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T‑555‑05

2006 CF 1235

Le commissaire à l’information du Canada (demandeur)

c.

Le ministre de l’Environnement du Canada (défendeur)

Répertorié : Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Ministre de l’Environnement) (C.F.)

Cour fédérale, juge Kelen—Ottawa, 3 et 17 octobre 2006.

Accès à l’information — Contrôle judiciaire du refus du ministre de l’Environnement du Canada de communiquer la section « analyse » d’un mémoire au Cabinet relatif au méthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyle (MMT) au motif qu’elle est soustraite à la communication en application des art. 21(1)a) et b) de la Loi sur l’accès à l’information —  La section « analyse » présentait une analyse objective du contexte de la question et des facteurs pris en compte pour arriver aux solutions possibles —  En vertu de l’art. 48 de la Loi, c’est au ministre qu’il appartient de prouver l’applicabilité d’une exception à un ensemble donné de documents —  Examen de l’interaction entre les art. 21 et 69 —  L’art. 21(1)a) exclut de la communication les « avis ou recommandations » élaborés pour un ministre —  Les « avis » excluent les renseignements surtout factuels —  L’art. 21(1)b) exclut de la communication les comptes rendus de consultations ou délibérations où est concerné un ministre —  Les renseignements factuels seront en général exclus du champ de l’art. 21(1)b) —  Le refus, fondé sur les art. 21(1)a) et b) de la Loi, de communiquer les passages contestés était déraisonnable —  Ce refus s’expliquait principalement par le fait que la question du MMT demeurait pour le gouvernement un dossier actif —  Le ministre doit considérer s’il est ou non dans l’intérêt public qu’un document soit communiqué et mettre en balance les intérêts rivaux en gardant à l’esprit les objets de la Loi —  Le sous‑ministre ne s’est pas demandé si la communication était possible sans que cela nuise à l’efficacité du gouvernement —  La mise en balance du ministre selon la norme de la décision raisonnable ne reposait pas sur des motifs suffisants —  Aucune preuve n’appuyait la conclusion du ministre selon laquelle la communication des passages contestés mettrait en péril l’action future du gouvernement en ce qui a trait au MMT.

Interprétation des lois —  Art. 69 et 21(1)a) et b) de la Loi sur l’accès à l’information —  Contrôle judiciaire du refus du ministre de l’Environnement du Canada de communiquer la section « analyse » d’un mémoire au Cabinet relatif au méthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyle au motif que les documents demandés sont soustraits à la communication en application des art. 21(1)a) et b) de la Loi sur l’accès à l’information (la Loi) —  Bien que l’art. 69(1) de la Loi prévoie que, de manière générale, la Loi ne s’applique pas aux documents confidentiels du Cabinet, l’art. 69(3)b) exclut les « documents de travail », dans les cas où les décisions auxquelles ils se rapportent ont été rendues publiques ou ont été rendues quatre ans auparavant, de l’application de l’art. 69(1) —  Il appert d’une simple lecture des art. 69(1) et (3) que, si un document entre dans le champ de l’art. 69(3), alors, comme exception à la règle de l’art. 69(1), la Loi s’applique audit document —  Parce que l’exception particulière de l’art. 21(1) se distingue des mots employés dans l’art. 69(3)b), il s’ensuit que, quelle qu’ait pu être l’intention du législateur à propos des documents de travail, l’intention exprimée dans l’art. 21(1) est que le ministre a le pouvoir discrétionnaire de refuser la communication de documents contenant des renseignements décrits dans cette disposition —  L’art. 21(1)a) de la Loi prévoit une exception discrétionnaire pour les « avis ou recommandations élaborés par ou pour une institution fédérale ou un ministre » —  Les « avis » comprennent l’expression d’une opinion sur des questions de politique, mais excluent les renseignements de nature très factuelle —  L’effet combiné des art. 21(1)a) et b) est d’exclure de la communication prévue par la Loi un très grand nombre de documents établis dans les processus internes d’élaboration des politiques d’une institution fédérale —  Les mots « compte rendu », « consultations » et « délibérations » utilisés à l’art. 21(1)b) ne sont pas définis dans la Loi, mais le Guide du Conseil du Trésor sur les politiques et lignes directrices en matière d’accès à l’information sert de guide —  Seuls les renseignements décrivant l’avis donné, les consultations entreprises ou l’échange d’idées conduisant à une décision particulière constituent un compte rendu pouvant faire l’objet d’une exception en vertu de l’art. 21(1)b) de la Loi —  Les renseignements factuels devront en général être exclus du champ de l’art. 21(1)b).

Il s’agissait d’une demande de contrôle judiciaire du refus du ministre de l’Environnement du Canada de communiquer certains passages d’un mémoire au Cabinet daté de 1995 relatif au méthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyle (MMT), un additif pour carburant, au motif que les documents demandés étaient soustraits à la communication en application des alinéas 21(1)a) et b) de la Loi sur l’accès à l’information (la Loi). Ces alinéas confèrent au ministre le pouvoir discrétionnaire de refuser la communication de certains documents renfermant des avis donnés au gouvernement. Le mémoire au Cabinet comprenait une argumentation de trois pages, des recommandations et des arguments à l’appui de celles‑ci ainsi qu’une analyse, ou un document de travail, qui présentait une analyse objective du contexte de la question.

Dans le cadre du premier contrôle judiciaire du refus du ministre de communiquer les documents demandés parce qu’il s’agissait de documents confidentiels du Cabinet, la Cour fédérale a statué que l’article 69 de la Loi, selon lequel la Loi ne s’applique pas aux documents confidentiels du Cabinet, ne comprenait pas la section « analyse » du mémoire du Cabinet. La Cour d’appel fédérale a confirmé cette décision, sauf qu’elle a donné au ministre la possibilité de revendiquer une exception susceptible de s’appliquer à la section « analyse » du mémoire du Cabinet en application des articles 13 à 26 de la Loi. Le ministre a décidé d’invoquer, pour certains passages de la section « analyse » du mémoire du Cabinet, certaines exceptions, y compris les alinéas 21(1)a) (avis ou recommandations élaborés pour un ministre) et b) (comptes rendus de consultations ou délibérations où est concerné un ministre). Le commissaire a conclu que les passages de la section « analyse » dont la communication avait été refusée en vertu des alinéas 21(1)a) et b) ne bénéficiaient pas d’une exception, et a recommandé au ministre de communiquer les passages en question. Cependant, le ministre a rejeté la recommandation du commissaire, qui a alors déposé un recours en révision du refus du ministre de communiquer les passages contestés. Il s’agissait de savoir si les passages contestés étaient soustraits à la communication en application des alinéas 21(1)a) et b) de la Loi et, dans l’affirmative, si le ministre avait légalement exercé son pouvoir discrétionnaire de refuser la communication des passages contestés.

Jugement : la demande est accueillie.

L’article 48 de la Loi dispose que c’est à l’institution fédérale concernée qu’il appartient d’établir le bien‑fondé du refus de communication totale ou partielle d’un document. C’est donc au ministre qu’il appartient de prouver l’applicabilité d’une exception à un ensemble donné de documents.

Bien que le paragraphe 69(1) de la Loi prévoie que, de manière générale, la Loi ne s’applique pas aux documents confidentiels du Cabinet, le paragraphe 69(3) énonce une exception à cette règle. Plus particulièrement, l’alinéa 69(3)b) exclut les « documents de travail visés à l’alinéa 1b) », dans les cas où les décisions auxquelles ils se rapportent ont été rendues publiques ou ont été rendues quatre ans auparavant, de l’application du paragraphe 69(1). L’argument préliminaire du commissaire selon lequel les exceptions des alinéas 21(1)a) et b) ne peuvent pas s’appliquer lorsque sont remplies les conditions de l’alinéa 69(3)b) parce que tel résultat va à l’encontre de l’intention du législateur et de l’objet déclaré de la Loi a été rejeté. Il appert d’une simple lecture des paragraphes 69(1) et (3) que, si un document entre dans le champ du paragraphe 69(3), alors, comme exception à la règle du paragraphe 69(1) qui exclut les documents confidentiels du Cabinet, la Loi s’applique audit document. Cependant, la décision quant à la question de savoir si le document doit être communiqué sur demande doit être prise en fonction des autres dispositions de la Loi, pas sur le fondement de ce seul fait. De même, si l’application de l’alinéa 69(3)b) faisait obstacle aux autres exceptions prévues par la Loi, la Cour d’appel fédérale n’aurait pas donné au ministre la possibilité de revendiquer les exceptions pouvant s’appliquer aux documents qui, selon le greffier, ne constituaient pas des documents confidentiels du Cabinet en vertu de l’alinéa 69(3)b) de la Loi. Qui plus est, parce que l’exception particulière du paragraphe 21(1) concernant les « avis et recommandations » et les « comptes rendus de consultations ou délibérations » se distingue des mots employés dans l’alinéa 69(3)b), il s’ensuit que, quelle qu’ait pu être l’intention du législateur à propos des documents de travail, l’intention exprimée dans le paragraphe 21(1) est que le ministre a le pouvoir discrétionnaire de refuser la communication de documents contenant des renseignements décrits dans ce paragraphe. Enfin, il appert de l’historique de la Loi que le législateur ne souhaitait pas que l’application du paragraphe 69(3) rende inopérant le paragraphe 21(1).

L’alinéa 21(1)a) prévoit une exception discrétionnaire pour les « avis ou recommandations élaborés par ou pour une institution fédérale ou un ministre ». Selon la jurisprudence, les « avis » comprennent l’expression d’une opinion sur des questions de politique, mais excluent les renseignements de nature très factuelle. L’effet combiné des alinéas 21(1)a) et b) est d’exclure de la communication prévue par la Loi un très grand nombre de documents établis dans les processus internes d’élaboration des politiques d’une institution fédérale.

Il y a eu relativement peu de jurisprudence sur l’alinéa 21(1)b). Cependant, le Guide du Conseil du Trésor : Politiques et lignes directrices en matière d’accès à l’information (le Guide) a servi de guide. Bien que les mots « compte rendu », « consultations » et « délibérations » ne soient pas définis dans la Loi, ils devraient recevoir leur sens ordinaire et habituel. Selon la définition de ces mots donnée dans le Guide, seuls les renseignements décrivant l’avis donné, les consultations entreprises ou l’échange d’idées conduisant à une décision particulière constituent un compte rendu pouvant faire l’objet d’une exception en vertu de l’alinéa 21(1)b). Il s’ensuit que les renseignements factuels devront en général être exclus du champ de l’alinéa 21(1)b).

Le refus du ministre de communiquer les passages contestés sur le fondement des alinéas 21(1)a) et b) était déraisonnable. Ce refus s’expliquait principalement par le fait que la question du MMT demeurait pour le gouvernement un dossier actif. Cependant, selon la jurisprudence, le ministre doit considérer s’il est ou non dans l’intérêt public qu’un document soit communiqué et mettre en balance les intérêts rivaux en gardant à l’esprit les objets de la Loi, savoir l’élimination d’obstacles aux communications libres et spontanées entre les ministères. Les principes démocratiques exigent que le public soit en mesure de participer aussi pleinement que possible à l’élaboration des politiques en exerçant une certaine influence. Il n’y avait aucune justification pour la non‑communication au regard de l’intérêt public, sauf que le MMT demeurait un dossier d’actualité. Le sous‑ministre doit se demander si la communication est possible sans que cela nuise à l’efficacité du gouvernement.

Le refus du ministre de communiquer les documents ne reposait pas sur des motifs suffisants. L’analyse faite par le sous‑ministre fut quelque peu arbitraire. Certaines parties des documents ont continué d’être communiquées après même que le sous‑ministre eut estimé que cette communication porterait atteinte à l’action gouvernementale, et cela bien que les circonstances fussent demeurées pratiquement inchangées. D’ailleurs, nombre des passages que le sous‑ministre a refusé de communiquer en invoquant une atteinte possible à l’action gouvernementale ne relevait pas de l’article 21. Il n’y avait aucune preuve propre à appuyer la conclusion du ministre selon laquelle la communication des passages contestés mettrait en péril l’action future du gouvernement en ce qui a trait au MMT, et la quasi‑totalité de la section « analyse » avait déjà été communiquée.

lois et règlements cités

Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. (1985), ch. A‑1, art. 2, 4 (mod. par L.C. 1992, ch. 1, art. 144, ann. VII, no 1(F); 2001, ch. 27, art. 202), 6, 13 (mod. par L.C. 2000, ch. 7, art. 21), 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 30 (mod. par L.C. 1992, ch. 21, art. 4), 39(2)a), 41, 42, 48, 49, 50, 53, 69 (mod. par L.C. 1992, ch. 1, art. 144, ann. VII, no 3(F)).

Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. (1985), ch. C‑5, art. 39 (mod. par L.C. 1992, ch. 1, art. 144, ann. VII, no 5(F)).

Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. (1985), ch. P‑21, art. 47.

Loi sur les additifs à base de manganèse, L.C. 1997, ch. 11.

Projet de loi C‑43, Loi édictant la Loi sur l’accès à l’information et la Loi sur la protection des renseignements personnels, modifiant la Loi sur la preuve au Canada et la Loi sur la Cour fédérale et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, 1re sess., 32e lég., 1980 (1re lecture, 17 juillet 1980), clauses 21, 22, 69.

jurisprudence citée

décisions appliquées :

3430901 Canada Inc. c. Canada (Ministre de l’Industrie), [2002] 1 C.F. 421; 2001 CAF 254; Lavigne c. Canada (Commissariat aux langues officielles), [2002] 2 R.C.S. 773; 2002 CSC 53; Conseil canadien des œuvres de charité chrétiennes c. Canada (Ministre des Finances), [1999] 4 C.F. 245 (1re inst.); Newfoundland Power Inc. c. Canada (Ministre du Revenu national—M.R.N.), 2002 CFPI 692; Babcock c. Canada (Procureur général), [2002] 3 R.C.S. 3; 2002 CSC 57; Northwestern Utilities Ltd. et autre c. Ville d’Edmonton, [1979] 1 R.C.S. 684.

décisions examinées :

Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Ministre de l’Environnement), [2001] 3 C.F. 514; 2001 CFPI 277; Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Ministre de l’Environnement), 2003 CAF 68; Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226; 2003 CSC 19; Sketchley c. Canada (Procureur général), [2006] 3 R.C.F. 392; 2005 CAF 404; Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Commissaire de la Gendarmerie royale du Canada), [2003] 1 R.C.S. 66; 2003 CSC 8; Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27; Peach Hill Management Ltd. c. Canada (sub nom. Jabel Image Concepts Inc. c. Canada), [2000] A.C.F. no 894 (C.A.) (QL); Rubin c. Canada (Société canadienne d’hypothèques et de logements), [1989] 1 C.F. 265 (C.A.).

décisions citées :

Renvoi  relatif  à  la Loi sur les armes à feu (Can.), [2000]  1  R.C.S.  783;  2000  CSC  31; R. c. Morgentaler, [1993] 3 R.C.S. 463.

doctrine citée

Canada. Guide du Conseil du Trésor : Politiques et lignes directrices en matière d’accès à l’information, chapitre 2‑8 « Exceptions particulières ». Ottawa : Approvision-nements et Services Canada, 1993.

Driedger, Elmer A. The Construction of Statutes Toronto : Butterworths, 1974.

Sullivan, Ruth. Sullivan and Driedger on the Construction of Statutes, 4th ed. Toronto : Butterworths, 2002.

DEMANDE de contrôle judiciaire du refus du ministre de l’Environnement du Canada de communi-quer certains passages d’un mémoire au Cabinet relatif au méthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyle au motif que les documents demandés étaient soustraits à la communication en application des alinéas 21(1)a) et b) de la Loi sur l’accès à l’information. Demande accueillie.

ont comparu :

Daniel Brunet et Diane Therrien pour le demandeur.

Christopher M. Rupar pour le défendeur.

avocats inscrits au dossier :

Daniel Brunet, Ottawa, pour le demandeur.

Le sous‑procureur général du Canada pour le défendeur.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement et du jugement rendus par

[1]Le juge Kelen: Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire du refus du ministre de l’Environnement du Canada (le ministre) de communiquer certains passages d’un mémoire au Cabinet daté de mars 1995 relatif au méthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyle (MMT), un refus fondé sur le fait que les documents demandés sont soustraits à la communication en applica-tion des alinéas 21(1)a) et b) de la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. (1985), ch. A‑1 (la Loi sur l’accès). Le ministre a communiqué les pages 11 à 38 et l’appendice 1 du mémoire au Cabinet, après suppression de certains passages de neuf paragraphes, suppression qui est l’objet de la présente demande.

[2]À l’appendice A des présents motifs figure un tableau qui indique les passages du mémoire au Cabinet qui ont été retranchés par le ministre et qui sont l’objet de la présente demande (les passages contestés).

LES FAITS

[3]Le mémoire au Cabinet comprenait deux sections. La première section était une argumentation de trois pages dans laquelle le ministre parrain présentait au Cabinet un survol de la question, accompagné de recommandations, outre leurs coûts et l’argument principal au soutien de chacune d’elles. La deuxième section, intitulée « analyse », présentait une analyse objective du contexte de la question, les facteurs qui avaient été pris en compte pour arriver aux solutions possibles évoquées, enfin le coût de mise en œuvre de chacune des solutions. La section « analyse » était auparavant appelée « document de travail », dans un mémoire au Cabinet.

L’information demandée

[4]L’information demandée est l’« analyse » ou le document de travail qui fait partie d’un mémoire au Cabinet. Le document de travail, qui se limite aux pages 11 à 38 et à l’appendice 1, est présenté dans les deux langues officielles. Il concerne le MMT, un additif pour carburant. Le Cabinet a rendu publique sa décision concernant le MMT le 19 mai 1995, date à laquelle le gouvernement a déposé le projet de loi C‑94, Loi sur les additifs à base de manganèse. Le projet de loi C‑94 a été déposé à nouveau en tant que projet de loi C‑29 le 22 avril 1996 et a été adopté par le Parlement le 25 avril 1997 (L.C. 1997, ch. 11). L’objet de la loi était d’interdire le commerce interprovincial et l’importation à des fins commerciales du MMT et de l’essence contenant du MMT.

Historique de la demande d’accès

a) La demande

[5]Le 16 septembre 1997, la société Ethyl Canada Inc., par l’entremise de son avocat, présentait au ministre une demande aux termes de l’article 6 de la Loi sur l’accès, en vue d’obtenir :

[traduction] Les documents de travail destinés à présenter des problèmes, des analyses ou des options politiques à l’examen du Conseil privé de la Reine pour le Canada se rapportant au méthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyle (MMT).

[6]Le 28 octobre 1997, le ministre recensait quatre documents se rapportant à la demande d’Ethyl, mais informait Ethyl que la communication des quatre documents serait refusée parce que les documents constituaient des « documents confidentiels du Conseil privé de la Reine pour le Canada » (les documents confidentiels du Cabinet) et qu’ils étaient donc exclus du champ de la Loi sur l’accès en application des alinéas 69(1)a) et e).

[7]Après refus par le ministre de communiquer les documents, Ethyl a porté plainte auprès du commissaire. Le commissaire a ouvert une enquête en vertu de l’article 30 [mod. par L.C. 1992, ch. 21, art. 4] de la Loi sur l’accès. Il est arrivé à la conclusion qu’une partie du mémoire, la section intitulée « analyse », entrait dans le champ des « documents de travail » dont parle l’alinéa 69(1)b) de la Loi sur l’accès, et a donc recommandé au ministre de communiquer les passages des documents demandés.

[8]Le ministre a rejeté la recommandation du commissaire. Le commissaire a alors déposé devant la Cour fédérale, en application de l’alinéa 42(1)a) de la Loi sur l’accès, un recours en révision à l’encontre du refus du ministre de communiquer les documents demandés.

b) Le premier recours en révision déposé en 2001 devant la Cour fédérale

[9]Le 2 avril 2001, le juge Edmond Blanchard faisait droit au recours en révision déposé par le commissaire et rendait une ordonnance, reproduite à l’appendice B des présents motifs, qui obligeait le greffier du Conseil privé (le greffier) à prélever et à communiquer les passages des documents demandés qui présentaient des problèmes, des analyses ou des options politiques : Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Ministre de l’Environnement), [2001] 3 C.F. 514 (1re inst.).

[10]Le 7 février 2003, la Cour d’appel fédérale confirmait le jugement du juge Blanchard, mais accueillait dans une mesure restreinte l’appel interjeté par le ministre : Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Ministre de l’Environnement), 2003 CAF 68. Rédigeant l’arrêt unanime de la Cour d’appel fédérale, le juge Noël écrivait ce qui suit [au paragraphe 27] :

Par conséquent, j’accueillerais l’appel dans la mesure restreinte dont il est fait mention dans les présents motifs, et je modifierais comme suit le paragraphe 2 de l’ordonnance rendue par le juge des demandes :

2. Les quatre documents que le ministre et le Bureau du Conseil privé ont qualifiés de documents confidentiels du Cabinet doivent être retournés au greffier du Conseil privé pour qu’il les examine afin de dire :

a) s’il existe dans les documents ou avec les documents un ensemble de mots destinés à présenter des problèmes, des analyses ou des options politiques à l’examen du Conseil et dont le prélèvement, conformément à l’article 25 de la Loi sur l’accès, ne pose pas de problèmes sérieux;

b) si le greffier du Bureau du Conseil privé constate l’existence de pareil ensemble de mots, il est ordonné que cet ensemble soit extrait du document et communiqué à la demanderesse sous réserve de toute exemption revendiquée par le responsable de l’institution fédérale.

[11]Le juge Blanchard avait estimé que l’article 69 [mod. par L.C. 1992, ch. 1, art. 144, ann. VII, no 3(F)] de la Loi sur l’accès, selon lequel la Loi ne s’applique pas aux documents confidentiels du Cabinet, ne compre-nait pas la section « analyse » du mémoire du Cabinet. La preuve historique montrait que le gouvernement avait transformé le « document de travail », qui faisait partie intégrante du mémoire au Cabinet, en section « analy-se ». Le juge Blanchard écrivait ce qui suit, au paragraphe 45 :

Un tel changement apporté au système de dossiers du Cabinet pourrait être considéré comme une tentative de faire fi de la volonté du législateur.

Le juge Blanchard avait donc estimé que la section « analyse » du mémoire au Cabinet était soumise à la Loi sur l’accès. Cette décision novatrice a été confirmée par la Cour d’appel fédérale, dont l’arrêt renferme les propos suivants du juge Noël, au paragraphe 10 :

En examinant l’évolution du système de dossiers du Cabinet, le juge des demandes a conclu que le type de discussion dont faisait autrefois état un document distinct identifié comme étant un « document de travail » faisait partie, pendant la période en cause, de la section « Analyse » d’un document désigné comme étant un « mémoire au Cabinet » (ou MC). Il a ensuite analysé les mots, le but et l’intention du législateur lorsque celui‑ci a édicté l’alinéa 69(3)b) de la Loi sur l’accès et l’alinéa 39(4)b) de la LPC et il a conclu que le législateur n’avait pas l’intention de permettre au Cabinet de se soustraire à l’application de la législation en incorporant simplement un document pouvant être communiqué dans un document qui ne peut pas l’être. Il a statué que c’était la teneur d’un document, plutôt que son titre, qui devrait l’emporter et il a attribué le refus de produire les documents demandés à une mauvaise appréciation de l’effet juridique de la législation pertinente.

[12]La partie du jugement qui n’a pas été confirmée était la conclusion du juge Blanchard, au paragraphe 47, selon laquelle la section « analyse » doit être communi-quée, sans référence aux exceptions prévues dans la Loi sur l’accès :

À mon avis, les « documents de travail » dont parlent les alinéas 69(1)b) et 69(3)b) de la Loi sur l’accès doivent s’entendre des renseignements destinés à présenter des problèmes, des analyses ou des options politiques à l’examen du Conseil. Si ces renseignements existent, mais se trouvent dans un mémoire au Cabinet, il faut alors se demander s’ils peuvent, sans que cela pose de problèmes sérieux, être prélevés du mémoire au Cabinet conformément à l’article 25 de la Loi sur l’accès. Si tel est le cas, ils doivent être communiqués au public. [Non souligné dans l’original.]

La Cour d’appel a jugé, au paragraphe 16, que le ministre (ou chef de l’institution fédérale) doit avoir la possibilité d’invoquer une exception susceptible de s’appliquer à tels renseignements en vertu des articles 13 [mod. par L.C. 2000, ch. 7, art. 21] à 26 de la Loi sur l’accès. La Cour d’appel a modifié l’ordonnance du juge Blanchard afin de donner en l’espèce au ministre de l’Environnement la possibilité d’envisager et de revendiquer une exception susceptible de s’appliquer à la section « analyse » du mémoire au Cabinet.

c) Le greffier présente une attestation en vertu de la Loi sur la preuve au Canada

[13]Le greffier a alors examiné les quatre documents et attesté que les documents nos 2, 3 et 4 constituaient des renseignements confidentiels du Conseil privé. Le document no 1, qui compte 51 pages, est le mémoire. Le greffier a attesté que les pages 1 à 10 et 39 à 51 du mémoire consistaient en des renseignements contenus dans « une note destinée à soumettre des propositions ou recommandations au Conseil », au sens de l’alinéa 39(2)a) de la Loi sur la preuve au Canada [L.R.C. (1985), ch. C-5] (la LPC).

[14]Le greffier a estimé que les pages 11 à 38 du mémoire et l’appendice 1 du mémoire (la section « analyse ») contenaient [traduction] « un ensemble de mots destinés à présenter des problèmes, des analyses ou des options politiques à l’examen du Conseil ». Il a donc renvoyé la section « analyse » au ministre pour examen, en l’invitant à invoquer tout motif restant qui justifiait une exception à la communication au titre de la Loi sur l’accès ainsi que l’envisageait l’arrêt de la Cour d’appel.

d) La deuxième plainte du commissaire et l’examen de la Cour fédérale

[15]Le 2 juin 2003, le commissaire prenait à nouveau, en vertu du paragraphe 30(3) de la Loi sur l’accès, l’initiative d’une plainte alléguant l’omission du ministre de communiquer la section « analyse ».

[16]Le 20 juin 2003, le ministre informait le commissaire et Ethyl de sa décision d’invoquer, pour certains passages de la section « analyse », les exceptions prévues par l’article 14, les alinéas 21(1)a), b) et c) et l’article 23 de la Loi sur l’accès. Le ministre a communiqué à Ethyl les passages de la section « analyse » qui ne tombaient pas sous le coup d’exceptions.

[17]À la suite de sa propre plainte, le commissaire a enquêté sur la réponse du ministre à la demande présentée par Ethyl en examinant les exceptions invoquées par le ministre et en invitant Ethyl et le ministre à s’exprimer sur l’application des exceptions.

[18]Le 20 février 2004, le ministre décidait de ne plus invoquer l’article 14 de la Loi sur l’accès pour les paragraphes 37 et 68 à 79 de la section « analyse », ni l’alinéa 21(1)c) de la Loi sur l’accès pour les paragraphes 55 à 106 de la section « analyse ». Le ministre continuait toutefois d’invoquer les exceptions prévues par les alinéas 21(1)a) et b) et l’article 23 de la Loi sur l’accès.

[19]Le 30 septembre 2004, le commissaire achevait l’examen de sa plainte. Il a conclu que les passages de la section « analyse » dont la communication avait été refusée aux termes des alinéas 21(1)a) et b) ne bénéficiaient pas d’une exception, et a recommandé au ministre de communiquer les passages en question. Il a aussi conclu toutefois que le ministre avait validement invoqué l’exception prévue par l’article 23 de la Loi sur l’accès pour les autres passages de la section « analyse ».

[20]Le ministre a rejeté la recommandation du commissaire de communiquer des renseignements additionnels. Le 25 mars 2005, avec le consentement d’Ethyl, le commissaire déposait devant la Cour un recours en révision du refus du ministre de communi-quer les passages contestés.

LES DISPOSITIONS LÉGALES APPLICABLES

[21]Les textes qui intéressent la demande sont les suivants :

1. la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. (1985), ch. A‑1;

2. la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. (1985), ch. C‑5.

Les extraits pertinents de ces lois sont reproduits à l’appendice C des présents motifs.

NORME DE CONTRÔLE

[22]Avant d’entreprendre l’analyse des points soulevés dans la demande, il est nécessaire de procéder à l’analyse pragmatique et fonctionnelle de la norme de contrôle devant être appliquée : Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226. Ainsi que l’écrivait le juge Linden dans l’arrêt Sketchley c. Canada (Procureur général), [2006] 3 R.C.F. 392 (C.A.F.), au paragraphe 46 :

[. . .] la cour de révision doit effectuer de nouveau l’analyse pragmatique et fonctionnelle chaque fois qu’une instance administrative rend une décision et non seulement pour chaque type de décision que rend un décideur en particulier en vertu d’une disposition précise. [Souligné dans l’original.]

[23]Les points soulevés dans la demande concernent l’interprétation des exceptions discrétionnaires prévues par les alinéas 21(1)a) et b) de la Loi sur l’accès, et leur application à un ensemble donné de documents. Si la Cour juge que les exceptions s’appliquent, alors le commissaire invite aussi la Cour à examiner la manière dont le ministre a exercé son pouvoir de refuser la communication des passages contestés. Ce sont là deux aspects distincts, qui requièrent chacun une analyse de la norme de contrôle applicable.

(i) La norme de contrôle se rapportant aux alinéas 21(1)a) et b) : interprétation et application

a)            La présence ou l’absence d’une clause privative ou d’un droit d’appel prévu par la loi

[24]Le premier facteur à considérer est la présence ou l’absence d’une clause privative ou d’un droit d’appel prévu par la loi. Ce facteur a été évalué par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Commissaire de la Gendarmerie royale du Canada), [2003] 1 R.C.S. 66. Au paragraphe 15, le juge Gonthier écrivait que la Loi sur l’accès ne contient pas de clause privative protégeant les décisions des responsables des institutions fédérales se rapportant aux questions d’accès à l’information, et les articles 41 et 42 de cette Loi prévoient un droit de recours en révision de telles décisions devant la Cour fédérale. Aucune obligation de retenue ne découle donc de ce facteur.

b)            Les spécialisations respectives du ministre et de la Cour

[25]Le second facteur à examiner est la spécialisation du décideur par rapport à celle de la Cour. La décision dont la révision est demandée concerne la manière dont le ministre interprète l’interaction des alinéas 21(1)a) et b) et de l’article 69 [mod. par L.C. 1992, ch. 1, art. 144, ann. VII, no 3(F)] de la Loi sur l’accès. Par rapport à la juridiction de contrôle, ce décideur n’a aucune spécialisation en matière d’interprétation des lois. La Cour est mieux placée que le ministre pour statuer sur les questions de droit. Ce facteur milite donc en faveur d’une retenue moindre.

c)            L’objet de la législation

[26]Le troisième facteur à considérer est l’objet du texte applicable, à savoir la Loi sur l’accès. Dans l’arrêt Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Commissaire de la Gendarmerie royale du Canada), le juge Gonthier, s’exprimant pour la Cour suprême, écrivait au paragraphe 17 que l’adoption d’une norme de contrôle qui commande une moins grande retenue sert l’objectif de la Loi sur l’accès.

d)            La nature de la question

[27]Le quatrième facteur à considérer est la nature de la question : s’agit‑il d’une question de droit, d’une question de fait ou d’une question mixte de droit et de fait? La Cour acquiescera plus volontiers aux conclusions factuelles du responsable d’une institution fédérale qu’à ses conclusions portant sur des questions de droit ou d’interprétation des lois. Le point soulevé dans le présent recours en révision concerne la manière d’interpréter l’interaction de plusieurs dispositions de la Loi sur l’accès en ce qui a trait aux passages contestés. C’est là une question de droit, qui ne commande aucune retenue judiciaire.

e)            Conclusion

[28]Eu égard aux quatre facteurs, la décision du ministre de ne pas communiquer les passages contestés sur le fondement des exceptions prévues par les alinéas 21(1)a) et b) devrait être évaluée selon la norme de la décision correcte.

(ii) La norme de contrôle se rapportant à l’exercice du pouvoir discrétionnaire

[29]La Loi sur l’accès fait relever du pouvoir discrétionnaire du ministre la communication de documents relevant des alinéas 21(1)a) ou b). La Cour d’appel fédérale a examiné, dans l’arrêt 3430901 Canada Inc. c. Canada (Ministre de l’Industrie), [2002] 1 C.F. 421 (l’arrêt Telezone), la norme de contrôle applicable à la manière dont un ministre exerce son pouvoir discrétionnaire selon l’alinéa 21(1)a). Au paragraphe 45, le juge Evans écrivait ce qui suit :

À mon avis, on peut également examiner l’exercice du pouvoir discrétionnaire conféré au ministre par l’alinéa 21(1)a) pour déterminer s’il était déraisonnable. De plus, c’est la norme de la « décision déraisonnable simpliciter », et non celle de la décision manifestement déraisonnable, qui est la variante pertinente de l’examen de la rationalité applicable à la décision discrétionnaire en l’espèce. L’importance accordée par la Loi au droit touché, savoir le droit du public d’avoir accès aux documents de l’administration fédérale garanti par un examen indépendant du refus de les communiquer, et la nature particulière de la décision de principe prise l’emportent sur l’expertise dont disposait le ministre lorsqu’il a pris la décision et son obligation de rendre compte au Parlement. [Non souligné dans l’original.]

[30]Selon moi, l’analyse du juge Evans vaut également pour la révision que fait la Cour de la manière dont le ministre exerce son pouvoir discrétionnaire en application des alinéas 21(1)a) et b). J’arrive donc à la conclusion que la manière dont le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire devrait être évaluée selon la norme de la décision raisonnable.

LA CHARGE DE LA PREUVE

[31]L’article 48 de la Loi sur l’accès dispose que c’est à l’institution fédérale concernée qu’il appartient d’établir le bien‑fondé du refus de communication totale ou partielle d’un document. Les parties s’accordent à dire que, en tant que partie qui souhaite empêcher la communication de documents, c’est au ministre qu’il appartient de prouver l’applicabilité d’une exception à un ensemble donné de documents.

[32]Le ministre fait valoir cependant que, en tant que partie qui prétend que le pouvoir discrétionnaire a été exercé irrégulièrement, c’est au Commissaire qu’il appartient de prouver ce fait. Le ministre invoque l’arrêt rendu par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Telezone. Au paragraphe 99 de cet arrêt, le juge Evans arrivait à la conclusion qu’« il incombait aux appelants d’établir que le ministre n’avait pas exercé conformément à la loi le pouvoir discrétionnaire de communiquer des documents contenant des avis et recommandations au sens de l’alinéa 21(1)a) ».

[33]À mon avis cependant, c’est l’arrêt rendu plus tard par la Cour suprême du Canada dans l’affaire Lavigne c. Canada (Commissariat aux langues officielles), [2002] 2 R.C.S. 773, qui dispose de cette question. Au paragraphe 60, le juge Gonthier, rédigeant l’arrêt unanime de la Cour, écrivait ce qui suit à propos de la Loi sur la protection des renseignements personnels [L.R.C. (1985), ch. P-21] :

Comme je l’ai mentionné, l’al. 22(1)b) n’est pas une clause d’exclusion absolue. La décision du Commissaire aux langues officielles de refuser la divulgation en application de l’al. 22(1)b) doit être appuyée sur des motifs concrets à l’intérieur des conditions imposées par cet alinéa. En effet, le législateur a prévu qu’il doit exister une vraisemblance de préjudice pour refuser de communiquer les renseignements en vertu de cette disposition. De plus, l’art. 47 de la Loi sur la protection des renseignements personnels prévoit qu’il appartient à l’institution fédérale de faire la preuve du bien‑fondé de l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. Si l’institution fédérale n’arrive pas à démontrer que son refus est basé sur des motifs raisonnables, la Cour fédérale peut alors modifier cette décision et autoriser l’accès aux renseignements personnels (art. 49). [Certains soulignés sont ajoutés.]

[34]Les propos tenus par le juge Gonthier dans l’arrêt Lavigne concernent l’article 47 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, mais le même raisonnement s’applique aussi bien à l’article 48 de la Loi sur l’accès. Ainsi que l’écrivait le juge Evans dans la décision Telezone, au paragraphe 93, « [l]es articles 47 et 48 de la Loi sur la protection des renseignements personnels ne diffèrent pas sensiblement des articles 48 et 49 de la Loi sur l’accès à l’informa-tion ».

[35]La Cour doit donc être persuadée que le ministre était fondé à dire que les alinéas 21(1)a) ou b) s’appli-quent aux passages contestés, et persuadée que sa décision de refuser leur communication était raisonnable.

LES POINTS LITIGIEUX

[36]Il s’agit de savoir si le ministre était légalement fondé à refuser la communication des passages contestés en invoquant l’exception prévue par les alinéas 21(1)a) et b) de la Loi sur l’accès. Plus précisément :

1. Les passages contestés sont‑ils soustraits à la communication en application des alinéas 21(1)a) ou b) de la Loi sur l’accès?

2. Dans l’affirmative, le ministre a‑t‑il légalement exercé son pouvoir discrétionnaire de refuser la communication des passages contestés?

ANALYSE

Point no 1 : Les passages contestés sont‑ils soustraits à la communication?

a)            L’interaction de l’article 21 et de l’article 69 de la Loi sur l’accès

[37]Les alinéas 21(1)a) et b) confèrent au ministre le pouvoir discrétionnaire de refuser la communication de certains documents renfermant des avis donnés au gouvernement :

Activités du gouvernement

21. (1) Le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication de documents datés de moins de vingt ans lors de la demande et contenant :

a) des avis ou recommandations élaborés par ou pour une institution fédérale ou un ministre;

b) des comptes rendus de consultations ou délibérations où sont concernés des cadres ou employés d’une institution fédérale, un ministre ou son personnel;

[39]Le paragraphe 69(1) prévoit que, de manière générale, la Loi sur l’accès ne s’applique pas aux documents confidentiels du Cabinet. Le paragraphe 69(3) énonce une exception à cette règle :

69. (1) La présente loi ne s’applique pas aux documents confidentiels du Conseil privé de la Reine pour le Canada, notamment aux :

[. . .]

b) documents de travail destinés à présenter des problèmes, des analyses ou des options politiques à l’examen du Conseil;

[. . .]

(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas :

a) aux documents confidentiels du Conseil privé de la Reine pour le Canada dont l’existence remonte à plus de vingt ans;

b) aux documents de travail visés à l’alinéa (1)b), dans les cas où les décisions auxquelles ils se rapportent ont été rendues publiques ou, à défaut de publicité, ont été rendues quatre ans auparavant.

[40]À la suite de l’arrêt de la Cour d’appel du 7 février 2003, le greffier a réévalué les quatre documents dont on avait trouvé au départ qu’ils correspondaient à la demande d’Ethyl, et en a prélevé les passages entrant dans le champ de l’exception définie à l’alinéa 69(3)b). Le greffier a conclu que la section « analyse » constituait un « document de travail » au sens de l’alinéa 39(4)b) de la Loi sur la preuve au Canada et qu’elle ne justifiait donc pas une protection en tant que document confidentiel du Cabinet. L’alinéa 39(4)b), qui est reproduit à l’appendice C des présents motifs, est identique à l’alinéa 69(3)b) de la Loi sur l’accès. Par suite de l’arrêt de la Cour d’appel, le ministre a eu le loisir de revendiquer les exceptions applicables à la section « analyse ».

[41]Le commissaire fait cependant valoir que les exceptions des alinéas 21(1)a) et b) ne peuvent pas s’appliquer lorsque sont remplies les conditions de l’alinéa 69(3)b). Les documents de travail soustraits au régime de « protection du franc‑parler », un régime institué dans le paragraphe 69(1), ne sauraient, de dire le commissaire, être soustraits à la communication parce qu’ils sont classés comme « avis ou recommandations » ou comme « comptes rendus de consultations ou délibérations », selon les alinéas 21(1)a) ou b). Le commissaire soutient qu’un tel résultat va à l’encontre de l’intention du législateur et de l’objet déclaré de la Loi sur l’accès.

[42]La méthode contemporaine d’interprétation des lois, décrite par Elmer Driedger dans The Construction of Statutes (Toronto : Butterworths, 1974), à la page 67, a été adoptée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Re Rizzo and Rizzo Shoes Ltd., [1998] 1 R.C.S. 27, au paragraphe 21 :

[traduction] Aujourd’hui il n’y a qu’un seul principe ou solution : il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur.

[43]Le commissaire a déposé des documents dressant l’historique des articles 21 et 69. Se fondant sur ces documents extrinsèques, il demande à la Cour d’interpréter la Loi sur l’accès d’une manière qui empêche l’application de l’exception du paragraphe 21(1) pour les documents relevant du paragraphe 69(3). Il est bien établi que la Cour peut s’en rapporter à des documents extrinsèques, notamment aux débats du Parlement, pour déterminer la raison d’être d’un texte ou d’une disposition : Renvoi relatif à la Loi sur les armes à feu (Can.), [2000] 1 R.C.S. 783, paragraphe 17; R. c. Morgentaler, [1993] 2 R.C.S. 463, aux pages 483 et 484.

[44]Une simple lecture des articles 21 et 69, suivie d’un examen de l’historique de la Loi sur l’accès, me conduit cependant à dire que l’argument du commissaire sur ce point n’est pas valable.

[45]D’abord, l’effet du paragraphe 69(3) apparaît, encore qu’indirectement, à la lecture des mots liminaires des paragraphes 69(1) et (3) :

69. (1) La présente loi ne s’applique pas aux documents confidentiels du Conseil privé de la Reine pour le Canada, notamment aux :

[. . .]

(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas : [Non souligné dans l’original.]

Une simple lecture de ces dispositions nous enseigne que, si un document entre dans le champ du paragraphe 69(3), alors, comme exception à la règle du paragraphe 69(1) qui exclut les documents confidentiels du Cabinet, la Loi sur l’accès s’applique audit document. Comme je le fait remarquer ci‑dessous, ce fait ne permet pas à lui seul de dire si le document doit être communiqué sur demande. C’est là une décision qui doit être prise en fonction des autres dispositions de la Loi sur l’accès.

[46]Deuxièmement, la Cour d’appel a clairement donné au ministre la possibilité de revendiquer les exceptions pouvant s’appliquer aux documents qui, selon le greffier, ne constituaient pas des documents confidentiels du Cabinet aux termes de l’alinéa 69(3)b) de la Loi sur l’accès. Comme je l’indique plus haut au paragraphe 10, le juge Noël écrivait ce qui suit :

b) si le greffier du Bureau du Conseil privé constate l’existence de pareil ensemble de mots, il est ordonné que cet ensemble soit extrait du document et communiqué à la demanderesse sous réserve de toute exemption revendiquée par le responsable de l’institution fédérale. [Non souligné dans l’original.]

Si l’application de l’alinéa 69(3)b) faisait obstacle aux autres exceptions prévues par la Loi sur l’accès, la Cour d’appel n’aurait pas donné cette possibilité au ministre.

[47]Troisièmement, l’exception particulière du paragraphe 21(1) concernant les « avis et recomman-dations » et les « comptes rendus de consultations ou délibérations » se distingue des mots employés dans l’alinéa 69(1)b) : « documents de travail destinés à présenter des problèmes, des analyses ou des options politiques à l’examen du Conseil ». Ainsi que l’expliquait le juge Malone dans l’arrêt Peach Hill Management Ltd. c. Canada (sub nom. Jabel Image Concepts Inc. c. Canada), [2000] A.C.F. no 894 (C.A.) (QL), au paragraphe 12 :

Lorsqu’une loi emploie des mots différents pour traiter du même sujet, ce choix du législateur doit être considéré comme délibéré et être tenu pour une indication de changement de sens ou de différence de sens.

Il s’ensuit que, quelle qu’ait pu être l’intention du législateur à propos des documents de travail, l’intention exprimée dans le paragraphe 21(1) est que le ministre a le pouvoir discrétionnaire de refuser la communication de documents contenant des renseignements décrits dans ce paragraphe.

[48]Finalement, l’historique de la Loi sur l’accès nous enseigne que le législateur ne souhaitait pas que l’application du paragraphe 69(3) rende inopérant le paragraphe 21(1). Le projet de loi C‑43, qui édictait la Loi sur l’accès, avait fait l’objet d’une première lecture à la Chambre des communes le 17 juillet 1980. En première lecture, le projet de loi C‑43 contenait des exceptions distinctes pour les documents confidentiels du Cabinet et les documents renfermant des « avis ou recommandations » et des « comptes rendus de consultations et délibérations » : les premiers étaient sujets à une exception impérative prévue par la clause 21, et les seconds étaient sujets à une exception discrétionnaire prévue par la clause 22. Les clauses 21 et 22, telles qu’elles étaient formulées durant la première lecture du projet de loi C‑43, sont reproduites à l’appendice D des présents motifs. Durant son examen en comité, le projet de loi C‑43 fut amendé par suppression de l’exception impérative pour les documents confidentiels du Cabinet, dans la clause 21, et par substitution d’une nouvelle clause 69, qui soustrayait purement et simplement les documents confidentiels du Cabinet au champ de la Loi sur l’accès. Ce faisant, le comité ajoutait une exclusion pour les documents de travail. La clause 22 est aujourd’hui l’article 21 de la Loi sur l’accès, et la clause 69 l’article 69 de la Loi sur l’accès.

[49]Les clauses 21 et 22 concernaient des catégories distinctes de documents, chacune fondée sur sa propre justification quant à la non‑communication desdits documents. Nonobstant les divergences entre les clauses du projet de loi et les dispositions actuelles des paragraphes 21(1) et 69(3) de la Loi sur l’accès, il est clair que le législateur ne voulait pas que ces disposi-tions soient appliquées de telle sorte que les documents relevant de la deuxième catégorie soient nécessairement exclus de la première. La possibilité d’un empiétement existe, mais rien d’inhérent à ces dispositions ne commande un tel empiétement.

[50]L’argument du commissaire selon lequel les exceptions prévues par le paragraphe 21(1) ne peuvent s’appliquer aux documents relevant du paragraphe 69(3) n’est donc pas valable.

Point no 1 : Les passages contestés sont‑ils soustraits à la communication?

b)            « Avis ou recommandations » : alinéa 21(1)a)

[51]L’alinéa 21(1)a) prévoit une exception discrétionnaire pour les « avis ou recommandations élaborés par ou pour une institution fédérale ou un ministre » de la Couronne. La Cour d’appel fédérale a jugé dans l’arrêt Telezone, précité, au paragraphe 50, que :

[…] en décidant d’inclure les « avis ou recommandations » dans une exception, le législateur voulait que le premier ait un sens plus général que le deuxième, sinon il y aurait redondance. [Souligné dans l’original.]

La Cour d’appel a ensuite interprété, au paragraphe 52, le mot « avis » :

Compte tenu de ces considérations, j’inclurais dans le mot anglais advice (avis) l’expression d’une opinion sur des questions de politique, mais j’en exclurais les renseignements de nature très factuelle, même si le verbe advise est parfois utilisé dans la langue courante relativement à une communication qui n’est pas normative et n’a pas la nature d’une opinion.

[52]Je suis également guidé par l’interprétation de l’article 21 qui est offerte par le juge Evans, aujourd’hui juge à la Cour d’appel fédérale, dans la décision Conseil canadien des œuvres de charité chrétiennes c. Canada (Ministre des Finances), [1999] 4 C.F. 245 (1re inst.), au paragraphe 39 :

Il est difficile de ne pas en venir à la conclusion que l’effet combiné des alinéas 21(1)a) et b) est d’exclure de la communication prévue par la Loi un très grand nombre de documents établis dans les processus internes d’élaboration des politiques d’une institution fédérale. Les documents renfermant des renseignements de nature factuelle ou statistique ou offrant une explication du contexte d’une politique ou d’une disposition législative en vigueur ne sont peut‑être pas visés par ces conditions générales. Cependant, la plupart des documents internes qui analysent un problème, en commençant par identifier celui‑ci, et qui proposent ensuite un certain nombre de solutions avant de terminer sur des recommandations précises au niveau des changements sont susceptibles de tomber sous le coup des alinéas 21(1)a) ou b).

[53]Pour refuser de communiquer les passages contestés, le ministre s’est fondé sur les deux alinéas 21(1)a) et b). Après examen des documents, j’arrive à la conclusion que certaines parties des passages contestés sont sujets à l’exception discrétionnaire de l’alinéa 21(1)a). J’examinerai séparément l’applicabilité de l’alinéa 21(1)b) aux passages contestés. L’appendice confidentiel des présents motifs reprend, pour plus de sûreté, les passages supprimés des neuf paragraphes en litige. Les parties mises en relief qui apparaissent dans l’appendice confidentiel sont les passages qui, selon la Cour, ne tombent pas sous le coup de l’alinéa 21(1)a).

Le paragraphe 46

[54]Le paragraphe 46, qui examine « les incidences économiques et la compétitivité de l’industrie des véhicules automobiles et de l’industrie pétrolière », renferme huit phrases. Les quatre dernières phrases ont été effacées. La première d’entre elles ne renferme que des renseignements factuels et ne tombe donc pas sous le coup de l’alinéa 21(1)a). La deuxième expose à la fois une opinion et un fait. Par conséquent, je suis d’avis que l’alinéa 21(1)a) s’applique à l’opinion exprimée dans les 15 premiers mots de la seconde phrase, mais non à l’information factuelle apparaissant dans les 18 mots restants. La troisième phrase, qui constitue un avis, est donc sujette à l’alinéa 21(1)a). La quatrième phrase renferme à la fois un fait et une opinion, et je suis d’avis que l’alinéa 21(1)a) ne s’applique qu’aux 12 derniers mots.

Le paragraphe 47

[55]Les trois dernières phrases du paragraphe 47 ont été effacées. La première de ces phrases contient à la fois un fait et un avis, et j’appliquerais l’alinéa 21(1)a) uniquement à l’avis exprimé dans les 13 derniers mots. La deuxième phrase en litige ne contient que des renseignements factuels, auxquels l’alinéa 21(1)a) ne s’applique pas. Selon moi, la troisième phrase exprime intégralement une opinion sur une question de principe et elle est donc sujette à l’alinéa 21(1)a).

Le paragraphe 66

[56]Le ministre a refusé de communiquer les deux phrases du paragraphe 66, où il est question d’un inconvénient de l’option « approche nationale ». La deuxième phrase a été effacée en vertu de l’article 23 de la Loi sur l’accès, qui prévoit une exception pour les renseignements protégés par le secret professionnel liant un avocat à son client. Le commissaire ne conteste pas le refus du ministre de communiquer la seconde phrase. On ne sait pas, au vu du document, si l’article 23 a également été invoqué pour la première phrase. En tout état de cause, le ministre dit que la première phrase est visée par l’exception des alinéas 21(1)a) et b).

[57]La première phrase du paragraphe 66 renferme des renseignements purement factuels. Par ailleurs, elle est presque identique à l’énoncé déjà communiqué qui est contenu dans le paragraphe 36 de la section « analyse ». Le ministre ne peut pas invoquer l’alinéa 21(1)a) pour refuser la communication de la première phrase. Il ne saurait prétendre non plus refuser la communication de la première phrase en invoquant l’article 23, parce que le privilège du secret profession-nel de l’avocat ne s’applique pas aux renseignements qui ont déjà été communiqués.

Le paragraphe 84

[58]Le ministre a refusé de communiquer la seconde phrase du paragraphe 84, où il est question d’un inconvénient de l’option consistant à « aligner les normes d’émissions des véhicules automobiles sur les normes fédérales des États‑Unis (sans suppression du MMT) » (option 3). Je ne suis pas convaincu que cette phrase constitue des « avis ou recommandations » au sens de l’alinéa 21(1)a).

Le paragraphe 87

[59] Le ministre a refusé de communiquer les trois phrases du paragraphe 87, où sont encore analysés les inconvénients de l’option 3. Les renseignements contenus dans les deux premières phrases, encore qu’assez hypothétiques, sont surtout factuels. Il m’est donc impossible de dire que les deux premières phrases sont visées par l’exception de l’alinéa 21(1)a). La troisième phrase, cependant, expose une opinion et elle bénéficie donc de l’exception de l’alinéa 21(1)a).

Le paragraphe 89

[60]Le ministre a refusé de communiquer les deux phrases du paragraphe 89, qui fait lui aussi partie de la section décrivant les inconvénients de l’option 3. Les 11 premiers mots constituent manifestement un avis au sens de l’alinéa 21(1)a); cependant, le reste du paragraphe 89 expose des renseignements factuels. Les 11 derniers mots de la première phrase semblent constituer le fondement de l’avis exprimé dans les mots liminaires de la phrase, mais je suis d’avis qu’un prélèvement s’impose ici. Par conséquent, seuls les 11 premiers mots du paragraphe 89 sont assujettis à l’exception de l’alinéa 21(1)a).

Le paragraphe 94

[61]Le paragraphe 94, dont le ministre a refusé de communiquer la dernière phrase, débute l’examen des inconvénients de l’« option de la taxe d’accise » (option 4). Le texte effacé renferme des renseignements qui sont de nature totalement hypothétique. Il s’agirait plus exactement, selon moi, d’une note explicative et non d’un avis sur une question de principe. Je ne suis pas persuadé que ce soit là des « avis ou recommandations » au sens de l’alinéa 21(1)a).

Le paragraphe 95

[62] Le paragraphe 95, qui comprend deux phrases, poursuit l’analyse des inconvénients de l’option 4. Le ministre a refusé de communiquer le paragraphe 95 dans son intégralité. Il ressort clairement d’une lecture de la première phrase que cette phrase est normative et qu’elle exprime un avis sur l’à‑propos de l’option 4. Elle est donc visée par l’exception de l’alinéa 21(1)a). Cependant, la deuxième phrase est de nature entièrement factuelle et n’est pas assujettie à l’exception de l’alinéa 21(1)a).

Le paragraphe 106

[63]Le paragraphe 106, qui contient deux phrases et dont le ministre a refusé intégralement la communication, parle d’un inconvénient de l’« approche fondée sur le marché (ne pas agir) ». Je suis d’avis que les deux phrases exposent des avis au sens de l’alinéa 21(1)a).

Point no 1 : Les passages contestés sont‑ils soustraits à la communication?

c)            « Comptes rendus de consultations ou délibéra-tions » : alinéa 21(1)b)

[64]Il y a relativement peu de jurisprudence sur l’alinéa 21(1)b). Je me guide cependant sur les commentaires interprétatifs faits par le juge Martineau dans la décision Newfoundland Power Inc. c. Canada (Ministre du Revenu national—M.R.N.), 2002 CFPI 692, au paragraphe 5 :

Je suis d’avis que l’analyse de différentes alternatives d’ordre stratégique ou légal, ainsi que toute recommandation émanant de cadres ou d’employés du défendeur relativement à la position que devrait prendre celui‑ci à l’égard d’un avis d’opposition d’un contribuable sont clairement visées par l’alinéa 21(1)b) de la Loi.

[65]Il convient de signaler aussi l’interprétation donnée dans le chapitre 2‑8 « Exceptions particulières » du Guide du Conseil du Trésor si Politiques et lignes directrices en matière d’accès à l’information. Avant d’examiner le contenu du guide, il faut savoir s’il est recevable comme preuve et comment l’utiliser. Ainsi que l’écrivait R. Sullivan dans Sullivan and Driedger on the Construction of Statutes (Toronto : Butterworths, 2002), aux pages 505 et 506 :

[traduction] Il est bien établi que les tribunaux peuvent se fonder sur une interprétation administrative pour déterminer la signification ou l’effet d’un texte législatif. Cependant, l’opinion des auteurs de l’interprétation administrative ne lie pas les tribunaux. Sauf dans la mesure où ils sont habilités à le faire par la loi, les administrateurs ne peuvent pas légiférer (c’est le travail du Parlement) ni déterminer le sens véritable de la loi (c’est le travail des tribunaux). Tout ce qu’ils peuvent faire, c’est offrir un avis qui est plus ou moins persuasif.

Le Guide du Conseil du Trésor renferme les commentaires suivants sur l’alinéa 21(1)b) :

Cette disposition comprend plusieurs éléments clés. Le premier est le terme « compte rendu ». Comme ce terme n’est pas défini dans la Loi, il faut lui donner son sens habituel, soit « un exposé ou un récit d’un événement ou d’un fait, un rapport, une relation ou une description ». Ce terme implique plus qu’un échange d’opinions.

[. . .]

Il est important de ne pas oublier que l’exception prévue par cette disposition de la Loi ne s’applique pas à n’importe quel genre de compte rendu : il doit s’agir d’un compte rendu de « consultations ou délibérations ». Comme ces termes ne sont pas définis dans le cadre de la Loi sur l’accès à l’information, ils doivent être pris dans leur sens habituel. Le terme « consultation » se définit comme « l’action de prendre avis ». Le verbe « consulter » signifie « demander avis, conseil à quelqu’un; avoir recours à quelqu’un pour obtenir une directive ou un avis professionnel [. . .] » La « délibération » est « l’action de discuter avec d’autres personnes en vue d’une décision à prendre; l’analyse du pour et du contre d’une mesure à prendre par les membres d’un conseil ».

Selon ces définitions, seuls les renseignements décrivant l’avis donné, les consultations entreprises ou l’échange d’idées conduisant à une décision particulière constituent un compte rendu pouvant faire l’objet d’une exception en vertu de l’alinéa 21(1)b). [Non souligné dans l’original.]

[66]J’admets que les mots « compte rendu », « consultations » et « délibérations » devraient recevoir leur sens ordinaire et habituel ainsi qu’on peut le lire dans le Guide du Conseil du Trésor.

[67]Il découle des définitions ci‑dessus que les renseignements factuels devront en général être exclus du champ de l’alinéa 21(1)b). J’arrive donc à la conclusion que les parties des passages contestés dont j’ai dit ci‑dessus, dans mon analyse de l’alinéa 21(1)a), qu’elles renfermaient des renseignements surtout factuels ne sont pas visées par l’exception de l’alinéa 21(1)b).

[68]S’agissant d’un mémoire au Cabinet, il est évident que les types de documents visés par chacun des alinéas 21(1)a) et b) risquent de présenter souvent des similitudes. Ces similitudes découlent de la nature consultative du mémoire, lequel a été rédigé par le personnel d’une institution fédérale ou d’un ministre de la Couronne. Pour ce qui touche en particulier la section « analyse », je suis d’avis que les parties des passages contestés dont j’ai dit qu’elles entraient dans le champ de l’exception prévue par l’alinéa 21(1)a) sont également assujetties à l’exception prévue par l’alinéa 21(1)b).

[69]J’arrive donc à la conclusion que les alinéas 21(1)a) et b) de la Loi sur l’accès s’appliquent aux passages contestés dans la mesure indiquée à l’appendice A des présents motifs.

Point no 2 : Dans l’affirmative, le ministre a‑t‑il légale-ment exercé son pouvoir discrétionnaire de refuser la communication des passages contestés?

[70]Le commissaire fait valoir que le ministre a irrégulièrement exercé son pouvoir discrétionnaire de refuser la communication des passages contestés. Les parties ont déposé des documents confidentiels censés aider la Cour à examiner la manière dont le ministre a exercé son pouvoir. Comme je l’ai dit plus haut, c’est au ministre qu’il appartient de convaincre la Cour qu’il a exercé son pouvoir d’une manière raisonnable.

[71]L’essentiel de l’argument du commissaire est que le pouvoir discrétionnaire du ministre a été exercé d’une manière déraisonnable parce que le ministre a refusé de communiquer des passages contenant les mêmes renseignements que ceux qui se trouvaient dans certaines parties des documents communiqués. Le commissaire fait aussi valoir que le ministre n’a pas exercé son pouvoir d’une manière conforme au principe énoncé par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Rubin c. Canada (Société canadienne d’hypothèques et de logement), [1989] 1 C.F. 265, à la page 274 :

En conséquence, il incombe au responsable d’une institution (ou à son délégué) de tenir compte de la politique et de l’objet de la Loi sur l’accès à l’information dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire qu’il tient du législateur en vertu du paragraphe 21(1). Lorsqu’on se rappelle que le paragraphe 4(1) de la Loi confère aux citoyens canadiens et aux résidents permanents un droit général d’accès et que les exceptions à cette règle doivent être précises et limitées, le législateur a, à mon avis, clairement voulu que les exceptions fassent l’objet d’une interprétation stricte. [Note de bas de page omise.]

[72]Le commissaire a renvoyé la Cour à plusieurs passages de la partie communiquée de la section « analyse », passages qui, selon lui, correspondent étroitement aux renseignements que le ministre a refusé de communiquer. La Cour a déjà conclu que les alinéas 21(1)a) et b) ne s’appliquent pas à nombre des passages contestés qui ont été recensés par le commissaire. Pour les passages auxquels ils ne s’appliquent pas, je n’estime pas qu’il y ait une similitude appréciable entre eux et les parties des passages contestés qui échappent à la communication selon les alinéas 21(1)a) et b). Les parties visées par une exception contiennent des avis, tandis que les passages auxquels le commissaire a renvoyé la Cour exposent des renseignements surtout factuels.

[73]Il appert du dossier que le refus du ministre de communiquer les passages contestés s’expliquait principalement par le fait que la question du MMT demeurait pour le gouvernement un dossier actif. Dans une lettre adressée au commissaire le 20 février 2004, le sous‑ministre écrivait ce qui suit :

[traduction] La question du MMT demeure une question d’actualité qui présente pour le gouvernement du Canada des incidences de nature politique. Le ministre de l’Environnement établit aujourd’hui une feuille de route pour qu’un tiers procède à un examen impartial de la question. Les conclusions de cet examen permettront de dire si la question du MMT justifie de nouvelles mesures fédérales. Vu que ce dossier demeure d’actualité, nous avons estimé que la communication de renseignements additionnels figurant dans le document pourrait nuire au processus décisionnel du gouvernement et compromettre les mesures fédérales futures.

[74]Plus tôt, le sous‑ministre avait écrit ce qui suit au commissaire dans une lettre datée du 8 septembre 2003 :

[traduction] Le MMT demeure un dossier d’actualité pour le gouvernement du Canada. Les exceptions appliquées au document sont nécessaires pour la préservation d’un dialogue complet et franc entre les fonctionnaires qui participent au processus décisionnel. Si tels avis devaient devenir publics, l’intégrité du processus décisionnel du gouvernement pourrait être compromise.

[75]L’examen des documents déposés à titre confidentiel ne révèle pas d’autres motifs quant au refus du ministre de communiquer les passages contestés. Lorsqu’il a procédé, comme il devait le faire, à la mise en balance des intérêts qui militaient pour leur communication et de ceux qui militaient contre leur communication, le représentant du ministre a estimé qu’un refus de communication s’imposait, principale-ment parce que le dossier du MMT restait une question d’actualité.

[76]Il existe une jurisprudence sur la nécessité pour le ministre de considérer s’il est ou non dans l’intérêt public qu’un document soit communiqué et de mettre en balance les intérêts rivaux en présence, en gardant à l’esprit les objets de la Loi. Le Guide du Conseil du Trésor précise aussi que le pouvoir de communiquer ou non des documents en application de l’article 21 requiert de se demander « si la communication de ces renseignements risque de nuire aux démarches engagées pour donner des avis, formuler des recommandations ou mener des consultations et des délibérations ». La Cour suprême du Canada a confirmé le principe de common law selon lequel l’intérêt public dans la communication doit être mis en balance avec l’intérêt public dans la préservation de la confidentialité—même s’il s’agit de documents confidentiels du Cabinet : Babcock c. Canada (Procureur général), [2002] 3 R.C.S. 3, aux paragraphes 22 et 28.

[77]La Cour d’appel a donné, dans l’arrêt Telezone, au paragraphe 51, les indications suivantes sur les objets dont doit tenir compte le ministre dans l’interprétation de l’article 21 :

De plus, il faut interpréter l’exception en tenant compte de l’objectif visé, savoir supprimer les obstacles aux communications libres et spontanées entre les ministères et assurer que le processus décisionnel ne fasse pas l’objet d’un examen extérieur approfondi, susceptible de miner la capacité du gouvernement de s’acquitter de ses fonctions essentielles : Conseil canadien des œuvres de charité chrétiennes, aux paragraphes 30 à 32.

[78]L’intérêt public rival dans la communication a été décrit par le juge Evans, aujourd’hui juge à la Cour d’appel fédérale, dans la décision Conseil canadien des œuvres de charité chrétiennes, au paragraphe 32 :

Par ailleurs, bien entendu, les principes démocratiques exigent que le public, et cela signifie souvent les représentants de différents groupes d’intérêts, soit en mesure de participer aussi pleinement que possible à l’élaboration des politiques en exerçant une certaine influence. Sans un certain degré d’ouverture de la part du gouvernement au sujet de sa réflexion sur les questions d’intérêt public, et sans accès aux renseignements pertinents qui sont en possession du gouvernement, l’efficacité de la participation du public sera inévitablement réduite.

[79]Le contre‑interrogatoire confidentiel du sous‑ministre ne fait ressortir aucune justification pour la non‑communication au regard de l’intérêt public, si ce n’est la raison exprimée publiquement selon laquelle les documents n’étaient pas communiqués parce que le MMT demeurait un dossier d’actualité. Il n’est pas établi que le sous‑ministre était au fait de la jurispru-dence régissant l’interprétation et l’application de l’article 21, et l’on ne sait pas s’il a tenu compte des principes applicables à l’exercice de son pouvoir. Le sous‑ministre doit se demander si la communication est possible sans que cela nuise à l’efficacité du gouvernement.

[80]Dans l’arrêt Telezone, la Cour d’appel écrivait ce qui suit, au paragraphe 112, à propos du caractère suffisant des motifs invoqués :

La question qui se pose est de savoir si les motifs fournissaient une explication suffisante au refus de communiquer permettant ainsi à la Cour d’effectuer une révision ou s’ils révèlent que le ministre n’a pas exercé conformément à la loi son pouvoir discrétionnaire de refuser de communiquer les documents visés par l’exception prévue à l’alinéa 21(1)a).

Le fait d’exposer des motifs favorise aussi la transparence et la responsabilité dans les décisions administratives. Ainsi que l’écrivait le juge Estey dans l’arrêt Northwestern Utilities Ltd. et autre c. Ville d’Edmonton, [1979] 1 R.C.S. 684, à la page 706 :

Cette obligation est salutaire : elle réduit considérablement les risques de décisions arbitraires, raffermit la confiance du public dans le jugement et l’équité des tribunaux administratifs et permet aux parties aux procédures d’évaluer la possibilité d’un appel et, le cas échéant, au tribunal siégeant en révision ou en appel d’accorder une audition complète, qui serait peut‑être inaccessible si les motifs de la décision n’étaient pas révélés.

[81]Si j’examine selon la norme de la décision raisonnable la manière dont le ministre a procédé à la mise en balance des intérêts considérés, je suis d’avis que le refus du ministre de communiquer les documents ne reposait pas sur des motifs suffisants. Selon moi, l’analyse faite par le sous‑ministre fut quelque peu arbitraire. Certaines parties des documents ont continué d’être communiquées après même que le sous‑ministre eut  estimé  que cette communication porterait atteinte à  l’action  gouvernementale,  et cela bien que les circonstances fussent demeurées pratiquement inchan-gées. D’ailleurs, en tout état de cause, nombre des passages que le sous‑ministre a refusé de communiquer en invoquant une atteinte possible à l’action gou-vernementale ne relèvent pas, dans cette analyse, de l’article 21.

[82]On ne m’a renvoyé à aucune preuve—publique ou confidentielle—propre à appuyer la conclusion du ministre selon laquelle la communication des passages contestés mettrait en péril l’action future du gouverne-ment en ce qui a trait au MMT. Le gouvernement a déjà communiqué la quasi‑totalité de la section « analyse ». L’analyse contient 106 paragraphes. Seules certaines parties de neuf paragraphes ont été effacées. Le texte communiqué comprend le détail des cinq options étudiées par le Cabinet. Le refus du ministre, fondé sur les alinéas 21(1)a) et b), de communiquer les passages contestés, un refus dont on ne saurait donc dire qu’il résiste à un examen assez poussé, est déraisonnable en l’espèce.

DISPOSITIF

[83]Eu égard à ce qui précède, j’accueille la demande de contrôle. L’article 49 de la Loi sur l’accès oblige la Cour à ordonner au responsable de l’institution dont relève le document en litige de communiquer la partie des documents dont le responsable n’avait pas le pouvoir de refuser la communication. Par conséquent, j’ordonne au ministre de communiquer à Ethyl les parties suivantes des passages contestés qui ne sont pas l’objet des exceptions discrétionnaires de l’article 21 :

1. au paragraphe 46 : l’intégralité de la première phrase, les 18 derniers mots de la deuxième phrase et les 11 premiers mots de la quatrième phrase;

2. au paragraphe 47 : les dix premiers mots de la première phrase et l’intégralité de la deuxième phrase;

3. la première phrase du paragraphe 66;

4. l’intégralité du paragraphe 84;

5. les deux premières phrases du paragraphe 87;

6. au paragraphe 89, les 11 derniers mots de la première phrase;

7. l’intégralité du paragraphe 94;

8. la deuxième phrase du paragraphe 95.

[84]Les parties restantes des passages contestés auxquelles s’appliquent les alinéas 21(1)a) et b) sont retournées au ministre pour qu’il décide à nouveau, motifs à l’appui, si leur communication à Ethyl est en l’occurrence justifiée, compte tenu de l’intérêt public dans la communication de l’information et dans la protection des processus internes requis pour une action gouvernementale efficace.

LES DÉPENS

[85]Les deux parties ont sollicité des dépens. Le paragraphe 53(1) de la Loi sur l’accès prévoit que les frais et dépens sont laissés à l’appréciation de la Cour et suivent, sauf ordonnance contraire de la Cour, le sort du principal. Les conclusions exposées par le commissaire devant la Cour portaient principalement sur la question de l’interaction des articles 21 et 69 de la Loi sur l’accès. Ces arguments étaient pour l’essentiel dépour-vus de bien‑fondé. Il en sera tenu compte dans une ordonnance obligeant chacune des parties à supporter ses propres dépens.

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1. Le ministre doit communiquer à Ethyl les parties suivantes des passages contestés, ainsi que le texte français correspondant :

a) au paragraphe 46 : l’intégralité de la première phrase, les 18 derniers mots de la deuxième phrase et les 11 premiers mots de la quatrième phrase;

b) au paragraphe 47 : les dix premiers mots de la première phrase et l’intégralité de la deuxième phrase;

c) la première phrase du paragraphe 66;

d) l’intégralité du paragraphe 84;

e) les deux premières phrases du paragraphe 87;

f) au paragraphe 89, les 11 derniers mots de la première phrase;

g) l’intégralité du paragraphe 94;

h) la deuxième phrase du paragraphe 95.

2. Les parties suivantes des passages contestés sont retournées au ministre pour qu’il décide à nouveau, motifs à l’appui, si leur communication à Ethyl est en l’occurrence justifiée, compte tenu de l’intérêt public dans la communication de l’information et dans la protection des processus internes nécessaires à une action gouvernementale efficace :

a) au paragraphe 46, les 15 premiers mots de la deuxième phrase, la troisième phrase et les 12 derniers mots de la quatrième phrase;

b) au paragraphe 47, les 13 derniers mots de la première phrase et la troisième phrase;

c) la troisième phrase du paragraphe 87;

d) les 11 premiers mots du paragraphe 89;

e) la première phrase du paragraphe 95;

f) le paragraphe 106;

3. Les parties supporteront chacune leurs propres dépens dans la présente instance.

APPENDIX A

The “disputed passages” in the memorandum to Cabinet regarding MMT

 

#

Page (English Version)

Para.

Material (English Version)

Provision(s) relied upon

Courts’ Conclusion

Exemption applied

 

Order

 

1

19

46

Last 4 sentences

21(1)(a) and (b)

Second sentence: first 15 words; third sentence; fourth sentence: last 12 words [21(1)(a),(b)]

Return exempt portion to Minister; release non‑exempt portion to Ethyl.

2

21

47

Last 3 sentences .

21(1)(a) and (b)

First sentence: last 13 words; third sentence. [21(1)(a),(b)]

Return exempt portion to Minister; release non‑exempt portion to Ethyl

3

25

66

First sentence

 21(1)(a) and (b), 23

None.

Release to Ethyl.

4

27

84

Last sentence

21(1)(a) and (b)

None.

Release to Ethyl.

5

27

87

Entire paragraph (3 sentences)

21(1)(a) and (b)

Third sentence. [21(1)(a),(b)]

Return exempt portion to Minister; release non‑exempt portion to Ethyl.

6

27

89

Entire paragraph (2 sentences)

21(1)(a) and (b)

First 11 words. [21(1)(a),(b)]

Return exempt portion to Minister; release non‑exempt portion to Ethyl.

7

29

94

Last sentence

21(1)(a) and (b)

None.

Release to Ethyl.

8

29

95

Entire paragraph (2 sentences)

21(1)(a) and (b)

First sentence. [21(1)(a),(b)]

Return exempt portion to Minister; release non‑exempt portion to Ethyl.

9

29

106

Entire paragraph (2 sentences)

21(1)(a) and (b)

Both sentences. [21(1)(a),(b)]

Return exempt portion to Minister.

 

 

TOTAL

 

 

 

19 sentences

 

 

APPENDICE A

Les « passages contestés » du mémoire au Cabinet relatif au MMT

 

#

Page (version anglaise)

Par.

Texte (version anglaise)

Disposition (s) invoquée(s)

Conclusion de la Cour

Exception appliquée

 

Ordonnance

 

1

19

46

Les 4 dernières phrases

21(1)a) et b)

Deuxième phrase : les 15 premiers mots; troisième phrase; quatrième phrase : les 12 derniers mots [21(1)a),b)]

Renvoi au ministre de la partie exemptée; communication à Ethyl de la partie non exemptée.

2

21

47

Les 3 dernières phrases

21(1)a) et b)

Première phrase : les 13 derniers mots; troisième phrase. [21(1)a),b)]

Renvoi au ministre de la partie exemptée; communication à Ethyl de la partie non exemptée.

3

25

66

La première phrase

 21(1)a) et b), 23

Aucune.

Communication à Ethyl.

4

27

84

La dernière phrase

21(1)a) et b)

Aucune.

Communication à Ethyl.

5

27

87

Tout le paragraphe (3 phrases)

21(1)a) et b)

Troisième phrase. [21(1)a),b)]

Renvoi au ministre de la partie exemptée; communication à Ethyl de la partie non exemptée.

6

27

89

Tout le paragraphe (2 phrases)

21(1)a) et b)

 Les 11 premiers mots. [21(1)a),b)]

Renvoi au ministre de la partie exemptée; communication à Ethyl de la partie non exemptée.

7

29

94

La dernière phrase

21(1)a) et b)

Aucune.

Communication à Ethyl.

8

29

95

Tout le paragraphe (2 phrases)

21(1)a) et b)

Première phrase. [21(1)a),b)]

Renvoi au ministre de la partie exemptée; communication à Ethyl de la partie non exemptée.

9

29

106

Tout le paragraphe (2 phrases)

21(1)a) et b)

Les deux phrases. [21(1)a),b)]

Renvoi au ministre de la partie exemptée.

 

 

TOTAL

 

 

 

19 phrases

 

APPENDICE B

Ordonnance du juge Blanchard en date du 2 avril 2001 [[2001] 3 C.F. 514 (1re inst.)]

1. Cette demande de contrôle judiciaire est accueillie, avec dépens.

2. Les quatre documents que le ministre et le Bureau du Conseil privé ont qualifiés de documents confidentiels du Cabinet doivent être retournés au greffier du Conseil privé pour qu’il les examine afin de dire :

a) Si les documents font état de problèmes, d’analyses ou d’options politiques qui peuvent, conformément à l’article 25 de la Loi sur l’accès, être extraits des documents sans que cela pose de problèmes sérieux;

b) Si le greffier du Bureau du Conseil privé juge que ces renseignements peuvent faire l’objet d’un prélèvement, alors il est ordonné que ces renseignements soient communiqués au demandeur.

APPENDICE C

1. Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. (1985), ch. A‑1 [art. 4 (mod. par L.C. 1992, ch. 1, art. 144, ann. VII, no 1(F); 2001, ch. 27, art. 202)]

2. (1) La présente loi a pour objet d’élargir l’accès aux documents de l’administration fédérale en consacrant le principe du droit du public à leur communication, les exceptions indispensables à ce droit étant précises et limitées et les décisions quant à la communication étant susceptibles de recours indépendants du pouvoir exécutif.

[. . .]

4. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi mais nonobstant toute autre loi fédérale, ont droit à l’accès aux documents relevant d’une institution fédérale et peuvent se les faire communiquer sur demande :

a) les citoyens canadiens;

b) les résidents permanents au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

[. . .]

Activités du gouvernement

21. (1) Le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication de documents datés de moins de vingt ans lors de la demande et contenant :

a) des avis ou recommandations élaborés par ou pour une institution fédérale ou un ministre;

b) des comptes rendus de consultations ou délibérations où sont concernés des cadres ou employés d’une institution fédérale, un ministre ou son personnel;

[. . .]

23. Le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication de documents contenant des renseignements protégés par le secret professionnel qui lie un avocat à son client.

[. . .]

25. Le responsable d’une institution fédérale, dans les cas où il pourrait, vu la nature des renseignements contenus dans le document demandé, s’autoriser de la présente loi pour refuser la communication du document, est cependant tenu, nonobstant les autres dispositions de la présente loi, d’en communiquer les parties dépourvues des renseignements en cause, à condition que le prélèvement de ces parties ne pose pas de problèmes sérieux.

[. . .]

30. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, le Commissaire à l’information reçoit les plaintes et fait enquête sur les plaintes :

a) déposées par des personnes qui se sont vu refuser la communication totale ou partielle d’un document qu’elles ont demandé en vertu de la présente loi;

[. . .]

(3) Le Commissaire à l’information peut lui‑même prendre l’initiative d’une plainte s’il a des motifs raisonnables de croire qu’une enquête devrait être menée sur une question relative à la demande ou à l’obtention de documents en vertu de la présente loi.

[. . .]

41. La personne qui s’est vu refuser communication totale ou partielle d’un document demandé en vertu de la présente loi et qui a déposé ou fait déposer une plainte à ce sujet devant le Commissaire à l’information peut, dans un délai de quarante‑cinq jours suivant le compte rendu du Commissaire prévu au paragraphe 37(2), exercer un recours en révision de la décision de refus devant la Cour. La Cour peut, avant ou après l’expiration du délai, le proroger ou en autoriser la prorogation.

[. . .]

48. Dans les procédures découlant des recours prévus aux articles 41 ou 42, la charge d’établir le bien‑fondé du refus de communication totale ou partielle d’un document incombe à l’institution fédérale concernée.

49. La Cour, dans les cas où elle conclut au bon droit de la personne qui a exercé un recours en révision d’une décision de refus de communication totale ou partielle d’un document fondée sur des dispositions de la présente loi autres que celles mentionnées à l’article 50, ordonne, aux conditions qu’elle juge indiquées, au responsable de l’institution fédérale dont relève le document en litige d’en donner à cette personne communication totale ou partielle; la Cour rend une autre ordonnance si elle l’estime indiqué.

[. . .]

53. (1) Sous réserve du paragraphe (2), les frais et dépens sont laissés à l’appréciation de la Cour et suivent, sauf ordonnance contraire de la Cour, le sort du principal.

(2) Dans les cas où elle estime que l’objet des recours visés aux articles 41 et 42 a soulevé un principe important et nouveau quant à la présente loi, la Cour accorde les frais et dépens à la personne qui a exercé le recours devant elle, même si cette personne a été déboutée de son recours.

[. . .]

69. (1) La présente loi ne s’applique pas aux documents confidentiels du Conseil privé de la Reine pour le Canada, notamment aux :

a) notes destinées à soumettre des propositions ou recommandations au Conseil;

b) documents de travail destinés à présenter des problèmes, des analyses ou des options politiques à l’examen du Conseil;

c) ordres du jour du Conseil ou procès‑verbaux de ses délibérations ou décisions;

d) documents employés en vue ou faisant état de communications ou de discussions entre ministres sur des questions liées à la prise des décisions du gouvernement ou à la formulation de sa politique;

e) documents d’information à l’usage des ministres sur des questions portées ou qu’il est prévu de porter devant le Conseil, ou sur des questions qui font l’objet des communications ou discussions visées à l’alinéa d);

f) avant‑projets de loi ou projets de règlement;

g) documents contenant des renseignements relatifs à la teneur des documents visés aux alinéas a) à f).

(2) Pour l’application du paragraphe (1), « Conseil » s’entend du Conseil privé de la Reine pour le Canada, du Cabinet et de leurs comités respectifs.

(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas :

a) aux documents confidentiels du Conseil privé de la Reine pour le Canada dont l’existence remonte à plus de vingt ans;

b) aux documents de travail visés à l’alinéa (1)b), dans les cas où les décisions auxquelles ils se rapportent ont été rendues publiques ou, à défaut de publicité, ont été rendues quatre ans auparavant.

2. Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. (1985), ch. C-5

39. (1) Le tribunal, l’organisme ou la personne qui ont le pouvoir de contraindre à la production de renseignements sont, dans les cas où un ministre ou le greffier du Conseil privé s’opposent à la divulgation d’un renseignement, tenus d’en refuser la divulgation, sans l’examiner ni tenir d’audition à son sujet, si le ministre ou le greffier attestent par écrit que le renseignement constitue un renseignement confidentiel du Conseil privé de la Reine pour le Canada.

(2) Pour l’application du paragraphe (1), un « renseignement confidentiel du Conseil privé de la Reine pour le Canada » s’entend notamment d’un renseignement contenu dans :

a) une note destinée à soumettre des propositions ou recommandations au Conseil;

b) un document de travail destiné à présenter des problèmes, des analyses ou des options politiques à l’examen du Conseil;

c) un ordre du jour du Conseil ou un procès‑verbal de ses délibérations ou décisions;

d) un document employé en vue ou faisant état de communications ou de discussions entre ministres sur des questions liées à la prise des décisions du gouvernement ou à la formulation de sa politique;

e) un document d’information à l’usage des ministres sur des questions portées ou qu’il est prévu de porter devant le Conseil, ou sur des questions qui font l’objet des communications ou discussions visées à l’alinéa d);

f) un avant‑projet de loi ou projet de règlement.

(3) Pour l’application du paragraphe (2), « Conseil » s’entend du Conseil privé de la Reine pour le Canada, du Cabinet et de leurs comités respectifs.

(4) Le paragraphe (1) ne s’applique pas :

a) à un renseignement confidentiel du Conseil privé de la Reine pour le Canada dont l’existence remonte à plus de vingt ans;

b) à un document de travail visé à l’alinéa (2)b), dans les cas où les décisions auxquelles il se rapporte ont été rendues publiques ou, à défaut de publicité, ont été rendues quatre ans auparavant.

APPENDICE D

3. Projet de loi C‑43, Loi édictant la Loi sur l’accès à l’information et la Loi sur la protection des renseignements personnels, modifiant la Loi sur la preuve au Canada et la Loi sur la Cour fédérale et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois (1re sess., 32e lég., 1re lecture 17 juillet 1980)

Activités du gouvernement

21. (1) Le responsable d’une institution fédérale est tenu de refuser la communication des documents qui entrent dans l’une des catégories suivantes :

a) notes ou mémoires destinés à soumettre des propositions ou recommandations au Conseil;

b) documents de travail destinés à présenter des problèmes, des analyses ou des options politiques à l’examen du Conseil, tant que celui‑ci n’a pas pris de décision à leur sujet;

c) ordres du jour du Conseil ou procès‑verbaux de ses délibérations ou décisions;

d) document employés en vue ou faisant état de consulta-tions entre ministres de la Couronne sur des questions liées à la prise des décisions du gouvernement ou à la formulation de sa politique;

e) documents d’information à l’usage des ministres de la Couronne sur des questions portées ou qu’il est prévu de porter devant le Conseil, ou sur des questions qui font l’objet des consultations visées à l’alinéa d);

f) avant‑projets de loi tant que les projets correspondants ne sont pas déposés devant le Parlement.

(2) Le responsable d’une institution fédérale est tenu de refuser la communication de documents contenant des renseignements relatifs à la teneur des documents qui font partie des catégories visées aux alinéas (1)a) à f).

(3) Les paragraphes (1) et (2) ne s’appliquent pas aux documents qui font partie des catégories visées aux alinéas (1)a) à f) et, selon le cas :

a) dont le premier ministre du Canada ou une personne qu’il délègue à cet effet autorise la communication ou dont la communication est autorisée en vertu de directives du premier ministre;

b) dont la date est antérieure de plus de vingt ans à celle de la demande de communication des documents en question ou de documents contenant des renseignements relatifs à leur teneur.

(4) Pour l’application du présent article, « Conseil » s’entend du Conseil privé de la Reine pour le Canada, du Cabinet et de leurs comités respectifs.

22. (1) Le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication de documents datés de moins de vingt ans lors de la demande et contenant :

a) des avis ou recommandations élaborés par ou pour une institution fédérale ou un ministre de la Couronne;

b) des comptes rendus de consultations ou délibérations où sont concernés des cadres ou employés d’une institution fédérale, un ministre de la Couronne ou le personnel de celui‑ci;

c) des projets préparés ou des renseignements portant sur des positions envisagées dans le cadre de négociations menées ou à mener par le gouvernement du Canada ou en son nom, ainsi que des renseignements portant sur les considérations qui y sont liées.

d) des projets relatifs à la gestion du personnel ou à l’administration d’une institution fédérale et qui n’ont pas encore été mis en œuvre.

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