T-1654-96
Clive E. Cannon (requérant)
c.
Le commissaire adjoint R. Berlinquette, en sa qualité d'officier compétent au sens de l'article 43 de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada (intimé)
Répertorié: Cannonc. Canada (Commissaire adjoint, GRC)(1re inst.)
Section de première instance, juge MacKay" Fredericton, 16 octobre; Ottawa, 14 novembre 1997.
Droit administratif — Contrôle judiciaire — Certiorari — Contrôle judiciaire de la décision par laquelle un comité d'arbitrage de la GRC a annulé l'assignation ordonnant à un officier poursuivant de comparaître comme témoin — Comité menant une enquête sur de présumées contraventions au code de déontologie de la GRC — Demande prématurée — La Cour n'intervient pour annuler une décision interlocutoire que s'il existe des circonstances exceptionnelles, c.-à-d. s'il s'agit d'une question qui est dirigée à l'encontre de l'existence même du tribunal — La décision n'a pas tranché une question fondamentale — Il s'agissait d'une simple décision interlocutoire portant sur une question préliminaire de preuve — Toute erreur dont est entachée une décision procédurale donne ouverture à un appel.
GRC — Contrôle judiciaire de la décision par laquelle le comité d'arbitrage a annulé l'assignation ordonnant à un officier de comparaître comme témoin — Comité menant une enquête sur des allégations de harcèlement sexuel, comme contraventions au code de déontologie de la GRC — Une assignation ordonnant à l'officier poursuivant de comparaître comme témoin a été délivrée et signifiée — Le comité a rejeté la requête visant à obtenir que l'officier poursuivant cesse d'occuper jusqu'à ce qu'il soit convoqué pour témoigner, au motif qu'il n'y avait pas suffisamment de preuve établissant l'existence d'un complot relativement à l'enquête et au dépôt des plaintes — Le comité n'a pas outrepassé sa compétence — Les organismes administratifs sont maîtres de leur propre procédure, sous réserve uniquement des limites explicites imposées par leur loi habilitante et des exigences de l'équité procédurale — Ni la Loi ni son règlement d'application ne limitent les pouvoirs du comité en ce qui concerne ses décisions procédurales — Aucun manquement à l'équité procédurale — Le comité a rendu une décision raisonnée après que les deux parties ont eu l'occasion de faire valoir leur point de vue respectif — Aucune erreur de droit — Le requérant n'a pas été empêché d'avoir toute latitude de présenter des éléments de preuve, de contre-interroger les témoins et de faire des observations, comme l'exige la Loi sur la GRC — La décision du comité était conforme à la jurisprudence en matière criminelle selon laquelle un fardeau de persuasion, qui consiste à faire la preuve de la pertinence et de la nécessité, est imposé à l'avocat qui cherche à forcer l'avocat de la partie adverse à venir à la barre et à lui faire renoncer à son rôle d'avocat — Cette norme s'applique en matière disciplinaire — Le comité ayant estimé que rien ne permettait de conclure à l'existence du prétendu complot, le témoignage ne serait pas pertinent aux questions soumises au comité.
Droit constitutionnel — Charte des droits — Vie, liberté et sécurité — Contrôle judiciaire de la décision par laquelle un comité d'arbitrage de la GRC a annulé l'assignation ordonnant à un officier poursuivant de comparaître comme témoin — Comité menant une enquête sur de présumées contraventions au code de déontologie de la GRC — La présente instance disciplinaire régie par la Loi sur la GRC, même si celle-ci prévoit la perte d'emploi comme sanction possible, ne donne pas lieu à l'application de l'art. 7 de la Charte (droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne, auquel il ne peut être porté atteinte qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale) — La justice fondamentale n'est pas plus exigeante que l'équité procédurale — Le comité n'a pas contrevenu aux principes de justice fondamentale en rendant sa décision interlocutoire, laquelle est une décision préliminaire portant sur la preuve.
Droit constitutionnel — Charte des droits — Procédures criminelles et pénales — Contrôle judiciaire de la décision par laquelle un comité d'arbitrage de la GRC a annulé l'assignation ordonnant à un officier poursuivant de comparaître comme témoin — Comité menant une enquête sur de présumées contraventions au code de déontologie de la GRC — L'art. 11d) de la Charte garantit le droit de tout inculpé d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial — Les procédures disciplinaires ne donnent pas lieu à l'application de l'art. 11, sauf si elles comportent de véritables conséquences pénales, c.-à-d. l'emprisonnement ou une amende qui, par son importance, semblerait imposée dans le but de réparer le tort causé à la société plutôt que pour maintenir la discipline interne — Le processus disciplinaire de la GRC n'est pas intrinsèquement criminel ou quasi-criminel et il n'implique pas une procédure de nature publique — Les sanctions visent à renforcer la discipline — La Loi sur la GRC ne prévoit pas l'emprisonnement comme sanction possible en cas de contravention au code de déontologie — Le congédiement n'est pas une conséquence pénale.
Il s'agissait de la demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle un comité d'arbitrage a annulé l'assignation ordonnant à un officier poursuivant de comparaître comme témoin. Le comité avait été constitué en vertu du paragraphe 43(2) de la Loi sur la GRC en vue de mener une enquête formelle sur une allégation de harcèlement sexuel, conduite constituant une contravention au code de déontologie de la GRC. La sanction, s'il était démontré qu'il y avait eu contravention au code de déontologie, serait le congédiement de la GRC. Après plusieurs refus de communiquer des éléments de preuve essentiels"la plaignante avait porté plainte contre deux autres officiers"et après avoir appris que l'un des poursuivants, le sergent Keating, avait joué un rôle dans les dispositions prises par la GRC en vue de payer les honoraires de l'avocat qui avait conseillé la première plaignante, le requérant en est venu à soupçonner l'existence d'un possible complot contre lui relativement à l'enquête et à la présentation des plaintes, et à croire qu'on ne lui avait pas divulgué des éléments de preuve concernant d'autres questions, comme l'état mental apparent de la première plaignante. Une assignation ordonnant au sergent Keating de comparaître comme témoin a été délivrée et signifiée. Le requérant a ensuite présenté une requête en vue d'obtenir que le sergent Keating, en tant que témoin assigné à comparaître, ne puisse plus agir comme avocat poursuivant et qu'il cesse d'occuper jusqu'à ce qu'il soit convoqué pour témoigner. Après avoir entendu les arguments des deux parties, le comité a annulé l'assignation et a statué qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments de preuve pour démontrer l'existence du prétendu complot et que le motif invoqué pour justifier l'assignation n'avait pas été établi.
Les membres du comité sont nommés individuellement, ne reçoivent aucune rémunération, hormis le traitement ordinaire qui leur est versé en tant que membres permanents au service de la GRC, et sous réserve des dispositions de la Loi sur la GRC et dans l'exercice des fonctions générales habituelles qu'ils continuent d'accomplir au sein de la GRC, ils continuent à relever du bureau du commissaire de la GRC, à qui ils doivent finalement rendre des comptes et qui, en dernière analyse, est investi du pouvoir discrétionnaire de trancher tout appel.
Les questions en litige étaient les suivantes: 1) le comité a-t-il outrepassé sa compétence, vu que la Loi sur la GRC ne l'habilite pas expressément à annuler une assignation qui a été régulièrement délivrée?; 2) la décision d'annuler l'assignation avait-elle pour effet de violer les principes d'équité procédurale?; 3) la décision avait-elle pour effet de violer le droit, garanti à l'article 7 de la Charte, à la vie, à la liberté et à la sécurité, droit auquel il ne peut être porté atteinte qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale, en empêchant le requérant de présenter sa cause?; 4) le comité, tel qu'il est constitué, respecte-t-il les exigences d'indépendance judiciaire contenues à l'alinéa 11d) de la Charte?
Jugement: la demande doit être rejetée.
La demande était prématurée, sauf pour ce qui est des moyens invoqués en vertu de l'alinéa 11d) de la Charte pour contester la constitution du comité d'arbitrage. La Cour n'intervient pour annuler une décision interlocutoire que s'il existe des circonstances exceptionnelles, c.-à-d. s'il s'agit d'une question qui est dirigée à l'encontre de l'existence même du tribunal. La décision par laquelle l'assignation a été annulée n'a pas tranché une question fondamentale soumise au tribunal. Elle était de toute évidence de nature interlocutoire, car elle portait sur une question préliminaire de preuve, c.-à-d. sur la question de savoir si l'assignation délivrée à un témoin éventuel devrait être annulée. Toute erreur dont est entachée une décision procédurale donne ouverture à un appel devant le commissaire en vertu de l'article 45.14 de la Loi sur la GRC, voire même à un contrôle judiciaire ultérieur, si l'erreur procédurale est grave et la décision rendue par le commissaire saisi de l'appel n'a pas pour effet de la corriger.
1) Le comité n'a pas outrepassé sa compétence en annulant l'assignation. Les organismes administratifs sont "maîtres de leur propre procédure", sous réserve uniquement des limites explicites imposées par leur loi habilitante et des exigences de l'équité procédurale. Ni la Loi sur la GRC ni son règlement d'application ne limitent les pouvoirs du comité en ce qui concerne ses décisions procédurales. Les seules restrictions qui existent découlent des exigences de l'équité procédurale. Qui plus est, l'article 4 des Consignes du commissaire (procédure et pratique devant les commissions) prévoit que si l'étude d'une question dont une commission est saisie soulève des points qui ne sont pas visés par les présentes consignes, la commission peut prendre les mesures qu'elle juge nécessaires pour régler ces points.
2) Il n'y a pas eu de manquement à l'équité procédurale. Le comité a rendu une décision raisonnée après que les deux parties ont eu l'occasion de faire valoir leur point de vue respectif.
La décision n'était pas entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle n'avait pas pour effet d'empêcher le requérant d'avoir toute latitude de présenter des éléments de preuve à l'audience, d'y contre-interroger les témoins et d'y faire des observations, comme l'exige le paragraphe 45.1(8) de la Loi sur la GRC. La Loi ne donnait pas au requérant un droit illimité de faire entendre des témoins, compte tenu particulièrement de l'article 6 des Consignes, qui permet au comité de congédier un témoin.
La décision du comité était conforme à la jurisprudence portant sur des circonstances analogues. Un fardeau de persuasion qui consiste à faire la preuve de la pertinence et de la nécessité est imposé à l'avocat, du moins dans les procès criminels, qui cherche à forcer l'avocat de la partie adverse à venir à la barre et à lui faire renoncer à son rôle d'avocat. Cette norme devrait s'appliquer en matière disciplinaire. Le comité a effectivement appliqué cette norme en rendant sa décision. Il a estimé que rien ne permettait de conclure à l'existence du prétendu complot dont le requérant se disait victime. Ainsi, le témoignage que pourrait donner le sergent Keating au sujet du prétendu complot ne serait pas, à cette étape-ci de l'instance, pertinent aux questions soumises au comité. Ce faisant, le comité a agi en rendant une décision interlocutoire qui n'est entachée d'aucune erreur donnant ouverture à un contrôle judiciaire à cette étape-ci.
3) La présente instance disciplinaire régie par la Loi sur la GRC ne donnait pas lieu à l'application de l'article 7 de la Charte, même si la sanction à laquelle s'exposait le requérant était la perte de son emploi. La justice fondamentale n'est pas plus exigeante que l'équité procédurale. À cette étape-ci, le comité n'a pas contrevenu aux principes de justice fondamentale en rendant sa décision interlocutoire, laquelle est une décision préliminaire portant sur la preuve.
4) L'alinéa 11d) de la Charte, qui garantit le droit de tout inculpé d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial dans le cadre d'un procès public et équitable, ne s'appliquait pas. En général, les procédures disciplinaires ne donnent pas lieu à l'application de l'article 11, sauf si elles comportent de véritables conséquences pénales, c.-à-d. l'emprisonnement ou une amende qui, par son importance, semblerait imposée dans le but de réparer le tort causé à la société en général plutôt que pour maintenir la discipline interne dans le cadre restreint de la GRC. Le processus disciplinaire de la GRC n'est pas intrinsèquement criminel ou quasi-criminel et il n'implique pas, en règle générale, une procédure de nature publique qui entraînerait l'application de l'article 11. La sanction vise simplement à renforcer la discipline au sein de la GRC. La Loi sur la GRC ne prévoit pas l'emprisonnement comme sanction possible si le comité conclut qu'il a été démontré qu'il y a eu contravention au code de déontologie. La sanction du congédiement dans une affaire disciplinaire policière n'est pas une "conséquence pénale" qui oblige le tribunal à être "indépendant et impartial" au sens de l'alinéa 11d ). Le comité n'était pas soumis à des critères d'indépendance et d'impartialité judiciaires comparables à ceux auxquels est soumis un tribunal judiciaire aux termes de l'alinéa 11d) de la Charte. Le comité devait faire preuve dans son travail d'une impartialité qui s'accordait avec les principes d'équité, mais le fait qu'il était composé d'officiers de la GRC en activité de service ne portait pas atteinte à l'alinéa 11d).
lois et règlements
Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44], art. 7, 11d),h), 24.
Code criminel, S.R.C. 1970, ch. C-34.
Consignes du commissaire (procédure et pratique devant les commissions), DORS/88-367 (mod. par DORS/90-790, art. 1), art. 4 (mod., idem, art. 4), 6.
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18 (mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 4), 18.1 (édicté, idem, art. 5), 57 (mod., idem, art. 19).
Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. (1985), ch. R-10, art. 43 (mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 8, art. 16), 45.1(8) (édicté, idem), 45.14 (édicté, idem), 45.16 (édicté, idem).
Loi sur la police, S.R.O. 1980, ch. 381.
Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. (1985), ch. P-21, art. 8 (mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 20, art. 13; (3e suppl.), ch. 1, art. 12; L.C. 1994, ch. 35, art. 39).
Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, ch. P-32.
Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13.
Règles de la Cour fédérale, C.R.C., ch. 663, Règle 1618 (édictée par DORS/92-43, art. 19).
jurisprudence
décisions appliquées:
Szczecka c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 116 D.L.R. (4th) 333; 25 Imm. L.R. (2d) 70; 170 N.R. 58 (C.A.F.); Groupe G. Tremblay Syndics Inc. c. Canada (Surintendant des faillites), [1997] 2 C.F. 719; (1997), 147 D.L.R. (4th) 739; 128 F.T.R. 81 (1re inst.); Mohawk Council of Kahnawake c. Jacobs, [1996] A.C.F. no 757 (1re inst.); Novopharm Ltd. c. Aktiebolaget Astra, [1996] 2 C.F. 839; (1996), 68 C.P.R. (3d) 117; 110 F.T.R. 307 (1re inst.) (QL); Weyer c. Canada (1988), 83 N.R. 272 (C.A.F.); R. c. Wigglesworth, [1987] 2 R.C.S. 541; (1987), 45 D.L.R. (4th) 235; [1988] 1 W.W.R. 193; 61 Sask. R. 105; 28 Admin. L.R. 294; 37 C.C.C. (3d) 385; 60 C.R. (3d) 193; 81 N.R. 161; Trimm c. Police régionale de Durham, [1987] 2 R.C.S. 582; (1987), 45 D.L.R. (4th) 276; 29 Admin. L.R. 106; 37 C.C.C. (3d) 120; 32 C.R.R. 244; 81 N.R. 297; 24 O.A.C. 357; Burnham c. Police de la communauté urbaine de Toronto, [1987] 2 R.C.S. 572; (1987), 45 D.L.R. (4th) 309; 29 Admin. L.R. 94; 37 C.C.C. (3d) 115; 32 C.R.R. 250; 81 N.R. 207; 24 O.A.C. 367; Trumbley et Pugh c. Police de la communauté urbaine de Toronto, [1987] 2 R.C.S. 577; (1987), 45 D.L.R. (4th) 318; 29 Admin. L.R. 100; 37 C.C.C. (3d) 118; 32 C.R.R. 254; 81 N.R. 212; 24 O.A.C. 372.
distinction faite avec:
R. c. Généreux, [1992] 1 R.C.S. 259; (1992), 88 D.L.R. (4th) 110; 70 C.C.C. (3d) 1; 8 C.R.R. (2d) 89; 133 N.R. 241.
décisions examinées:
Pfeiffer c. Canada (Surintendant des faillites), [1996] 3 C.F. 584; 116 F.T.R. 173 (1re inst.); Landry c. Gaudet (1992), 95 D.L.R. (4th) 289; 54 F.T.R. 307 (C.F. 1re inst.); Laquerre c. Canada (Gendarmerie royale du Canada) (1995), 33 Admin. L.R. (2d) 268; 100 F.T.R. 241 (C.F. 1re inst.).
décisions citées:
Singh c. Canada (Secrétaire d'État) (1994), 82 F.T.R. 68; 27 Imm. L.R. (2d) 176 (C.F. 1re inst.); Cedarvale Tree Services Ltd. v. L.I.U.N.A., Local 183, [1971] 3 O.R. 832; (1971), 22 D.L.R. (3d) 40; 71 CLLC 14,087 (C.A.); Bell Canada c. Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, [1997] A.C.F. no 207 (1re inst.); Knight c. Indian Head School Division No. 19, [1990] 1 R.C.S. 653; (1990), 69 D.L.R. (4th) 489; [1990] 3 W.W.R. 289; 83 Sask. R. 81; 43 Admin. L.R. 157; 30 C.C.E.L. 237; 90 CLLC 14,010; 106 N.R. 17; Japan Electrical Manufacturers Assn. c. Canada (Tribunal antidumping) (1986), 32 D.L.R. (4th) 222; 12 C.E.R. 260; 72 N.R. 300 (C.A.F.); Sutton c. Canada (Commission de l'emploi et de l'immigration) (1994), 74 F.T.R. 284 (C.F. 1re inst.); Bernier c. Établissenent Kent (1986), 7 F.T.R. 229 (C.F. 1re inst.); R. v. Sungalia, [1992] O.J. no 3718 (Div. gén.) (QL); R. v. Cocelli (1996), 15 O.T.C. 85 (Div. gén. de l'Ont.) (QL); R. v. Kyling, [1996] Q.J. no 1566 (C.S.) (QL); Andrews c. Law Society of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 143; (1989), 56 D.L.R. (4th) 1; [1989] 2 W.W.R. 289; 34 B.C.L.R. (2d) 273; 25 C.C.E.L. 255; 10 C.H.R.R. D/5719; 36 C.R.R. 193; 91 N.R. 255.
DEMANDE de contrôle judiciaire de la décision par laquelle un comité d'arbitrage de la GRC a annulé l'assignation ordonnant à un officier poursuivant de comparaître comme témoin, au motif qu'elle portait atteinte aux principes de l'équité procédurale, constituait une erreur de compétence et portait atteinte aux droits du requérants garantis aux articles 7 et 11d) de la Charte. Demande rejetée.
avocats:
George P. L. Filliter, pour le requérant.
Michael F. Donovan, pour l'intimé.
procureurs:
Wood Melanson Filliter, Fredericton, pour le requérant.
Le sous-procureur général du Canada, pour l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
Le juge MacKay: La Cour est saisie d'une demande de contrôle judiciaire tendant à obtenir diverses réparations, notamment un bref de prohibition, un bref de certiorari et un jugement déclaratoire en vertu des articles 18 [mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 4] et 18.1 [édicté, idem, art. 5] de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, modifiée, ainsi qu'une ordonnance et un jugement déclaratoire fondés sur les articles 7 et 24 et sur l'alinéa 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés [qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44]] (la Charte). La décision contestée en l'espèce est une décision interlocutoire prononcée par un comité d'arbitrage constitué en vertu de l'article 43 [mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 8, art. 16] de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. (1985), ch. R-10, modifiée (la Loi sur la GRC) en vue de mener une enquête formelle sur les présumées contraventions du requérant au code de déontologie de la GRC.
La décision que le requérant conteste par l'avis de requête introductif d'instance modifié qu'il a déposé le 6 novembre 1996 conformément à l'ordonnance prononcée par le juge Lutfy le 18 octobre 1996, est à l'origine de toutes les réparations sollicitées en l'espèce et a fait l'objet des observations formulées par les parties à Fredericton le 16 octobre 1997. Les présents motifs concernent l'ordonnance que je prononce maintenant et par laquelle je rejette la demande de contrôle judiciaire.
Genèse de l'instance
Le requérant a accumulé près de 25 années de service au sein de la Gendarmerie royale du Canada. Il a été promu au rang de caporal en 1987, et à celui de sergent en 1993. Son affectation la plus récente a été celle de sous-officier aux douanes et à l'accise à Fredericton, au Nouveau-Brunswick. En 1995, le requérant a, dans le cadre d'un cours d'administration supérieure de la police, été évalué comme étant un [traduction] "atout pour la Gendarmerie royale du Canada".
En avril 1995, une commis occasionnelle temporaire de la division J de la GRC à Fredericton s'est plainte d'avoir été victime de harcèlement sexuel de la part du requérant. La plainte a fait l'objet d'une enquête visant à déterminer s'il y avait matière à poursuites criminelles. Après avoir consulté le directeur des poursuites criminelles, il a été déterminé qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments de preuve pour justifier des poursuites criminelles. Il a toutefois été décidé que la plainte portée contre le requérant devait faire l'objet d'une enquête sous le régime du code de déontologie de la GRC pour déterminer si les présumées contraventions à ce code pouvaient être démontrées.
Le 5 avril 1995, le requérant a été suspendu avec solde et a été informé qu'une enquête interne avait été ouverte au sujet des accusations portées par la première plaignante au sujet de sa conduite. Le requérant a par la suite appris que d'autres personnes avaient également porté plainte au sujet de sa conduite.
Une recommandation a été faite au commandant de la division, l'intimé à l'instance, qui a décidé de prendre des mesures disciplinaires graves en vertu de l'article 43 de la Loi sur la GRC. Un comité d'arbitrage a été constitué conformément au paragraphe 43(2) pour faire enquête sur les présumées contraventions du requérant au code de déontologie de la GRC. L'avis d'audience disciplinaire daté du 4 décembre 1995 renferme huit allégations de harcèlement sexuel dont le requérant se serait rendu coupable à l'égard de cinq employées civiles de la GRC. Le requérant a été informé dans cet avis que la sanction qui serait réclamée, s'il était démontré qu'il avait contrevenu au code de déontologie, serait son congédiement de la GRC.
L'audience du comité s'est ouverte le 3 juin 1996. Il semble que certaines accusations aient par la suite été retirées. À l'audience, la première plaignante a donné un témoignage qui, selon le requérant, était fort différent des éléments de preuve documentaire qui lui avaient été communiqué avant l'ouverture de l'audience. Pour cette raison, le représentant du requérant a, au cours de l'audience, présenté plusieurs requêtes pour faire écarter des éléments de preuve au motif qu'ils ne lui avaient pas été divulgués. Ces requêtes ont toutes été rejetées.
Le 6 juin 1996, le représentant du requérant a révélé, lors de son contre-interrogatoire, que la première plaignante avait porté plainte contre deux autres officiers à peu près à la même époque que celle où elle avait porté plainte contre le requérant. L'existence de ces autres plaintes n'avait pas été révélée au requérant, malgré le fait que, dans l'une d'entre elles, qui portait sur un harcèlement de nature non sexuelle, le nom du requérant était mentionné et que le dossier de cette plainte aurait, selon lui, dû être communiqué aux poursuivants.
Le requérant a présenté une requête en vue d'obtenir le rejet des plaintes de la première plaignante en raison de cette non-communication d'éléments de preuve essentiels. Le 6 juin 1996, le comité a conclu qu'au moins un des officiers poursuivants, sinon les deux, étaient au courant de l'existence du dossier relatif à la plainte de harcèlement non sexuel, mais que ces officiers n'avaient pas l'intention d'induire le comité en erreur ou de faire preuve de malice envers le requérant ou de lui causer un préjudice.
Le requérant a commencé à s'inquiéter du rôle joué par un des officiers poursuivants, le sergent Keating, relativement à l'enquête et à la présentation des plaintes. En outre, il a semblé au requérant que les honoraires de l'avocat qui avait conseillé la première plaignante avait peut-être été payés par la GRC et que le sergent Keating avait joué un rôle dans les dispositions qui avaient été prises à cet égard. Le requérant en est venu à soupçonner l'existence d'un possible complot contre lui et à croire qu'on ne lui avait pas divulgué des éléments de preuve concernant d'autres questions, comme l'état mental apparent de la première plaignante. Le 10 juin 1996, le requérant a chargé son avocat d'assigner le sergent Keating à comparaître et une assignation ordonnant à ce dernier de comparaître comme témoin a été délivrée par le greffier du comité et a été signifiée le jour même.
Les 10 et 11 juin 1996, le requérant a présenté une requête en vue d'obtenir que le sergent Keating, en tant que témoin assigné à comparaître, ne puisse plus agir comme avocat poursuivant et qu'il cesse d'occuper jusqu'à ce qu'il soit convoqué pour témoigner comme un témoin ordinaire. L'avocat a fait valoir que le sergent Keating avait trempé dans un complot visant à induire le comité en erreur et à cacher certains renseignements au comité et au requérant. Le 11 juin 1996, une demande a été présentée au comité par un officier supérieur de la GRC en vue de faire annuler l'assignation signifiée au sergent Keating. Après avoir entendu les arguments des deux parties, le comité a annulé l'assignation délivrée par le greffier et a statué qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments de preuve pour démontrer l'existence du prétendu complot et que le motif invoqué pour justifier l'assignation n'avait pas été établi. En conséquence, le comité a annulé l'assignation délivrée au sergent Keating et a rejeté la requête présentée par le requérant pour obtenir que le sergent Keating cesse d'occuper jusqu'à ce qu'il soit convoqué pour témoigner.
C'est la décision annulant l'assignation que le requérant conteste maintenant au motif qu'elle va à l'encontre du principe de l'équité procédurale, qu'elle constitue un excès de compétence et qu'elle porte atteinte aux droits qui lui sont garantis par l'article 7 et l'alinéa 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés. Plus précisément, le requérant soutient que la Loi sur la GRC n'habilite pas expressément le comité à annuler une assignation qui a été régulièrement délivrée et que, par conséquent, le comité a outrepassé sa compétence. Le requérant affirme que la décision d'annuler l'assignation est incorrecte ou manifestement déraisonnable et que, de toute façon, elle a pour effet de violer les principes d'équité procédurale et de justice fondamentale qui sont reconnus en common law et qui sont garantis par l'article 7 de la Charte, parce que cette décision empêche le requérant de présenter sa cause. Qui plus est, le requérant soutient que, tel qu'il est constitué, le comité ne respecte pas les exigences d'indépendance judiciaire contenues à l'alinéa 11d) de la Charte.
Analyse
Après avoir entendu les avocats des parties et après avoir examiné les prétentions et les moyens des parties, je conclus que la présente demande devrait être rejetée. À mon avis, la demande est prématurée, sauf pour ce qui est des moyens invoqués en vertu de l'alinéa 11d) de la Charte pour contester la constitution du comité d'arbitrage et la constitutionnalité des dispositions de la Loi sur la GRC en vertu desquelles le comité a été constitué.
Il est de jurisprudence constante que, pour être susceptible d'un contrôle judiciaire, une "décision" doit être une décision définitive, et non une décision interlocutoire ou procédurale. Ainsi, dans l'arrêt Szczecka c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration)1 , la Cour d'appel fédérale déclare, sous la plume du juge Létourneau:
. . . il ne doit pas, sauf circonstances spéciales, y avoir d'appel ou de révision judiciaire immédiate d'un jugement interlocutoire. De même, il ne peut pas y avoir ouverture au contrôle judiciaire, particulièrement au contrôle immédiat, lorsqu'il existe, au terme des procédures, un autre recours approprié. Plusieurs décisions de justice sanctionnent ces deux principes, précisément pour éviter une fragmentation des procédures ainsi que les retards et les frais inutiles qui en résultent, qui portent atteinte à une administration efficace de la justice et qui finissent par la discréditer. En matière de contrôle judiciaire sous l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, ce dont nous sommes saisis dans la présente cause, l'interprétation jurisprudentielle qui est faite de cet article est encore plus stricte.
Dans le jugement Groupe G. Tremblay Syndics Inc. c. Canada (Surintendant des faillites)2, Mme le juge Tremblay-Lamer a, dans une instance introduite en vertu de l'article 18.1, invoqué l'arrêt Szczecka au soutien de la proposition que "sauf circonstances spéciales, il ne doit pas y avoir de révision judiciaire immédiate d'un jugement interlocutoire. Les décisions à l'égard desquelles il y a ouverture à contrôle judiciaire sont celles qui adjugent sur le mérite d'une cause de façon définitive". Dans le même ordre d'idées, dans le jugement Mohawk Council of Kahnawake c. Jacobs3 , elle a jugé qu'à moins que le requérant soit en mesure de démontrer l'existence de circonstances spéciales, la Cour ne soumet pas une décision interlocutoire à un contrôle judiciaire.
Dans le jugement Novopharm Ltd. c. Aktiebolaget Astra4, citant le jugement Szczecka, le juge Gibson écrit:
. . . en premier lieu . . . la Cour a le pouvoir d'exercer le contrôle judiciaire visé à l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale à l'égard d'un jugement ou d'une décision interlocutoire, et en second lieu, . . . dans des circonstances spéciales, il convient d'exercer ce pouvoir. En toute autre circonstance, l'exercice de ce pouvoir risque d'entraîner "une fragmentation des procédures ainsi que les retards et les frais inutiles qui en résultent, qui portent atteinte à une administration efficace de la justice et qui finissent par la discréditer".
Le principe applicable est que, saisie d'une demande de contrôle judiciaire, la Cour n'intervient pour annuler une décision interlocutoire que s'il existe des circonstances exceptionnelles. Les tribunaux ont analysé la nature des circonstances spéciales qui justifient une intervention dans le cas d'une décision interlocutoire. Ainsi, dans le jugement Pfeiffer c. Canada (Surintendant des faillites)5, dans lequel le requérant contestait la constitutionnalité d'un tribunal administratif auquel le surintendant des faillites avait délégué ses pouvoirs, le juge Tremblay-Lamer a déclaré:
À mon avis, puisqu'il s'agit d'une question qui est dirigée à l'encontre de l'existence même du tribunal, il existe une raison spéciale qui permet la révision judiciaire à cette étape des procédures. Tel que déclaré dans Mahabir c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), ([1992] 1 C.F. 133 (C.A.), à la p. 140) "il s'agit d'une décision définitive qui tranche une question fondamentale soumise au tribunal".
Dans le jugement Novopharm6, le juge Gibson a statué qu'il n'existait aucune circonstance spéciale dans cette affaire, qui portait sur le contrôle judiciaire d'une décision interlocutoire prononcée dans le cadre d'une procédure d'opposition régie par la Loi sur les marques de commerce [L.R.C. (1985), ch. T-13]. Après avoir discuté de la nature discrétionnaire des réparations sollicitées, le juge a conclu:
. . . je conclus qu'il existe un autre recours approprié ouvert à la requérante, savoir un appel à l'issue des procédures d'opposition, dans l'hypothèse où la requérante n'aurait pas gain de cause, appel au cours duquel la décision du registraire qui nous occupe pourrait être contestée. La nature de l'erreur qu'aurait commise le registraire selon la requérante résulte en effet de l'interprétation, correcte ou erronée, de la Loi sur les marques de commerce et de son Règlement d'application [Règlement sur les marques de commerce, C.R.C., ch. 1559]. Comme la Loi sur les marques de commerce prévoit un appel à la Cour, c'est-à-dire la juridiction saisie de la demande de contrôle judiciaire, l'on ne saurait prétendre que le droit d'appel pourrait être quelque peu affaibli sur le plan qualitatif. Donc, je conclus que l'ensemble des facteurs devant être pris en considération pour déterminer s'il y a lieu de procéder au contrôle judiciaire en l'espèce incitent à ne pas l'exercer.
En l'espèce, le requérant soutient que la décision par laquelle l'assignation délivrée au sergent Keating a été annulée est une décision définitive. Je ne suis toutefois pas persuadé qu'elle tombe dans la catégorie des décisions qui sont ordinairement susceptibles d'un contrôle judiciaire. Elle ne tranche pas une question fondamentale soumise au tribunal. La décision du comité est de toute évidence de nature interlocutoire: elle porte en effet sur une question préliminaire de preuve, en l'occurrence la question de savoir si l'assignation délivrée à un témoin éventuel devrait être annulée. L'article 45.14 [édicté par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 8, art. 16] de la Loi sur la GRC permet d'interjeter appel de la décision du comité devant le commissaire "quel [que] soit le motif [de l'appel]", que celui-ci concerne la conclusion du comité selon laquelle une contravention alléguée au code de déontologie a été établie, ou qu'il concerne toute peine imposée. Ces dispositions sont suffisamment larges pour englober les plaintes concernant de présumées erreurs procédurales, et le commissaire peut, en vertu de l'article 45.16 [édicté, idem ], ordonner la tenue d'une nouvelle audience ou rendre la décision que, selon lui, le comité d'arbitrage aurait dû rendre. En conséquence, sauf s'il existe des circonstances spéciales justifiant l'intervention de la Cour à cette étape-ci, il ne devrait pas être sursis plus longtemps à l'instance se déroulant devant le comité d'arbitrage. Toute erreur dont est entachée une décision procédurale donne ouverture à un appel, voire même à un contrôle judiciaire ultérieur, si l'erreur procédurale est grave et que la décision rendue par le commissaire saisi de l'appel n'a pas pour effet de la corriger.
À mon avis, aucun des autres arguments invoqués par le requérant pour prétendre que le comité a commis une erreur flagrante ou qu'il existe des circonstances spéciales justifiant l'intervention de la Cour à cette étape-ci n'est convaincant. J'estime tout d'abord que le comité n'a pas outrepassé sa compétence en annulant l'assignation. Il est de jurisprudence constante que les organismes administratifs comme le comité d'examen en cause en l'espèce sont "maître de leur propre procédure", sous réserve uniquement des limites explicites imposées par leur loi habilitante et des exigences de l'équité procédurale7 . Malgré la thèse du requérant, il m'est impossible de conclure que, pour pouvoir fixer ses propres exigences procédurales, le comité doit être expressément autorisé par la loi pour pouvoir annuler l'assignation qui a été signifiée en l'espèce au poursuivant. Ni la Loi sur la GRC ni son règlement d'application ne limitent les pouvoirs du comité en ce qui concerne ses décisions procédurales. Les seules restrictions qui existent découlent des exigences de l'équité procédurale. Qui plus est, l'article 4 des Consignes du commissaire (procédure et pratique devant les commissions), DORS/88-367, modifiées [par DORS/90-790, art. 1, 4] (les Consignes), prévoit: "Si l'étude d'une question dont une commission est saisie soulève des points qui ne sont pas visés par les présentes consignes, la commission peut prendre les mesures qu'elle juge nécessaires pour régler ces points".
Deuxièmement, j'estime qu'il n'y a pas de manquement à l'équité procédurale en l'espèce, du moins d'après la façon dont la décision contestée a été rendue. Il ressort du dossier que la décision elle-même a été rendue après que les deux parties eurent eu l'occasion de faire valoir leur point de vue respectif, et que le comité a ensuite rendu une décision raisonnée. La question des incidences de cette décision procédurale sur l'issue finale de l'instance ne se pose pas à cette étape-ci du contrôle judiciaire, alors qu'il s'agit de déterminer si l'équité procédurale a été respectée.
Ceci étant dit, si la décision d'annuler l'assignation avait pour effet d'empêcher le requérant d'avoir "toute latitude de présenter des éléments de preuve à l'audience, d'y contre-interroger les témoins et d'y faire des observations", comme l'exige le paragraphe 45.1(8) [édicté, idem ] de la Loi sur la GRC, la décision serait alors entachée d'une erreur de droit parce qu'elle ne respecterait pas les exigences de la Loi. À cette étape-ci, je ne suis pas persuadé qu'une telle erreur a été commise. À mon avis, la Loi sur la GRC ne peut être interprétée comme donnant au requérant un droit illimité de faire entendre des témoins, compte tenu particulièrement de l'article 6 des Consignes, qui permet au comité de congédier un témoin. L'avocat du requérant soutient qu'un témoin ne peut être congédié tant qu'il n'a pas été convoqué au cours de l'instance, mais je ne suis pas persuadé que c'est le cas.
Le comité a décidé d'annuler une assignation qui avait été délivrée en son nom par le greffier et il a effectivement congédié un témoin qui avait été assigné à comparaître pour des motifs et d'une manière qui, comme l'intimé le souligne, sont conformes à la jurisprudence portant sur des circonstances analogues, c'est-à-dire lorsqu'un avocat engagé dans un procès est appelé à témoigner par l'avocat de la partie adverse. Il existe plusieurs décisions suivant lesquelles, du moins dans les procès criminels, [traduction] "un fardeau de persuasion est imposé à l'avocat qui cherche à forcer l'avocat de la partie adverse à venir à la barre et à lui faire renoncer à son rôle d'avocat. Ce fardeau de persuasion consiste à faire la preuve de la pertinence et de la nécessité8". Je ne vois pas pourquoi cette norme ne devrait pas s'appliquer en matière disciplinaire. Or, j'estime que le comité a effectivement appliqué cette norme dans le cas qui nous occupe. Il a estimé que rien ne permettait de conclure à l'existence du prétendu complot dont le requérant se disait victime. Ainsi, le témoignage que pourrait donner le témoin assigné à comparaître, le sergent Keating, au sujet du prétendu complot ne serait pas, du moins à cette étape-ci de l'instance, pertinent aux questions soumises au comité dans le cadre de son enquête. Ce faisant, le comité a agi en rendant une décision interlocutoire qui n'est entachée d'aucune erreur donnant ouverture à un contrôle judiciaire à cette étape-ci.
Troisièmement, je ne suis pas convaincu que le comité a violé la Constitution. Il convient de signaler que, même si les documents initialement déposés par le requérant contenaient un avis de question constitutionnelle, cet avis n'a, si j'ai bien compris, pas été signifié à tous les procureurs généraux conformément à l'article 57 [mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 19] de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, modifiée. Néanmoins, après avoir examiné les moyens tirés de la Charte qui ont été invoqués au nom du requérant, je me prononce sur ces moyens après avoir conclu que la décision du comité et les dispositions de la Loi sur la GRC en question en l'espèce ne sont ni inconstitutionnelles ni inopérantes pour des raisons d'ordre constitutionnel.
L'avocat du requérant soutient que le comité a contrevenu à l'article 7 de la Charte en ne s'assurant pas que l'instance se déroulait conformément à l'équité procédurale ou aux principes de justice fondamentale qui sont garantis par cette disposition. À cet égard, l'avocat du requérant cite les propos tenus par le juge La Forest, de la Cour suprême, dans l'arrêt Andrews c. Law Society of British Columbia9, suivant lesquels la question de savoir si le droit de gagner sa vie est une valeur qui est constitutionnellement protégée par la Charte n'est pas encore résolue. Il semble que notre Cour ait répondu par la négative à cette question.
Dans l'arrêt Weyer c. Canada10, la Cour d'appel fédérale a examiné l'applicabilité de l'article 7 à une instance introduite en vertu de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, ch. P-32, qui portait sur le congédiement d'un employé accusé d'incompétence. Dans cette affaire, le requérant faisait valoir que le fait qu'il n'existait pas de dispositions l'autorisant à assigner des personnes à témoigner devant la commission en question portait atteinte aux droits que l'article 7 lui garantissait. Pour rejeter ce moyen, le juge Mahoney a déclaré:
Le recours devant le comité d'appel établi en vertu du paragraphe 31(3) de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique du Canada portait sur le statut d'employé du requérant. Il semble que certains tribunaux, à tout le moins en première instance, aient interprété le droit à la liberté comme englobant un droit au travail. On trouvera une revue à jour utile de la jurisprudence dans Wilson et al. v. Medical Services Commission of B.C., [1987] 3 W.W.R. 48, aux pages 69 et suivantes.
Quant à ce tribunal, la question a fait l'objet d'une décision qui fait autorité. Dans Smith, Kline & French c. Le Procureur général du Canada, [1986] 1 C.F. 274, à la page 313, le juge Strayer affirmait:
À mon avis, le fait d'associer les concepts de "vie [. . .] liberté et [. . .] sécurité de sa personne" en colore le sens et ils se rapportent au bien-être physique d'une personne physique. Comme tels ils ne permettent pas de décrire les droits d'une société ni de décrire les intérêts purement économiques d'une personne physique.
Cette cause a été portée en appel devant cette cour, [1987] 2 C.F. 359. À la page 364, le juge Hugessen dit:
En ce qui concerne les arguments fondés sur [. . .] l'allégation d'atteinte au droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne que garantit l'article 7 de la Charte, je suis entièrement d'accord avec les conclusions du juge de première instance et avec ses motifs. Si l'on peut ajouter quelque chose, on doit dire qu'il a donné à ces arguments un traitement plus complet qu'ils ne le méritaient; toute autre observation de ma part serait superflue.
Puisque les garanties juridiques enchâssées dans l'article 7 de la Charte n'étaient pas menacées par les procédures intentées devant le comité d'appel, la prétention du requérant n'a aucun fondement.
À mon avis, la présente instance disciplinaire régie par la Loi sur la GRC ne donne pas lieu à l'application de l'article 7 de la Charte, même si la sanction à laquelle s'expose le requérant est la perte de son emploi. Même si je n'étais pas lié par la décision rendue par la Cour d'appel dans l'affaire Weyer, je ne conclurais pas qu'on a contrevenu à l'article 7 en l'espèce. Nul n'a soutenu, avec raison selon moi, que la justice fondamentale serait plus exigeante que l'équité procédurale dans le cas qui nous occupe. Ainsi, pour les motifs déjà exposés dans l'analyse relative à l'équité procédurale, j'estime, à cette étape-ci, que le comité n'a pas contrevenu aux principes de justice fondamentale protégés par l'article 7"si tant est que ceux-ci s'appliquent en l'espèce"en rendant sa décision interlocutoire, laquelle est une décision préliminaire portant sur la preuve.
Finalement, le requérant affirme, en invoquant l'arrêt R. c. Généreux11, que l'instance qui s'est déroulée en l'espèce devant un organisme interne de la GRC et qui était susceptible de se solder par l'imposition d'une sanction le privant de la liberté de poursuivre une longue carrière, est une instance de nature pénale et, partant, de caractère public, et que, par conséquent, l'alinéa 11d) de la Charte s'applique. Cet alinéa dispose:
11. Tout inculpé a le droit:
. . .
d) d'être présumé innocent tant qu'il n'est pas déclaré coupable, conformément à la loi, par un tribunal indépendant et impartial à l'issue d'un procès public et équitable;
L'avocat du requérant soutient qu'en l'espèce, le comité ne remplit pas les conditions requises pour pouvoir être considéré comme un "tribunal indépendant et impartial", comme l'exige l'alinéa 11d ). Les trois membres du comité sont nommés individuellement, ne reçoivent aucune rémunération, hormis le traitement ordinaire qui leur est versé en tant que membres permanents au service de la GRC, et sous réserve des dispositions de la Loi sur la GRC et, dans l'exercice des fonctions générales habituelles qu'ils continuent d'accomplir au sein de la GRC, ils continuent à relever du bureau du commissaire de la GRC, à qui ils doivent finalement rendre des comptes et qui, en dernière analyse, est investi du pouvoir discrétionnaire de trancher tout appel interjeté par le requérant d'une conclusion tirée par le comité.
Je tiens à faire remarquer que la contestation formulée en vertu de l'alinéa 11d) de la Charte en ce qui concerne la constitution du comité et son fondement législatif est une contestation légitime à cette étape-ci de l'instance se déroulant devant le comité. Si la thèse du requérant était convaincante, il s'agirait là d'une circonstance spéciale justifiant l'intervention de la Cour dans le cadre d'un contrôle judiciaire, même si la décision contestée est de toute évidence de nature interlocutoire. Si l'on concluait que la constitution du comité porte atteinte aux droits garantis à l'appelant par l'alinéa 11d), l'instance et toutes les décisions du comité, y compris celle qui est contestée en l'espèce, seraient invalidées par suite de l'intervention nécessaire de la Cour. Je m'empresse d'ajouter que je ne suis pas persuadé que, vu les faits de la présente affaire, l'alinéa 11d) de la Charte s'applique. Ainsi, l'alinéa 11d) n'a pas été violé et les conditions qu'il renferme ne constituent pas des circonstances spéciales qui justifieraient l'intervention de la Cour.
Je fais par ailleurs remarquer qu'à l'audience, l'intimé a insisté pour dire que la Cour n'était pas régulièrement saisie de la présente contestation, compte tenu de l'ordonnance du 18 octobre 1996 par laquelle le juge Lutfy a ordonné qu'un avis de requête introductif d'instance modifié soit déposé relativement à l'unique décision par laquelle le comité avait annulé l'assignation. On peut soutenir que cette décision est contestée si l'autorité légitime de l'organisme qui l'a rendue est remise en question au motif que cet organisme n'a pas été constitué en conformité avec la Charte. Je me propose de statuer au fond sur ce moyen.
Dans l'arrêt R. c. Wigglesworth12, la Cour suprême du Canada a jugé que l'alinéa 11h) ne s'applique que lorsque l'affaire est de nature criminelle ou quasi-criminelle et qu'elle est publique, en ce sens qu'elle vise à promouvoir l'ordre et le bien-être publics dans une sphère d'activité publique, ou si l'affaire comporte des conséquences pénales. Cette affaire ne portait pas sur l'alinéa 11d), mais elle visait une situation dans laquelle l'appelant, un officier de la GRC, avait été condamné à une amende imposée par un tribunal disciplinaire interne et avait également été accusé en vertu du Code criminel [S.R.C. 1970, ch. C-34] relativement aux mêmes actes pour lesquels il avait été condamné par l'organisme interne. Dans son analyse des liens qui existent entre l'article 11 en général et les procédures disciplinaires, la Cour a précisé qu'en règle générale, les procédures disciplinaires ne donnent pas lieu à l'application de l'article 11, sauf si elles comportent de véritables conséquences pénales, c'est-à-dire l'emprisonnement ou une amende qui, par son importance, semblerait imposée dans le but de réparer le tort causé à la société en général plutôt que pour maintenir la discipline interne dans le cadre restreint de la GRC. Le code de déontologie qui était en cause dans l'affaire Wigglesworth ne portait pas, de façon générale, sur des procédures criminelles ou quasi-criminelles, mais sur le maintien de la discipline et de l'intégrité au sein de la GRC. La Cour a toutefois conclu que la possibilité d'emprisonnement pour les manquements graves au devoir prévus par la Loi sur la GRC, dans sa rédaction alors en vigueur, équivalait à une véritable conséquence pénale qui entraînait l'application de l'article 11.
Dans l'arrêt Généreux, c'était le caractère public des infractions jugées par la cour martiale, en l'occurrence des infractions portant sur des stupéfiants et sur une désertion, et la nature des peines potentielles, notamment l'emprisonnement, qui avaient amené la Cour suprême à conclure que le tribunal administratif devait faire preuve d'indépendance et d'impartialité au même titre qu'un tribunal judiciaire au sens traditionnel. À mon avis, il y a lieu d'établir une distinction entre l'arrêt Généreux et la présente affaire en raison de la nature des actes qui y étaient reprochés et des sanctions auxquelles s'exposait l'accusé.
Qui plus est, conformément à l'arrêt Wigglesworth, notre Cour a jugé que le processus disciplinaire de la GRC n'est pas intrinsèquement criminel ou quasi-criminel et qu'il n'implique pas, en règle générale, une procédure de nature publique qui entraînerait l'application de l'article 11 de la Charte. Il se peut que, si une peine sévère pouvait être appliquée dans un cas donné, le critère des conséquences pénales qui a été dégagé dans l'arrêt Wigglesworth entraînerait l'application de l'alinéa 11d) de la Charte. Cela serait toutefois moins probable lorsque des peines moins sévères permettent de conclure que la sanction vise simplement à renforcer la discipline au sein de la GRC.
Dans le jugement Landry c. Gaudet13, le juge Joyal a statué qu'une instance introduite en vertu de la Loi sur la GRC et qui portait sur une présumée infraction disciplinaire pour laquelle les sanctions proposées étaient une amende de 500 $, une réprimande et une suspension, était une procédure interne qui n'était aucunement publique et qui ne comportait pas de sanctions comportant des conséquences pénales. Cette instance n'était pas assujettie à l'article 11 de la Charte. Elle n'était plus particulièrement pas assujettie à l'alinéa 11d), qui, selon ce qu'affirmait le requérant dans cette affaire, s'appliquait, ainsi que le requérant l'affirme en l'espèce.
De même, dans le jugement Laquerre c. Canada (Gendarmerie royale du Canada)14, le juge Teitelbaum s'est dit d'avis que l'alinéa 11d) ne s'appliquait pas au requérant qui, accusé dans cette affaire en vertu de la Loi sur la GRC de conduite disgracieuse, avait été condamné à une amende équivalant à deux semaines de salaire. Sa Seigneurie a déclaré:
Bien qu'il s'agisse peut-être là d'une grosse somme pour le requérant, je ne dirais pas qu'elle est destinée à réparer le tort causé à la société. Il s'agit plutôt d'une somme qui est imposée pour maintenir la discipline à l'intérieur de la sphère d'activité limitée de la G.R.C.
Dans le cas qui nous occupe, la Loi sur la GRC ne prévoit pas l'emprisonnement comme sanction possible si le comité conclut qu'il a été démontré qu'il y a eu contravention au code de déontologie. Pourtant, le requérant insiste pour dire que la possibilité de congédiement de la GRC constitue en l'espèce une sanction qui comporte de véritables conséquences pénales au sens du critère posé dans l'arrêt Wigglesworth. Plus récemment, la Cour suprême a examiné les principes dégagés dans l'arrêt Wigglesworth dans le contexte de procédures disciplinaires policières. Ainsi, dans l'arrêt Trimm c. Police régionale de Durham15, la Cour suprême a suivi l'arrêt Wigglesworth et a jugé qu'une procédure disciplinaire policière introduite en vertu de la Loi sur la police de l'Ontario, R.S.O. 1980, ch. 381, n'était pas assujettie à l'article 11, même si le règlement d'application de cette loi prévoyait une peine de congédiement dans le cas des "infractions majeures". Dans les arrêts Burnham c. Police de la communauté urbaine de Toronto16 et Trumbley et Pugh c. Police de la communauté urbaine de Toronto17, les appelants étaient accusés d'"infractions majeures" au règlement et s'exposaient par conséquent à un congédiement. La Cour suprême a statué que l'alinéa 11d ) ne s'appliquait pas.
Je conclus, à la lecture de ces décisions, que la sanction du congédiement dans une affaire disciplinaire policière n'est pas une "conséquence pénale" qui oblige le tribunal à être "indépendant et impartial" au sens de l'alinéa 11d ). La sanction éventuelle n'est pas une sanction pénale qui entraîne nécessairement l'application de cette condition de la Charte; elle vise plutôt à maintenir la discipline dans les rangs de la GRC. Le comité qui a été constitué en l'espèce en vertu de l'article 43 de la Loi sur la GRC pour examiner les allégations de contraventions au code de conduite n'est pas un organisme qui est soumis à des critères d'indépendance et d'impartialité judiciaires comparables à ceux auxquels est soumis un tribunal judiciaire aux termes de l'alinéa 11d) de la Charte. Le comité doit faire preuve dans son travail d'une impartialité qui s'accorde avec les principes d'équité, mais le fait qu'il soit composé d'officiers de la GRC en activité de service ne porte pas atteinte à l'alinéa 11d).
Dispositif
Une ordonnance rejetant la présente demande de contrôle judiciaire sera prononcée. Je conclus qu'il n'existe pas de circonstances spéciales qui justifieraient l'intervention de la Cour dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision qui est interlocutoire et qui ne constitue pas une décision définitive qui tranche les questions de fond soumises au comité. Le comité n'a pas été constitué en violation de l'alinéa 11d) de la Charte et la décision qu'il a rendue et par laquelle il a annulé l'assignation délivrée au poursuivant n'a pas été rendue d'une façon qui va à l'encontre des principes d'équité procédurale et elle ne viole pas l'article 7 de la Charte. La Cour refuse d'intervenir à cette étape-ci de l'instance du comité d'arbitrage.
Je constate que le requérant réclame les frais extrajudiciaires, essentiellement parce que le dépôt de l'affidavit du poursuivant, auquel était jointe une annexe précisant les allégations et le détail des accusations non établies portées contre le requérant, était vexatoire. Suivant le requérant, ces détails ne sont pas pertinents à la demande de l'intimé à l'appui de laquelle l'affidavit a été produit. Il affirme également que le dépôt public de ces renseignements est contraire à la politique de la GRC et aux dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. (1985), ch. P-21, et qu'il visait à embarrasser le requérant. Le requérant ajoute, dans ses observations écrites, que [traduction] "en raison de la divulgation de ces renseignements au public, le requérant a perdu son droit à une audience juste et impartiale".
À mon avis, le dépôt d'un affidavit dans une instance judiciaire ne prive pas la partie adverse de son droit à un procès juste et impartial, même si cet affidavit est par la suite jugé non pertinent. Même s'il n'a pas été débattu, l'argument que l'inclusion des renseignements dans une annexe à l'affidavit qui a été déposé est contraire à la Loi sur la protection des renseignements personnels est, selon moi, mal fondé, compte tenu des exceptions contenues à l'article 8 [mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 20, art. 13; (3e suppl.), ch. 1, art. 12; L.C. 1994, ch. 35, art. 39] de la Loi qui permettent la divulgation de renseignements personnels. La pertinence des renseignements en ce qui concerne la requête interlocutoire que l'intimé a déjà présentée n'est pas une question qu'il faut trancher en l'espèce.
Ainsi, il n'existe aucune raison spéciale, au sens de la Règle 1618 [édictée par DORS/92-43, art. 19] des Règles, qui justifie d'envisager d'adjuger des dépens au requérant, même si sa requête avait été accueillie, et, de toute évidence, aucun motif justifiant l'adjudication de frais extrajudiciaires n'a été établi. Il n'y aura donc pas d'adjudication de dépens, comme c'est habituellement le cas à l'occasion d'une demande de contrôle judiciaire, ainsi que le prévoit la Règle 1618 des Règles de la Cour fédérale, C.R.C., ch. 663, modifiées.
1 (1993), 116 D.L.R. (4th) 333 (C.A.F.), à la p. 335.
2 [1997] 2 C.F. 719 (1re inst.), aux p. 737 et 738.
3 [1996] A.C.F. no 757 (1re inst.) (QL). Voir également le jugement Singh c. Canada (Secrétaire d'État) (1994), 82 F.T.R. 68 (C.F. 1re inst.).
4 [1996] 2 C.F. 839 (1re inst.), à la p. 847.
5 [1996] 3 C.F. 584 (1re inst.), à la p. 596.
6 Supra, note 4, à la p. 851.
7 Cedarvale Tree Services Ltd. v. L.I.U.N.A., Local 183, [1971] 3 O.R. 832 (C.A.), cité et approuvé dans le jugement Bell Canada c. Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, [1997] A.C.F. no 207 (1re inst.); Knight c. Indian Head School Division No. 19, [1990] 1 R.C.S. 653, à la p. 685 ("Il ne faut pas oublier que tout organisme administratif est maître de sa propre procédure et n'a pas à se modeler sur les tribunaux judiciaires"); Japan Electrical Manufacturers Assn. c. Canada (Tribunal antidumping) (1986), 32 D.L.R. (4th) 222 (C.A.F.), à la p. 234 (Le Tribunal de la concurrence est "maître de sa propre procédure et a le droit d'exiger que la pertinence des questions qui lui sont soumises soit établie"); Sutton c. Canada (Commission de l'emploi et de l'immigration) (1994), 74 F.T.R. 284 (C.F. 1re inst.), à la p. 289 "Il est généralement accepté qu'un tribunal administratif est maître de sa propre procédure, sous réserve évidemment des limites imposées par sa loi constitutive"); Bernier c. Établissement de Kent (1986), 7 F.T.R. 229 (C.F. 1re inst.)., à la p. 233 ("Le principe selon lequel un tribunal administratif comme le tribunal disciplinaire est maître de sa propre procédure est bien établi en droit").
8 R. v. Sungalia, [1992] O.J. no 3718 (Div. gén.) (QL), au par. 3. Voir également les jugements R. v. Cocelli (1996), 15 O.T.C. 85 (Div. gén. de l'Ont.); et R. c. Kyling, [1996] Q.J. no 1566 (C.S.) (QL).
9 [1989] 1 R.C.S. 143, à la p. 201.
10 (1988), 83 N.R. 272 (C.A.F.), à la p. 276.
11 [1992] 1 R.C.S. 259.
12 [1987] 2 R.C.S. 541.
13 (1992), 95 D.L.R. (4th) 289 (C.F. 1re inst.).
14 (1995), 33 Admin. L.R. (2d) 268 (C.F. 1re inst.), à la p. 293.
15 [1987] 2 R.C.S. 582.
16 [1987] 2 R.C.S. 572.
17 [1987] 2 R.C.S. 577.