être la juste interprétation à donner, le rôle du tribunal administratif se limiterait en réalité à constater des faits.

[73]      Je conclus que la présomption établie dans l’arrêt Alberta Teachers’ n’a pas été réfutée par la GRC. La norme de contrôle est celle de la décision raisonnable à l’égard de l’interprétation faite par le commissaire selon laquelle le paragraphe 23(1) ne lui interdisait pas d’enquêter sur la divulgation.

B.        La norme de contrôle applicable à l’interprétation du paragraphe 24(1)

[74]      En ce qui concerne l’interprétation du commissaire de l’article 24 de la LPFDAR, il a déjà été déterminé par la Cour d’appel [fédérale] dans l’arrêt Agnaou c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 30 (Agnaou no 1), au paragraphe 35, que la norme de contrôle était celle de la décision raisonnable.

[75]      La GRC ne conteste pas cela et je reconnais que la décision raisonnable est la norme de contrôle appropriée pour l’interprétation donnée par le commissaire au paragraphe 24(1).

V.        L’interprétation du paragraphe 23(1) était-elle raisonnable?

[76]      L’interprétation du paragraphe 23(1) de la LPFDAR est au cœur du différend entre les parties. La GRC croit qu’il doit être interprété au sens large et que ce faisant, je dois conclure que l’examen et l’évaluation de consultation TC suffisaient à éteindre la compétence du commissaire. Le commissaire affirme que les activités de TC ne répondent pas au critère, qu’il s’agisse du fait d’être « saisi » ou de « l’objet » et que de toute façon, TC n’était pas saisi « au titre d’une autre loi fédérale », comme l’ordonne le paragraphe 23(1).

A.        Principes généraux de l’interprétation des lois

[77]      Les parties ont disséqué les différents mots utilisés au paragraphe 23(1) et plus particulièrement les segments discrets « est saisi », « l’objet » et « au titre d’une autre loi fédérale ». J’examinerai bientôt ces observations. Dans un premier temps, il est important de noter que le point de départ de l’interprétation législative, établi par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27 (Rizzo), au paragraphe 21, est qu’il faut « lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi ». Cela signifie que « [l]e juge doit tenir compte du contexte global de la disposition, “même si, à première vue, le sens de son libellé peut paraître évident” » : voir l’arrêt Canada (Procureur général) c. Stanford, 2014 CAF 234, au paragraphe 44.

1)         Esprit et objet de la LPFDAR

[78]      La LPFDAR est une loi sur les lanceurs d’alerte conçue pour permettre aux employés du gouvernement fédéral de signaler des actes répréhensibles dans la fonction publique sans crainte de représailles. Les dispositions de la LPFDAR visent à « atteindre l’équilibre » entre le devoir de loyauté du fonctionnaire envers son employeur et son droit à la liberté d’expression.

[79]      L’esprit de la LPFDAR souligne l’importance de l’éthique dans la fonction publique. Le juge Diner, dans la décision Swarath c. Canada (Procureur général), 2015 CF 963, au paragraphe 1, a conclu que la LPFDAR est « conçu[e] pour s’assurer que les Canadiens sont protégés par une fonction publique légitime, transparente et sans corruption ».

[80]      Le préambule affirme que l’administration publique fédérale est « une institution nationale essentielle au fonctionnement de la démocratie parlementaire canadienne ». Il affirme également que « la confiance dans les institutions publiques ne peut que profiter de la création de mécanismes efficaces de divulgation des actes répréhensibles ». Afin de protéger ces valeurs, l’accès public aux conclusions d’actes répréhensibles, que ce soit à la suite d’une procédure interne ou d’une enquête du commissaire, est obligatoire.

[81]      Le commissaire a l’obligation explicite d’examiner les enquêtes et de rendre compte de ses conclusions au divulgateur et à l’administrateur général responsable. Lorsqu’un acte répréhensible a été commis, le commissaire a l’obligation de déposer un rapport au Parlement. Il n’y a pas d’obligation de déposer un rapport s’il n’y a pas de conclusion d’acte répréhensible. Cette distinction renforce la valeur élevée que le Parlement a accordée à la divulgation publique des actes répréhensibles.

[82]      Le commissaire rend compte directement au Parlement en déposant un rapport annuel sur les activités du Commissariat et un rapport sur le cas lorsqu’il conclut à l’existence d’un acte répréhensible. Ceci souligne l’importance du travail du commissaire et l’intérêt public de la divulgation publique des actes répréhensibles, conformément aux valeurs énoncées dans le préambule.

[83]      La Cour d’appel [fédérale] dans l’arrêt Agnaou c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 29, [2016] 1 R.C.F. 322 (Agnaou no 2), au paragraphe 60, a décrit comme suit l’objet de la LPFDAR :

[…] dénoncer et punir les actes répréhensibles dans le secteur public dans le but ultime d’accroître la confiance du public dans l’intégrité des fonctionnaires fédéraux. C’est l’intérêt public qui prime et c’est le commissaire qui a mandat de le protéger.

[84]      C’est dans cet esprit et avec ces objets en tête que les paragraphes 23(1) et 24(1) doivent être interprétés.

B.        Thèses des parties

1)         « [E]st saisi » et « l’objet »

a)         Thèse de la GRC

[85]      La GRC fait valoir que le paragraphe 23(1) existe dans le but d’éviter les dédoublements d’effort. Elle affirme que le commissaire a reconnu que TC avait été saisi de l’objet de la divulgation dans ses lettres du 9 juillet 2014 et du 14 octobre 2014, ainsi qu’à la page 10 du rapport sur le cas. Elle souligne qu’il y a eu chevauchement de l’objet dont TC a été saisi, incluant l’allégation d’acte répréhensible que le commissaire a jugé fondé : des aéronefs ont fait des envolées avec un poids excédentaire, en contravention de l’alinéa 602.07a) du RAC. À ce titre, les ressources internes de la GRC ont participé à deux procédures parallèles, contrairement à l’intention du paragraphe 23(1).

[86]      La GRC préconise une interprétation large du paragraphe 23(1), affirmant que son champ d’application est vaste et est rédigé en termes généraux et très larges. La GRC fait valoir que l’expression « est saisi » a un sens ordinaire très large et général. Le sens ordinaire de « est saisi » est celui qui correspond à [traduction] « la première impression du lecteur, la compréhension qui vient spontanément à l’esprit » : voir Sullivan on the Construction of Statutes, 5e éd. (Markham, Ont. : LexisNexis Canada, 2008), aux pages 25 et 26. Renvoyant aux définitions de plusieurs dictionnaires, la GRC affirme qu’« être saisi de » signifie [traduction] « agir à l’égard de, administrer, traiter, se prononcer (sur une question) de quelque façon ».

[87]      L’avocat de la GRC a fait valoir que lorsque la GRC a demandé à TC d’évaluer si ses activités étaient conformes à la réglementation et par la suite lorsque TC a évalué les PMC conçus par la GRC, TC était clairement « saisi » de l’objet au sens ordinaire de l’expression.

[88]      Dans une annexe à sa lettre envoyée au commissaire le 30 juillet 2014, la GRC affirme que sa thèse est que l’utilisation des PMC est autorisée par l’article 4.2 de la Loi sur l’aéronautique, afin d’assurer la conformité aux RAC. Ceci démontre que [traduction] « l’objet de l’acte répréhensible allégué par le commissaire fait l’objet d’un traitement administratif par le ministre des Transports ». La GRC poursuit en affirmant que [traduction] « les autorités chargées de l’application de la loi désignées dans la Loi sur l’aéronautique n’ont pas été sollicitées », notant qu’il s’agissait là d’une distinction importante. Le paragraphe 23(1) prévoit qu’une enquête sur un acte répréhensible peut être menée parallèlement à une procédure d’application de la loi. La GRC conclut que le paragraphe 23(1) interdit [traduction] « la conduite d’une procédure administrative ayant le même objet que la divulgation alléguée ».

[89]      La GRC fait valoir que la nature volontaire de l’arrangement entre la GRC et TC constitue un élément non pertinent puisque le paragraphe 23(1) n’est limité d’aucune façon. Par conséquent, « est saisi » n’inclut aucune [traduction] « considération du caractère adéquat de la façon dont une autre instance est saisie de l’objet » et qu’il n’y a pas non plus de limitation sur la façon dont ladite instance est saisie dudit objet, sauf pour dire qu’elle doit en être saisie au titre d’une autre loi fédérale.

[90]      Enfin, la GRC met en opposition le paragraphe 23(1) et l’alinéa 24(1)a) afin de faire remarquer que l’alinéa 24(1)a) précise que le commissaire doit estimer si l’objet de la divulgation a été instruit comme il se doit dans le cadre de la procédure prévue par toute autre loi fédérale ou pourrait l’être avantageusement selon celle-ci, une directive ou qualification qui n’apparaît pas au paragraphe 23(1). La GRC conclut que cela signifie que le commissaire ne peut pas se saisir de l’objet une fois qu’une autre instance en est saisie. Appliquant la maxime unius est exclusio alterius (la mention de l’un implique l’exclusion de l’autre), la GRC affirme qu’en vertu du paragraphe 23(1), la mesure dans laquelle l’autre instance est saisie efficacement ou de manière appropriée l’objet n’a pas d’importance, puisque, contrairement à l’article 24, le Parlement n’a accordé aucun pouvoir discrétionnaire au commissaire dans le paragraphe 23(1). Par conséquent, il n’a pas le droit d’évaluer de façon subjective la façon dont l’autre instance saisie instruit l’objet.

b)         Thèse du commissaire

[91]      Le commissaire fait valoir qu’au vu des objets importants de la LPFDAR, qui sont de maintenir et d’accroître la confiance du public dans l’intégrité des fonctionnaires, et de l’obligation de rendre compte au Parlement lorsque le commissaire conclut à l’existence d’un acte répréhensible, la limite prévue au paragraphe 23(1) doit être interprétée de façon stricte. Il préconise que cette limite ne soit appliquée que dans les cas les plus clairs. À l’appui de cette thèse, il pointe les dispositions de la LPFDAR qui lui imposent de recevoir et d’examiner les divulgations et lui confèrent un large pouvoir discrétionnaire pour entreprendre une enquête.

[92]      Le commissaire affirme qu’il ne suffit pas de posséder des pouvoirs et qu’il existe un seuil d’activité qui doit être atteint. Il renvoie à la version française du paragraphe 23(1) « saisi de l’objet de celle-ci » pour faire valoir que pour que le paragraphe 23(1) s’applique, TC doit être explicitement saisi de l’objet dans le cadre d’une procédure administrative visant à se prononcer ou à statuer de façon définitive sur la question ou l’allégation précises, avec un effet contraignant. Le processus consultatif volontaire mené par TC ne respecte pas cette exigence.

[93]      Le commissaire affirme que TC n’était pas saisi de l’objet et n’agissait pas au titre d’une autre loi fédérale. La GRC a volontairement invité TC à examiner l’ensemble de ses activités au SAO, à titre de consultant. L’objectif était de déterminer l’existence de lacunes réglementaires et de présenter des pratiques exemplaires en tenant compte du nouveau règlement sur l’aviation proposé. Tandis que le commissaire examinait de façon rétrospective des comportements survenus au cours des années 2003 à 2012, TC se penchait principalement sur la réglementation à venir et a examiné une période passée inférieure à 12 mois.

[94]      Le commissaire affirme que TC n’a pas été saisi de « l’objet de la divulgation », parce que même si TC avait été saisi de questions similaires, le paragraphe 23(1) exige que TC soit saisi de questions précises soulevées par la divulgation. Autrement, les divulgations méritoires pourraient ne pas être saisies et l’objet de la LPFDAR, qui est de faire la lumière sur les actes répréhensibles, serait contourné par des instances qui examinent des questions différentes. La GRC indique par exemple que TC vise à faciliter la conformité actuelle et future à la réglementation et non à exposer les actes répréhensibles passés ou à demander à la GRC de rendre des comptes. Le commissaire allègue que l’évaluation de consultation avait une approche et une orientation complètement différentes. Il s’agissait d’un examen [traduction] « à usage interne seulement » mené à la demande de la GRC afin de fournir des conseils techniques et de faire des recommandations en vue de la conformité future et qui aurait pu être annulé en tout temps par la GRC.

[95]      En ce qui concerne l’argument selon lequel le paragraphe 23(1) doit être lu de manière à [traduction] « éviter le dédoublement », le commissaire fait remarquer que lorsqu’un organisme d’application de la loi est concerné, le chevauchement des enquêtes est expressément autorisé par le paragraphe 23(1); éviter le dédoublement n’était donc pas une préoccupation du législateur.

[96]      Enfin, le commissaire fait valoir que si la GRC a raison, n’importe quel ministère fédéral pourrait mener une enquête de nature générale et non contraignante qui entraverait les dispositions sur la responsabilité de la LPFDAR.

2)         « [A]u titre d’une autre loi fédérale »

a)         Thèse de la GRC

[97]      Même si la GRC a invité TC à évaluer ses opérations, elle affirme qu’en vertu des dispositions de la Loi sur l’aéronautique, TC peut contrôler la conformité à la loi en tout temps. À l’appui de sa thèse, la GRC cite la formulation de l’article 4.2, qui dispose que « [l]e ministre est chargé du développement et de la réglementation de l’aéronautique, ainsi que du contrôle de tous les secteurs liés à ce domaine ». L’article 8.7 accorde des pouvoirs très vastes au ministre, comme celui d’entrer en tout lieu aux fins d’inspection ou de vérification relativement à l’application de la loi, de saisir tout document ou autre élément dans un lieu s’il peut constituer une preuve d’infraction et de retenir tout aéronef lorsqu’il a des motifs raisonnables de croire qu’il n’est pas sûr ou qu’il pourrait être utilisé de façon dangereuse.

[98]      La GRC affirme que l’évaluation de consultation et les PMC ne pouvaient être conduits qu’en vertu des pouvoirs conférés par la Loi sur l’aéronautique. S’appuyant sur la décision Larny Holdings Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé), 2002 CFPI 750, [2003] 1 C.F. 541 [Larny Holdings], la GRC prétend que l’expression « au titre d’une loi » a été interprétée de façon large pour inclure une personne réputée exercer des pouvoirs au titre d’une loi, que ces pouvoirs lui aient été explicitement conférés ou non.

[99]      Appliquée en l’espèce, la GRC affirme que [traduction] « si les inspecteurs [de Transports Canada] n’agissaient pas au titre de la Loi sur l’aéronautique, que faisaient-ils? »

b)         Thèse du commissaire

[100]   À l’appui de sa position selon laquelle TC n’agissait pas au titre d’une loi fédérale, le commissaire s’appuie fortement sur le fait que c’est la GRC qui a demandé à TC de conduire un examen et que TC a indiqué aux inspecteurs que le travail relevait davantage d’un audit. La GRC était titulaire d’un certificat d’exploitation privée temporaire. Selon le plan de surveillance [traduction] « [p]uisque les exploitants privés ne sont assujettis à aucune exigence officielle de surveillance, les membres de l’équipe de TC seront en mesure d’exécuter leurs tâches à titre de conseillers auprès de la GRC ». En d’autres mots, TC n’effectuait pas d’examen réglementaire et n’agissait donc pas au titre de la Loi sur l’aéronautique.

[101]   Le commissaire souligne que l’évaluation de consultation a formulé des observations et des recommandations, et non des conclusions. Le travail de TC visait à faciliter la conformité actuelle et future, et non à tenir la GRC responsable d’infractions passées. TC n’a pas examiné les infractions propres à la réglementation constituant l’objet de la divulgation et n’a rendu aucune décision à leur égard.

[102]   En réponse à l’argument de la décision Larny Holdings présenté par la GRC, le commissaire répond que TC n’agissait au titre d’aucune loi et ne prétendait pas le faire. Les fonctionnaires de TC utilisaient simplement leur connaissance de la loi et du RAC pour fournir des avis à la GRC, à titre de conseillers.

[103]   L’évaluation de consultation ne traite d’aucun cas de vol avec un poids excédentaire avant 2013, alors que les divulgations portent toutes sur des événements antérieurs à 2013. En ce qui concerne le fait d’agir au titre d’une loi et d’avoir la capacité de faire appliquer la réglementation, l’article 26 de la Loi sur l’aéronautique interdit les poursuites relatives à des incidents survenus plus de 12 mois auparavant, sauf si elles visent la suspension ou la révocation du certificat de l’exploitant ou s’il s’agit d’une poursuite par voie de mise en accusation.

[104]   Le commissaire soutient en outre que même si TC agissait au titre d’une autre loi fédérale, les activités de TC et du commissaire n’étaient pas concomitantes. Après l’évaluation de consultation, TC n’agissait plus au titre d’une autre loi fédérale et le commissaire pouvait poursuivre son enquête ou décider de ne pas y mettre fin en vertu du paragraphe 24(1).

C.        Analyse et conclusion

[105]   Les parties ont mis l’accent sur les expressions tirées du paragraphe 23(1), mais pas nécessairement dans le contexte de la LPFDAR. Compte tenu de l’importance de la législation sur les lanceurs d’alerte pour [traduction] « dénoncer et punir les actes répréhensibles dans le secteur public », le terme « saisi » doit tirer son sens de ce contexte. Le terme ne peut pas être interprété si largement qu’elle frustre l’esprit et l’intention de la loi. Porter l’acte répréhensible à l’attention de l’administrateur général n’est qu’un aspect de l’intention d’une enquête. L’exposition publique est obligatoire lorsqu’une enquête conclut à l’existence d’un acte répréhensible.

[106]   La loi porte sur les actes répréhensibles d’une ampleur telle qu’ils pourraient miner la confiance du public s’ils n’étaient pas signalés et corrigés. Lorsque le commissaire est « saisi » d’une allégation d’acte répréhensible, il s’agit d’une question qui, si elle est avérée, implique une menace grave à l’intégrité de la fonction publique. C’est pourquoi, avant qu’une enquête soit ouverte, une analyse est faite pour établir que la divulgation a un certain mérite. C’est aussi pour cette raison que les enquêteurs se distinguent des analystes.

[107]   Les dispositions sur la divulgation de la LPFDAR visent à découvrir des actes répréhensibles passés, à les porter à l’attention du public et à mettre en place des mesures correctives pour éviter que ces actes ne se reproduisent. Comme l’indiquent le plan de surveillance et l’évaluation de consultation, TC mettait l’accent sur la recherche de lacunes dans les procédures existantes et l’offre de conseils en lien avec la réglementation à venir. Le contexte et le but des activités de TC sont totalement différents de ceux de l’analyse et de l’enquête sur les allégations contenues dans la divulgation menées par le commissaire au titre de la LPFDAR.

[108]   TC menait un examen d’ensemble de la SDSA et non un examen propre au SAO. En vertu du plan de surveillance, des visites ont été faites au quartier général de la SDSA et dans 4 sections de l’air, y compris la SAO. La SAO est l’une de 19 sections de l’air de la SDSA à travers le pays.

[109]   TC rendait également compte à l’auteur potentiel des actes répréhensibles, sans aucune obligation de rendre publiques ses observations ou ses recommandations. Les activités de TC étaient de nature consultative, et ne constituaient pas une enquête. À plusieurs reprises et de différentes façons, TC a répété aux enquêteurs que son rôle auprès de la GRC était davantage celui d’un conseiller — il n’a pas agi en vertu [traduction] « d’un mode de réglementation » — et que son travail consistait essentiellement à mener un audit. Bien que la GRC affirme que la qualité de l’activité de l’autre instance ne soit pas pertinente, je ne crois pas que la LPFDAR doive être interprétée de façon aussi large, puisqu’une telle interprétation ferait complètement abstraction de l’esprit et de l’intention de la loi.

[110]   Un courriel envoyé le 18 août 2014 par Sean Flatt à l’un des enquêteurs souligne une différence importante dans l’approche adoptée par TC par rapport à celle du commissaire dans la façon de traiter la question de la non-conformité au RAC par le SAO. M. Flatt a dit :

[traduction] Traiter des questions de non-conformité par voie de PMC est la méthode de choix pour toute organisation, puisque notre objectif est de rétablir la conformité. Des outils d’intensité progressive pour veiller à l’application de la loi sont disponibles si une organisation ne se conforme pas à la loi.

[…]

Je souhaite sincèrement que la Sous-direction des services de l’air de la GRC continue d’axer ses efforts sur les mesures correctives qu’elle a élaborées dans le but d’en arriver à une conformité constante à la réglementation. S’attarder sur une réponse punitive à des questions de non-conformité passées ne servirait qu’à perturber les efforts positifs en cours.

[111]   Le fait que le résultat final — les mesures prises par la GRC sur l’avis de TC — a été jugé satisfaisant par le commissaire ne modifie ni n’affecte la légitimité de son enquête sur les actes répréhensibles. Le dépôt du rapport au Parlement constitue un élément important du processus d’alerte. La reconnaissance par la GRC, même à contrecœur, de la conclusion qu’il y a effectivement eu contravention au règlement lorsque des entrées inexactes ont été faites dans les carnets de route n’aurait pas autrement été rendue publique.

[112]   Le fait que TC traite de telles contraventions d’une manière différente est la différence entre l’approche d’un organisme de réglementation et l’approche d’une personne dont le mandat est de préserver et d’améliorer l’intégrité des fonctionnaires et la confiance du public envers l’administration fédérale. Cela se fait en établissant des procédures efficaces de divulgation d’actes répréhensibles. Une fois que le mérite de la divulgation a été établi, ces procédures conduisent à une analyse plus poussée et à une enquête, s’il y a lieu. Il s’agit d’être « saisi » de façon continue de la divulgation, selon un processus prudent qui s’efforce de faire en sorte que seules les divulgations les plus importantes, faites en temps opportun et de bonne foi soient instruites.

[113]   La LPFDAR est une loi réparatrice. À ce titre, l’article 12 de la Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. 1-21, exige qu’elle soit interprétée « de la manière la plus équitable et la plus large qui soit compatible avec la réalisation de son objet ». Le législateur ne peut pas avoir voulu que le paragraphe 23(1) soit interprété de manière tellement large qu’une procédure lancée plusieurs mois après que le commissaire a commencé à donner suite à une divulgation, présentée par une autre instance dans un but différent, vouée au résultat qualitativement différent d’un rapport privé, sans égard à la conclusion, et n’examinant que des éléments de preuve récents et très différents, puisse suffire à empêcher le commissaire de déterminer si une allégation grave d’actes répréhensibles passés est avérée et, si c’est le cas, de les rendre publics.

[114]   Je reconnais que la GRC croit fermement avoir pris des mesures proactives lorsqu’elle a pour la première fois reçu la version originale du rapport négatif de Beaconsfield. La GRC croit sincèrement qu’elle faisait sans raison l’objet d’une enquête du commissaire. Elle souhaite comprendre les conditions du paragraphe 23(1). Il s’agit ici d’un cas d’espèce. Sans savoir exactement où se trouve la limite qui, lorsqu’elle est franchie, déclenche l’application du paragraphe 23(1), je suis sûre qu’elle n’a pas été franchie en l’espèce. Je formulerai également, plus loin dans ces motifs, une autre analyse qui pourrait être utile à l’avenir.

[115]   À mon avis, le commissaire a interprété de façon raisonnable les activités de TC en concluant que TC n’agissait pas au titre d’une autre loi fédérale. TC l’a indiqué à ses enquêteurs directement par téléphone et par courriel, et dans l’évaluation de consultation qu’ils ont faite. Parmi ses raisons, ainsi qu’il les a communiquées à la GRC, le commissaire a indiqué conclure que le paragraphe 23(1) ne s’appliquait pas parce que [traduction] « comme vous et TC l’avez confirmé, les plans de mesures correctives sont des arrangements volontaires qui n’engagent pas les outils d’application de la loi au titre de la Loi sur l’aéronautique » et [traduction] « parce que la GRC peut se retirer unilatéralement du processus de plans de mesures correctives et que Transports Canada ne peut pas obliger la prise de mesures de suivi contre la GRC en vertu des plans de mesures correctives eux-mêmes » (courriels envoyés par le commissaire à la GRC le 14 octobre 2014 et le 10 novembre 2014, respectivement).

[116]   Même en jugeant raisonnable l’interprétation très large faite par la GRC, l’interprétation faite par le commissaire l’est tout autant, en raison de la nature importante de ses obligations au titre de la LPFDAR. Il est raisonnable de conclure qu’un rapport privé, commandé par l’auteur des actes répréhensibles allégués, même avec les meilleures intentions du monde, ne peut supplanter le travail du commissaire. Ceci est particulièrement vrai lorsque le rapport privé ne comporte aucun élément de responsabilité publique. Lorsque des interprétations raisonnables concomitantes d’une loi sont proposées, la Cour suprême du Canada a conclu que le décideur administratif qui interprète sa loi constitutive a « le pouvoir discrétionnaire de lever toute incertitude législative en retenant une interprétation que permet raisonnablement le libellé de la disposition en cause ». La déférence judiciaire « constitue alors en elle-même un principe d’interprétation législative moderne » (McLean c. Colombie-Britannique (Securities Commission), 2013 CSC 67, [2013] 3 R.C.S. 895, au paragraphe 40).

VI.       L’interprétation du paragraphe 24(1) était-elle raisonnable?

A.        Thèses des parties

[117]   La GRC affirme que le paragraphe 24(1) ne s’applique pas parce que le paragraphe 23(1) interdit au commissaire de mener une enquête, de sorte qu’il n’est jamais question du paragraphe 24(1). Elle fait valoir que le commissaire peut s’appuyer sur l’alinéa 24(1)a) pour déterminer si l’autre instance a adéquatement été saisie de l’objet de la divulgation. Dans ce cas, le commissaire aura l’avantage de l’information provenant de l’autre instance.

[118]   La GRC soutient que cette approche, dans laquelle l’article 24 permet un examen a posteriori de la façon dont une autre instance a été saisie de l’objet plutôt que de permettre au commissaire de reprendre le processus au titre du paragraphe 23(1), est cohérent avec l’intention de la LPFDAR, qui est de porter les actes répréhensibles à l’attention des administrateurs généraux et de formuler des recommandations de mesures correctives. La GRC a limité son analyse à cet aspect du paragraphe 24(1) et n’a pas examiné la question de savoir si l’autre instance pouvait être mieux placée pour être saisi de l’objet ni l’autre intention de dénoncer et de punir les actes répréhensibles au sein du secteur public.

[119]   La GRC a demandé instamment au commissaire de mettre fin à son enquête au titre des alinéas 24(1)a), d) et f), au motif que [traduction] « les lacunes par rapport à des exigences réglementaires, sont traitées en consultation avec les inspecteurs de l’aviation civile de TC » et que [traduction] « si le SAO est incapable de mettre en œuvre les plans de mesures correctives, le ministre des Transports dispose déjà des pouvoirs discrétionnaires requis pour passer aux mesures d’application ou aux pénalités prévues par la Loi sur l’aéronautique » (lettre du 22 mai 2014 du commissaire Paulson au commissaire Dion).

[120]   Le commissaire souligne que TC avait terminé son évaluation en novembre 2013 et que si le paragraphe 23(1) s’était déjà appliqué, la restriction a cessé d’exister au moment où l’évaluation menée par TC a été complétée. Le commissaire affirme qu’il était à ce moment-là libre d’exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 24(1) de poursuivre son enquête.

[121]   Le commissaire fait également valoir que l’alinéa 24(1)a) lui confère le pouvoir discrétionnaire de mettre fin à une enquête « s’il est d’avis » que l’objet de la divulgation a été instruit comme il se doit « dans le cadre d’une procédure prévue par toute autre loi fédérale » et que, en corollaire, il peut refuser de mettre fin à une enquête s’il estime que l’objet de la divulgation n’a pas été instruit comme il se doit dans le cadre de cette autre procédure.

[122]   Dans sa réponse aux commentaires du commissaire Paulson sur le paragraphe 24(1), le commissaire a décidé que, puisque les résultats préliminaires démontrent que [traduction] « des actes répréhensibles pourraient avoir été commis à plusieurs reprises au SAO » et que, si c’est le cas, ces actes représentent [traduction] « une question grave d’intérêt public », il ne croyait pas qu’il existait un motif valide de mettre fin à l’enquête avant sa conclusion.

B.        Analyse et conclusion

[123]   La Cour d’appel [fédérale], dans l’arrêt Agnaou no 2, confirme qu’il « est évident que le commissaire a une discrétion très large pour décider de ne pas donner suite à une divulgation ou de ne pas faire enquête en vertu de l’article 24 de la Loi » (voir le paragraphe 59).

[124]   Dans la décision Detorakis c. Canada (Procureur général), 2010 CF 39 (Detorakis), au paragraphe 106, le juge Russell conclut que le pouvoir discrétionnaire du commissaire au titre du paragraphe 24(1) a une très large portée :

[…]

(i)   Le pouvoir discrétionnaire prévu au paragraphe 24(1) a une très large portée. Il semble qu’il vise à permettre au commissaire de décider s’il est dans l’intérêt du public de faire enquête sur la plainte ou de déterminer, sur la foi des renseignements fournis par le plaignant, si l’affaire pourrait avantageusement être instruite sous le régime d’une autre loi. Il y a lieu de présumer que le commissariat possède une certaine expertise en la matière.

[125]   Cette conclusion dans la décision Detorakis a été soulignée avec approbation à deux reprises par la Cour d’appel [fédérale] (dans l’arrêt Agnaou no 1 et dans l’arrêt Agnaou c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 29 [précité] (souvent appelée l’arrêt Agnaou no 2)) ainsi que dans plusieurs décisions subséquentes de la Cour.

[126]   Je suis d’accord avec la GRC pour dire que le paragraphe 24(1) fournit au commissaire un examen a posteriori des activités d’une autre instance. Il reste à déterminer à quel moment correspond « a posteriori ».

[127]   Les faits ne permettent pas d’établir clairement à quel moment TC a cessé de traiter des questions examinées en vertu de son plan de surveillance. Tout indique que TC a estimé son travail terminé en janvier 2014, au moment où l’évaluation de consultation a été préparée et présentée. Ce travail contenait les conclusions et les recommandations. L’échéancier du plan de surveillance prévoyait que le rapport final soit remis en décembre ou janvier. La conclusion du dernier paragraphe de l’évaluation de consultation indique que TC considérait son travail comme étant terminé :

[traduction] C’est avec une sincère gratitude envers la GRC que Transports Canada a été invité à évaluer les opérations de la Sous-direction des services de l’air. Le personnel de la SDSA est résolu à faire son travail d’une manière très professionnelle et nous avons bon espoir que les changements seront positifs. C’est avec confiance que ce rapport est présenté à titre de catalyseur de poursuite du changement. Nous vous remercions du temps et des efforts consentis pour accommoder l’équipe de Transports Canada.

[128]   Compte tenu de tous ces renseignements, il était raisonnable pour le commissaire de conclure que TC avait terminé son évaluation en décembre 2013 ou en janvier 2014 et qu’il était libre de décider si le travail avait été fait de manière adéquate. Le commissaire a décidé de ne pas mettre un terme à son enquête compte tenu de la conclusion préliminaire d’acte répréhensible touchant des questions de sécurité publique en aviation.

[129]   Sinon, il était entièrement raisonnable pour le commissaire, compte tenu de son expertise reconnue dans la décision Detorakis, de déterminer que l’intérêt public commandait de mener l’enquête jusqu’à sa conclusion. L’alinéa 24(1)f) permet au commissaire d’exercer son pouvoir discrétionnaire s’il estime « que cela est opportun pour tout autre motif justifié ». En ajoutant cette disposition « de portée générale », le législateur a conféré au commissaire une immense latitude. Sa considération selon laquelle l’intérêt public exigeait de déterminer si la GRC avait commis des actes répréhensibles, compte tenu de la nature des allégations, était raisonnable.

VII.      Analyse supplémentaire des articles 23 et 24

[130]   Il existe un détail important qui n’a pas été abordé directement par les parties, mais qui est sous-jacent à leurs arguments. Le commissaire avait été saisi de la divulgation d’actes répréhensibles à l’endroit du SAO longtemps avant que la GRC n’invite TC à examiner les opérations de la SDSA. La divulgation a été reçue en janvier 2013. La GRC a sollicité les services de TC en août 2013.

[131]   Une lecture simple du paragraphe 23(1) montre qu’il est rédigé au présent. Au moment où le commissaire a entrepris d’instruire la divulgation et pendant les sept mois suivants, personne d’autre n’était saisi de l’objet de la divulgation. En fait, ce n’est qu’un an après avoir commencé à instruire la divulgation que le commissaire a su que TC était engagé auprès du SAO. Sur ce fondement, le paragraphe 23(1) était proprement utilisé par le commissaire dès le début.

[132]   Lorsque TC a été invité à examiner les opérations du SAO, rien dans l’article 23 ne l’empêchait de mener son évaluation. L’article 23 ne concerne que le commissaire. Exiger du commissaire qu’il cède la place à une autre instance administrative fédérale dans de telles circonstances, compte tenu de l’importance qu’accorde la LPFDAR à la dénonciation des actes répréhensibles, exige une formulation très claire. La formulation claire précisant dans quelles circonstances le commissaire pourrait décider de mettre fin à son enquête sur la divulgation se trouve à l’alinéa 24(1)a). Soit l’objet de la divulgation a été instruit comme il se doit par une autre instance, soit il pourrait l’être avantageusement par une autre instance.

[133]   L’article 23 a une application relativement étroite. Il s’applique lorsque le commissaire reçoit une divulgation et qu’une autre instance instruit déjà l’objet de la divulgation en vertu d’une loi fédérale. Ce n’est pas le cas en l’espèce. Mais si cela avait été le cas, comme on l’a fait valoir ici, j’estime que la question de savoir si le commissaire pouvait ne pas instruire la divulgation exige d’examiner la nature de l’expression « est saisi » dans le contexte de l’intention et des objets de la LPFDAR.

[134]   Ce n’est qu’à la fin de novembre 2013 que les enquêteurs du commissaire ont pour la première fois été informés de l’engagement de TC. Des contacts ont été établis avec TC début décembre 2013, mais les enquêteurs n’ont eu aucune information sur le rôle de TC avant janvier 2014, lorsqu’ils ont reçu l’évaluation de consultation. À ce moment-là, l’alinéa 24(1)a) donnait au commissaire le pouvoir discrétionnaire de mettre fin à son enquête s’il estimait que l’objet de la divulgation avait été instruit comme il se doit par TC. Or, si on retient l’argument de la GRC selon lequel TC continuait d’instruire l’objet du fait des PMC, le commissaire aurait pu se demander si TC pouvait plus avantageusement instruire l’objet de la divulgation dans le cadre d’une procédure prévue par la Loi sur l’aéronautique.

[135]   Dans ce cas, le paragraphe 24(1) indique ce que doit faire le commissaire lorsqu’une autre instance commence à donner suite à l’objet après qu’il a lui-même entrepris de l’instruire au titre de l’article 23. Pour les motifs déjà donnés, je suis d’avis que le commissaire a raisonnablement établi son opinion en vertu de l’article 24 après avoir reçu un complément d’information. Il a ensuite fourni de bonnes raisons de refuser de mettre fin à l’enquête sur la divulgation.

VIII.     Conclusion

[136]   Compte tenu de la nature de l’évaluation de consultation menée par TC, tel qu’elle est énoncée dans les présents motifs, la conclusion du commissaire en vertu du paragraphe 23(1) que TC n’agissait pas en vertu d’une autre loi fédérale était raisonnable et ne devrait pas être annulée.

[137]   À la lumière des faits en l’espèce et de l’expertise du commissaire, ainsi que du vaste pouvoir discrétionnaire qui lui est accordé par l’article 24, la décision du commissaire de ne pas mettre fin à son enquête après avoir été informé des activités de TC est inattaquable.

[138]   Pour les motifs établis ci-dessous, la demande est rejetée.

[139]   Les parties ont convenu qu’il n’y aurait pas d’ordonnance de dépens, peu importe l’issue de la cause.

JUGEMENT

LA COUR rejette la présente demande.

ANNEXE

Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles

Loi prévoyant un mécanisme de divulgation des actes répréhensibles et de protection des divulgateurs dans le secteur public

[…]

Préambule

Attendu :

que l’administration publique fédérale est une institution nationale essentielle au fonctionnement de la démocratie parlementaire canadienne;

qu’il est dans l’intérêt public de maintenir et d’accroître la confiance du public dans l’intégrité des fonctionnaires;

que la confiance dans les institutions publiques ne peut que profiter de la création de mécanismes efficaces de divulgation des actes répréhensibles et de protection des fonctionnaires divulgateurs, et de l’adoption d’un code de conduite du secteur public;

que les fonctionnaires ont un devoir de loyauté envers leur employeur et bénéficient de la liberté d’expression garantie par la Charte canadienne des droits et libertés et que la présente loi vise à atteindre l’équilibre entre ce devoir et cette liberté;

que le gouvernement du Canada s’engage à adopter une charte des valeurs du service public énonçant les valeurs qui guident les fonctionnaires dans leur conduite et leurs activités professionnelles,

Sa Majesté, sur l’avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, édicte :

[…]

Définitions

Définitions

2 (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

[…]

enquête Pour l’application des articles 24, 25, 26 à 31, 33, 34, 36 et 37, toute enquête menée sur une divulgation ou commencée au titre de l’article 33.

[…]

Actes répréhensibles

Actes répréhensibles

8 La présente loi s’applique aux actes répréhensibles ci-après commis au sein du secteur public ou le concernant :

a) la contravention d’une loi fédérale ou provinciale ou d’un règlement pris sous leur régime, à l’exception de la contravention de l’article 19 de la présente loi;

b) l’usage abusif des fonds ou des biens publics;

c) les cas graves de mauvaise gestion dans le secteur public;

d) le fait de causer — par action ou omission — un risque grave et précis pour la vie, la santé ou la sécurité humaines ou pour l’environnement, à l’exception du risque inhérent à l’exercice des attributions d’un fonctionnaire;

e) la contravention grave d’un code de conduite établi en vertu des articles 5 ou 6;

f) le fait de sciemment ordonner ou conseiller à une personne de commettre l’un des actes répréhensibles visés aux alinéas a) à e).

[…]

Attributions du commissaire

Attributions

22 Le commissaire exerce aux termes de la présente loi les attributions suivantes :

a) fournir des renseignements et des conseils relatifs aux divulgations faites en vertu de la présente loi et à la tenue des enquêtes menées par lui;

b) recevoir, consigner et examiner les divulgations afin d’établir s’il existe des motifs suffisants pour y donner suite;

c) mener les enquêtes sur les divulgations visées à l’article 13 ou les enquêtes visées à l’article 33, notamment nommer des personnes pour les mener en son nom;

d) veiller à ce que les droits, en matière d’équité procédurale et de justice naturelle, des personnes mises en cause par une enquête soient protégés, notamment ceux du divulgateur, des témoins et de l’auteur présumé de l’acte répréhensible;

e) sous réserve de toute autre loi fédérale applicable, veiller, dans toute la mesure du possible et en conformité avec les règles de droit en vigueur, à ce que l’identité des personnes mises en cause par une divulgation ou une enquête soit protégée, notamment celle du divulgateur, des témoins et de l’auteur présumé de l’acte répréhensible;

f) établir des procédures à suivre pour le traitement des divulgations et assurer la confidentialité des renseignements recueillis relativement aux divulgations et aux enquêtes;

g) examiner les résultats des enquêtes menées sur une divulgation ou commencées au titre de l’article 33 et faire rapport de ses conclusions aux divulgateurs et aux administrateurs généraux concernés;

h) présenter aux administrateurs généraux concernés des recommandations portant sur les mesures correctives à prendre et examiner les rapports faisant état des mesures correctives prises par les administrateurs généraux à la suite des recommandations;

i) recevoir et examiner les plaintes à l’égard des représailles, enquêter sur celles-ci et y donner suite.

Interdictions d’intervenir

23 (1) Le commissaire ne peut donner suite à une divulgation faite en vertu de la présente loi ou enquêter au titre de l’article 33 si une personne ou un organisme — exception faite d’un organisme chargé de l’application de la loi — est saisi de l’objet de celle-ci au titre d’une autre loi fédérale.

[…]

Refus d’intervenir

24 (1) Le commissaire peut refuser de donner suite à une divulgation ou de commencer une enquête ou de la poursuivre, s’il estime, selon le cas :

a) que l’objet de la divulgation ou de l’enquête a été instruit comme il se doit dans le cadre de la procédure prévue par toute autre loi fédérale ou pourrait l’être avantageusement selon celle-ci;

b) que l’objet de la divulgation ou de l’enquête n’est pas suffisamment important;

c) que la divulgation ou la communication des renseignements visée à l’article 33 n’est pas faite de bonne foi;

d) que cela serait inutile en raison de la période écoulée depuis le moment où les actes visés par la divulgation ou l’enquête ont été commis;

e) que les faits visés par la divulgation ou l’enquête résultent de la mise en application d’un processus décisionnel équilibré et informé;

f) que cela est opportun pour tout autre motif justifié.

[…]

Avis

(3) En cas de refus de donner suite à une divulgation ou de commencer une enquête, le commissaire en donne un avis motivé au divulgateur ou à la personne qui lui a communiqué les renseignements visés à l’article 33.

[…]

Enquêtes

Objet des enquêtes

26 (1) Les enquêtes menées sur une divulgation ou commencées au titre de l’article 33 ont pour objet de porter l’existence d’actes répréhensibles à l’attention des administrateurs généraux et de leur recommander des mesures correctives.

[…]

Enquête sur un autre acte répréhensible

33 (1) Si, dans le cadre d’une enquête ou après avoir pris connaissance de renseignements lui ayant été communiqués par une personne autre qu’un fonctionnaire, le commissaire a des motifs de croire qu’un acte répréhensible — ou, dans le cas d’une enquête déjà en cours, un autre acte répréhensible — a été commis, il peut, s’il est d’avis sur le fondement de motifs raisonnables, que l’intérêt public le commande, faire enquête sur celui-ci, sous réserve des articles 23 et 24; les dispositions de la présente loi applicables aux enquêtes qui font suite à une divulgation s’appliquent aux enquêtes menées en vertu du présent article.

[…]

Rapports

[…]

Rapport annuel

38 (1) Dans les trois mois suivant la fin de chaque exercice, le commissaire prépare un rapport annuel de ses activités pendant l’exercice.

[…]

Rapport sur le cas

(3.1) S’il a fait un rapport à un administrateur général à l’égard d’une enquête menée sur une divulgation ou commencée au titre de l’article 33 où il conclut qu’un acte répréhensible a été commis, le commissaire prépare, dans les soixante jours, un rapport sur le cas faisant état :

a) de sa conclusion;

[…]

Dépôt du rapport

(3.3) Le commissaire présente, dans le délai prévu au paragraphe (1) ou (3.1) dans le cas du rapport qui y est visé ou à toute époque de l’année dans le cas d’un rapport spécial, son rapport au président de chaque chambre, qui le dépose immédiatement devant la chambre qu’il préside ou, si elle ne siège pas, dans les quinze premiers jours de séance de celle-ci suivant la réception du rapport.

Loi sur les Cours fédérales

Loi concernant la Cour d’appel fédérale et la Cour fédérale

[…]

Compétence de la Cour fédérale

[…]

Recours extraordinaires : offices fédéraux

18 (1) Sous réserve de l’article 28, la Cour fédérale a compétence exclusive, en première instance, pour :

a) décerner une injonction, un bref de certiorari, de mandamus, de prohibition ou de quo warranto, ou pour rendre un jugement déclaratoire contre tout office fédéral;

b) connaître de toute demande de réparation de la nature visée par l’alinéa a), et notamment de toute procédure engagée contre le procureur général du Canada afin d’obtenir réparation de la part d’un office fédéral.

Recours extraordinaires : Forces canadiennes

(2) Elle a compétence exclusive, en première instance, dans le cas des demandes suivantes visant un membre des Forces canadiennes en poste à l’étranger : bref d’habeas corpus ad subjiciendum, de certiorari, de prohibition ou de mandamus.

Exercice des recours

(3) Les recours prévus aux paragraphes (1) ou (2) sont exercés par présentation d’une demande de contrôle judiciaire.

Demande de contrôle judiciaire

18.1 (1) Une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par le procureur général du Canada ou par quiconque est directement touché par l’objet de la demande.

Délai de présentation

(2) Les demandes de contrôle judiciaire sont à présenter dans les trente jours qui suivent la première communication, par l’office fédéral, de sa décision ou de son ordonnance au bureau du sous-procureur général du Canada ou à la partie concernée, ou dans le délai supplémentaire qu’un juge de la Cour fédérale peut, avant ou après l’expiration de ces trente jours, fixer ou accorder.

Pouvoirs de la Cour fédérale

(3) Sur présentation d’une demande de contrôle judiciaire, la Cour fédérale peut :

a) ordonner à l’office fédéral en cause d’accomplir tout acte qu’il a illégalement omis ou refusé d’accomplir ou dont il a retardé l’exécution de manière déraisonnable;

b) déclarer nul ou illégal, ou annuler, ou infirmer et renvoyer pour jugement conformément aux instructions qu’elle estime appropriées, ou prohiber ou encore restreindre toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l’office fédéral.

Motifs

(4) Les mesures prévues au paragraphe (3) sont prises si la Cour fédérale est convaincue que l’office fédéral, selon le cas :

a) a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou refusé de l’exercer;

b) n’a pas observé un principe de justice naturelle ou d’équité procédurale ou toute autre procédure qu’il était légalement tenu de respecter;

c) a rendu une décision ou une ordonnance entachée d’une erreur de droit, que celle-ci soit manifeste ou non au vu du dossier;

d) a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

e) a agi ou omis d’agir en raison d’une fraude ou de faux témoignages;

f) a agi de toute autre façon contraire à la loi.

Vice de forme

(5) La Cour fédérale peut rejeter toute demande de contrôle judiciaire fondée uniquement sur un vice de forme si elle estime qu’en l’occurrence le vice n’entraîne aucun dommage important ni déni de justice et, le cas échéant, valider la décision ou l’ordonnance entachée du vice et donner effet à celle-ci selon les modalités de temps et autres qu’elle estime indiquées.

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