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A-614-04

2005 CAF 56

(Cour fédérale no: IMM-577-04 )

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (appelant) (défendeur en Cour fédérale)

c.

CHEN, Tsai-Cheng, PENG, Sheng-Chien, WU, Chin-Chung, LIN, Chin Yuan, KUO, Nai Wei, WANG, Hsiu Shan, HSIEH, Tze-En, HUNG, Mei Ying, KO, Ching Yi, KO, Yu Fan, KO Yu Chu, HSU, Tase Yuen, CHANG, Lien Fang, CHEN, Yuan Hsing, LIN, Cheng-I, CHEN, Ping-Hung, HSIEH, Tsung-Jen, CHEN, Yeuh-Yin, FANG CHANG, Shu Min, PUI, Kwan Kay, LAI, Yung-Liang, CHANG, Ting Hui, CHANG, Fang Ming, LEI, Manuel Joao, LIN, Yung Nien, HUANG HSU, Li-Mei, FANG, Ming-Tau, LIU, Kun Yung, CHEN, Kun-Wen, TSENG, Hung Yu, CHANG, Mao, MENG, Lin Yu, TAI, Yu-Hu, YANG, Cheng-Kang, CHEN, Wen-Shing, YU, Chung-Wen, YU, Wei-Chung, LIN, Shih Chun, CHANG, Lei-Fa, CHAO, Lin Shu, HSU, Pao Hua (intimés) (demandeurs en Cour fédérale)

(Cour fédérale no: IMM-1467-04 )

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (appelant) (défendeur en Cour fédérale)

c.

CHU, Kar Ho and PENG, Jeng-Yang Alex (intimés) (demandeurs en Cour fédérale)

IMM-10140-03

Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (appelant) (défendeur en Cour fédérale)

c.                

PENG, Sheng-Chien, WU, Chin-Chung, LIN, Chin Yuan, KUO, Nai Wei, WANG, Hsiu Shan, HSIEH, Tze-En, HUNG, Mei Ying, KO, Ching Yi, KO, Yu Fan, KO Yu Chu, HSU, Tase Yuen, CHANG, Lien Fang, CHEN, Yuan Hsing, LIN, Cheng-I, CHEN, Ping-Hung, HSIEH, Tsung-Jen, CHEN, Yeuh-Yin, FANG CHANG, Shu-Min, PUI, Kwan Kay, LAI, Yung-Liang, CHANG, Ting Hui, CHAN, Yun Tsung, CHAN, Kai Yen, CHANG, Frang Ming, LEI, Manuel Joao, LIN, Yung Nien, HUANG, Chin Ming, HUANG HSU, Li-Mei, HUANG, Hsiu-Chu, FANG, Ming-Tau, LIU, Kun Yung, CHEN, Kun-Wen, TSENG, Hung Yu, WANG, Bey Ling, HSIAO, Hsueh Chun, CHANG, Mao, MENG, Lin Yu, TAI, Yu-Hu, YANG, Cheng-Kang, CHEN, Wen Shing, Yu, Chung-Wen, YU, Wei-Chung, LIN, Shih Chun, CHANG, Lei-Fa, CHAO, Lin Shu, HSU, Pao Hua (intimés) (demandeurs en Cour fédérale)

(Cour fédérale no: IMM-576-05 )

Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (appelant) (défendeur en Cour fédérale)

c.

Kin Wah AU, Mel Chu HSU, Shu-Ho Sun, Lai Sha SO, Ching Man AU, Ho Pang AU, Lung Pin CHEN, Huan-Yuan CHEN, Png-Ju Chen, Ping-Hua CHEN, Pun-Chun SUN KUO, Wen-Kuel SUN et Wen-Li SUN (intimés) (demandeurs en Cour fédérale)

Répertorié: Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.A.F.)

Cour d'appel fédérale, juges Rothstein, Evans et Malone, J.C.A.--Toronto, 3 février 2005.

Citoyenneté et Immigration -- Contrôle judiciaire -- Compétence de la Cour fédérale -- Requête visant l'annulation de l'appel interjeté d'une décision d'instruire la demande de contrôle judiciaire comme une action -- Les procédures, initiées par des non-Canadiens présentement hors du Canada, cherchent à obtenir un redressement pour défaut de traiter leurs demandes pour obtenir une carte de résident permanent -- La C.A.F. accueille l'argument qu'elle n'a pas compétence pour entendre l'appel, au motif qu'aucune question grave de portée générale n'a été certifiée comme l'exige l'art. 74d) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés -- Le point de vue du ministre n'est fondé ni sur le libellé de la loi non plus que la politique qui la fonde.

lois et règlements cités

Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, art. 83(1) (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 73).

Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, art. 72 (mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 194), 73, 74, 75 (mod., idem).

Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 1 (mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 14), 18.4 (édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5; 2002, ch. 8, art. 28), 27 (mod., idem, art. 34).

jurisprudence

décision appliquée:

Geza c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2001), 12 Imm. L.R. (3d) 123; 266 N.R. 158 (C.A.F.).

distinction faite d'avec:

Adams c. Canada (Gendarmerie royale du Canada) (1995), 182 N.R. 354 (C.A.F.); Bande indienne de Shubenacadie c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans) (2002), 299 N.R. 241; 2002 CAF 509.

décisions citées:

Sandor c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1668 (1re inst.) (QL); Kozak c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1680 (1re inst.) (QL).

REQUÊTE en annulation de l'appel du ministre d'une décision ([2005] 3 R.C.F. 79; 2004 CF 1573 (C.F.)) transformant une demande de contrôle judiciaire dans une affaire d'immigration en action. Requête accueillie.

ont comparu:

M. Sean Gaudet et Brenda Carbonell pour l'appelant.

Rocco Galati et Lawrence Wong pour les intimés.

avocats inscrits au dossier:

Le sous-procureur général du Canada pour l'appelant.

Galati, Rodrigues & Associates, Toronto, et Wong Pederson Law Offices, Vancouver, pour les intimés.

Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance prononcés à l'audience par

[1]Le juge Evans, J.C.A.: La requête déposée par les intimés vise à l'annulation de l'appel interjeté par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration de la décision du juge Russell, de la Cour fédérale, dans Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2005] 3 R.C.F. 79. Par cette décision, le juge ordonnait que la demande de contrôle judiciaire déposée par les intimés soit instruite comme s'il s'agissait d'une action, en application du paragraphe 18.4(2) [édicté par L.C.1990, ch. 8, art. 5; 2002, ch. 8. art. 28] de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7 [art. 1 (mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 14)].

[2]Cette requête prend sa source dans des demandes d'injonction et de réparation pécuniaire déposées par les intimés, des non-Canadiens qui sont présentement hors du Canada, mais qui y résidaient à une certaine époque. Ils allèguent que le ministre a violé leurs droits légaux et constitutionnels en ne traitant pas leurs demandes pour obtenir une carte de résident permanent, document sans lequel ils ne peuvent même pas venir visiter leur famille à leur domicile au Canada.

[3]Dans leur requête, les intimés soutiennent que la Cour n'a pas compétence pour entendre l'appel du ministre, au motif qu'il trouve sa source dans une demande de contrôle judiciaire d'une affaire d'immigration et que, dans son ordonnance, le juge n'a pas certifié de question grave de portée générale en vertu de l'alinéa 74d) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001 ch. 27 (la LIPR). En l'absence d'une question certifiée, le jugement de la Cour fédérale n'est pas susceptible d'appel à notre Cour. De plus, le paragraphe 75(2) [mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 194] de la LIPR précise que les dispositions de la section 8 de la LIPR (savoir, les articles 72 à 75 [art. 72 (mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 194), 75(1) (mod., idem)]) l'emportent sur les dispositions incompatibles de la Loi sur les Cours fédérales.

[4]En réponse à la requête des intimés, le ministre déclare que les dispositions de la LIPR qui interdisent d'en appeler de la Cour fédérale à notre Cour ne s'appliquent qu'aux demandes de contrôle judiciaire. La décision du juge Russell ayant transformé la demande des intimés en action, procédure à laquelle la section 8 ne s'applique pas, y compris la disposition portant sur les questions certifiées et l'alinéa 72(2)e) de la LIPR, qui prévoit que les décisions interlocutoires ne sont pas susceptibles d'appel. Par conséquent, le ministre soutient qu'il a un droit d'appel absolu à notre Cour de tout jugement final ou interlocutoire de la Cour fédérale, en vertu de l'article 27 de la Loi sur les Cours fédérales.

[5]Nous sommes tous d'avis que la requête des intimés doit être accueillie. Notre Cour a systématiquement conclu que les dispositions de la section 8 de la LIPR, ainsi que la disposition analogue de la loi précédente, la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, paragraphe 83(1) [mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 73], interdisent tout appel d'une décision dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire d'une affaire d'immigration, y compris de toute décision accessoire ou interlocutoire y afférente.

[6]Les intimés s'appuient notamment sur l'arrêt Geza c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2001),12 Imm. L.R. (3D) 123 (C.A.F.), par lequel notre Cour rejetait l'appel d'une décision d'un juge de la Section de première instance de la Cour fédérale (sa désignation d'alors) rejetant une requête qui visait à transformer une demande de contrôle judiciaire d'une affaire d'immigration en une action, au motif qu'aucune question n'avait été certifiée par le juge de première instance [sub nom. Sandor c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1668 (1re inst.) (QL) et sub nom. Kozak c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1690 (1re inst.) (QL)].

[7]Le ministre cherche à établir une distinction d'avec l'arrêt Geza en disant que, comme dans cette affaire la Cour avait refusé de transformer la demande en action, l'instance s'était poursuivie comme demande et que l'appel portait sur celle-ci. Par contre, l'ordonnance du juge Russell transformant le demande de contrôle judiciaire en action est venue mettre fin à la demande et la seule instance qui demeure est l'action des intimés, à laquelle la section 8 de la LIPR ne s'applique pas.

[8]Nous ne sommes pas de cet avis, n'étant pas convaincus que le libellé de la loi non plus que la politique qui la fonde vont dans le sens de la distinction plaidée au nom du ministre.

[9]Le ministre s'appuie aussi sur une jurisprudence qui établit qu'une fois la demande de contrôle judiciaire transformée en action, l'instance devient soumise aux règles qui régissent les actions: voir, par exemple, Adams c. Canada (Gendarmerie royale du Canada) (1995), 182 N.R. 354 (C.A.F.); Bande indienne de Shubenacadie c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans) (2002), 299 N.R. 241 (C.A.F.).

[10]Selon nous, on peut aussi distinguer ces arrêts de l'espèce au motif qu'ils portent sur des litiges de procédure qui ont pris naissance après la transformation d'une demande en action et non sur l'à-propos de la transformation elle-même. Par contre, en l'espèce, l'objet même de l'appel vise à faire déterminer si le juge a commis une erreur en transformant la demande des intimés en action.

[11]Pour ces motifs, la requête des intimés sera accueillie et l'appel du ministre sera rejeté. Les intimés auront droit aux dépens, pour un total de 6 500 $ (y compris les débours et la T.P.S.).

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