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[1994] 1 C.F. 96

IMM-2574-93

Van Hoa Nguyen (requérant)

c.

Le ministre de l’Emploi et de l’Immigration (intimé)

Répertorié: Nguyen c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1re inst.)

Section de première instance, juge Reed—Vancouver, 10 septembre 1993.

Citoyenneté et Immigration — Pratique en matière d’immigration — Demande de directives — Demande d’autorisation en vue d’intenter une procédure fondée sur l’art. 82.1 visant à contester une décision de la Section du statut de réfugié sur le statut de réfugié du requérant — Les témoignages sont cités en détail dans les motifs bien que des notes sténographiques n’ont pas été préparées par un sténographe judiciaire officiel avant que le requérant ne le demande après le début de la demande — Le dossier de la demande comprenant le mémoire des faits et du droit contient des citations des propres notes de la Commission qui ne réflètent pas ce qui s’est produit à l’audience — En réponse, il est soutenu que les témoignages n’ont pas été cités de façon imprécise — Au mémoire déposé en réplique est joint à titre d’affidavit, une transcription des procédures de la Commission — Bien que les Règles de la Cour fédérale en matière d’immigration ne prévoient pas précisément le dépôt de preuve par affidavit en réponse, le requérant n’est pas empêché de demander l’autorisation de déposer un tel document — Sur le fondement des Règles 5 et 6 des Règles de la Cour fédérale, la Cour est habilitée à accorder l’autorisation de déposer une copie des notes sténographiques officielles dans le cadre d’un affidavit — Compte tenu de la nature des arguments, la Cour peut également ordonner le dépôt des notes sténographiques aux termes de la Règle 14(2) des Règles de la Cour fédérale en matière d’immigration — Le dépôt des notes sténographiques est ordonné.

LOIS ET RÈGLEMENTS

Loi sur l’immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, art. 82.1 (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 73).

Règles de la Cour fédérale, C.R.C., ch. 663, Règles 5, 6 (édictés par DORS/90-846, art. 2).

Règles de la Cour fédérale en matière d’immigration, DORS/89-26.

Règles de 1993 de la Cour fédérale en matière d’immigration, DORS/93-22, Règles 4(1), 13, 14(2).

JURISPRUDENCE

DISTINCTION FAITE AVEC:

Fawaz c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 92-T-36, juge Pinard, ordonnance en date du 30-4-92, C.F. 1re inst., non publiée).

DEMANDE de directives sur la question de savoir si les notes sténographiques officielles de l’audience de la CSSR visant à déterminer le statut de réfugié du requérant pouvaient être déposées en réponse à l’allégation selon laquelle il n’a pas été démontré que les citations de témoignages dans la décision étaient imprécises. Le dépôt des notes sténographiques a été ordonné.

AVOCATS:

Gary Botting pour le requérant.

Wayne D. Garnons-Williams pour l’intimé.

PROCUREURS:

Gary Botting & Associates, Victoria (C.-B.), pour le requérant.

Le sous-procureur général du Canada pour l’intimé.

Ce qui suit est la version française des motifs de directives rendus par

Le juge Reed: Il s’agit d’une demande interlocutoire à l’égard de laquelle il est, à mon avis, important de rendre des motifs. Le requérant a déposé une demande d’autorisation en vue d’intenter une procédure fondée sur l’article 82.1 [Loi sur l’immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 73)] visant à contester une décision de la Section du statut de réfugié. Cette demande a été déposée le 25 mai 1993. Au cours de la préparation de la demande, l’avocat du requérant a obtenu copie d’une lettre qui avait été envoyée par le sténographe officiel lors des procédures de la Commission à l’un des membres de la Commission:

[traduction] Messieurs,

Aujourd’hui, j’ai lu attentivement une copie de vos motifs de détermination du statut de réfugié de Van Hoa Nguyen de l’audience du 19 mars 1993. Vous vous souviendrez que j’étais un sténographe judiciaire officiel engagé par la Commission pour enregistrer les procédures.

Franchement, je suis surpris que vous ayez cité l’audience avec beaucoup de détails alors que je n’ai jamais préparé de transcription de cette affaire. Je ne conteste pas votre droit de préparer votre propre transcription, mais si c’est le cas, je me demande pour quelle raison la Commission a retenu mes services.

Enfin, puisque je ne me souviens pas que les avocats ou les membres aient utilisé d’appareils de transcription ou de magnétophones, je ne suis pas convaincu de la précision de telles citations des notes sténographiques que les fonctionnaires de la Commission ou toute autre partie pourraient considérer comme mon travail.

Veuillez me répondre à ce sujet.

Le 24 juin 1993, le requérant a obtenu une prorogation de délai, jusqu’au 15 juillet 1993 pour présenter sa demande. La lettre du sténographe officiel a été incorporée sous un affidavit dans les documents déposés dans le dossier du requérant. Le paragraphe 12 du mémoire des faits et du droit du requérant qui a été déposé dans le cadre de ce dossier, prévoit:

[traduction] La Commission s’est fondée sur ses propres notes plutôt que sur la transcription officielle des procédures. Les généreuses citations des notes ne reproduisent pas le déroulement de l’instance.

La réponse de l’intimé à cette allégation se trouve au paragraphe 5 de son mémoire qui a été déposé le 13 août 1993; en voici le texte:

[traduction] … il n’y a aucun élément de preuve que les parties de témoignages citées par la Commission dans ses motifs sont d’aucune façon imprécises et ne réflètent pas ce qui s’est produit à l’audience.

Le requérant a, en conséquence, déposé en réplique un mémoire auquel était joint à titre d’affidavit, une transcription des procédures de la Commission.

L’intimé, par une lettre datée du 24 août 1993, a alors écrit au registraire de la Cour fédérale. Voici en partie le texte de cette lettre:

[traduction] J’écris pour demander les directives de la Cour et pour demander, avec égards, que la Cour soit avisée que l’intimé s’oppose aux documents déposés par l’avocat du requérant en réplique au mémoire de l’intimé.

L’intimé soutient que l’affidavit de Gary Botting fait sous serment le 17 août 1993 et le mémoire du requérant présenté en réponse qui se fonde d’une manière extensive sur l’affidavit sont inappropriés.

Premièrement, l’intimé soutient que ces documents ont été déposés en violation des Règles de la Cour fédérale en matière d’immigration. La Règle 9 de ces Règles permet que les affidavits soient déposés à l’appui d’une demande d’autorisation et fixe les délais qui s’appliquent. La Règle 18 de ces Règles prévoit le dépôt d’observations écrites supplémentaires en réponse aux documents déposés par l’intimé. Le dépôt de nouveaux éléments de preuve dans une réponse n’est pas prévu:

Satnam Singh Bainwait c. Ministre de l’Emploi et de l’Immigration (90-T-611, 7 mai 1990, ordonnance du juge Muldoon)

Deuxièmement, l’intimé soutient que ces documents causent un préjudice important à l’intimé. Le requérant a privé l’intimé d’une occasion de répondre complètement aux arguments du requérant. Le requérant a présenté de nouveaux arguments et de nouveaux éléments de preuve sans donner à l’intimé l’occasion d’y répondre. Les Règles de la Cour fédérale en matière d’immigration ne permettent pas à l’intimé de présenter des documents et des arguments en réfutation.

Dans l’affaire Fawaz c. Ministre de l’Emploi et de l’Immigration 30 avril 1992, 92-T-36 (C.F. 1re inst.), le juge Pinard a conclu que l’affidavit d’un requérant déposé avec la réponse du requérant aux arguments de l’intimé avait été déposé en violation du paragraphe 9(3) des Règles de la Cour fédérale en matière d’immigration et que la réponse écrite du requérant ne pouvait être examinée dans la mesure où elle se fondait sur l’affidavit qui n’avait pas été déposé à bon droit.

L’avocat du requérant a répondu:

[traduction] En réponse à la lettre de M. Brindle du 24 août 1993 au registraire, on soutient avec égards que les notes sténographiques des procédures du sténographe judiciaire officiel qui ont été déposées dans le cadre de l’affidavit contesté peuvent difficilement être considérées comme causant un « préjudice important pour l’intimé » à moins que l’intimé ne cherche à obtenir un redressement par voie de déconcertation. Les notes sténographiques ne pouvaient simplement pas être obtenues avant la fin du délai pour déposer la demande d’autorisation.

Nous étions d’avis que l’intimé nous fournirait une copie des notes sténographiques officielles de l’audience, et nous avons été surpris d’apprendre que les notes n’avaient même pas été demandées. Par conséquent, nous l’avons finalement fait nous-même, mais malheureusement, nous ne les avons pas reçues avant la fin du délai pour le dépôt. Il faut donc se demander pourquoi l’intimé ne les a pas demandées après avoir prévu la présence d’un sténographe judiciaire officiel.

Les principes d’équité procédurale et de justice naturelle exigent que les meilleurs renseignements possibles soient fournis à la Cour. Le fait pour la Cour de refuser d’accorder foi à la transcription officielle d’une procédure, pour les motifs que les renseignements de toute évidence précis qu’elle contient pourraient causer un préjudice à l’intimé (en l’espèce, un ministère du gouvernement avec ses nombreuses ressources) serait susceptible de déconsidérer l’administration de la justice et pourrait même faire en sorte qu’il s’agisse d’une atteinte à la Charte.

Nous ne nous opposons pas à ce que l’intimé soit autorisé à répondre au mémoire présenté en réplique, et en particulier aux notes sténographiques, si la Cour est d’avis qu’il s’agit d’un redressement approprié.

L’intimé a maintenant répondu:

[traduction] Il convient de souligner que cette Cour n’a pas par le passé permis le dépôt d’affidavits supplémentaires en réplique. L’affaire Omar Sheikh Hussain c. M.E.I., no du greffe de la Cour fédérale 92-T-2090, a donné des directives le 14 avril 1993, par lesquelles madame le juge McGillis a ordonné ce qui suit:

« Les règles ne permettent pas le dépôt d’un affidavit supplémentaire en réponse. Le document ne doit pas faire partie du dossier de cette demande. »

Conformément à cette directive et selon la question principale, il est clair que non seulement les notes sténographiques des procédures qui se trouvent à la pièce « A » mais l’affidavit au complet de Gary Botting fait sous serment le 17 août 1993, ne devrait pas faire partie du dossier de cette demande comme il est joint au mémoire présenté par le requérant en réplique.

Je remarque que l’affidavit de Gary Botting qui a été déposé avec le mémoire de réponse est très très court et ne dit rien de plus qu’une copie des notes sténographiques officielles de l’audience de la Commission est jointe.

Dans la mesure où l’arrêt Fawaz [Fawaz c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 92-T-36, juge Pinard, ordonnance en date du 30-4-92, C.F. 1re inst., non publiée)] est visé, il porte sur une version précédente [DORS/89-26] des Règles de 1993 de la Cour fédérale en matière d’immigration [DORS/93-22], une version qui n’est désormais plus en vigueur. Bien que je convienne avec mes collègues que les Règles ne prévoient pas précisément le dépôt d’une preuve par affidavit en réponse, je ne crois pas qu’un requérant ne puisse pas demander l’autorisation de déposer un tel document. Bien que la Règle 13 des Règles de 1993 de la Cour fédérale en matière d’immigration indique qu’un requérant peut déposer un mémoire en réplique, il ne prévoit pas précisément que d’autres documents ne peuvent pas être déposés. La Règle 4(1) des Règles de 1993 de la Cour fédérale en matière d’immigration prévoit que la Partie I et d’autres parties des Règles de la Cour fédérale [C.R.C., ch. 663] s’appliquent aux demandes en matière d’immigration sauf dans la mesure où elles ne sont pas conformes aux Règles de 1993 de la Cour fédérale en matière d’immigration. La Règle 5 des Règles de la Cour fédérale prévoit que lorsque se pose une question non autrement visée, la Cour déterminera la pratique et la procédure à suivre pour cette question par analogie à d’autres dispositions des règles ou à la pratique et à la procédure adoptées dans la province visée. La Règle 6 [ajoutée par DORS/90-846, art. 2] prévoit que la Cour peut, par ordonnance, si des circonstances spéciales le justifient et sous réserve de toute condition qu’elle estime appropriée, dispenser de l’observation d’une règle lorsque cela s’avère nécessaire dans l’intérêt de la justice. Sur le fondement de ces règles, je suis d’avis que je suis habilité en l’espèce à accorder au requérant l’autorisation de déposer une copie des notes sténographiques officielles dans le cadre de l’affidavit de M. Botting.

De plus, je remarque que la transcription de l’audience est exactement le genre de document, compte tenu de la nature des arguments qui ont été présentés par le requérant et par l’intimé, dont la Cour peut de toute façon ordonner le dépôt aux termes de la Règle 14(2) des Règles de 1993 de la Cour fédérale en matière d’immigration. Si je fais erreur quant à l’application des Règles 5 et 6 de la Cour fédérale, j’exerce alors ma compétence aux termes de la Règle 14(2) des Règles de 1993 de la Cour fédérale en matière d’immigration et j’ordonne le dépôt de la transcription.

L’intimé aura deux semaines à compter de la date des présentes directives pour déposer les autres arguments qu’il désire présenter.

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