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[2014] 1 R.C.F. 405

IMM-8165-11

2012 CF 993

Xin Cai Hou (aussi appelé Xincai Hou) (demandeur)

c.

Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (défendeur)

Répertorié : Hou c. Canada (Citoyenneté et Immigration)

Cour fédérale, juge Gleason—Toronto, 11 juin; Ottawa, 14 août 2012.

Citoyenneté et Immigration — Statut au Canada — Réfugiés au sens de la Convention et personnes à protéger — Contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié rejetant la demande d’asile du demandeur — La SPR a conclu que le demandeur n’était pas crédible et que sa connaissance du Falun Gong était insuffisante — La SPR n’a pas cru que le demandeur avait été un adepte du Falun Gong en Chine et a établi que sa pratique au Canada avait été entreprise uniquement aux fins d’appuyer une demande d’asile frauduleuse —L’évaluation de la crédibilité qu’a faite la SPR était raisonnable — La SPR n’a pas privé le demandeur de son droit à l’équité procédurale — L’évaluation par la SPR de la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong reposait sur des preuves — La SPR n’a pas commis d’erreur dans son examen des motivations du demandeur à se livrer à la pratique du Falun Gong au Canada — La jurisprudence canadienne reconnaît que la motivation de l’engagement dans une pratique religieuse au Canada peut être examinée par la SPR dans une affaire pertinente — En l’espèce, l’évaluation et la conclusion de la SPR étaient raisonnables — Demande rejetée.

Il s’agissait d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié rejetant la demande d’asile du demandeur, un citoyen de la Chine. Le demandeur a déclaré être adepte du Falun Gong, que les membres de son groupe du Falun Gong avaient été arrêtés pour avoir distribué des feuillets et qu’il craignait d’être arrêté lui aussi.

La SPR n’a pas cru que le demandeur avait été un adepte du Falun Gong en Chine et a établi que sa pratique du Falun Gong au Canada avait été entreprise uniquement aux fins d’appuyer une demande d’asile frauduleuse. La SPR a donc conclu que si le demandeur était renvoyé en Chine, il ne serait pas perçu comme un véritable adepte et qu’il n’avait donc pas la qualité de réfugié au sens de la Convention.

Il s’agissait de déterminer si l’une ou l’autre des conclusions reprochées en ce qui concerne la crédibilité du demandeur était assez erronée pour justifier l’annulation de la décision, si la SPR avait privé le demandeur de son droit à l’équité procédurale par les observations reprochées au sujet de la connaissance qu’il avait de la religion, si la SPR avait commis une erreur susceptible de révision dans son évaluation de la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong, et si elle avait commis une erreur susceptible de révision dans son examen des motivations du demandeur à se livrer à la pratique du Falun Gong au Canada.

Jugement : la demande doit être rejetée.

L’évaluation de la crédibilité qu’a faite la Commission était raisonnable. Compte tenu des incohérences dans le témoignage du demandeur, les conclusions de la Commission relatives à la crédibilité lui donnaient une base solide pour établir que le demandeur n’était pas un véritable adepte du Falun Gong. Pour ce qui est du manquement allégué au devoir d’équité procédurale, les observations reprochées au commissaire, bien que malencontreuses, ne constituaient pas une violation du principe d’équité procédurale, car toutes les parties, par leur comportement subséquent, ont reconnu que le commissaire n’était pas satisfait du niveau d’exhaustivité des réponses données par le demandeur. De plus, la SPR n’a pas commis d’erreur susceptible de révision dans son évaluation de la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong puisqu’elle disposait de preuves à l’appui de sa conclusion.

Les motivations du demandeur à se livrer à la pratique du Falun Gong au Canada étaient pertinentes. La jurisprudence canadienne reconnaît bel et bien que la motivation de l’engagement dans une pratique religieuse au Canada peut être examinée par la SPR dans une affaire pertinente. La sincérité de ces croyances est un enjeu dans des affaires où, comme en l’espèce, la poursuite de la pratique religieuse dans le pays d’origine pourrait exposer le demandeur à un risque. On ne peut rejeter une revendication sur place uniquement à cause d’un manque de crédibilité ou d’un motif illégitime. La SPR doit évaluer la sincérité de la pratique religieuse du demandeur afin de déterminer si la personne s’exposera à un risque en retournant dans son pays d’origine. En l’espèce, la SPR a effectué une telle évaluation et sa conclusion était donc raisonnable.

LOIS ET RÈGLEMENTS CITÉS

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, art. 74, 96, 97.

Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 1 (mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 14), 18.1(4)d) (édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5; 2002, ch. 8, art. 27).

Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002-228, règle 5(1).

JURISPRUDENCE CITÉE

décisions appliquées :

Jin c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 595; Wang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 614.

décisions différenciées :

Ejtehadian c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 158; El Aoudie c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 450; Hannoon c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 408; Yin c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 544; Nadarasa c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 752.

décisions examinées :

Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190; Sketchley c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 404, [2006] 3 R.C.F. 392; Re HB, Refugee Appeal no 2254/94 (N.Z.R.A.A.); Velauthar c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] A.C.F. no 425 (C.A.) (QL); Li c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 1109 (1re inst.) (QL); Haji c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 528; Ghazizadeh v. Canada (Minister of Employment and Immigration) (1993), 154 N.R. 236 (C.A.F.); Huang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 205; Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1176.

décisions citées :

Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 732 (C.A.) (QL); Singh c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 486 (C.A.) (QL); Cetinkaya c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 8; Cao c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1436; Cao c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1174; Huang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 346; Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 270; Zhang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 503; Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339; Rohm & Haas Canada Ltd. et Tribunal antidumping, Re, [1978] A.C.F. no 522 (C.A.) (QL); Buttar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1281; Turner c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 159; Ke c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 862; Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817; Jia c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 444; Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 677.

DOCTRINE CITÉE

Hathaway, James. The Law of Refugee Status. Toronto : Butterworths, 1991.

Hongzhi, Li. The Great Way of Spiritual Perfection, 3e éd. traduite, juillet 2006, en ligne : <http://www.falundafa.org/book/eng/pdf/dymf_2006.pdf>.

Hongzhi, Li. Zhuan Falun, 3e éd. traduite. New York : Universe Pub. Co., 1999, en ligne : <http://www.falundafa.org/book/eng/doc/zflus.doc>.

DEMANDE de contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié rejetant la demande d’asile du demandeur. Demande rejetée.

ONT COMPARU

Michael Korman pour le demandeur.

Ildiko Erdei pour le défendeur.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Otis & Korman, Toronto, pour le demandeur.

Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement et du jugement rendus par

[1]        La juge Gleason : Le demandeur, un citoyen chinois, affirme être un adepte du Falun Gong. Il est entré au Canada avec l’aide d’un passeur en 2009 et y a revendiqué le statut de réfugié. La Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (la SPR ou la Commission) a rejeté sa revendication dans une décision rendue en date du 18 octobre 2011. Dans sa demande de contrôle judiciaire, le demandeur cherche à obtenir l’annulation de la décision de la SPR.

[2]        La SPR a rejeté la revendication du demandeur pour deux raisons. Premièrement, elle a constaté que le demandeur manquait de crédibilité en raison des nombreuses incohérences de son témoignage devant la Commission, de plusieurs incohérences supplémentaires entre ce qu’il a déclaré dans son témoignage et ce qu’il a écrit dans le formulaire sur les renseignements personnels (FRP) qu’il était tenu de remplir en vertu du paragraphe 5(1) des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002-228, et de sa façon de répondre aux questions du commissaire de la SPR qui a procédé à l’audience. Deuxièmement, la Commission a soutenu que la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong ne cadrait pas avec quelqu’un qui affirmait s’être livré à 17 ans de pratique continue et d’étude exhaustive du Zhuan Falun [3e éd. traduite. New York : Universe Pub. Co., 1999], le texte central du Falun Gong. En évaluant la sincérité des croyances du demandeur, la SPR n’a guère accordé de poids aux lettres d’appui et aux pétitions déposées par le demandeur concernant sa pratique alléguée du Falun Gong au Canada.

[3]        Se fondant sur ces facteurs, la Commission n’a pas cru que le demandeur avait été un adepte du Falun Gong en Chine et a établi que sa pratique du Falun Gong au Canada avait été entreprise uniquement aux fins d’appuyer une demande d’asile frauduleuse. La SPR a donc conclu que si le demandeur était renvoyé en Chine, il ne serait pas perçu comme un véritable adepte et qu’il n’avait donc pas la qualité de réfugié au sens de la Convention, au sens de l’article 96 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR ou la Loi), ni celle de personne à protéger au sens de l’article 97 de la Loi.

[4]        Le demandeur soutient que la SPR a commis quatre erreurs susceptibles de révision dans sa décision. Il soutient premièrement que la Commission a commis plusieurs erreurs dans l’évaluation de sa crédibilité. Deuxièmement, le demandeur affirme que la SPR a fait erreur en concluant qu’il avait une connaissance limitée du Falun Gong parce qu’elle a imposé une norme de connaissance anormalement élevée et fondé sa conclusion en grande partie sur une interprétation erronée du Falun Gong. Troisièmement, le demandeur prétend que le commissaire de la SPR qui a rendu la décision a violé les principes d’équité procédurale en indiquant au cours de l’audience que le demandeur avait une « assez bonne » connaissance de la troisième leçon du Zhuan Falun, mais en fondant ensuite sa décision en partie sur le manque de connaissance qu’avait le demandeur de cette leçon. Enfin, le demandeur soutient que la SPR s’est trompée en examinant les motivations de sa pratique du Falun Gong au Canada, lesquelles n’ont selon lui aucune pertinence lorsqu’il s’agit d’évaluer s’il peut revendiquer valablement le statut de réfugié sur place ou sur la base de ses activités au Canada. Le demandeur soutient à cet égard que les autorités sur lesquelles s’appuie la SPR ne sont pas valables et que la présence ou l’absence d’une motivation de bonne foi pour se livrer à des activités susceptibles de donner lieu à une revendication sur place n’est pas un critère pertinent en droit canadien.

[5]        En l’occurrence, les questions suivantes se posent donc :

1. Quelle norme de contrôle s’applique à l’évaluation de chacune des erreurs alléguées par le demandeur?

2. Est-ce que l’une ou l’autre des conclusions reprochées en ce qui concerne la crédibilité du demandeur est assez erronée pour justifier l’annulation de la décision?

3. Le commissaire a-t-il privé le demandeur de son droit à l’équité procédurale par les observations reprochées au sujet de la connaissance qu’il avait de la troisième « leçon » du Zhuan Falun?

4. La SPR a-t-elle commis une erreur susceptible de révision dans son évaluation de la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong?

5. La SPR a-t-elle commis une erreur susceptible de révision dans son examen des motivations du demandeur à se livrer à la pratique du Falun Gong au Canada?

Chacune de ces questions est traitée ci-dessous.

Quelle norme de contrôle s’applique à l’évaluation de chacune des erreurs alléguées par le demandeur?

[6]        Premièrement, pour ce qui est de la norme de contrôle applicable, la norme déférente de la raisonnabilité s’applique aux conclusions de la Commission en matière de crédibilité, à son évaluation de la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong et à sa prise en considération des motivations du demandeur à pratiquer cette religion au Canada. Cependant, l’examen de l’allégation de violation du principe d’équité procédurale ne fait l’objet d’aucune déférence.

[7]        Pour ce qui est de l’examen des conclusions relatives à la crédibilité, il est bien établi qu’une certaine déférence s’impose à l’égard des conclusions auxquelles arrive un tribunal, y compris la SPR, en matière de crédibilité (voir p. ex. Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 732 (C.A.) (QL) (Aguebor), au paragraphe 4; Singh c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 486 (C.A.) (QL) (Singh), au paragraphe 3; Cetinkaya c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 8, au paragraphe 17).

[8]        La norme de la décision raisonnable est également applicable à l’évaluation par la Commission de la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong, puisqu’il s’agit d’une question de fait. À cet égard, il convient de noter que le demandeur n’allègue pas que la Commission a commis une erreur de droit en prenant en considération et en mettant à l’épreuve le niveau de connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong, affirmant plutôt que la conclusion à laquelle elle est arrivée était erronée. Dans la plupart des cas — mais pas tous — où elle a examiné cette question, cette Cour a appliqué la norme de la raisonnabilité à l’examen de l’évaluation faite par la SPR des connaissances religieuses d’un demandeur (voir p. ex. Jin c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 595 (Jin), aux paragraphes 5 et 17 (le juge Pinard); Cao c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1436 (Cao II), au paragraphe 19 (le juge Zinn); Chen c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1176 (Chen III), aux paragraphes 28 à 30 (le juge Russell); Wang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 614, aux paragraphes 13 et 20 (le juge Near); Cao c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1174 (Cao I), aux paragraphes 20 à 24 (le juge Mosley); Huang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 346 (Huang I), aux paragraphes 7 et 11 (le juge Mosley); Chen c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 270 (Chen I), au paragraphe 9 (le juge Barnes)). Bien que monsieur le juge Campbell semble avoir appliqué récemment la norme de la décision correcte dans Zhang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 503, au paragraphe 17, à mon sens l’approche adoptée dans la majorité des cas est la bonne, parce qu’il s’agit d’une question de fait et qu’il est fermement établi que les décisions factuelles rendues par les tribunaux inférieurs sont susceptibles de révision suivant la norme de la raisonnabilité (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 51; Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339, aux paragraphes 25 et 46).

[9]        En ce qui concerne la norme de contrôle applicable à l’examen par la SPR des motivations du demandeur à se livrer à la pratique du Falun Gong au Canada, là aussi, c’est la norme de la raisonnabilité qui s’applique, car, en l’occurrence, l’examen par la Commission des motivations du demandeur est une question mixte de droit et de fait; or, ces questions sont susceptibles de révision suivant la norme de la raisonnabilité (Dunsmuir, au paragraphe 51). En l’occurrence, la Commission devait évaluer la sincérité des convictions du demandeur afin de déterminer s’il était vraisemblable qu’il continue la pratique du Falun Gong s’il était renvoyé en Chine, car, sur la base de ces faits, c’est la poursuite de cette pratique qui aurait exposé le demandeur à un risque. La motivation est une considération pertinente pour jauger la sincérité des convictions du demandeur.

[10]      Il faut distinguer la présente cause de celles où le risque allégué dépend non pas du fait que le demandeur est susceptible ou non de poursuivre la pratique d’une religion dans son pays d’origine, mais plutôt du simple fait de s’être notoirement livré au Canada à une activité particulière qui, en elle-même, pourrait l’exposer au risque de persécution (voir p. ex. Ejtehadian c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 158 (Ejtehadian), traité plus en détail au paragraphe 64 ci-dessous). Dans de telles circonstances, il est permis de penser que l’examen de ce qui motive le comportement d’un demandeur au Canada pourrait s’avérer un type d’erreur de droit susceptible de révision suivant la norme de la décision correcte (voir Ejtehadian, au paragraphe 12). En effet, dans ce cas — contrairement à la présente affaire — la probabilité que le demandeur pratique sa religion s’il retourne dans son pays d’origine est sans rapport avec le risque auquel il s’expose. Ce risque découle du simple fait de s’être livré à certaines activités pendant son séjour au Canada. Ici, en revanche, le risque allégué découle de la probabilité que le demandeur se livrerait à la pratique du Falun Gong s’il était renvoyé en Chine, parce que les autorités chinoises ne persécutent pas les anciens adeptes du Falun Gong. Ainsi, il était nécessaire pour la SPR de déterminer si le demandeur était un adepte sincère de cette religion.

[11]      Il faut également distinguer les circonstances en l’espèce d’une grande partie de la jurisprudence du tribunal dans ce domaine, laquelle porte sur des situations où la Commission est allée jusqu’à omettre de prendre en considération le fait qu’une revendication avait été présentée sur place et a rejeté des demandes d’asile en se fondant uniquement sur sa conclusion qu’un demandeur avait commencé à pratiquer une religion pour soutenir une demande d’asile frauduleuse (voir p. ex. El Aoudie c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 450 (El Aoudie); Hannoon c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 448 (Hannoon); Yin c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 544 (Yin)). Dans ces affaires, il a en effet été statué que l’omission par la SPR d’évaluer un aspect essentiel d’une revendication constitue une erreur susceptible de révision à l’égard de laquelle aucune déférence ne s’impose (comme l’a récemment dit le juge Phelan dans un autre contexte lié à l’immigration, dans la décision Nadarasa c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 752, au paragraphe 26). En revanche, dans la présente affaire, j’examine l’évaluation par la Commission des motivations du demandeur dans le contexte de l’analyse qu’elle a réalisée de la revendication présentée sur place. Tel qu’il a été mentionné, il s’agit en l’espèce d’une question mixte de fait et de droit qui, à ce titre, justifie une révision suivant la norme de la raisonnabilité.

[12]      La norme de la raisonnabilité est très exigeante; elle oblige l’instance révisionnelle à faire preuve de déférence face à la décision du tribunal; une instance ne peut intervenir que si elle estime que les motifs du tribunal ne sont pas « justifi[és] […], transparen[ts] et […] intelligi[bles] » et que le résultat n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, au paragraphe 47, précité au paragraphe 8). Dans l’application de cette norme de déférence, peu importe que l’instance révisionnelle soit d’accord ou non avec la conclusion du tribunal, qu’elle fût arrivée à un résultat différent ou qu’elle eût pu avoir un raisonnement différent. Tant que les motifs sont compréhensibles et que le résultat est rationnel et soutenable à la lumière des faits et du droit applicable, une instance ne doit pas infirmer la décision d’un tribunal inférieur suivant la norme de contrôle de la raisonnabilité.

[13]      Dans l’évaluation de la raisonnabilité des conclusions factuelles d’un tribunal, il est fermement établi que l’instance révisionnelle ne peut ni ne doit soupeser à nouveau les éléments de preuve (Khosa, au paragraphe 61, précité au paragraphe 8). De fait, le critère qui permet de déterminer la raisonnabilité des conclusions factuelles de la SPR, y compris ses conclusions relatives à la crédibilité, est énoncé à l’alinéa 18.1(4)d) [édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5; 2002, ch. 8, art. 27] de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7 [art. 1 (mod., idem, art. 14)], qui dispose que la conclusion reprochée doit répondre à trois critères pour accueillir une demande de contrôle judiciaire : premièrement, la conclusion de fait doit être vraiment erronée; deuxièmement, elle doit avoir été tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont le tribunal dispose; enfin, la décision du tribunal doit être fondée sur cette conclusion erronée (Rohm & Haas Canada Ltd. et Tribunal antidumping, Re, [1978] A.C.F. no 522 (C.A.) (QL) (Rohm & Haas), au paragraphe 5; Buttar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1281, au paragraphe 12).

[14]      Enfin, pour ce qui est de la violation alléguée des principes d’équité procédurale, c’est à l’instance révisionnelle qu’il revient d’établir si la SPR a violé ces principes. Aucune déférence ne s’impose à la Commission à cet égard (voir p. ex. Turner c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 159, au paragraphe 43; Ke c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 862, au paragraphe 36). Comme l’a dit la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Sketchley c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 404, [2006] 3 R.C.F. 392, au paragraphe 53 :

Soit le décideur a respecté l’obligation d’équité dans les circonstances propres à l’affaire, soit il a manqué à cette obligation.

[15]      Ainsi, pour résumer, la norme de la décision raisonnable s’applique aux conclusions de la Commission relatives à la crédibilité, à son évaluation des connaissances religieuses du demandeur et à son examen des motivations de la pratique du Falun Gong par le demandeur au Canada, tandis qu’il y a lieu d’évaluer si, par sa conduite, le commissaire a violé les principes d’équité procédurale comme l’allègue le demandeur.

Est-ce que l’une ou l’autre des conclusions reprochées en ce qui concerne la crédibilité du demandeur est assez erronée pour justifier l’annulation de la décision?

[16]      Avant d’analyser la raisonnabilité des conclusions reprochées en ce qui a trait à la crédibilité, il est nécessaire de résumer les divers motifs invoqués par la SPR pour ne pas croire le demandeur, car le demandeur attaque pratiquement chacune des conclusions de la SPR.

[17]      À ce chapitre, la Commission a d’abord examiné les disparités entre le témoignage du demandeur et les déclarations qu’il avait faites dans les deux versions de son FRP concernant les motifs de l’arrestation alléguée d’autres membres du Falun Gong et les fondements de sa fuite hors de la Chine. Dans son témoignage à la SPR, le demandeur a déclaré que l’arrestation est survenue parce que les membres de son groupe du Falun Gong distribuaient des feuillets et qu’il craignait d’être arrêté lui aussi parce qu’il en avait également distribué. Cependant, il a négligé de mentionner ces faits dans son FRP initial, qu’il a rempli peu de temps après avoir revendiqué le statut de réfugié, et dans son FRP modifié, qu’il a rempli peu de temps avant l’audience. Interrogé sur cette incohérence, le demandeur a déclaré qu’il n’avait pas [traduction] « osé mentionner » la distribution de dépliants, parce qu’il n’était pas certain de la situation au Canada et qu’il craignait la présence d’espions chinois. La Commission n’a pas accepté cette explication parce que le demandeur avait participé à une manifestation en faveur du Falun Gong devant l’ambassade de Chine à Toronto, quelques jours à peine avant de remplir son premier FRP. Elle a estimé qu’il n’était ni plausible ni crédible que le demandeur ait eu trop peur pour remplir son FRP, un document essentiel à l’appui de sa demande d’asile, alors qu’il avait participé à une manifestation très publique pratiquement au même moment.

[18]      Ensuite, la Commission a commenté une autre contradiction dans le témoignage du demandeur. Interrogé sur la raison pour laquelle il avait manifesté devant l’ambassade de Chine, le demandeur a déclaré qu’il n’avait pas craint de manifester parce qu’il n’avait appris que par la suite que l’ambassade était équipée de caméras. Plus tard au cours de témoignage, cependant, il a déclaré qu’au moment de la manifestation, il était conscient de la possibilité d’être identifié s’il choisissait de participer à cette manifestation. La SPR a noté cette incohérence et souligné aussi que la déclaration du demandeur à savoir qu’il n’avait pas peur de manifester contredisait le motif qu’il avait invoqué pour passer sous silence, dans ses FRP, son rôle dans la distribution des feuillets. La Commission a tiré des inférences défavorables de ces contradictions.

[19]      La Commission a ensuite commenté une incohérence évidente entre le témoignage du demandeur et ses FRP, ainsi que les efforts qu’il a déployés pour tenter d’expliquer cette incohérence. Dans son témoignage, le demandeur a affirmé que son groupe du Falun Gong en Chine comptait huit membres, que quatre d’entre eux avaient été arrêtés et que l’un d’entre eux avait été [traduction] « persécuté à mort ». Dans ses FRP, toutefois, le demandeur n’a mentionné l’arrestation que d’une seule personne. Quand on lui a demandé de nommer les personnes qui, selon ses dires, avaient été arrêtées, le demandeur a donné quatre noms, mais pas celui de la personne qu’il avait nommée dans ses FRP. Quand la SPR a signalé ce détail au demandeur, il a répondu que les quatre personnes dont il avait donné le nom dans son témoignage appartenaient à un second groupe du Falun Gong dont il était également membre. La SPR a rejeté cette explication et conclu que le demandeur « a modifié son témoignage en vue de dissiper une incohérence manifeste ». Ce fait a également amené la Commission à tirer une inférence défavorable.

[20]      La Commission a ensuite commenté son interrogatoire du demandeur sur les raisons pour lesquelles il avait omis de mentionner, dans ses FRP, l’arrestation des quatre personnes et la mort de l’une d’elles. Le demandeur a allégué qu’il avait agi ainsi parce qu’il ne connaissait pas « tous les détails de ladite persécution » et qu’il ne voulait pas en faire mention parce qu’il aurait du mal à s’expliquer à l’audience. La Commission a rejeté cette explication, l’estimant non crédible.

[21]      La Commission s’est ensuite penchée sur une autre contradiction entre le témoignage du demandeur et ses FRP, à savoir que le demandeur avait affirmé dans son témoignage que son épouse avait reçu des menaces du Bureau de la sécurité publique (PSB) de la Chine, mais avait négligé d’en faire mention dans ses FRP. La SPR a une fois de plus tiré une inférence défavorable de cette incohérence. La SPR a également tiré une inférence défavorable du fait que, hormis les menaces alléguées, l’épouse et le fils du demandeur, en Chine, n’avaient eu aucun problème, notant que la documentation sur ce pays que la Commission avait en main indiquait que « les autorités chinoises utilisent en outre les membres de la famille de l’adepte en fuite comme otages afin de forcer les adeptes à quitter le mouvement du Falun Gong ». La SPR a estimé qu’il était peu plausible que les autorités chinoises se soient bornées à menacer d’arrestation l’épouse du demandeur si elles savaient que le demandeur était un adepte du Falun Gong.

[22]      La Commission a ensuite examiné une autre incohérence dans le témoignage du demandeur, notant qu’à un moment, il avait affirmé que le PSB n’était pas au courant de ses activités avec le Falun Gong en Chine, mais qu’il avait pourtant affirmé que les autorités auraient été en mesure de l’identifier dans un site Web du Falun Gong comme un participant à une manifestation contre le gouvernement chinois. La Commission a également noté que le demandeur n’avait mis de l’avant aucun élément prouvant que les autorités chinoises étaient au courant de sa pratique alléguée du Falun Gong.

[23]      Sur la base de ce qui précède, la SPR a conclu que le témoignage du demandeur relativement à l’arrestation de membres de ses groupes du Falun Gong en Chine n’était pas crédible et que le demandeur ne faisait pas l’objet de poursuites par les autorités chinoises pour ses prétendues activités en lien avec le Falun Gong en Chine.

[24]      La Commission s’est ensuite penchée sur la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong. La Commission a conclu que le demandeur ne manifestait pas un niveau de connaissance correspondant à celui d’une personne qui affirmait pratiquer le Falun Gong depuis près de 17 ans et qui prétendait avoir lu une des leçons du Zhuan Falun chaque semaine depuis 1994 quand il vivait en Chine et avoir continué de lire le Zhuan Falun quotidiennement au Canada. À titre d’exemple, la SPR a noté que le demandeur déclarait que la troisième leçon était sa préférée, mais qu’il était incapable de donner des détails significatifs sur le contenu de cette leçon, et que le demandeur était incapable de nommer plus d’une des huit principales caractéristiques particulières du Falun Gong décrites par le Maître Li dans le Zhuan Falun.

[25]      La SPR a ensuite pris en considération les lettres d’appui et les pétitions déposées par le demandeur en lien avec sa pratique alléguée du Falun Gong au Canada. L’une de ces lettres était de Joel Chipkar, vice-président de la Falun Dafa Association. Le demandeur affirme que la SPR aurait dû donner beaucoup de poids à cette lettre, car M. Chipkar avait été accepté à titre de témoin expert par la SPR dans d’autres affaires et cette lettre précisait que la Falun Dafa Association ne fournissait des lettres d’appui que dans les cas où elle était convaincue de la sincérité de la pratique du Falun Gong par le demandeur. Toutefois, la SPR n’a guère attribué de poids à la lettre de M. Chipkar et aux autres documents déposés par le demandeur à l’appui de l’allégation selon laquelle il était un véritable adepte du Falun Gong au Canada.

[26]      En ce qui concerne la lettre de M. Chipkar, la SPR a noté que cette lettre ne donnait aucune information sur la façon dont M. Chipkar avait rencontré le demandeur, qu’elle ne précisait pas s’il avait personnellement observé la pratique du Falun Gong par le demandeur et qu’elle n’indiquait pas non plus s’il avait procédé à une appréciation personnelle de la sincérité des croyances du demandeur. La SPR a également noté que la lettre de M. Chipkar était une photocopie et que M. Chipkar n’avait pas été appelé à témoigner, même si l’avocate avait indiqué qu’il était présent et avait l’intention de l’appeler à la barre. La SPR a noté en outre que la lettre et les autres documents de pratiquants présumés du Falun Gong se bornaient à attester que le demandeur était adepte du Falun Gong, sans donner de précision sur la sincérité de ses croyances, question que la Commission devait trancher.

[27]      Vu ce qui précède, la Commission a conclu que l’allégation faite par le demandeur qu’il était un véritable adepte du Falun Gong en Chine n’était pas crédible et, de plus, que le demandeur n’était pas devenu un véritable adepte au Canada.

[28]      En arrivant à cette dernière conclusion, la SPR a d’abord cité un dossier de 1994 [Re HB, Refugee Appeal no 2254/94] de l’Autorité d’appel en matière de statut de réfugié de la Nouvelle‑Zélande, où le président du conseil écrit :

[traduction] (c) S’il n’y avait pas d’exigence relative à la bonne foi dans une situation de demande d’asile sur place, l’appelant d’une décision sur le statut de réfugié aurait alors le moyen de déterminer unilatéralement s’il y a lieu de s’accorder le statut de réfugié.

[29]      La SPR a ensuite censément cité James C. Hathaway, dans The Law of Refugee Status (Toronto : Butterworths, 1991), affirmant que le professeur Hathaway avait écrit ce qui suit au sujet des revendications sur place : [traduction] « Une personne qui, en guise de stratagème, manipule délibérément les circonstances dans le but de créer un véritable risque de persécution qui n’existe pas au préalable, ne peut être réputée appartenir à cette catégorie » (c.-à-d. celle des demandeurs d’asile sur place). Comme il est mentionné plus bas, cependant, cette citation ne se trouve pas dans le livre du professeur Hathaway.

[30]      Enfin, la SPR a estimé que la revendication du demandeur n’avait pas été faite de bonne foi et elle a conclu comme suit, aux paragraphes 32 et 33 de la décision :

Ayant conclu que le demandeur d’asile n’était pas un véritable adepte du mouvement du Falun Gong quand il vivait en Chine, et que sa demande d’asile n’a pas été présentée de bonne foi, le tribunal estime que, selon la prépondérance des probabilités, et à la lumière des constatations qui précèdent, le demandeur d’asile est devenu membre dudit mouvement au Canada dans l’unique but de soutenir une demande d’asile frauduleuse. Le tribunal conclut que, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur d’asile a pris part aux activités du Falun Gong au Canada seulement pour se ménager une situation lui permettant de déposer une demande d’asile.

À la lumière de ce qui précède, ainsi que de l’ensemble des constatations et inférences défavorables susmentionnées, le tribunal conclut que, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur d’asile n’est pas un véritable adepte du Falun Gong et qu’il ne serait pas non plus perçu comme tel en Chine.

En se fondant sur l’ensemble de la preuve et sur ce qui se dégage de l’ensemble de ses constatations, le tribunal conclut que le demandeur d’asile ne s’est pas acquitté du fardeau d’établir qu’il est exposé à un risque sérieux de persécution ou qu’il y a un risque sérieux qu’il soit personnellement exposé à une menace à sa vie, au risque de traitements ou de peines cruels et inusités ou au risque d’être soumis à la torture par des autorités de la République populaire de Chine.

[31]      Le demandeur allègue que la SPR a commis huit erreurs susceptibles de révision dans son évaluation de la crédibilité et avance les arguments suivants :

1. La conclusion quant à une incohérence entre le témoignage du demandeur et ses FRP en raison de l’omission de mentionner la distribution de feuillets dans les FRP est déraisonnable parce que ces événements constituent un [traduction] « détail secondaire ».

2. La conclusion qu’il n’était ni plausible ni crédible pour le demandeur d’avoir été trop effrayé pour remplir correctement sa FRP, alors qu’il avait pourtant choisi de participer à une manifestation publique au même moment est [traduction] « hypothétique et déraisonnable » parce qu’il est habituel pour les adeptes du Falun Gong de manifester même s’ils craignent pour leur sécurité.

3. La Commission a déraisonnablement rejeté les motifs invoqués par le demandeur pour ne pas avoir mentionné son autre groupe du Falun Gong dans ses FRP, car la SPR n’a pas indiqué pourquoi elle rejetait l’explication du demandeur.

4. La Commission a formulé une hypothèse déraisonnable en affirmant que si le récit du demandeur était vrai, sa famille se serait exposée à des conséquences négatives, sans tenir compte du fait que les visites et avertissements répétés allégués du PSB étaient des conséquences négatives.

5. La conclusion de la SPR à savoir que le PSB n’était pas au courant que le demandeur était un adepte du Falun Gong en Chine était hypothétique, parce qu’elle était dénuée de fondement.

6. Le refus de la SPR d’accorder un poids approprié à la lettre de Joel Chipkar parce qu’il s’agissait d’une photocopie était déraisonnable, car ce détail est non pertinent pour la valeur probante de la lettre.

7. Le fait que la SPR s’est appuyée sur l’omission d’appeler M. Chipkar à témoigner est déraisonnable, car la Commission savait que sa disponibilité pour témoigner était limitée.

8. Enfin, il était déraisonnable que la Commission rejette les autres preuves documentaires censées confirmer la pratique du Falun Gong par le demandeur au Canada, car la SPR a omis d’évaluer les documents et d’indiquer pourquoi ils ne corroboraient pas l’identité du demandeur en tant qu’adepte du Falun Gong.

[32]      Chacune de ces assertions invite la Cour fédérale à entreprendre précisément le type d’analyse qui a été maintes et maintes fois jugé inapproprié dans le contexte d’une demande de contrôle judiciaire. Bref, le demandeur m’invite à soupeser à nouveau les éléments de preuve. Comme il a été mentionné, il est bien établi que cela ne peut ni ne doit se faire dans le contexte d’une demande comme celle-ci. Qui plus est, les arguments du demandeur ne sont pas convaincants. Pour ces motifs, les éléments de la contestation par le demandeur des conclusions de la Commission relatives à la crédibilité doivent être rejetés.

[33]      En ce qui a trait aux deux premiers arguments, contrairement à ce qu’affirme le demandeur, l’allégation relative à la distribution de feuillets n’est pas un « détail secondaire » dans la version des faits du demandeur. Comme l’a noté la SPR, cet événement a été présenté par le demandeur dans son témoignage comme le motif central pour lequel le PSB cherchait présumément à l’arrêter. Il constituait donc un élément clé du récit du demandeur, et son omission dans les FRP était un facteur que la SPR pouvait raisonnablement considérer dans sa mise en doute de la crédibilité du demandeur.

[34]      De même, l’assertion selon laquelle il était plutôt déraisonnable que la SPR n’ait pas trouvé plausible l’explication donnée par le demandeur pour justifier l’omission de ce détail dans ses FRP est dénuée de fondement. En déclarant qu’il arrive souvent que les adeptes du Falun Gong manifestent alors que cela pourrait les mettre en danger, le demandeur méconnaît le but du raisonnement de la Commission. Celle-ci a conclu que l’explication donnée par le demandeur manquait de crédibilité, non parce qu’il est incroyable qu’un adepte du Falun Gong puisse courir des risques en manifestant, mais plutôt parce que la volonté qu’avait le demandeur de manifester publiquement est incompatible avec son refus, motivé par une prétendue crainte, d’inclure un élément clé de sa revendication à son FRP, qui est un formulaire écrit. La conclusion de la Commission concernant l’invraisemblance de cette explication découle directement de la preuve et, de plus, cadre bien avec la portée de l’expertise de la SPR en ce qui concerne le comportement vraisemblable des demandeurs d’asile.

[35]      De même, le troisième des arguments ci-dessus invoqués par le demandeur n’est pas fondé. Il n’était pas nécessaire que la Commission insiste inutilement sur ses raisons de rejeter le récit changeant du demandeur concernant son appartenance à un second groupe du Falun Gong, alors que le commissaire avait mis en évidence la discordance fondamentale entre les FRP du demandeur et son témoignage quant au nombre et à l’identité des personnes qui avaient censément été arrêtées. L’explication donnée par le demandeur en réponse à cette constatation n’était pas convaincante et semble effectivement avoir été improvisée.

[36]      De même, la Commission pouvait raisonnablement considérer peu plausible la version des faits donnée par le demandeur, en raison de la discordance entre son récit et le comportement habituel du PSB à l’égard des membres de la famille d’adeptes du Falun Gong, tel qu’il ressort de la documentation relative au pays. À ce chapitre, la preuve documentaire indique que les partisans et les membres de la famille d’adeptes du Falun Gong font l’objet de harcèlement et, dans certains cas, d’arrestation par les autorités chinoises. La Commission a noté ce fait et y a ajouté foi raisonnablement.

[37]      En ce qui concerne le cinquième argument invoqué par le demandeur, une fois de plus, le motif de la décision de la Commission échappe au demandeur. La SPR a conclu que rien ne prouvait que le PSB était au courant des activités du demandeur, parce qu’aucune preuve n’en a été soumise si ce n’est sa propre affirmation, fondée sur les ouï-dire de son épouse, à savoir que le PSB était au courant de ses activités. À la lumière des nombreuses incohérences qui émaillent le témoignage du demandeur, il était raisonnable que la Commission rejette cette affirmation et exige une preuve indépendante pour corroborer l’affirmation selon laquelle le PSB avait connaissance des activités du demandeur en lien avec le Falun Gong. En l’absence de tout élément de preuve sur ce sujet, la conclusion de la Commission à savoir que le PSB n’était pas au courant des activités du demandeur n’est certes pas conjecturale, et sa conclusion à savoir que cette affirmation ne s’appuie sur aucune preuve est raisonnable.

[38]      Pour ce qui est de la façon dont la SPR a traité la lettre de Joel Chipkar, le raisonnement précis de la Commission sur ce point échappe encore une fois au demandeur. Comme il a été mentionné plus haut, la décision de la Commission d’accorder peu de poids à cette lettre se fonde principalement sur l’absence de détails dans la lettre en ce qui a trait à la sincérité des croyances du demandeur et de sa pratique du Falun Gong. Certes, le demandeur a raison de noter que le fait qu’il s’agit d’une photocopie n’est pas un élément probant pour apprécier la fiabilité du document, car il arrive souvent que des copies soient soumises en preuve à la SPR et la Commission n’est pas tenue d’appliquer de façon stricte les règles de la preuve, mais l’appréciation faite par la SPR du poids à accorder à la lettre ne se fondait pas principalement sur le fait qu’il s’agissait d’une photocopie. Elle se fondait plutôt sur la teneur de la lettre. Bien que sa teneur soit censée confirmer les croyances et les pratiques du demandeur, la lettre ne contient aucune indication quant aux fondements de cette information et, en particulier, ne précise pas que son auteur avait personnellement été témoin de l’engagement religieux du demandeur. Il était donc raisonnable que la Commission lui accorde peu de poids.

[39]      En ce qui concerne l’omission de faire témoigner M. Chipkar, la Commission avait la possibilité de commenter cet aspect dans sa décision. Certes, l’avocate a informé la SPR de la disponibilité limitée de M. Chipkar, mais cela ne change rien au fait que c’est au demandeur qu’incombe le fardeau de prouver ce qu’il avance. À ce titre, il incombait à l’avocate de veiller à ce que les témoins nécessaires soient disponibles. Si cela n’était pas possible, l’avocate aurait pu demander un ajournement à la SPR. Or, tel n’a pas été le cas. Par conséquent, il était juste que la Commission considère l’omission de faire témoigner M. Chipkar comme un motif supplémentaire d’accorder peu de poids à cette lettre.

[40]      Pour ce qui est des autres documents auxquels la Commission a accordé peu de poids, contrairement à ce qu’affirme le demandeur, la SPR a bel et bien motivé sa décision à ce sujet et, comme il a été noté, a déclaré que les autres documents n’attestaient pas de la sincérité des croyances du demandeur, mais simplement de sa pratique du Falun Gong au Canada. Cela étant, et à la lumière des nombreux problèmes qui entachent la crédibilité du demandeur sur d’autres aspects, ces conclusions étaient raisonnables.

[41]      Pour ces motifs, l’évaluation de la crédibilité qu’a faite la Commission est raisonnable. De plus, compte tenu des incohérences dans le témoignage du demandeur, les conclusions de la Commission relatives à la crédibilité lui donnaient une base solide pour établir que le demandeur n’était pas un véritable adepte du Falun Gong, ni en Chine, ni au Canada.

Le commissaire a-t-il privé le demandeur de son droit à l’équité procédurale par les observations reprochées au sujet de la connaissance qu’il avait de la troisième leçon du Zhuan Falun?

[42]      Pour ce qui est du manquement allégué au devoir d’équité procédurale, comme il a été mentionné, la SPR a conclu que la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong ne concordait pas avec les attentes de la Commission de la part d’un adepte ayant une expérience de la pratique depuis aussi longtemps que ce que prétendait le demandeur. Pour évaluer la connaissance qu’avait le demandeur, le commissaire de la SPR lui a posé une série de questions sur le Falun Gong et sa pratique alléguée de ce culte. Certaines de ces questions avaient trait à la troisième leçon du Zhuan Falun, dont la Commission a constaté que le demandeur avait une connaissance limitée.

[43]      Le demandeur soutient que certaines observations faites par le commissaire pendant l’audience équivalaient, pour l’essentiel, à un manquement au devoir d’équité procédurale; en effet, le commissaire s’est dit satisfait de la connaissance qu’avait le demandeur de la troisième leçon, mais il a ensuite estimé dans sa décision que cette connaissance était lacunaire. L’échange pertinent entre le commissaire et le demandeur s’est déroulé comme suit (dossier certifié du tribunal (DCT), aux pages 243 et 244) :

[traduction]

COMMISSAIRE : Quelle est votre leçon préférée?

DEMANDEUR : Je les aime toutes.

COMMISSAIRE : D’accord. Mais y en a-t-il une que vous préférez?

DEMANDEUR : La troisième leçon; dans cette leçon, le Maître dit qu’il nous considère tous comme ses disciples.

COMMISSAIRE : Que dit-il d’autre dans la troisième leçon?

DEMANDEUR : Il dit qu’il considère tous les étudiants comme ses disciples.

COMMISSAIRE : Est-ce la seule chose dont il est question dans la troisième leçon?

DEMANDEUR : Non.

COMMISSAIRE : Alors dites-moi de quoi d’autre il est question dans la troisième leçon.

DEMANDEUR : Il est question de la possession spirituelle. Il est aussi question du langage cosmique.

COMMISSAIRE : Autre chose?

DEMANDEUR : Oui, le fait que les disciples du Falun Dafa doivent répandre la pratique.

COMMISSAIRE : Oui.

DEMANDEUR : Je suis désolé, je ne me rappelle rien d’autre.

COMMISSAIRE : C’est tout, hein?

DEMANDEUR : Il y a 10 sections — 10 sous-titres.

COMMISSAIRE : Mais c’est très bien. Vous avez très bien fait. Quel est le but du troisième exercice?

[44]      Le commissaire a ensuite posé un certain nombre d’autres questions au sujet de la troisième leçon et d’autres leçons du Zhuan Falun; les réponses données par le demandeur à ces questions étaient très limitées.

[45]      L’avocate du défendeur affirme qu’il est difficile d’évaluer le passage qui précède, parce qu’il n’indique rien du ton de la conversation. Elle note en outre que le commissaire n’était de toute évidence pas satisfait des réponses du demandeur au sujet de la troisième leçon, car il a poursuivi son interrogatoire en posant plusieurs autres questions au sujet de cette leçon. L’avocate affirme également que l’étendue de la connaissance qu’avait le demandeur était clairement une question en litige pendant toute l’audience, compte tenu de l’énoncé des questions en litige par la Commission au début de l’audience et du fait que l’avocate du demandeur a présenté des arguments sur l’étendue de la connaissance qu’avait le demandeur dans ses observations finales. À mon sens, ces arguments ont un poids considérable.

[46]      Les observations reprochées au commissaire, bien que malencontreuses, ne constituent pas une violation du principe d’équité procédurale, car toutes les parties, par leur comportement subséquent, ont reconnu que le commissaire n’était pas satisfait du niveau d’exhaustivité des réponses données par le demandeur au sujet de la troisième leçon et de ses connaissances religieuses : le commissaire a continué de poser des questions au sujet de la troisième leçon, et l’avocate a présenté des arguments au sujet de l’adéquation de la connaissance qu’avait le demandeur dans ses observations finales.

[47]      L’évaluation des exigences relatives à l’équité procédurale dépend en grande partie des circonstances de chaque affaire et dépend de facteurs tels que : la nature de la décision recherchée et le processus suivi pour y parvenir et, plus particulièrement, la mesure dans laquelle le processus administratif s’approche du processus judiciaire; la nature du régime législatif en vertu duquel agit le tribunal; l’importance de la décision pour les personnes visées; les attentes légitimes des parties; enfin, le choix de procédure que le tribunal fait (Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, aux paragraphes 21 à 28). La jurisprudence de cette Cour indique que dans des circonstances comme celles-ci, il y a violation de l’équité procédurale lorsque les parties n’ont pas eu conscience qu’une question était en litige, mais il n’y pas de telle violation lorsque la Commission fait des observations ineptes, mais que les parties ont une indication que la question est préoccupante et qu’elles ont la possibilité de présenter des arguments à ce sujet.

[48]      Par exemple, dans l’arrêt Velauthar c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] A.C.F. no 425 (C.A.) (QL) (Velauthar), le commissaire avait donné à l’avocat l’instruction de préparer des arguments écrits sur une seule question — à savoir si le demandeur répondait à la définition de réfugié — pour ensuite rejeter sa demande en se fondant sur la crédibilité. La Cour d’appel fédérale a conclu que, puisque le tribunal avait précisé qu’une seule question serait en litige, les principes de justice naturelle avaient été violés par le commissaire qui avait rendu sa décision sur la base d’une autre question.

[49]      Dans la même veine, dans la décision Li c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 1109 (1re inst.) (QL), madame la juge Reed a conclu qu’il y avait eu violation des principes de justice naturelle parce que la Commission avait dissuadé le demandeur d’expliquer une situation, puis s’était fondée sur l’absence d’explication pour rejeter sa revendication.

[50]      En revanche, dans la décision Haji c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 528 (Haji), la Cour a conclu que l’arrêt Velauthar était inapplicable parce que le commissaire avait indiqué au début de l’audience que la question en litige devait être tranchée par la Commission et avait donné à l’avocate du demandeur la possibilité de présenter des arguments à ce sujet une fois la preuve close (voir le paragraphe 14). Cette constatation a été faite même si la conduite du commissaire pendant l’audience laissait présumer que le demandeur avait réussi à faire valoir ses arguments. Même si la Commission a débouté le demandeur sur cette question, il n’y a pas eu de violation de l’équité procédurale parce que la question était clairement définie comme étant en litige et que le demandeur avait eu la possibilité de présenter des arguments sur la question.

[51]      La situation en l’espèce est très semblable à celle de la décision Haji. Dans les deux cas, la question en litige — en l’espèce, le niveau des connaissances religieuses du demandeur — a clairement été définie au début de l’audience comme étant en jeu, et l’avocate a présenté des arguments sur cette question. De plus, pour ce qui est de la connaissance qu’avait le demandeur de la troisième leçon du Zhuan Falun, la conduite subséquente du commissaire, qui a continué de poser des questions au sujet de la leçon après avoir fait le commentaire reproché, démontrait qu’il n’était pas satisfait des réponses du demandeur. Ainsi, dans ces circonstances, il aurait dû être clair pour le demandeur et son avocate que les connaissances religieuses du demandeur en général et sa connaissance de la troisième leçon en particulier étaient en litige. En conséquence, le commissaire de la SPR n’a pas commis un manquement à l’équité procédurale en faisant les observations qui lui sont reprochées.

La SPR a-t-elle commis une erreur susceptible de révision dans son évaluation de la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong?

[52]      Outre la violation de l’équité procédurale alléguée par le demandeur, l’avocat du demandeur soutient que la SPR exigeait un niveau de connaissance déraisonnablement élevé de la part du demandeur, affirmant que [traduction] « [d]ans la jurisprudence de la Cour fédérale, le critère auquel doivent répondre les demandeurs d’asile pour démontrer leurs connaissances religieuses en vue d’établir leur identité religieuse est très peu exigeant », citant à ce sujet les décisions Chen I et Huang I (mémoire du demandeur, aux paragraphes 11 et 12, toutes les deux précitées au paragraphe 8). Il soutient également que la conclusion de la SPR à savoir que le demandeur n’était capable de citer aucune des huit caractéristiques distinctives du Falun Gong décrites par Maître Li dans le Zhuan Falun est déraisonnable parce que ces caractéristiques sont contenues dans l’ouvrage The Great Way of Spiritual Perfection [3e éd. traduite, juillet 2006] de Maître Li et non dans le Zhuan Falun, et que le fait de se faire demander de citer les huit caractéristiques serait source de confusion pour un adepte du Falun Gong, car Maître Li demande aux adeptes de ne pas classer mécaniquement ses enseignements. En appui à ces assertions, l’avocat se fonde sur un affidavit de M. Chipkar, déposé en appui à la présente demande de contrôle judiciaire, dans lequel M. Chipkar présente les deux arguments susmentionnés.

[53]      L’avocate du défendeur ne s’est pas opposée à l’admissibilité de cet affidavit, mais elle soutient que la conclusion de la SPR au sujet des huit caractéristiques était raisonnable même si le commissaire a fait erreur en les attribuant au Zhuan Falun plutôt qu’à The Great Way of Spiritual Perfection. Elle note à ce sujet que l’erreur a été commise uniquement dans la décision et que dans son interrogatoire, le commissaire n’a pas attribué la discussion sur les caractéristiques au Zhuan Falun et n’a donc pas semé la confusion chez le demandeur (voir le DCT, à la page 245). Elle se fonde également sur la décision Chen III, au paragraphe 21 (précité, au paragraphe 8), où monsieur le juge Russell a noté que des questions similaires avaient été posées par le commissaire pour ensuite confirmer la raisonnabilité de la décision de la Commission. Elle affirme enfin que le demandeur a mal interprété les décisions de cette Cour en matière de connaissances religieuses et elle cite d’autres décisions où l’on a conclu que l’inaptitude à répondre à des questions comme celles qui ont été posées dans la présente affaire était un motif raisonnable de conclure à l’absence de sincérité des croyances du demandeur (citant les décisions Wang et Cao II, toutes les deux précitées au paragraphe 8).

[54]      Dans ce domaine, chaque affaire repose essentiellement sur ses propres faits, et la raisonnabilité des conclusions tirées de réponses données à des questions sur les connaissances religieuses dépend de la situation du demandeur, des questions qu’on lui pose et des réponses qu’il donne. En outre, la raisonnabilité d’une décision dépend souvent des constats faits par la Commission sur la crédibilité à l’égard d’autres aspects de la revendication du demandeur, comme l’a dit monsieur le juge Mosley dans la décision Cao I, aux paragraphes 27 à 29 (précitée au paragraphe 8). Lorsque, comme en l’espèce, la version des faits donnée par le demandeur dans son pays d’origine n’a aucune crédibilité, et que, comme en l’espèce, le demandeur n’a ni vécu une expérience de conversion au Canada, ni donné la moindre preuve solide de la sincérité de ses présumées croyances, la Commission devrait avoir une latitude considérable dans son appréciation des connaissances religieuses du demandeur.

[55]      De fait, dans toutes les affaires — et particulièrement celles où, comme dans la présente, on constate que le demandeur manque de crédibilité —, la Cour ne doit pas trop se hâter de substituer son opinion à celle de la SPR, qui a acquis une expertise en ce qui concerne les préceptes de diverses religions. Comme l’a noté monsieur le juge Near dans la décision Wang (précitée au paragraphe 8), l’évaluation de la sincérité des croyances religieuses du demandeur est une tâche difficile, et la Commission « est chargée de cette tâche délicate en qualité de juge des faits, et la Cour ne peut décider, lors du contrôle judiciaire, de revoir en fait les résultats de ce qui peut commencer à ressembler à une ronde de jeu-questionnaire biblique » (au paragraphe 18). À mon avis, dans la décision Wang, au paragraphe 20, monsieur le juge Near a établi la bonne approche à adopter par la Cour pour évaluer la raisonnabilité de l’évaluation faite par la SPR de la sincérité des croyances religieuses d’un demandeur. Après avoir examiné une série de questions maladroites que la Commission avait posées sur la description de Jésus comme personne, il écrit :

[…] cette série de questions illustre […] la difficulté de l’évaluation à laquelle la Commission doit se livrer. Elle ne laisse voir aucune erreur qui justifierait d’infirmer sa décision. Tant qu’il n’est pas établi que la preuve a été ignorée ou qu’il y a eu un malentendu sur les faits, je ne suis pas disposé à revenir sur la conclusion de la Commission à cet égard – encore une fois, la déférence est de mise. La Commission ne s’est pas prononcée sur la sincérité de la foi du demandeur en se fiant uniquement à son incapacité à évoquer les attributs humains de Jésus. Les réponses à d’autres questions touchant la foi pentecôtiste étaient vagues et pauvres en détail. Comme le fait valoir le défendeur, un témoignage privé des détails qu’il est raisonnable d’attendre de la part d’une personne se trouvant dans la situation du demandeur d’asile justifie la conclusion que la demande n’est pas crédible, même si le demandeur a su répondre correctement et très précisément à d’autres questions.

[56]      L’application de ce raisonnement dans la présente affaire m’amène à conclure que l’évaluation faite par la Commission de la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong était raisonnable. Plus précisément, il était raisonnable pour la Commission d’interroger le demandeur sur ses croyances, et la conclusion qu’elle en a tirée était elle aussi raisonnable.

[57]      Pour ce qui est, premièrement, de la nature des questions posées par la Commission, sur la base des faits de la présente affaire, la Commission avait de bonnes raisons de mettre en doute la sincérité du demandeur, compte tenu de son manque total de crédibilité en ce qui concerne les faits qui, d’après lui, avaient été connus en Chine et les explications peu convaincantes qu’il avait données pour tenter de justifier les incohérences que la Commission portait à son attention. Vu les problèmes que soulevait la crédibilité du demandeur, il était raisonnable que la Commission examine avec soin la revendication présentée sur place par le demandeur. De plus, le demandeur a fait des allégations précises quant à sa façon de pratiquer sa foi et a affirmé avoir lu le Zhuan Falun sur une base hebdomadaire pendant plusieurs années en Chine, puis sur une base quotidienne depuis son arrivée au Canada. Compte tenu de ce niveau d’étude allégué et des autres aspects des éléments soumis en preuve par le demandeur, il était approprié que la Commission interroge le demandeur au sujet de sa connaissance du Falun Gong.

[58]      Comme il a été mentionné, le demandeur a déposé un affidavit de Joel Chipkar en appui à son argument selon lequel certaines des questions qu’on lui avait posées étaient déraisonnables. Cependant, ni le demandeur ni son avocate ne se sont opposés aux questions posées par la Commission au sujet des huit caractéristiques du Falun Gong lors de l’audience, et ils n’ont pas présenté à la Commission les arguments qu’ils invoquent ici. À mon avis, il est inapproprié que le demandeur, dans le contexte d’une demande de contrôle judiciaire, cherche en fait à faire établir par notre Cour que les questions posées par le commissaire étaient inappropriées, en soutenant que la Commission s’est fiée déraisonnablement aux réponses données à ces questions. Si un demandeur ou son avocat estime qu’une question est inéquitable, c’est à la SPR et non à la Cour qu’il doit présenter cet argument. En conséquence, je n’accorde aucun poids à l’affidavit de Joel Chipkar et je conclus que les questions posées par la SPR au sujet de la connaissance qu’avait le demandeur du Falun Gong étaient raisonnables. Cette conclusion est confirmée par la décision de monsieur le juge Russell dans la décision Chen III, sur laquelle s’appuie le défendeur.

[59]      Ensuite, en ce qui a trait à la conclusion relative au manque de connaissance du Falun Gong par le demandeur, à mon avis, l’évaluation faite par la Commission de la connaissance qu’avait le demandeur était raisonnable. Les réponses données par le demandeur à la plupart des questions qu’on lui a posées étaient sommaires et, comme l’a noté l’avocate du défendeur, le commissaire n’a pas attribué de façon erronée la source des huit caractéristiques du Falun Gong dans son interrogatoire du demandeur. Le fait que la Commission n’a pas noté le bon ouvrage comme étant la source des caractéristiques dans sa décision ne suffit pas à rendre déraisonnable sa conclusion quant au caractère lacunaire de la connaissance du demandeur, car The Great Way of Spiritual Perfection et le Zhuan Falun sont tous les deux des textes qui énoncent les préceptes du Falun Gong. Et surtout, la Commission disposait de preuves à l’appui de sa conclusion à savoir que la connaissance qu’avait le demandeur était insuffisante pour prouver qu’il était un adepte sincère, compte tenu du caractère superficiel des réponses données par le demandeur aux questions qu’on lui posait et de son inaptitude à répondre à certaines autres questions, notamment celle qui portait sur les huit caractéristiques. En conséquence, conformément à l’approche préconisée pour l’appréciation de la raisonnabilité dans la décision Wang (et décrite plus haut au paragraphe 55), il n’y a pas lieu de contester la conclusion de la Commission. Bref, cette conclusion s’appuie sur des faits probants et est donc raisonnable.

La SPR a-t-elle commis une erreur susceptible de révision dans son examen des motivations du demandeur à se livrer à la pratique du Falun Gong au Canada?

[60]      Le demandeur soutient enfin, comme il a été noté, que la Commission a commis une erreur en considérant les motifs qui l’ont poussé à pratiquer le Falun Gong au Canada, car la jurisprudence canadienne établit que la motivation n’est pas pertinente pour l’évaluation d’une revendication présentée sur place.

[61]      Je ne suis pas d’accord avec cette assertion du demandeur; contrairement à ce que celui-ci affirme, la jurisprudence canadienne reconnaît bel et bien que la motivation de l’engagement dans une pratique religieuse au Canada peut être examinée par la SPR dans une affaire pertinente. Cependant, la conclusion portant qu’un demandeur a été motivé à pratiquer une religion au Canada pour soutenir une demande d’asile frauduleuse ne peut servir, à elle seule, de fondement pour rejeter la demande. La conclusion que le demandeur a été motivé par la volonté d’étayer sa demande d’asile est plutôt un facteur que la SPR peut prendre en considération dans son évaluation de la sincérité des croyances religieuses d’un demandeur.

[62]      La sincérité de ces croyances est un enjeu dans des affaires où, comme en l’espèce, la poursuite de la pratique religieuse dans le pays d’origine pourrait exposer le demandeur à un risque. Si ses croyances ne sont pas authentiques, alors il n’y a pas de risque, car le demandeur ne pratiquerait pas sa religion nouvellement acquise dans son pays d’origine si son adhésion à cette religion était motivée uniquement par la volonté d’étayer une demande d’asile. En revanche, il peut fort bien y avoir des situations où le demandeur, initialement incité à se convertir à une religion par ce type de motivation, acquiert cependant la foi en cours de route et devient un véritable adepte de la religion. Cela semble avoir été le cas dans la décision Ejtehadian (précité, au paragraphe 10), où le demandeur, qui avait d’abord commencé à pratiquer le christianisme pour alimenter sa demande d’asile, a fini par être ordonné prêtre de la confession mormone.

[63]      Le point de départ de l’analyse de la notion d’une revendication sur place en droit canadien est l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans Ghazizadeh v. Canada (Minister of Employment and Immigration) (1993), 154 N.R. 236, où la Cour a statué que le [traduction] « concept de réfugié “sur place” exige d’évaluer la situation dans le pays d’origine du requérant après qu’il l’a quitté ». En conséquence, la Cour a annulé la décision de la Commission, laquelle était centrée sur le fait que le demandeur avait obtenu un visa de sortie de l’Iran, par opposition aux risques auxquels les événements survenus par la suite dans ce pays l’auraient exposé s’il y était retourné.

[64]      Notre Cour a été appelée, dans une série d’affaires récentes, à apprécier les exigences associées aux revendications sur place fondées sur la religion. La première, la décision Ejtehadian, avait pour contexte un demandeur converti au christianisme après avoir quitté l’Iran. La Commission a rejeté sa revendication parce qu’elle a établi que sa conversion n’était pas sincère et conclu qu’il s’était converti au christianisme afin d’obtenir un moyen de demeurer au Canada en revendiquant le statut de réfugié. Fait important, dans cette cause, contrairement à la présente affaire, il a été démontré à la Commission que les apostats sont persécutés et exécutés en Iran et, donc, que le simple fait de l’apostasie (par opposition à la pratique continue de la religion) aurait pu donner lieu à la persécution. En outre, il semble que le demandeur ait vécu une expérience de conversion et soit devenu un pratiquant sincère, car, comme il a été noté, il a été ordonné prêtre mormon. Monsieur le juge Blanchard a annulé la décision de la SPR et noté que la Commission avait formulé le critère de façon incorrecte dans le cas d’une revendication sur place et estimé qu’au regard des faits de cette cause [au paragraphe 11] :

En évaluant les risques auxquels le demandeur pourrait faire face à son retour, dans le cadre d’une demande d’asile sur place, il est nécessaire de tenir compte de la preuve crédible de ses activités au Canada, indépendamment des motifs derrière sa conversion.

[65]      Dans une série d’affaires récentes mettant en cause des demandeurs d’origine chinoise, notre Cour a appliqué la décision Ejtehadian et conclu que la Commission ne peut rejeter une revendication sur place uniquement à cause d’un manque de crédibilité ou d’un motif illégitime, mais qu’elle doit plutôt évaluer la sincérité de la pratique religieuse du demandeur afin de déterminer si la personne s’exposera à un risque en retournant dans son pays d’origine (voir Jin, précitée au paragraphe 8; El Aoudie, précitée au paragraphe 11; Hannoon, précitée au paragraphe 11; Jia c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 444; Huang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 205 (Huang II); Yin, précitée au paragraphe 11; Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 677 (Chen II)). Dans plusieurs de ces affaires, les décisions de la SPR ont été annulées parce qu’aucune analyse de la sincérité de la pratique religieuse du demandeur n’avait été entreprise et que la SPR avait simplement rejeté les revendications au départ, sur la base d’une motivation illégitime (voir El Aoudie; Hannoon; Yin; Chen II). Dans les décisions Jin et Wang (précitées au paragraphe 8), en revanche, la Commission a mentionné le caractère douteux de la motivation de la conversion, mais elle a ensuite évalué la sincérité de la conversion du demandeur et l’a trouvée lacunaire. La Commission a fondé ses conclusions sur le manque de crédibilité des demandeurs d’asile, sur le fait qu’ils avaient forgé des histoires au sujet de leur statut de chrétiens en Chine et sur leur manque de connaissance des détails de la religion qu’ils prétendaient pratiquer. Comme il a été conclu que les demandeurs n’étaient pas de véritables adeptes, la SPR a conclu qu’ils ne pratiqueraient pas leur religion alléguée s’ils retournaient en Chine et, par conséquent, qu’ils ne s’exposaient à aucun risque. Et notre Cour a confirmé les conclusions de la Commission dans ces affaires. Bref, dans des circonstances très semblables aux présentes, les décisions de la SPR ont été confirmées.

[66]      Ainsi, l’énoncé tiré de la décision de 1994 de l’Autorité d’appel en matière de statut de réfugié de la Nouvelle‑Zélande, sur laquelle la SPR se fonde, ne reflète pas le droit au Canada, non plus que l’assertion selon laquelle [traduction] « [u]ne personne qui, en guise de stratagème, manipule délibérément les circonstances dans le but de créer un véritable risque de persécution qui n’existe pas au préalable, ne peut être réputée appartenir » à la catégorie des demandeurs d’asile sur place (assertion que la SPR a attribuée par erreur à James Hathaway, comme il est mentionné plus haut au paragraphe 29).

[67]      En fait, comme l’a noté monsieur le juge Zinn dans la décision Huang II (précitée au paragraphe 65), loin d’adopter la position selon laquelle une motivation de mauvaise foi invalide une demande d’asile, M. Hathaway endosse au contraire l’analyse élaborée plus haut. À cet égard, il écrit [au paragraphe 29] :

[traduction]

Il ne s’ensuit pas toutefois que toutes les personnes se livrant à l’étranger à des activités qui ne mettent pas véritablement en évidence une opinion politique oppositionnelle sont exclues de la définition de réfugié. Même s’il est évident que la déclaration ou l’acte délibéré était frauduleux, en ce sens qu’il s’expliquait principalement par la volonté d’obtenir l’asile, le fait que la demandeure d’asile se soit vu imputer conséquemment une opinion politique négative par les autorités de son pays d’origine peut néanmoins faire en sorte qu’elle soit visée par la définition de réfugié au sens de la Convention. Étant donné que le droit des réfugiés vise essentiellement l’octroi d’une protection contre des actes déraisonnables de l’État, il devrait être procédé à une analyse des risques de préjudice en cas de retour, en raison des activités politiques effectuées de façon non sincère à l’étranger.

Cette question se pose particulièrement lorsqu’il est allégué que le fait d’avoir présenté une demande d’asile non fondée peut en soi poser un risque sérieux de persécution. Même si ces cas constituent peut‑être les exemples les plus évidents d’une tentative « d’arriver à ses fins », le tribunal doit néanmoins prendre clairement acte des risques à l’égard des droits de la personne fondamentaux en cas de retour, qui peuvent découler du fait que l’État a imputé une opinion politique répréhensible à la demandeure d’asile, et il doit évaluer ces risques. Le simple fait que la demandeure d’asile puisse subir une certaine forme de sanction peut ne pas être suffisamment important pour constituer de la persécution, mais il existe clairement des situations où les conséquences du retour peuvent être considérées comme donnant naissance à une crainte bien fondée de persécution. Par exemple, dans Slawomir Krzystof Hubicki, la preuve démontrait que, en vertu du droit criminel polonais de l’époque, le demandeur d’asile était passible d’une peine d’emprisonnement d’une durée maximale de huit ans parce qu’il avait présenté une demande d’asile au Canada. En pareille situation, le fondement de la demande n’est pas l’activité frauduleuse ou l’assertion elle‑même, mais plutôt l’opinion politique ou la déloyauté imputée à la demandeure d’asile par l’État d’origine. Dans un tel cas, la gravité de l’atteinte conséquente et les autres critères définitionnels devraient être évalués pour déterminer si le statut de réfugié est justifié.

[68]      À la lumière de ce qui précède, le simple fait que la Commission a examiné la motivation qu’avait le demandeur à pratiquer le Falun Gong au Canada et s’est fiée à cette motivation n’invalide pas sa décision. La question à laquelle il faut répondre est plutôt de savoir si la SPR est arrivée à une conclusion raisonnable en établissant que la pratique du Falun Gong par le demandeur au Canada n’était pas motivée par une foi sincère. Comme dans les décisions Jin et Wang, j’estime que cette conclusion est raisonnable.

[69]      C’est au demandeur qu’incombait le fardeau d’établir la sincérité de ses croyances. La conclusion de la Commission, à savoir qu’il ne s’était pas déchargé de ce fardeau, était raisonnable, car elle était fondée sur l’évaluation de la crédibilité du demandeur, sur le fait qu’il avait de toute évidence forgé une histoire sur ce qui était arrivé en Chine, sur sa connaissance limitée des préceptes du Falun Gong (compte tenu des autres facteurs et de la durée depuis laquelle le demandeur affirmait être un adepte) et sur le caractère peu convaincant des déclarations présentées en appui à sa pratique au Canada. La Commission avait d’abondants éléments probants desquels elle pouvait raisonnablement tirer la conclusion que la pratique du Falun Gong par le demandeur au Canada n’était pas sincère; dans ce contexte, le fait que la Commission a mal cité les autorités, bien qu’assurément non souhaitable, ne rend pas sa décision déraisonnable. La conclusion à laquelle elle est arrivée est défendable à la lumière des faits et du droit applicable et, selon la formulation de la norme de contrôle de la raisonnabilité établie par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Dunsmuir (précitée au paragraphe 8) et dans des affaires subséquentes, la décision de la SPR est par conséquent raisonnable.

[70]      Donc, pour ces motifs, la Commission n’a pas violé les principes d’équité procédurale et sa décision est raisonnable. La présente demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.

[71]      Les parties n’ont pas soumis de question à certifier en vertu de l’article 74 de la LIPR, et aucune n’est soulevée en l’espèce.

JUGEMENT

LA COUR STATUE QUE :

1. La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2. Aucune question de portée générale n’est certifiée.

3. Aucuns dépens ne sont adjugés.

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