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[1996] 2 C.F. 263

A-545-95

Westcoast Energy Inc. (appelante)

c.

Office national de l’énergie et Procureur général du Canada (intimés)

A-606-95

AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur l’Office national de l’énergie ET un renvoi de l’Office national de l’énergie en vertu de l’article 18.3 et du paragraphe 28(2) de la Loi sur la Cour fédérale

Répertorié : Westcoast Energy Inc. c. Canada (Office national de l’énergie) (C.A.)

Cour d’appel, juges Pratte, Hugessen et Stone, J.C.A.—Vancouver, 8, 9 et 10 janvier; Ottawa, 9 février 1996.

Droit constitutionnel Partage des pouvoirs Les usines de traitement qu’une entreprise de transport de gaz naturel par pipeline projette de construire relèvent de la compétence du Parlement du Canada aux termes de la Loi constitutionnelle de 1867.

Énergie L’Office national de l’énergie a compétence à l’égard des usines de traitement devant être construites par une entreprise de transport de gaz naturel par pipeline, celles-ci étant du ressort du Parlement du Canada aux termes de la Loi constitutionnelle de 1867Les installations sont visées par la définition de « pipeline » à l’art. 2 de la Loi sur l’Office national de l’énergie.

Westcoast, dont les activités consistent à assurer le transport du gaz naturel par pipeline pour le compte d’autrui, projetait la construction de deux usines de traitement dans la région de Peace River au nord-est de la Colombie-Britannique. Dans chacun des deux cas, les installations projetées pouvaient être considérées comme l’agrandissement des installations de collecte de Westcoast pour le transport du gaz « brut » à partir du point de livraison par le producteur et la construction de nouvelles usines de traitement plus grandes, l’une dans la région de Fort St. John et l’autre dans la région de la vallée Grizzly, où le gaz « combustible », essentiellement du méthane, est séparé des autres composants du gaz brut. L’un des dossiers d’appel porte sur la décision de l’Office national de l’énergie selon laquelle ce dernier n’a pas compétence en ce qui concerne la majeure partie des nouvelles installations dont Westcoast projette la construction dans la région de Fort St. John. L’autre porte sur un renvoi en vertu de l’article 18.3 de la Loi sur la Cour fédérale où l’Office demande à la Cour de trancher une question semblable relativement à la compétence fédérale sur les autres installations projetées dans la région de la vallée Grizzly et, subsidiairement, de répondre à une question concernant l’interprétation de sa loi habilitante, la Loi sur l’Office national de l’énergie, quant à la compétence qu’elle lui confère.

Deux questions doivent être tranchées. Premièrement, les installations projetées constituent-elles des entreprises qui relient la province à une autre ou qui s’étendent au-delà des limites de la province? Cette question en soulève une autre : Westcoast exploite-t-elle une ou plusieurs entreprises? En présence d’une seule entreprise, il ne fait aucun doute que cette entreprise satisfait aux exigences de l’article 92(10)a) de la Loi constitutionnelle de 1867, car elle s’étend en aval et en amont au-delà des limites de la Colombie-Britannique. Par contre, si plusieurs entreprises sont exploitées par Westcoast, la question est alors de savoir si l’entreprise dont feront partie les installations projetées est assujettie à la compétence fédérale. La seconde question en litige, qui n’est pertinente que dans la mesure où la première est tranchée en faveur de la compétence fédérale, consiste à savoir si les usines de traitement projetées peuvent à juste titre être considérées comme des « ouvrages, ou autres biens immeubles ou meubles, connexes » au sens de la définition du mot « pipeline » à l’article 2 de la Loi sur l’Office national de l’énergie.

Arrêt : l’appel est accueilli et la réponse aux deux questions est affirmative.

Pour trancher la question constitutionnelle, il convient premièrement de déterminer si les installations en cause de Westcoast constituent une ou plusieurs entreprises. Il ressort des faits que les installations ne constituent qu’une seule entreprise. Ce n’est pas la différence entre les activités et les services, mais l’interaction entre ceux-ci et le fait qu’ils relèvent ou non de la même direction et partagent ou non des objectifs communs qui permettent de déterminer s’ils font partie d’une entreprise unique. Compte tenu des faits suivants, Westcoast n’exploitait qu’une seule entreprise englobant les activités de collecte, de traitement et de transport du gaz naturel : (1) Westcoast n’était qu’un fournisseur de services; (2) le traitement était nécessaire pour faciliter le transport assuré par elle; (3) le traitement était un service offert uniquement à l’expéditeur qui avait recours à ses canalisations principales de transport; (4) le gaz combustible qui était acheminé dans ses canalisations principales de transport était de loin le principal composant du gaz brut collecté et traité par elle; (5) ses installations étaient non seulement reliées physiquement entre elles et interdépendantes, mais elles étaient aussi parfois interchangeables; (6) le gaz combustible pouvait être acheminé, sur une base contractuelle, à l’extérieur de la province à partir de toutes ses usines de traitement; (7) le même personnel était affecté aux installations de collecte et aux canalisations principales de transport et, tout comme le personnel des usines de traitement, il relevait d’un même centre de direction et de contrôle des opérations; (8) Westcoast était propriétaire de toutes les installations en cause. Il en ressort une très forte présomption de compétence du palier fédéral. Bien qu’elle ne soit pas déterminante au chapitre de la compétence constitutionnelle, la propriété ne constitue certainement pas un facteur sans importance.

En somme, le fait que Westcoast cumulait propriété, direction et contrôle, de même que les autres facteurs énumérés précédemment, mènent inéluctablement à la conclusion que Westcoast était une entreprise unique de transport interprovincial et international de gaz naturel. Elle relevait donc de la compétence fédérale par le jeu des articles 91(29) et 92(10)a) de la Loi constitutionnelle de 1867.

Même en se fondant sur l’interprétation la plus large et la plus généreuse qui soit, on ne peut conclure que l’article 92A empêche l’exercice de la compétence fédérale à l’égard d’une entreprise de transport qui reçoit du gaz brut des producteurs, une fois celui-ci extrait du sous-sol, déshydraté et acheminé aux points de livraison. Cette compétence fédérale est parfaitement compatible avec l’exercice des pouvoirs conférés aux provinces à l’article 92A.

Même si l’on considérait que les activités de collecte de Westcoast constituent une entreprise distincte par rapport aux activités de traitement et de transport au moyen de la canalisation principale (un point de vue jugé non fondé), cette entreprise, y compris les activités exercées dans les régions de Fort St. John et de la vallée Grizzly, doit être considérée comme étant interprovinciale, car le transport s’effectue de façon régulière et ininterrompue au-delà des limites de la province. Que seulement une partie relativement infime des installations de collecte de Westcoast se prolonge au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest et en Alberta n’a pas non plus d’importance sur le plan constitutionnel.

Lorsqu’on conclut à l’existence d’une entreprise unique, il n’est pas nécessaire que chacune des composantes de cette entreprise soit également « fondamentale » ou « essentielle » à celle-ci. Cependant, la conclusion selon laquelle les installations de collecte et de traitement que possède et exploite Westcoast font partie de son entreprise de transport n’implique pas nécessairement que les activités de collecte et de traitement exercées par d’autres sont fondamentales ou essentielles à l’entreprise de Westcoast au point de devenir elles-mêmes assujetties à la compétence fédérale. Cette question n’avait pas besoin d’être tranchée.

Enfin, la définition de « pipeline » à l’article 2 de la Loi sur l’Office national de l’énergie englobe les usines de traitement de Westcoast. Une fois établi que Westcoast constituait une entreprise unique, les usines de traitement devaient être considérées comme faisant partie intégrante des pipelines auxquels elles étaient reliées de part et d’autre. Même si les usines de traitement ne sont pas expressément mentionnées dans la définition, les termes généraux employés dans celle-ci permettent de les englober. L’Office a donc compétence à l’égard des usines de traitement visées en l’espèce.

LOIS ET RÈGLEMENTS

Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vict., ch. 3 (R.-U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1) [L.R.C. (1985), appendice II, no 5], art. 91, 92, 92A, sixième annexe.

Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18.3 (édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5).

Loi sur l’Office national de l’énergie, L.R.C. (1985), ch. N-7, art. 2 « pipeline » (mod. par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 28, art. 299).

JURISPRUDENCE

DÉCISIONS APPLIQUÉES :

Attorney-General for Ontario v. Israel Winner, [1954] A.C. 541 (P.C.); Toronto Corporation v. Bell Telephone Company of Canada, [1905] A.C. 52 (P.C.); The Queen in the Right of the Province of Ontario v. Board of Transport Commissioners, [1968] R.C.S. 118; (1967), 65 D.L.R. (2d) 425; Luscar Collieries Ltd. v. McDonald, [1927] A.C. 925 (P.C.); Dome Petroleum Ltd. c. Office national de l’énergie (1987), 73 N.R. 135 (C.A.F.); Flamborough c. Office national de l’énergie, Interprovincial Pipe Line Ltd. et Canada (1984), 55 N.R. 95 (C.A.F.); Ontario Hydro c. Ontario (Commission des relations de travail), [1993] 3 R.C.S. 327; (1993), 107 D.L.R. (4th) 457; 66 O.A.C. 241; 93 CLLC 14,061; 158 N.R. 161; [1993] O.L.R.B. Rep. 1071; Ottawa-Carleton Regional Transit Commission and Amalgamated Transit Union, Local 279 et al., Re (1983), 44 O.R. (2d) 560 (C.A.).

DÉCISIONS EXAMINÉES :

Travailleurs unis des transports c. Central Western Railway Corp., [1990] 3 R.C.S. 1112; (1990), 76 D.L.R. (4th) 1; 91 CLLC 14,006; 119 N.R. 1; Canadian Pacific Railway Company v. Attorney-General for British Columbia and Attorney-General for Canada, [1950] A.C. 122 (P.C.); Office national de l’énergie (Re), [1988] 2 C.F. 196 (1987), 48 D.L.R. (4th) 596; 81 N.R. 241 (C.A.).

DÉCISION CITÉE :

Northern Telecom Ltée c. Travailleurs en communication du Canada, [1980] 1 R.C.S. 115; (1979), 98 D.L.R. (3d) 1; 79 CLLC 14,211; 28 N.R. 107.

DOCTRINE

Hogg, Peter W. Constitutional Law of Canada, 3rd ed. (supplemented). Scarborough, Ont. : Carswell, 1992.

APPEL d’une décision de l’Office national de l’énergie selon laquelle l’Office n’a pas compétence à l’égard de la majeure partie des nouvelles installations de traitement projetées par Westcoast Energy Inc. dans la région de Fort St. John, en Colombie-Britannique. Appel accueilli.

RENVOI de l’Office quant à savoir si les installations de traitement dont Westcoast projetait la construction dans la région de la vallée Grizzly, en Colombie-Britannique, sont assujetties à la compétence fédérale et relèvent donc, suivant l’interprétation de la Loi sur l’Office national de l’énergie, de la compétence de l’Office. Une réponse affirmative est donnée aux deux questions.

AVOCATS :

W. Ian C. Binnie, c.r. et Robin M. Sirett, pour l’appelante Westcoast Energy Inc.

Judith B. Hanebury, pour l’intimé Office national de l’énergie.

Anne Michaud, pour l’intimé procureur général du Canada.

W. Stanley Martin, Cal Johnson, D. G. Cowper, pour B.C. Gas Utility Ltd.

George H. Copley, pour Sa Majesté la Reine du chef de la province de la Colombie-Britannique.

James J. Quail, pour l’Association des consommateurs du Canada (section Colombie-Britannique).

PROCUREURS :

McCarthy Tétrault, Toronto et Vancouver, pour l’appelante Westcoast Energy Inc.

Services juridiques, Office national de l’énergie, Calgary, pour l’intimé Office national de l’énergie.

Le sous-procureur général du Canada, pour l’intimé le procureur général du Canada.

Russell & Du Moulin, Vancouver, pour B.C. Gas Utility Ltd.

Le ministère du procureur général, Victoria, pour Sa Majesté la Reine du chef de la province de la Colombie-Britannique.

B.C. Public Interest Advocacy Centre, Vancouver, pour l’Association des consommateurs du Canada (section Colombie-Britannique).

Code Hunter Wittmann, Calgary, pour le groupe Aitken Creek.

Services juridiques, Ministère de l’Énergie de l’Alberta, Calgary, pour le ministère de l’Énergie de l’Alberta.

Macleod Dixon, Calgary, pour Alberta Natural Gas Company Ltd.

Robert C. Beattie, Vancouver, pour Canwest Gas Supply Inc.

Bull, Housser & Tupper, Vancouver, pour le Conseil des industries forestières, Methanex Corp. et Cominco Ltd.

Guild, Yule and Company, Vancouver, pour le groupe des utilisateurs étrangers.

Lidstone, Young, Anderson, Vancouver, pour le district régional de Peace River.

Services juridiques, Pétro-Canada, Calgary, pour Pétro-Canada.

Services juridiques, Progas Limited, Calgary, pour Progas Limited.

Carter, Lock & Repka, Grande Prairie (Alberta), pour M. Calloway Roller et Mme Yvonne Roller.

Services juridiques, Shell Canada Limited, Calgary, pour Shell Canada Limited.

Milner Fenerty, Calgary, pour le groupe des expéditeurs de Tumbler Ridge.

Services juridiques, Unocal Canada Limited, Calgary, pour Unocal Canada Limited.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par

Le juge Hugessen, J.C.A. :

Introduction

La Cour est saisie d’un appel visant une décision de l’Office national de l’énergie et d’un renvoi de cet organisme en vertu de l’article 18.3 de la Loi sur la Cour fédérale[1]. Les deux affaires portent sur des installations que se propose de construire Westcoast Energy Inc. (Westcoast) dans la région de Peace River au nord-est de la Colombie-Britannique.

L’appel vise la décision majoritaire (2 contre 1) d’une formation de l’Office national de l’énergie (l’Office) selon laquelle l’Office n’a pas compétence en ce qui concerne la majeure partie des nouvelles installations dont Westcoast projette la construction dans la région de Fort St. John. Dans son renvoi, l’Office demande à la Cour de trancher une question semblable relativement à la compétence fédérale sur les autres installations projetées par Westcoast dans la région de la vallée Grizzly; dans l’hypothèse où la Cour conclurait à la compétence fédérale, l’Office lui demande subsidiairement de répondre à une question concernant l’interprétation de la compétence que lui confère sa loi habilitante, la Loi sur l’Office national de l’énergie[2].

Les activités de Westcoast consistent à assurer le transport du gaz naturel par pipeline pour le compte d’autrui. Dans chaque cas, les installations projetées peuvent être considérées, de façon générale, comme l’agrandissement des installations de collecte de Westcoast pour le transport du gaz « brut » à partir du point de livraison par les producteurs, et la construction d’une nouvelle usine de traitement où le gaz « combustible », essentiellement le méthane, est séparé des autres composants du gaz brut. Certains de ces composants, tels les hydrocarbures liquides comme le propane, ont eux-mêmes une utilité commerciale; d’autres, tel l’hydrogène sulfuré, peuvent être transformés, et ils le sont, en un produit commercialisable (le soufre).

Les composants principaux du gaz brut, exprimés en « fractions molaires », pour chacune des deux installations projetées, sont les suivants[3] :

Composant

Projet Fort St. John

(usine Aitken Creek)

Projet Grizzly Valley

(usine Pine River)

Azote

Dioxyde de carbone

Hydrogène sulfuré

Méthane

Éthane

Propane

0,0048

0,0172

0,0132

0,8618

0,0619

0,0232

0,0037

0,0787

0,1005

0,8148

0,0022

0,0001

On nous a dit à l’audience que la façon empirique de déterminer le pourcentage réel des différents composants du gaz brut consistait à multiplier la « fraction molaire » par 100. Ainsi, par exemple, à partir du tableau qui précède, le pourcentage de méthane que contient le gaz brut serait de 86,18 à l’usine Aitken Creek et de 81,48 à l’usine Pine River.

Les deux projets de Westcoast comportent des modifications relativement minimes, y compris des ajouts, en ce qui concerne ses principales canalisations de transport du gaz combustible en aval des usines de traitement en cause. Dans les deux cas, ce sont les nouvelles installations de traitement qui occasionneront les travaux de loin les plus importants et les plus coûteux.

Les deux projets d’agrandissement diffèrent l’un de l’autre sous trois aspects importants :

1) En ce qui concerne le projet Fort St. John, le gaz brut renferme des quantités importantes de liquides d’hydrocarbures, ce qui a une incidence non seulement sur l’exploitation des pipelines de collecte, lesquels doivent comporter un mécanisme de propulsion des liquides pour éviter l’obstruction, mais également sur la nouvelle usine de traitement projetée à Aitken Creek qui englobera des installations d’extraction, de fractionnement et de manipulation de ces liquides d’hydrocarbures. Par ailleurs, l’hydrogène sulfuré est un composant relativement peu important du gaz brut produit dans la région de Fort St. John. À l’opposé, le gaz brut devant être manipulé aux nouvelles installations de la vallée Grizzly ne renferme pas de liquides d’hydrocarbures, mais un pourcentage relativement élevé (environ 10 %) d’hydrogène sulfuré; par conséquent, les nouvelles installations de l’usine de traitement Pine River ne permettront pas la manipulation de liquides d’hydrocarbures;

2) Le projet Grizzly Valley prévoit l’agrandissement d’installations pipelinières existantes (la canalisation Sukunka) qui permettent le transport du gaz combustible en amont de l’usine de traitement vers les installations de production (notamment aux fins de la déshydratation) dans la région de la vallée Grizzly. Il n’existe pas d’installations équivalentes dans la région de Fort St. John. L’Office a fait valoir sa compétence à l’égard de la canalisation Sukunka dans une décision antérieure qui n’a pas été contestée, et il n’a pas été avancé que le projet d’agrandissement de cette canalisation modifiait le statut général du projet Grizzly Valley sur le plan de la compétence constitutionnelle;

3) Dans le cas du projet Fort St. John, le gaz sera acheminé par les pipelines de collecte dans la nouvelle usine Aitken Creek grâce à de nouvelles installations de compression qui seront mises en place en amont de l’usine. À l’opposé, le déplacement des quantités supplémentaires de gaz dans les pipelines de collecte de la vallée Grizzly sera facilité par l’adjonction de nouvelles installations de compression en aval de l’usine Pine River sur la principale canalisation de transport comme telle.

Les parties et les procédures engagées devant l’Office

Initialement, Westcoast a demandé à l’Office d’approuver les deux projets à la fois. Pour des raisons qui ne sont pas pertinentes en l’espèce, la demande relative au projet Grizzly Valley a fait l’objet d’un ajournement, et seule celle afférente au projet Fort St. John a été entendue. Lors de l’audience publique tenue relativement à la demande, B.C. Gas Utility Ltd. (B.C. Gas) a remis en question la compétence de l’Office sur les installations actuelles et projetées de collecte et de traitement de Westcoast[4]. L’opposition de B.C. Gas comportait deux volets. Premièrement, elle a invoqué la Constitution pour nier la compétence de l’Office à l’égard des installations de collecte et de traitement qui se trouvent en totalité à l’intérieur des limites de la province de la Colombie-Britannique. B.C. Gas a prétendu que ces installations étaient des ouvrages et des entreprises de nature purement locale se rapportant à la production et à la mise en valeur des ressources naturelles dans la province et ne faisaient pas partie d’une entreprise interprovinciale ou internationale de transport, ce qui aurait eu pour effet de les assujettir à la compétence fédérale par le jeu des articles 91(29) et 92(10)a) de la Loi constitutionnelle de 1867[5]. Le second motif d’opposition de B.C. Gas ne se rapportait qu’aux installations de traitement projetées par Westcoast (qui, comme indiqué précédemment, correspondent de loin à la partie la plus importante des investissements prévus par Westcoast). B.C. Gas a prétendu que l’usine de traitement échappait à la compétence de l’Office parce qu’elle ne fait pas partie d’un « pipeline » au sens de l’article 2 [mod. par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 28, art. 299] de la Loi sur l’Office national de l’énergie, précitée, la loi habilitante de l’Office :

2. …

« pipeline » Canalisation servant ou destinée à servir au transport du pétrole ou du gaz, seul ou avec un autre produit, et reliant une province et une ou plusieurs autres provinces, ou s’étendant au-delà des limites d’une province ou de la zone extracôtière, au sens de l’article 123, y compris les branchements, extensions, citernes, réservoirs, installations de stockage ou de chargement, pompes, rampes de chargement, compresseurs, systèmes de communication entre stations par téléphone, télégraphe ou radio, ainsi que les ouvrages, ou autres biens immeubles ou meubles, connexes.

Le 26 mai 1995, après avoir entendu l’affaire, l’Office a reconnu, à la majorité, le bien-fondé de l’argument constitutionnel et il a conclu qu’il n’avait pas compétence. Il n’a donc pas jugé nécessaire de se prononcer sur la question de la compétence conférée par la Loi, laquelle est demeurée sans réponse. L’autorisation d’interjeter appel devant la Cour a été accordée le 24 août 1995.

Vu la décision rendue concernant le projet Fort St. John, Westcoast a réactivé le dossier du projet Grizzly Valley et a demandé à l’Office de soumettre à la Cour la question de sa compétence. Le 21 septembre 1995, après avoir reçu, à son invitation, des observations écrites de la part de tous les intéressés, dont B.C. Gas et le procureur général de la Colombie-Britannique[6], l’Office a rendu une ordonnance faisant état par le menu des faits sur lesquels elle fonderait une décision et a renvoyé les questions suivantes à la Cour :

(1)  Les installations que se propose de construire et d’exploiter Westcoast Energy Inc. relèvent-elles de la compétence du Parlement du Canada selon les Lois constitutionnelles de 1867 à 1982?

(2)  Le cas échéant, ces installations sont-elles visées par la définition de « pipeline » qui figure à l’article 2 de la Loi sur l’Office national de l’énergie ?

L’appel et le renvoi ont été réunis et entendus simultanément. Des observations ont été formulées non seulement par Westcoast et B.C. Gas, mais également par le procureur général du Canada, le procureur général de la Colombie-Britannique, Consumers’s Gas Company Ltd. et l’Association des consommateurs du Canada (section C.-B.).

Les questions en litige

Il appert donc que deux questions doivent être tranchées dans la présente instance.

La première, et de loin la plus importante, est la question constitutionnelle. Elle peut être formulée comme suit à partir du libellé de l’article 92(10)a) de la Loi constitutionnelle de 1867, précitée : les installations projetées constituent-elles des entreprises qui relient la province à une autre ou qui s’étendent au-delà des limites de la province? Cette question en appelle une autre : Westcoast exploite-t-elle une ou plusieurs entreprises? En présence d’une seule entreprise, il ne fait aucun doute, comme nous le verrons, que cette entreprise satisfait aux exigences de l’article 92(10)a), car elle s’étend en aval et en amont au-delà des limites de la Colombie- Britannique. Par contre, si plusieurs entreprises sont exploitées par Westcoast, la question est alors de savoir de quelle entreprise les installations projetées feront partie et si elles satisfont au deuxième volet du critère énoncé par le juge en chef Dickson dans l’arrêt Travailleurs unis des transports c. Central Western Railway Corp.[7] :

Il y a deux façons dont Central Western peut être considérée comme relevant de la compétence fédérale et, partant, du Code canadien du travail. Premièrement, on peut considérer qu’il s’agit d’un chemin de fer interprovincial qui tombe en conséquence dans le champ d’application de l’al. 92(10)a) de la Loi constitutionnelle de 1867 à titre d’ouvrage ou d’entreprise de compétence fédérale. Deuxièmement, si l’on peut à bon droit voir l’appelante comme faisant partie intégrante d’un ouvrage ou d’une entreprise à caractère fédéral qui existe déjà, elle relève de la compétence fédérale suivant l’al. 92(10)a). Par souci de clarté, je tiens à préciser que ces deux approches, en dépit de leur connexité, sont distinctes l’une de l’autre. Dans le premier cas, il s’agit surtout de déterminer si le chemin de fer constitue en lui-même un ouvrage ou une entreprise de compétence fédérale. Dans le second cas, cependant, la compétence tient à une conclusion que la réglementation de la matière en question fait partie intégrante d’une entreprise fédérale principale. [Souligné dans l’original.]

La seconde question en litige, qui n’est pertinente que si la première est tranchée en faveur de la compétence fédérale, a une portée beaucoup moins grande. Il s’agit de savoir si les usines de traitement projetées peuvent à juste titre être considérées comme des « ouvrages, ou autres biens immeubles ou meubles, connexes » au sens de la définition du mot « pipeline » à l’article 2 de la Loi sur l’Office national de l’énergie, précitée.

Westcoast et le procureur général du Canada ont invité la Cour à répondre aux deux questions par l’affirmative et à conclure que l’Office a compétence, tandis que B.C. Gas et le procureur général de la Colombie-Britannique lui ont demandé de répondre aux deux questions par la négative. L’Association des consommateurs du Canada (section C.-B.) a plaidé en faveur d’une réponse négative à la question constitutionnelle, mais, advenant que la compétence constitutionnelle du Parlement du Canada soit reconnue, en faveur d’une réponse affirmative à la question de l’interprétation législative. Consumers’ Gas Company Ltd. n’a pas pris position à l’égard de l’une ou l’autre des questions, mais a plutôt fait valoir une série de principes généraux qui, selon elle, devaient présider à l’examen de la Cour.

Le réseau Westcoast

Dans son ordonnance de renvoi, l’Office décrit minutieusement les installations pipelinières de Westcoast de la façon suivante :

11. Westcoast possède et exploite des installations de gaz naturel reliées entre elles qui commencent à des points de réception, situés au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest, en Alberta et en Colombie-Britannique, et se terminent à des points de livraison, situés en Colombie-Britannique et en Alberta ainsi qu’à la frontière internationale près de Huntingdon (Colombie-Britannique). Le gaz des producteurs provenant de divers gisements passe dans les canalisations de transport de gaz brut de Westcoast. Ce gaz brut, qui contient des substances comme l’hydrogène sulfuré et le dioxyde de carbone, est transporté par les canalisations de transport du gaz brut de Westcoast jusqu’aux usines de traitement de la compagnie où il est débarrassé de ces substances. Cependant, dans certains cas, le gaz est transporté jusqu’aux usines de traitement de Westcoast par des canalisations de transport du gaz brut appartenant à d’autres compagnies, et, dans un cas particulier, les canalisations de transport du gaz brut de Westcoast sont reliées à une usine de traitement de Pacific Northern Gas pour fournir un service auxiliaire. Le traitement produit du gaz épuré, du soufre et des liquides qui peuvent ensuite être acheminés vers les marchés. Le gaz épuré passe dans la canalisation principale de Westcoast pour être transporté vers les marchés.

12. Les canalisations et les installations de traitement de Westcoast sont les suivantes :

•     environ 2 576 km de canalisations principales parcourant l’Alberta et la Colombie-Britannique, et 17 stations de compression;

•     environ 2 488 km de canalisations de « collecte » ou de transport de gaz brut parcourant l’Alberta, la Colombie-Britannique, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest, et 17 stations auxiliaires;

•     cinq usines de traitement situées en Colombie-Britannique, à Fort Nelson, Taylor, Pine River, Aitken Creek et dans la région de Sikanni au nord-ouest de Fort St. John. Westcoast possède une sixième usine à Boundary Lake (C.-B.) qui n’est pas actuellement exploitée.

14. Comme on peut le voir sur la carte, la canalisation principale de transport de Westcoast commence à la frontière internationale, près de Huntingdon (Colombie-Britannique) à l’est de Vancouver, où elle est raccordée au gazoduc que possède et exploite Northwest Pipeline Corporation aux États-Unis.

15. À partir de Huntingdon, la canalisation principale de Westcoast se prolonge vers le nord jusqu’à la station de compression no 2, où elle se divise en trois branches. L’une des branches (la canalisation principale Fort Nelson) va vers le nord jusqu’à l’usine de Fort Nelson (C.-B.) En chemin, près de la station de compression N4, des canalisations la relient aux usines Sikanni et Aitken Creek qui appartiennent à Westcoast. La canalisation principale Fort Nelson se raccorde aussi à l’usine Buckinghorse, qui appartient à Westcoast Gas Services Inc., filiale de Westcoast qui n’est pas réglementée par l’Office. La deuxième branche (la canalisation principale Pine River) se prolonge vers le sud-est jusqu’à l’usine Pine River, près de Chetwynd (C.-B.). La troisième branche (la canalisation principale Fort St. John) va en direction du nord-est jusqu’à la station de compression no 1, qui est adjacente à l’usine McMahon, située à Taylor près de Fort St. John (C.-B.), où elle se divise en deux branches en Alberta. De ces deux branches, la plus au nord (la canalisation principale Boundary Lake, d’un d. e. de 16 po) pénètre en Alberta sur environ 1,6 km; elle se raccorde alors à un gazoduc que possède et exploite NOVA Gas Transmission Ltd. (« NOVA »). L’autre branche (la canalisation principale Alberta, d’un d. e. de 26 po) pénètre en Alberta sur environ 6,6 km; elle se raccorde alors à un gazoduc de Westcoast Transmission Company (Alberta) Ltd. (« Westcoast Alberta »), filiale à part entière de Westcoast. Le gazoduc de Westcoast Alberta est relié ensuite au gazoduc de NOVA à environ 19 km à l’est de la frontière entre la Colombie-Britannique et l’Alberta. Par ailleurs, le gazoduc de Westcoast Alberta raccorde les gisements de gaz de la région de Peace River (Alberta) aux installations de transport de gaz brut de Westcoast. Westcoast Alberta n’a pas d’employés et toutes ses installations sont exploitées par Westcoast.

16. Depuis le début de l’exploitation des installations de Westcoast en 1957, le gaz épuré produit en Alberta a été transporté vers l’ouest, par les installations de Westcoast Alberta et, plus tard, de NOVA, jusqu’à la canalisation principale de Westcoast pour être vendu en Colombie-Britannique, ou jusqu’à la frontière internationale aux fins d’exportation aux États-Unis. Le gaz produit en Colombie-Britannique peut aussi être transporté à partir de la station de compression no 1 (adjacente à l’usine McMahon) en direction de l’est par les installations de Westcoast et de Westcoast Alberta jusqu’à celles de NOVA pour être livré sur les marchés de l’Alberta, ceux qui se trouvent à l’est de l’Alberta et ceux des États-Unis.

17. Les canalisations de transport de gaz brut de Westcoast sont en amont des quatre usines de traitement suivantes : Fort Nelson, Aitken Creek, McMahon et Pine River. Les usines Aitken Creek et McMahon se trouvent dans la région de Fort St. John; l’usine Pine River, dans la région de la vallée Grizzly. Il n’existe pas de raccordement entre les canalisations de collecte des régions de Fort Nelson, Fort St. John et de la vallée Grizzly. Parmi les canalisations de transport de gaz brut situées en amont des usines Pine River, Aitken Creek, et McMahon, aucune ne traverse la frontière provinciale. Certaines des canalisations de gaz brut desservant l’usine Fort Nelson traversent la frontière provinciale. La canalisation de transport du gaz brut en amont de l’usine de traitement Sikanni appartient à des producteurs.

18. Comme le montre la carte, Westcoast possède et exploite les installations de transport de gaz brut suivantes :

a)   Les pipelines de transport de gaz brut Fort Nelson dans la région de ressources Fort Nelson consistent en installations pipelinières qui s’étendent sur environ 856 km au nord et à l’est de l’usine Fort Nelson, et des installations de compression connexes.

b)   Les pipelines de transport de gaz brut Fort St. John dans la région de ressources Fort St. John consistent en installations pipelinières qui s’étendent sur environ 1 372 km au nord de l’usine McMahon à Taylor (C.-B.) et de l’usine Aitken Creek, et des installations de compression connexes.

c)   Les pipelines de transport de gaz brut Grizzly Valley dans la région de ressources Grizzly Valley consistent en installations pipelinières qui s’étendent sur environ 179 km de l’usine Pine River aux champs de gaz Grizzly Valley, au sud-est de l’usine. Une carte de la région de ressources Grizzly Valley portant la légende « Région de ressources Grizzly Valley » figure à l’annexe 5 (les canalisations de « collecte » des producteurs y apparaissent en noir). Dans cette région, le diamètre des canalisations de Westcoast varie de 8 à 24 po. Il y a 30 puits producteurs dans la région, et Westcoast collecte le gaz brut à onze points de réception. Certains pipelines de transport de gaz brut appartenant à Westcoast dans la région de la vallée Grizzly peuvent servir de source d’approvisionnement auxiliaire à l’usine de traitement de gaz naturel de Pacific Northern Gas qui dessert la ville de Tumbler Ridge. L’usine s’approvisionne principalement à partir des canalisations de collecte qui appartiennent à des producteurs et qui ne sont pas réglementées par l’Office. Le gaz brut acheminé par Westcoast ne serait utilisé que si l’usine ne pouvait s’approvisionner à partir des canalisations de collecte. Pacific Northern Gas, une filiale de Westcoast, n’est pas réglementée par l’Office. [Recueil, aux pages 3 à 6.]

Le système de Westcoast est décrit de façon analogue, mais plus brièvement et moins en détail dans la décision majoritaire rendue à l’égard du projet Fort St. John. L’Office y résume l’exposé de l’avocat de Westcoast concernant les faits pertinents au chapitre de la compétence et dit juger « exacte la description générale » du réseau Westcoast (dossier d’appel, aux pages 4646 et 4647).

La décision de l’Office concernant le projet Fort St. John

Après avoir cité les textes constitutionnels applicables et le critère à deux volets énoncé par le juge en chef Dickson dans l’arrêt Central Western Railway, précité, les membres majoritaires examinent la prétention de B.C. Gas selon laquelle les activités de collecte et de traitement de Westcoast « sont un autre genre d’affaires et ne forment pas partie de la même entreprise » que les canalisations principales à caractère interprovincial et international de Westcoast qui relèvent incontestablement de la compétence fédérale. Voici un extrait de la décision majoritaire :

Selon l’Office, le traitement du gaz et le transport du gaz sont des activités ou services fondamentalement différents. Le traitement est l’une des opérations qui aboutit à la production du gaz résiduaire, du soufre et de liquides, qui sont ensuite transportés jusqu’aux marchés par divers moyens. La collecte est une activité de transport, mais selon l’Office, elle est liée au processus de production plutôt qu’au transport par la canalisation principale.

Les pratiques commerciales de Westcoast reflètent les différents services qu’elle offre. Les clients peuvent passer des contrats pour obtenir les services de transport, et des contrats distincts pour les services de collecte et de traitement. Les droits applicables aux services de collecte, de traitement et de transport par la canalisation principale sont calculés séparément et sont obtenus par des méthodes de conception distinctes. Les installations de Westcoast sont exploitées de façon coordonnée, mais selon l’Office, il s’agit là d’une caractéristique universelle de l’industrie du gaz naturel, qui surviendrait entre des installations reliées nonobstant la propriété. Westcoast accepte le gaz résiduaire des usines de traitement de gaz qui sont exploitées par d’autres compagnies, ce qui suppose un degré similaire de coordination et de coopération. En outre, les producteurs peuvent posséder des canalisations de collecte reliées aux canalisations de collecte de Westcoast, et les canalisations alimentant l’usine Sikanni appartiennent toutes à des producteurs.

Certaines des usines qui sont actuellement exploitées par Westcoast appartenaient auparavant à d’autres compagnies relevant de la compétence provinciale, qui les exploitaient. Bien qu’« [un changement quant à la personne morale qui a le contrôle puisse … s’avérer important lorsque cela entraîne des modifications dans l’exploitation de l’entreprise en question » (Central Western à la page 1131), rien ne montre que le transfert, à Westcoast, de la propriété et du contrôle de ces installations a notablement modifié la démarche générale d’exploitation de ces installations.

L’avocat du Groupe Aitken Creek a suggéré qu’il serait difficile de séparer la gestion des fonctions de collecte, de traitement et de transport. Toutefois, des installations appartenant à d’autres compagnies sont reliées aux installations de Westcoast et il est manifeste que l’infrastructure complète de collecte et de traitement qui alimente la canalisation de transport principale de Westcoast comprend des composantes qui sont détenues et gérées de façon distincte. Un bon nombre de causes appuie la proposition selon laquelle la propriété, en soi, n’est pas déterminante de la question constitutionnelle : Northern Telecom Ltée c. Travailleurs en communication du Canada, [1980] 1 R.C.S. 115 à la page 134; Northern Telecom Ltée c. Travailleurs en communication du Canada, [1983] 1 R.C.S. 733 à la page 757; Alberta Government Telephones c. C.R.T.C., [1989] 2 R.C.S. 225 à la page 263.

L’Office est donc d’avis que les installations proposées ne formeraient pas partie de l’entreprise de transport par canalisation principale de Westcoast, à l’exception du doublement proposé du pipeline Aitken Creek, qui serait relié à la nouvelle usine Aitken Creek par la canalisation principale de Westcoast. [Dossier d’appel, aux pages 4652 et 4653.]

Les membres majoritaires examinent ensuite l’incidence éventuelle, sur le plan de la compétence, du fait que certaines des canalisations de collecte de Westcoast s’étendent au-delà des limites de la province en Alberta, au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest. Selon eux, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur l’étendue de la compétence fédérale à l’égard de ces installations, étant donné que les installations de collecte et de traitement projetées dans la région de Fort St. John, les seules visées alors par l’examen de l’Office, « ne formeront pas partie … de la même entreprise » (Dossier d’appel, à la page 4653). L’Office signale que les installations projetées dans la région de Fort St. John ne seraient pas reliées aux canalisations interprovinciales de collecte, sauf par la canalisation principale de transport.

Après avoir conclu que les installations projetées dans la région de Fort St. John ne constitueraient pas elles-mêmes des ouvrages ou des entreprises de compétence fédérale, les membres majoritaires se penchent sur la question suivante, à savoir si les installations projetées seront essentielles à l’entreprise de transport par canalisation principale de Westcoast. Voici leur raisonnement et leur conclusion à ce sujet :

L’Office est d’avis que les installations de collecte et de traitement proposées, qu’elles soient considérées séparément ou comme faisant partie des installations de collecte et de traitement actuelles dans la région de Fort St. John comme une entreprise unique ou, peut-être, deux entreprises, ne sont pas intégrales (sic) à l’entreprise de transport par canalisation principale de Westcoast dans le sens constitutionnel nécessaire. Le lien physique n’aboutit pas, en soi, à la compétence fédérale : « …il en faut davantage que l’existence d’un lien matériel et des relations commerciales mutuellement avantageuses avec un ouvrage ou une entreprise à caractère fédéral… » (Central Western, à la page 1147). Le réseau de transport par canalisation principale est dépendant, en amont, des puits de gaz et de l’infrastructure de collecte et de traitement qui l’alimentent, et, en aval, des installations de distributeurs locaux. Le réseau de transport et les infrastructures connexes, en amont et en aval, sont, par la force des choses, exploités d’une manière coordonnée, sans égard à leur appartenance. Selon l’Office, cette dépendance et cette coordination sont une caractéristique inévitable de l’industrie du gaz naturel et ne signifient pas que les installations reliées sont essentielles et intégrales (sic) dans le sens constitutionnel. [Dossier d’appel, à la page 4654.]

Le membre dissident de l’Office tire une conclusion différente. À son avis, « l’ensemble du réseau Westcoast est une entreprise indivisible » (Dossier d’appel, à la page 4656). Voici l’essentiel de son raisonnement :

… les services de traitement de Westcoast sont offerts seulement aux expéditeurs et ils sont un élément essentiel du transport du gaz, parce que des facteurs techniques, économiques et de sécurité font que le transport du gaz acide brut vers les marchés est impraticable. Le sulfure hydrogène contenu dans le gaz brut exige que les canalisations, les soudures et le matériel requis possèdent des propriétés métallurgiques spéciales pour résister à la corrosion, à la fragilisation et au fissurage. Cela ajoute considérablement au coût d’un pipeline destiné au transport du gaz brut. En outre, le sulfure d’hydrogène est toxique et les conséquences que pourrait avoir un bris d’une canalisation transportant du gaz brut sont donc plus graves que s’il s’agissait d’une canalisation acheminant du gaz résiduaire. Puisque la canalisation principale de Westcoast traverse des zones urbaines de la partie continentale sud, le transport du gaz brut acide soumettrait le public à un risque inacceptable.

Le gaz brut contient aussi des liquides qui aboutissent souvent à la formation de substances semi-solides appelées hydrates lorsque des étranglements ou des bouchons se forment dans un pipeline. En outre, des bouchons d’hydrates peuvent faire éclater une canalisation lorsqu’ils rencontrent un étranglement ou un coude serré. Les grosses canalisations de collecte doivent donc être « ramonées » pour en retirer les hydrates. S’il s’agissait d’une canalisation principale, cette opération serait impraticable et plus dangereuse.

Pour ces motifs, le gaz brut doit donc être traité avant d’être introduit dans la canalisation principale.

Les usines de traitement sont aussi intégrées dans le réseau de collecte. Le lieu et la conception des usines et du réseau de collecte sont interdépendants; par rapport à d’autres secteurs semblables en Alberta, le réseau de collecte de Westcoast dans le nord-est de la Colombie-Britannique est plus vaste, de sorte que le traitement peut être accompli à l’aide d’un petit nombre d’usines de grande taille. La planification des gros agrandissements des installations pipelinières est invariablement liée à un agrandissement des moyens de collecte et de traitement, comme c’est le cas dans la présente demande.

[L]es usines de traitement de Westcoast sont essentielles au transport du gaz vers le marché; elles existent seulement à l’avantage des expéditeurs du réseau; elles sont fournies par le propriétaire de l’entreprise de transport, soit Westcoast; et, à mon avis, elles forment une partie intégrale (sic) et essentielle du réseau. Comme je l’ai indiqué au début, je suis d’avis que l’ensemble du réseau Westcoast constitue une entreprise unique. [Dossier d’appel, aux pages 4657 et 4658.]

Une ou plusieurs entreprises?

Comme indiqué précédemment, il convient, pour trancher la question constitutionnelle, de déterminer premièrement si les installations en cause de Westcoast constituent une ou plusieurs entreprises. Il faut donc examiner l’exploitation réelle du réseau Westcoast tel qu’il existe et fonctionne actuellement. Il ressort de la jurisprudence qu’il ne s’agit pas de savoir comment l’entreprise aurait pu être structurée ou comment d’autres personnes exploitent et structurent dans les faits des entreprises différentes. Voici un extrait de l’arrêt Attorney-General for Ontario v. Israel Winner[8] en ce sens :

[traduction] Il ne fait aucun doute que l’activité consistant à faire monter puis descendre des passagers qui se déplacent uniquement dans la province pourrait être scindée du reste de l’entreprise de M. Winner. Or, ce faisant, on ne se demanderait pas s’il existe une entreprise et si elle est reliée à d’autres pays ou provinces, mais plutôt si l’on peut démembrer l’entreprise telle qu’elle existe tout en la laissant intacte ou la scinder de façon qu’une partie soit interprovinciale et l’autre provinciale.

Il s’agit, en l’instance, d’une entreprise unique et indivisible. Certes, on aurait pu l’exploiter de façon différente et en confiner l’activité soit dans les limites de la province, soit en dehors de celles-ci, mais ce n’est pas le cas, et leurs Seigneuries ne peuvent admettre que la possibilité qu’une entreprise puisse être exercée d’une autre façon qu’elle ne l’est, puisse modifier, en tout ou en partie, son statut d’entreprise interprovinciale ou internationale.

Il est clair, évidemment, que le simple fait que ce soit Westcoast qui exerce les différentes activités n’emporte pas en soi l’existence d’une entreprise unique. C’est ce qui ressort de l’arrêt Canadian Pacific Railway Company v. Attorney-General for British Columbia and Attorney-General for Canada[9] (l’affaire Empress Hotel) :

[traduction] La question qui doit être tranchée, selon leurs Seigneuries, est donc de savoir si l’hôtel Empress fait partie des ouvrages et de l’entreprise ferroviaires de l’appelante qui relient la Colombie-Britannique à d’autres provinces ou constitue une entreprise distincte. Une société peut être autorisée à exploiter et peut, dans les faits, exploiter plus d’une entreprise. Ce n’est pas parce qu’une société est une société ferroviaire que tous ses ouvrages doivent être ferroviaires ni que toutes ses activités doivent se rapporter à son entreprise de chemin de fer.

De la même manière, toutefois, le fait que différentes activités puissent être exercées ou que différents services puissent être assurés n’empêche pas de conclure à l’existence d’une entreprise unique : Toronto Corporation v. Bell Telephone Company of Canada[10] :

[traduction] L’entreprise dont l’exploitation a été autorisée par la loi en 1880 était une entreprise unique, même si, à certaines fins, ses activités peuvent être considérées comme appartenant à diverses catégories ou relevant de divers sujets. L’entreprise de la Bell Telephone Company n’est pas davantage un agrégat d’entreprises distinctes que ne l’est l’entreprise d’une société de télégraphie qui exploite une ligne interurbaine en plus d’exercer des activités locales ou l’entreprise d’une société ferroviaire qui peut avoir un important trafic de banlieue et être dotée de kilomètres de chemins de fer assurant la liaison avec des endroits éloignés.

De même, dans l’affaire de Empress Hotel, précitée, le Conseil privé dit ce qui suit, à la page 144 :

[traduction] Leurs Seigneuries ne considèrent pas que l’autorisation d’exercer des activités visant « le confort du public voyageur » exige de l’appelante qu’elle serve des repas exclusivement ou spécialement aux personnes qui se déplacent grâce à son réseau. Il est loisible à l’appelante de faire concurrence aux autres établissements hôteliers dans la fourniture de services hôteliers généraux. Il ressort des faits énoncés dans l’ordonnance de renvoi que l’appelante a ainsi interprété l’autorisation et qu’elle exerce des activités hôtelières générales à l’hôtel Empress. Dans l’hypothèse où l’appelante a choisi d’exploiter un hôtel pour le seul ou pour le principal bénéfice des voyageurs utilisant son réseau, il est possible que cet hôtel ferait partie de son entreprise de chemin de fer. Fournir repas et repos aux voyageurs empruntant son réseau peut constituer, leurs Seigneuries n’en doutent pas, une fonction de l’entreprise de l’appelante, que ces services soient offerts dans les trains ou dans les gares; ils peuvent aussi l’être dans un hôtel. Toutefois, l’hôtel Empress est d’un type maintenant différent. Très peu d’éléments, s’il en est, des faits énoncés permettent de le différencier d’un hôtel appartenant à un tiers dans une situation semblable. Il ne fait aucun doute que l’existence d’un grand hôtel bien tenu à Victoria contribue à l’affluence sur le réseau de l’appelante; il se peut que la composante ferroviaire et la composante hôtelière de l’appelante s’aident l’une l’autre, mais cela ne les empêche pas de constituer des activités ou des entreprises distinctes.

Dans le même ordre d’idées, la Cour suprême du Canada dit ce qui suit dans l’arrêt The Queen in the Right of the Province of Ontario v. Board of Transport Commissioners[11] (l’affaire GO Train) :

[traduction] Dans la présente affaire, la compétence constitutionnelle dépend de la nature de la ligne de chemin de fer et non de la nature d’un service en particulier qui y est offert. Le fait que, à certaines fins, le service de banlieue doive être assimilé à un service distinct n’en fait pas une ligne de chemin de fer distincte. Physiquement, les trains de banlieue font partie de l’exploitation globale de la voie sur laquelle ils circulent. Il est bien établi que le Parlement du Canada a compétence sur toute chose qui fait physiquement partie d’un chemin de fer soumis à sa compétence.

Comme nous l’avons vu, l’Office a estimé, à la majorité, que les installations de collecte et de traitement de Westcoast sont des entreprises distinctes de la canalisation principale de transport parce que « le traitement du gaz et le transport du gaz sont des activités ou services fondamentalement différents ». Avec égards, j’estime que l’Office fait fausse route, car le fait que différentes activités soient exercées ou que différents services soient fournis ne peut en soi être déterminant quant à savoir si on a affaire à une ou à plusieurs entreprises. Ce n’est pas la différence entre les activités et les services, mais l’interaction entre ceux-ci et le fait qu’ils relèvent ou non de la même direction et partagent ou non des objectifs communs qui permettent de déterminer s’ils font partie d’une entreprise unique. Voici ce que dit Hogg à ce sujet[12] :

[traduction] Qu’un propriétaire unique exerce différentes activités commerciales n’empêche pas de se demander si ses activités correspondent à plus d’une entreprise sur le plan constitutionnel. C’est la mesure dans laquelle les activités sont intégrées sur le plan fonctionnel ou commercial qui détermine si elles forment une seule entreprise ou non.

Plus important encore est le fait que l’avis de la majorité selon lequel la collecte et le traitement sont « des activités ou services fondamentalement différents » est simplement énoncé comme une conclusion et n’est pas appuyé de conclusions de fait détaillées qui permettraient de trancher rationnellement la question de savoir si on est en présence d’une seule entreprise ou de plusieurs. Heureusement, toutefois, l’ordonnance de renvoi, dont j’ai déjà cité un extrait, énonce les faits de façon méticuleuse et très détaillée. Le texte suivant, tiré de l’ordonnance, décrit très précisément les installations de collecte et de traitement ainsi que leurs liens les unes avec les autres et avec la canalisation principale de transport :

19. Le gaz brut que collecte Westcoast contient un mélange d’hydrocarbures (principalement du méthane) et d’autres substances telles que l’hydrogène sulfuré et le dioxyde de carbone. En général, les producteurs collectent le gaz sortant des puits dans des pipelines de petit diamètre et en enlèvent l’eau avant de l’envoyer dans les pipelines de transport de gaz brut de Westcoast. La déshydratation du gaz est une étape du traitement d’épuration qui facilite le transport en réduisant les risques de corrosion et la formation des hydrates qui peut gêner le déplacement du gaz dans les pipelines. Les pipelines de transport du gaz brut de Westcoast transportent le gaz brut des installations des producteurs jusqu’aux usines de traitement de Westcoast où l’on épure le gaz en le débarrassant de l’hydrogène sulfuré, du dioxyde de carbone et des autres substances. Les usines Fort Nelson, Taylor et Pine River sont également équipées pour la récupération du soufre extrait du gaz brut et garantissent ainsi le respect des normes environnementales en vigueur. De plus, étant donné que le gaz de la région de ressources Fort St. John contient des liquides d’hydrocarbures, l’usine McMahon, située à Taylor (C.-B.), est équipée d’installations de stabilisation, de fractionnement et de livraison pour traiter les liquides (propane, butane et condensats) extraits du gaz naturel au cours du traitement.

20. Le gaz brut qui contient de l’hydrogène sulfuré et du dioxyde de carbone est appelé gaz « acide » ou « gaz corrosif ». Le métal utilisé pour les canalisations dans lesquelles passe du gaz acide et pour le matériel connexe a des propriétés métallurgiques différentes du métal utilisé pour les canalisations qui servent au transport de gaz non acide. En outre, l’hydrogène sulfuré est toxique et son transport poserait un problème de sécurité et constituerait un risque inacceptable pour l’environnement. Il est donc nécessaire de débarrasser le gaz brut de ses composés acides avant de l’expédier vers les marchés. De plus, pour des raisons de sécurité et de protection de l’environnement, il est ensuite indispensable de transformer l’hydrogène sulfuré en soufre, lequel peut être stocké, puis livré aux propriétaires du gaz.

21. Le transport du gaz brut s’effectue de la même manière que celui du gaz épuré, c’est-à-dire par compression. Les installations de compression de Westcoast utilisées pour le gaz brut fonctionnent de la même manière que celles utilisées pour le gaz épuré.

22. Les canalisations de transport et les installations de traitement de gaz brut de Westcoast font partie d’un réseau d’installations situées en Colombie-Britannique et hors de la province. La plus grande partie de ces installations appartient à Westcoast. Elles permettent de transporter le gaz épuré vers les régions consommatrices à l’intérieur comme à l’extérieur de la province.

23. En termes de transport, le gaz épuré est l’équivalent du gaz non corrosif naturel, qui ne contient pas beaucoup d’hydrogène sulfuré, de dioxyde de carbone ou d’autres substances. Le gaz non corrosif est acheminé vers le marché sans traitement si ce n’est une déshydratation qui est effectuée à la tête de puits ou à proximité. Les installations pipelinières de Westcoast comprennent certaines canalisations de gaz non corrosif au sud-est de Fort St. John.

Circulation du gaz

24. Le gaz qui circule dans la canalisation principale de transport de Westcoast peut approvisionner aussi bien les marchés de l’Alberta à l’est que ceux de la Colombie-Britannique et des États-Unis au sud. Malgré la direction matérielle qu’il prend dans les canalisations, le gaz peut être « transporté » du point de vue « contractuel » par déplacement à partir de n’importe laquelle des quatre sources principales de production (c.-à-d. les régions de Fort Nelson, Fort St. John, Grizzly Valley et l’Alberta) jusqu’aux installations pipelinières de NOVA ou jusqu’à des points de livraison en Colombie-Britannique ou à la frontière internationale pour exportation vers les États-Unis. Le diagramme figurant à l’annexe 6 montre comment la circulation « contractuelle » du gaz se déroule entre les différentes régions de ressources et le réseau NOVA en Alberta. Les deux points de raccordement principaux qui facilitent la circulation matérielle et la circulation « contractuelle » du gaz sont les stations de compression no 1 et no 2.

25. La station de compression no 1 est située à l’usine McMahon de Taylor (C.-B.). Elle est le point de raccordement entre les canalisations de transport de gaz brut Fort St. John, l’usine McMahon, et les canalisations principales Boundary Lake (16 po) et Alberta (26 po), dans lesquelles est envoyé le gaz épuré de l’usine McMahon. La station no 1 se compose de sept compresseurs alternatifs d’une puissance individuelle de 2 000 chevaux (ch). Trois compresseurs compriment le gaz brut de l’usine McMahon, deux compresseurs compriment le gaz des canalisations principales Boundary Lake et Alberta et les deux compresseurs restants peuvent servir soit pour les canalisations de transport du gaz brut, soit pour les canalisations principales. Le fonctionnement et l’entretien de la station de compression no 1 sont effectués par le même personnel avec l’aide des mêmes installations de contrôle. En plus de cette station, Westcoast a une station auxiliaire (station auxiliaire no 1), équipée de deux compresseurs de 3 000 ch, qui comprime principalement le gaz brut de l’usine McMahon qui y arrive par les canalisations de transport du gaz brut Oak, Fort St. John et Milligan Peejay.

26. La station de compression no 2 est située à Willow Flats (C.-B.). Elle est le point de raccordement des canalisations principales Fort Nelson, Fort St. John et Pine River. On y comprime le gaz qui circule constamment dans la canalisation principale de transport de Westcoast. Un diagramme, qui montre la circulation du gaz à la station de compression no 2, figure à l’annexe 7.

Sources et destinations du gaz transporté par les installations de Westcoast

27. À part des petites quantités de gaz vendu par Westcoast, dans le cadre de contrats de vente hors-réseau, à des distributeurs locaux du nord-est de la Colombie-Britannique, tout le gaz qui est transporté grâce aux installations de Westcoast appartient à des producteurs, des courtiers, des distributeurs locaux, des usagers industriels et d’autres clients. Westcoast transporte donc ce gaz au nom de ses clients, en vertu de contrats de service. La collecte, le traitement, l’utilisation de la canalisation principale Nord ou de la canalisation principale Sud constituent des services différents de Westcoast et, en tant que tels, ils peuvent faire l’objet de contrats séparés ou peuvent être fournis dans le cadre d’un contrat unique.

28. Le gaz peut changer de mains à divers points, par ex. à la sortie de l’usine de traitement. Une partie peut posséder le gaz brut avant le traitement, tandis que d’autres parties peuvent être les propriétaires du gaz épuré et d’autres produits commercialisables extraits à l’usine de traitement. Les contrats de propriété du soufre et des liquides de gaz naturel extraits à l’usine de traitement peuvent être différents des contrats de propriété du gaz naturel épuré. Le gaz épuré peut être produit dans une usine n’appartenant pas à Westcoast et ensuite acheminé par la canalisation principale de Westcoast exactement de la même façon que s’il avait été produit dans une usine de traitement appartenant à Westcoast.

29. Le gaz épuré de sources albertaines reçu par Westcoast est transporté par les canalisations principales Nord et Sud de Westcoast, mais il ne passe pas par les installations de collecte ou de traitement de Westcoast.

Exploitation et entretien

30. Aux fins d’exploitation et d’entretien des canalisations et des installations de compression, c’est le même personnel qui assure l’exploitation des canalisations principales et des installations de transport du gaz brut de Westcoast. Les opérations pipelinières de la compagnie se déroulent dans deux régions géographiques, les districts Sud et Nord. Le personnel du district Sud veille au fonctionnement et à l’entretien de la canalisation principale Sud jusqu’à la station de compression no 2 inclusivement, ainsi que de la station de compression N5 située sur la canalisation principale Fort Nelson. Le personnel du district Nord veille au fonctionnement et à l’entretien de la canalisation principale Fort Nelson au nord de la station de compression no 2, des installations de transport du gaz brut Fort Nelson, de la canalisation principale Fort St. John, de la canalisation de transport du gaz brut Fort St. John, de la canalisation de 16 po Boundary Lake, de la canalisation principale Alberta de 26 po, de la canalisation principale Pine River et de la canalisation de transport du gaz brut Grizzly Valley. À cet égard, ces équipes, sous la supervision des mêmes cadres de Westcoast, travaillent parfois sur les canalisations de transport du gaz brut, et les installations de compression connexes, et parfois sur les canalisations principales et les installations de compression connexes. Des bureaux locaux, des parcs de stockage des tuyaux, des entrepôts, des ateliers de réparation des appareils de compression et des ateliers de mesure et d’entretien des pipelines communs desservent les canalisations principales et les canalisations de transport du gaz brut de Westcoast.

31. Le personnel qui veille au fonctionnement et à l’entretien des pipelines ou des installations de compression de Westcoast peut aussi travailler pour des filiales de Westcoast qui ne sont pas réglementées par l’Office. Par moments, certains employés s’occupent de l’exploitation ou de l’entretien des usines de traitement de Westcoast.

32. Le fonctionnement local des usines de traitement de Westcoast est assuré par le personnel de chaque usine, sous la supervision des cadres à Vancouver, sauf pour ce qui est de l’usine Aitken Creek, que des employés de Unocal Canada Ltd. font tourner sous la supervision de Westcoast.

33. Les cadres des bureaux de Vancouver dirigent et supervisent aussi le personnel de Westcoast qui participe à l’exploitation des installations de compagnies connexes. Ces installations ne sont pas réglementées par l’Office.

34. L’exploitation des pipelines et des usines de traitement de Westcoast repose sur un vaste système de télécommunication. Les circuits principaux comprenant quatre lignes partagées à temps complet ou voies téléphoniques sélectives relient toutes les stations de compression et les stations auxiliaires, les bureaux, les entrepôts et autres installations fixes de l’ensemble du réseau. Dans les régions où les installations de Westcoast se trouvent hors de portée raisonnable des systèmes de télécommunication existants, Westcoast possède et utilise un système radio multivoies point à point. Elle possède et utilise aussi un système de radiocommunications bilatérales pour les communications avec des stations mobiles le long des emprises et sur les routes contiguës pour l’ensemble du réseau. Toutes les stations de compression, les stations auxiliaires et les usines de traitement du gaz sont munies d’une station de base de radiocommunications bilatérales permettant de communiquer avec les véhicules dotées d’équipement radio mobile dans les zones et servant de systèmes de relève pour les voies téléphoniques. Le système de radiocommunications bilatérales est commandée à partir de Fort Nelson, Fort St. John, Prince George, Savona et Vancouver et, au besoin, il peut être relié à distance en un système de communication continue bout à bout.

35. Le personnel du Contrôle du gaz de Westcoast au Centre de contrôle du gaz à Vancouver surveille et contrôle l’acheminement du gaz par les canalisations de transport du gaz brut et les canalisations principales de Westcoast pour assurer que les expéditeurs peuvent livrer et prendre le gaz aux canalisations.

36. Le personnel du Contrôle du gaz surveille et contrôle les pressions dans les canalisations de transport du gaz brut et des canalisations principales pour assurer que les expéditeurs maintiennent un équilibre entre les arrivages de gaz dans les canalisations de transport du gaz brut et les prises de gaz dans les canalisations principales. Pour que l’exploitation des installations pipelinières se déroule de façon sûre et efficace, il est essentiel que les réceptions et les livraisons de gaz soient équilibrées.

37. Le Contrôle du gaz surveille les acheminements de gaz dans le réseau à l’aide d’un système d’acquisition et de contrôle des données (SCADA). Grâce au SCADA, ce personnel a accès à des renseignements en temps réel sur les pressions dans les conduites à des points critiques du réseau, à des paramètres d’exploitation importants pour les installations de compression et de traitement du gaz, ainsi qu’à des renseignements sur la qualité du gaz livré dans les pipelines. Il utilise aussi le SCADA pour démarrer, arrêter et contrôler à distance les installations de compression des canalisations de transport du gaz brut et des canalisations principales. Certaines installations de compression sont actionnées manuellement par le personnel local d’après les instructions du Contrôle du gaz.

38. Cette interdépendance et cette coordination sont une facette essentielle de l’industrie du gaz naturel. Les diverses installations de production, de transport et de distribution du gaz naturel jusqu’à livraison aux utilisateurs ultimes sont reliées matériellement et doivent fonctionner de façon coordonnée. Peu en importe l’appartenance, les installations doivent toujours fonctionner de façon interdépendante et coordonnée. [Recueil, aux pages 6 à 9.]

Je dois dire qu’il me semble impossible de prendre connaissance de cette description sans arriver à la conclusion que Westcoast n’exploite qu’une seule entreprise englobant les activités de collecte, de traitement et de transport du gaz naturel. Les faits suivants, plus particulièrement, semblent mener inéluctablement à cette conclusion :

(1) Westcoast n’est qu’un fournisseur de services; elle ne fait pas le commerce du gaz dont elle assure le transport;

(2) Le traitement est nécessaire pour faciliter le transport assuré par Westcoast. Plus particulièrement,

a) il rend le transport sur de longues distances plus facile et plus sûr pour ce qui concerne les installations pipelinières elles-mêmes et

b) il débarrasse le gaz brut des composés dont le transport, dans les régions habitées, serait inacceptable sur le plan de la sécurité et de la santé publiques;

3) Le traitement est un service offert uniquement à l’expéditeur qui a recours aux canalisations principales de transport de Westcoast; bien qu’une certaine quantité de gaz brut soit acheminée dans certaines des installations de traitement de Westcoast au moyen de canalisations de collecte possédées et exploitées par d’autres, la totalité du gaz combustible provenant de ces usines de traitement est acheminée par Westcoast;

4) Le gaz combustible qui est acheminé dans les canalisations principales de transport de Westcoast est de loin le principal composant (plus de 80 %) du gaz brut collecté et traité par Westcoast; le méthane n’est pas modifié[13] pendant le traitement, si ce n’est qu’il est débarrassé des liquides d’hydrocarbures, de l’hydrogène sulfuré et d’autres substances qui rendent son transport difficile ou périlleux;

5) Les installations de Westcoast sont non seulement reliées physiquement entre elles et interdépendantes, mais elles sont aussi parfois interchangeables; certains compresseurs peuvent être utilisés pour le gaz brut ou le gaz combustible dans les usines de traitement, et d’autres semblent être utilisés pour les deux;

6) Le gaz combustible peut être acheminé, sur une base contractuelle, à l’extérieur de la province à partir de toutes les usines de traitement de Westcoast, y compris celles qui s’approvisionnent en gaz brut au-delà des limites de la province;

7) Le même personnel est affecté aux installations de collecte et aux canalisations principales de transport et, tout comme le personnel des usines de traitement, il relève d’un même centre de direction et de contrôle des opérations,

8) Westcoast est propriétaire de toutes les installations en cause.

L’ouvrage ou l’entreprise de nature locale qui est contrôlé et exploité par une entreprise interprovinciale ou internationale de transport du même genre, ou conjointement avec elle, fait partie de cette dernière. Telle est la teneur de la décision rendue par le Conseil privé dans Luscar Collieries Ltd. v. McDonald[14] :

[traduction] Leurs Seigneuries conviennent, à l’instar du juge Duff, que le chemin de fer Mountain Park et l’embranchement Luscar, vu les circonstances de l’espèce, font partie d’un même réseau continu de chemins de fer exploité par la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada et qui relie la province de d’Alberta aux autres provinces canadiennes. Il est impossible, à leur avis, de dire d’une section quelconque de ce réseau qui ne s’étend pas jusqu’à la frontière de la province, qu’elle ne relie pas cette province à une autre. Si elle est reliée à une ligne qui est elle-même reliée à une ligne dans une autre province, alors elle constitue un maillon de la chaîne, et on peut dire à bon droit qu’elle relie la province dans laquelle elle est située avec d’autres provinces.

Dans la présente affaire, considérant le mode d’exploitation du chemin de fer, leurs Seigneuries sont d’avis qu’il s’agit en fait d’un chemin de fer reliant la province d’Alberta avec d’autres provinces et, par conséquent, visé par l’art. 92(10)a) de l’Acte de 1867. Il existe une liaison ferroviaire continue entre le point de l’embranchement Luscar le plus éloigné de son point de jonction avec l’embranchement Mountain Park et certaines parties du Canada situées à l’extérieur de l’Alberta. Si, en vertu des accords susmentionnés, la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada devait cesser d’exploiter l’embranchement Luscar, il se peut que, dans cette nouvelle situation, la question de savoir si le chemin de fer n’est plus visé par l’art. 92(10)a) doive être décidée, mais cette question ne se pose pas maintenant.

À mon avis cependant, les faits sont encore plus clairs en l’espèce que dans Luscar, parce que non seulement Westcoast exploite et contrôle les installations de collecte et de traitement, mais elle en est également propriétaire. Dans le raisonnement suivi par les membres majoritaires de l’Office et les observations formulées par les tenants de la compétence provinciale, on insiste beaucoup sur le fait indubitable que la propriété n’est pas, en elle-même, déterminante au chapitre de la compétence constitutionnelle. Il ne s’ensuit toutefois pas que la propriété, ainsi que le contrôle et la direction qui s’y rattachent, n’a aucune importance lorsqu’il s’agit de trancher la question de la compétence. Voici ce que dit à ce sujet, de façon plutôt détaillée, le juge en chef Dickson dans l’arrêt Central Western Railway, précité, aux pages 1131 à 1133 :

Un changement quant à la personne morale qui a le contrôle peut néanmoins s’avérer important lorsque cela entraîne des modifications dans l’exploitation de l’entreprise en question. Ce qui est crucial, ce n’est pas simplement de déterminer si une autre personne morale en a acquis le contrôle, mais bien de se demander si l’ouvrage en question peut à bon droit être qualifié d’interprovincial, compte tenu de la nature de ses opérations.

En l’espèce, les intimés soutiennent que, comme Central Western appartenait antérieurement au CN, sa vente à une compagnie provinciale ne saurait la soustraire à la compétence fédérale. De plus, ils allèguent à l’appui de l’argument selon lequel il existe un lien opérationnel important entre Central Western et CN que la voie de Central Western ne se raccorde qu’à celle de CN, et soulignent que la totalité des marchandises transportées par l’appelante sont livrées au CN en vue de leur acheminement. Dans le même ordre d’idées, les intimés font valoir que les différents contrats subsistant entre l’appelante et CN confirment l’existence d’un lien matériel entre les deux compagnies et établissent ainsi l’intégration fonctionnelle de ces dernières.

Les points soulevés par les intimés sont certes valables, mais ils ne sont pas non plus convaincants. À mon avis, si les facteurs mentionnés par les intimés révèlent l’existence de rapports commerciaux étroits entre les deux compagnies de chemin de fer, ils n’établissent pas que la voie de Central Western est exploitée par CN. Au contraire, la vente de cette voie a entraîné un changement fondamental dans la gestion de celle-ci. Cette différence se manifeste principalement dans la gestion quotidienne des affaires reliées à la voie en question. En effet, c’est l’appelante qui s’occupe de la répartition des wagons à grain le long de la voie et les wagons de CN ne circulent pas sur le chemin de fer Central Western. De plus, la compagnie ferroviaire fédérale ne participe pas à la gestion des baux afférents aux biens-fonds. Tout compte fait, CN n’exerce aucun contrôle sur l’exploitation du chemin de fer Central Western, tant et si bien qu’on peut difficilement considérer celui-ci comme un ouvrage ou une entreprise de compétence fédérale.

Les intimés invoquent toutefois plusieurs arrêts au soutien de leur argument sur ce point. Parmi ceux-ci figure l’arrêt Luscar Collieries Ltd. v. McDonald, [1927] A.C. 925 (Luscar), qui, à ce qu’on prétend, appuie l’argument suivant lequel Central Western n’échappe pas à la compétence fédérale du simple fait qu’il appartient à l’appelante. Il s’agissait dans l’affaire Luscar d’un court chemin de fer secondaire situé en Alberta. Ce chemin de fer appartenait à une compagnie de charbon provinciale, Luscar Collieries, qui l’avait également construit. C’était toutefois CN qui l’exploitait et il avait été construit en vue d’une vente future au CN. Dans ces circonstances, on a jugé que le chemin de fer relevait de la compétence fédérale, mais en rendant l’arrêt du Conseil privé, lord Warrington of Clyffe a paru fonder sa conclusion sur le fait que le chemin de fer local était exploité par la compagnie nationale. Il affirme, aux pp. 932 et 933 :

[traduction] Il est impossible, à leur avis [celui des lords juges], de dire d’une section quelconque de ce réseau qui ne s’étend pas jusqu’à la frontière de la province, qu’elle ne relie pas cette province à une autre. Si elle est reliée à une ligne qui est elle-même reliée à une ligne dans une autre province, alors elle constitue un maillon de la chaîne, et on peut dire à bon droit qu’elle relie la province dans laquelle elle est située avec d’autres provinces.

Dans la présente affaire, considérant le mode d’exploitation du chemin de fer, leurs Seigneuries sont d’avis qu’il s’agit en fait d’un chemin de fer reliant la province d’Alberta avec d’autres provinces et, par conséquent, visé par l’al. 92(10)a) de l’Acte de 1867… . Si, en vertu des accords susmentionnés, la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada devait cesser d’exploiter l’embranchement Luscar, il se peut que, dans cette nouvelle situation, la question de savoir si le chemin de fer n’est plus visé par l’al. 92(10)a) doive être décidée, mais cette question ne se pose pas maintenant.

Ainsi que l’indique ce passage, le Conseil privé dans l’arrêt Luscar a tenu pour déterminante l’exploitation de la ligne de chemin de fer. Cette interprétation de l’arrêt a été appuyée par notre Cour dans l’arrêt British Columbia Electric Railway, précité, aux pp. 169 et 170. L’arrêt Luscar ne tranche cependant pas la question même dont nous sommes saisis en l’espèce, c’est-à-dire celle de savoir si le transfert de la propriété du chemin de fer pouvait opérer un changement de compétence. Bien qu’il y ait un lien entre l’entreprise de l’appelante et CN, il diffère de celui qui existait dans l’affaire Luscar. La différence la plus évidente est que le chemin de fer en cause dans l’affaire Luscar, quoique appartenant à une compagnie provinciale, était exploité conjointement avec l’ouvrage ou l’entreprise à caractère fédéral. Tel n’est pas le cas en l’espèce. CN n’exploite pas Central Western et n’envisage pas d’en prendre la direction ni ne s’attend à le faire, contrairement à ce qui s’est passé dans Luscar. [Souligné dans l’original.]

Dans l’affaire Central Western Railway, le chemin de fer était passé des mains d’une société interprovinciale de compétence fédérale à celles d’une société de nature purement locale. Ainsi, le changement de propriétaire a fait en sorte que l’entreprise a cessé de relever de la compétence fédérale pour être assujettie à la compétence provinciale, ce qui suffit à expliquer[15] pourquoi les installations de collecte et de traitement qui n’appartiennent pas à Westcoast n’ont jamais relevé de la compétence de l’Office. La présente espèce ne met certes pas en cause un transfert de propriété, mais elle présente des analogies avec les faits dans l’affaire Central Western Railway avant que la vente n’ait lieu.

Notre Cour a eu plus d’une fois l’occasion d’analyser l’importance de la propriété (assortie, bien sûr, dans tous les cas, de la direction et du contrôle). Dans l’arrêt Dome Petroleum Ltd. c. Office national de l’énergie[16], le juge Mahoney, J.C.A., dit ce qui suit au nom de la Cour :

Tel que je le conçois, le pipe-line de l’entreprise en participation, le Cochin, est une entreprise ayant pour objet le transport des produits qu’elle est autorisée à acheminer de Fort Saskatchewan à Sarnia ainsi qu’aux points intermédiaires. Il faut, pour assurer le mouvement des produits qui y transitent, qu’existent des moyens de retirer ceux-ci de la canalisation; sans cela, il ne peut y avoir transport. Le Comité judiciaire a fait remarquer dans Canadian Pacific Rly. v. A.G. for British Columbia, à la p. 144 :

« [traduction] Dans l’hypothèse où l’appelante a choisi d’exploiter un hôtel pour le seul ou pour le principal bénéfice des voyageurs utilisant son réseau, il est possible que cet hôtel fasse partie de son entreprise de chemin de fer. Fournir repas et repos aux voyageurs empruntant son réseau peut constituer, leurs Seigneuries n’en doutent pas, une fonction de l’entreprise de l’appelante, que ces services soient offerts dans les trains ou dans les gares; ils peuvent aussi l’être dans un hôtel. Toutefois, l’hôtel Empress est d’un type nettement différent. »

Le lien existant entre les cavités d’emmagasinage et le Cochin diffère de façon marquée de celui qui existait entre l’hôtel Empress et le Canadien Pacifique.

Les installations du terminal d’un pipe-line sont fournies, quel qu’en soit le fournisseur, pour le seul bénéfice des expéditeurs de produits, peu importe la destination finale de ceux-ci. À mon avis, lorsqu’elles sont fournies par le propriétaire de l’entreprise de transport, elles font partie de cette entreprise. C’est le cas en l’espèce. Les cavités d’emmagasinage de l’entreprise en participation sont un élément essentiel du réseau Cochin et en font partie intégrante. [Non souligné dans l’original.]

De même, dans Office national de l’énergie (Re)[17], notre Cour était appelée à se prononcer relativement à un pipeline de « dérivation » construit par un consommateur local de gaz afin de raccorder ses installations directement au réseau interprovincial de Trans-Canada Pipelines Ltd. La Cour a tranché en faveur de la compétence provinciale, mais le juge MacGuigan, J.C.A. a clairement laissé entendre que l’issue aurait été différente si le pipeline de dérivation avait été construit et exploité par le réseau interprovincial :

En fait, pour pouvoir établir une analogie convaincante entre le renvoi actuel et l’arrêt Winner, il faudrait que TCPL ait déposé une demande visant la construction et l’exploitation du pipeline de dérivation pour son propre compte. En l’absence d’une telle situation, j’estime que le pipeline de dérivation doit satisfaire au critère du lien nécessaire pour que la compétence fédérale se trouve établie suivant l’alinéa 92(10)a).

Enfin, le fait que le gaz transporté grâce aux canalisations interprovinciales et internationales de Westcoast soit à plus de 80 % le même que celui acheminé dans les installations de collecte et que les usines de traitement en retirent simplement les composés qui rendent le transport difficile ou périlleux, rend la présente affaire analogue, bien que les faits qui la sous-tendent soient plus concluants, à la situation que notre Cour a examinée dans Flamborough c. Office national de l’énergie, Interprovincial Pipe Line Ltd. et Canada[18] :

La preuve établit sans conteste que les produits liquides extraits du gaz naturel (N.G.L.) sont composés de 35 % de propane, le reste étant composé de butane et de condensat. Le procédé de fractionnement effectué aux installations de Dome Petroleum n’est qu’un procédé de séparation. Il s’agit d’un procédé non chimique et le propane ne subit aucun changement chimique. Au terme du fractionnement, le propane pur n’est ni plus ni moins que le propane qui se trouvait dans le réseau et dont on a augmenté la concentration en fonction des besoins du marché, en retirant les substances avec lesquelles il était mélangé. Il demeure la substance qu’Interprovincial avait déjà transportée par pipeline depuis les provinces des Prairies jusqu’à Sarnia, et qu’elle est habilitée à acheminer par pipeline plus loin vers l’est.

À mon avis, le fait que Westcoast cumule propriété, direction et contrôle, de même que les autres facteurs dont je fais mention précédemment, mènent inéluctablement à la conclusion que Westcoast est une entreprise unique de transport interprovincial et international de gaz naturel. Elle relève donc de la compétence fédérale par le jeu des articles 91(29) et 92(10)a).

Voilà qui suffit à trancher la question constitutionnelle. Il importe cependant de faire état, par souci d’exhaustivité, de certaines questions soulevées en plaidoirie. Il s’agit respectivement de l’effet de l’article 92A de la Loi constitutionnelle de 1867, précitée, de l’importance du fait que certaines des installations pipelinières de collecte de Westcoast s’étendent au-delà des limites de la province et de la question de savoir s’il a été satisfait au deuxième volet du critère dégagé dans l’arrêt Central Western Railway. J’examinerai maintenant ces questions.

L’article 92A de la Loi constitutionnelle de 1867

Ajouté à la Loi constitutionnelle de 1867 lors du rapatriement de la Constitution, ce texte doit être interprété en fonction de la définition qui figure à la sixième annexe. En voici le libellé :

92A. (1) La législature de chaque province a compétence exclusive pour légiférer dans les domaines suivants :

a) prospection des ressources naturelles non renouvelables de la province;

b) exploitation, conservation et gestion des ressources naturelles non renouvelables et des ressources forestières de la province, y compris leur rythme de production primaire;

c) aménagement, conservation et gestion des emplacements et des installations de la province destinés à la production d’énergie électrique.

(2) La législature de chaque province a compétence pour légiférer en ce qui concerne l’exportation, hors de la province, à destination d’une autre partie du Canada, de la production primaire tirée des ressources naturelles non renouvelables et des ressources forestières de la province, ainsi que de la production d’énergie électrique de la province, sous réserve de ne pas adopter de lois autorisant ou prévoyant des disparités de prix ou des disparités dans les exportations destinées à une autre partie du Canada.

(3) Le paragraphe (2) ne porte pas atteinte au pouvoir du Parlement de légiférer dans les domaines visés à ce paragraphe, les dispositions d’une loi du Parlement adoptée dans ces domaines l’emportant sur les dispositions incompatibles d’une loi provinciale.

(4) La législature de chaque province a compétence pour prélever des sommes d’argent par tout mode ou système de taxation :

a) des ressources naturelles non renouvelables et des ressources forestières de la province, ainsi que de la production primaire qui en est tirée;

b) des emplacements et des installations de la province destinés à la production d’énergie électrique, ainsi que de cette production même.

Cette compétence peut s’exercer indépendamment du fait que la production en cause soit ou non, en totalité ou en partie, exportée hors de la province, mais les lois adoptées dans ces domaines ne peuvent autoriser ou prévoir une taxation qui établisse une distinction entre la production exportée à destination d’une autre partie du Canada et la production non exportée hors de la province.

(5) L’expression « production primaire » a le sens qui lui est donné dans la sixième annexe.

(6) Les paragraphes (1) à (5) ne portent pas atteinte aux pouvoirs ou droits détenus par la législature ou le gouvernement d’une province lors de l’entrée en vigueur du présent article.

SIXIÈME ANNEXE

Production primaire tirée des ressources naturelles non

1. Pour l’application de l’article 92A :

a) on entend par production primaire tirée d’une ressource naturelle non renouvelable :

(i) soit le produit qui se présente sous la même forme que lors de son extraction du milieu naturel,

(ii) soit le produit non manufacturé de la transformation, du raffinage ou de l’affinage d’une ressource, à l’exception du produit du raffinage du pétrole brut, du raffinage du pétrole brut lourd amélioré, du raffinage des gaz ou des liquides dérivés du charbon ou du raffinage d’un équivalent synthétique du pétrole brut;

b) on entend par production primaire tirée d’une ressource forestière la production constituée de billots, de poteaux, de bois d’œuvre, de copeaux, de sciure ou d’autre produit primaire du bois, ou de pâte de bois, à l’exception d’un produit manufacturé en bois

Comme l’énonce clairement la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Ontario Hydro c. Ontario (Commission des relations de travail)[19], cet article s’applique de pair avec les autres dispositions constitutionnelles, et les pouvoirs qu’il accorde aux législatures provinciales sont, comme tous les autres pouvoirs législatifs des provinces, subordonnés au pouvoir déclaratoire fédéral prévu à l’article 92(10)c). Aussi, même si l’examen des pouvoirs fédéraux aux termes de l’article 92(10)a) doit tenir compte des différents pouvoirs exclusifs accordés aux provinces, y compris ceux énumérés à l’article 92A, j’estime que cette dernière disposition ne saurait avoir préséance, de quelque manière, sur les pouvoirs du Parlement du Canada.

Aux fins de la présente affaire, la partie de l’article 92A pertinente est l’alinéa 92A(1)b), lequel porte sur l’exploitation, la conservation et la gestion des ressources naturelles non renouvelables et sur leur rythme de production primaire. Même en me fondant sur l’interprétation la plus large et la plus généreuse qui soit, je ne peux conclure que cette disposition empêche l’exercice de la compétence fédérale à l’égard d’une entreprise de transport qui reçoit du gaz brut des producteurs, une fois qu’il a été extrait du sous-sol, déshydraté et acheminé aux points de livraison. Cette compétence fédérale est parfaitement compatible avec l’exercice des pouvoirs conférés aux provinces à l’article 92A.

Prolongement des canalisations de collecte au-delà des limites de la province

On se souviendra que la majorité des membres de l’Office n’a pas examiné cette question, car elle estimait que les installations de collecte de Westcoast dans la région de Fort St. John « ne form[ai]ent pas partie de la même entreprise » que les installations de collecte de Westcoast qui se prolongeaient jusqu’en Alberta, au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest.

Avec égards, ce raisonnement me semble assez inusité. C’est une chose que d’affirmer, comme le fait l’Office, que la collecte et le traitement constituent des entreprises distinctes du transport au moyen de la canalisation principale. C’en est tout à fait une autre que d’affirmer que les activités de collecte exercées par Westcoast dans une partie de la Colombie-Britannique constituent une entreprise distincte par rapport aux mêmes activités exercées dans le cadre d’une gestion et d’une direction communes par la même société dans une autre partie de cette province. Je ne vois rien dans la jurisprudence qui puisse justifier un tel point de vue.

Par conséquent, je suis d’avis que même si les activités de collecte de Westcoast constituaient une entreprise distincte par rapport aux activités de traitement et de transport au moyen de la canalisation principale (un point de vue que je ne crois pas fondé, pour les motifs donnés précédemment), cette entreprise, y compris les activités exercées dans les régions de Fort St. John et de la vallée Grizzly, doit être considérée comme étant interprovinciale, car le transport s’effectue de façon régulière et ininterrompue au-delà des limites de la province. Que seulement une partie relativement infime des installations de collecte de Westcoast se prolonge au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest et en Alberta n’a non plus aucune importance sur le plan constitutionnel. Dans l’arrêt Ottawa-Carleton Regional Transit Commission and Amalgamated Transit Union, Local 279 et al., Re[20], le juge Cory (qui était alors juge de la Cour d’appel de l’Ontario) dit ce qui suit :

[traduction] L’appelante a fait valoir que la faible étendue de l’exploitation extraprovinciale, par rapport à l’ensemble de l’exploitation, devait suffire, en soi, pour soustraire l’entreprise à l’application de l’art. 92(10)a). On ne saurait faire droit à cette prétention. Lorsque l’exploitation extraprovinciale est régulière et ininterrompue, comme c’est le cas en l’espèce, l’entreprise est assujettie à la disposition.

Plus loin, dans la même décision, le juge Cory ajoute, à la page 570 :

[traduction] La méthode quantitative comporte des difficultés inhérentes. Par exemple, la question se pose toujours de savoir où il convient de tracer la ligne de démarcation dans un cas en particulier. Le rapport critique doit-il correspondre à 80-20, à 90-10, à 95-5 ou à 60-40? Si l’on retient la méthode quantitative, une très grande société ayant une activité extraprovinciale minime, mais régulière, représentant 4 % de l’ensemble de ses activités devrait-elle appartenir à une autre catégorie que celle dont fait partie une petite entreprise ayant le même niveau d’activités extraprovinciales, lesquelles, en raison des dimensions moindres de l’entreprise, représentent 50 % de l’exploitation globale? Les relations de travail de l’entreprise plus modeste devraient-elles être régies par un organisme différent par rapport à celles de l’entreprise plus importante? À mon avis, il n’est pas opportun d’avoir recours à la méthode quantitative. Pour trancher la question fondamentale de savoir si l’entreprise relie des provinces, il convient plutôt de se fonder sur le caractère ininterrompu et régulier des activités de liaison ou de l’activité extraprovinciale.

À mon avis, l’Office a également commis une erreur à cet égard. À tout le moins, la totalité des installations de collecte de Westcoast relèvent de la compétence fédérale.

Le deuxième volet du critère dégagé dans l’arrêt Central Western Railway

Comme je suis arrivé à la conclusion que les installations de Westcoast ne constituent qu’une seule entreprise assujettie à la compétence fédérale, il est inutile que je me penche sur le second volet du critère dégagé dans l’arrêt Central Western Railway aux termes duquel il convient de se demander si une entreprise qui n’est pas en soi de caractère fédéral le devient lorsqu’elle est essentielle à une entreprise fédérale principale et qu’elle fait partie intégrante de celle-ci. Dans l’arrêt Central Western Railway, précité, le juge en chef Dickson, citant les propos qu’il avait tenus antérieurement dans l’arrêt Northern Telecom Ltée c. Travailleurs en communication du Canada[21], résume comme suit cet élément du critère, à la page 1139 :

Premièrement, il faut examiner l’exploitation principale de l’entreprise fédérale. On étudie ensuite l’exploitation accessoire pour laquelle les employés en question travaillent. En dernier lieu on parvient à une conclusion sur le lien entre cette exploitation et la principale entreprise fédérale, ce lien nécessaire étant indifféremment qualifié « fondamental », « essentiel » ou « vital ».

Toutefois, lorsque, comme en l’espèce, on conclut à l’existence d’une entreprise unique, il n’est pas nécessaire, selon moi, que chacune des composantes de cette entreprise soit également « fondamentale » ou « essentielle » à celle-ci. Autrement dit, il n’est pas nécessaire que l’entreprise fédérale elle-même dépende de l’existence et de l’exploitation de chacune de ses composantes. Ces questions ne sont pertinentes qu’aux fins du second volet du critère dégagé dans l’arrêt Central Western Railway.

Une entreprise peut fort bien englober des activités et des services qui ne lui sont ni fondamentaux ni essentiels. Ces activités et services font néanmoins partie de la même entreprise dans la mesure où ils font partie intégrante de celle-ci sur le plan du fonctionnement et de l’exploitation et qu’il existe un objectif commun suffisant. Nul ne prétend qu’un chemin de fer ne pourrait fonctionner s’il n’exploitait pas de restaurant dans les gares, mais comme l’objectif de tels restaurants est d’assurer le confort des passagers et qu’il s’agit également de l’un des objectifs de l’exploitation d’un train comme telle, les restaurants font partie de la même entreprise. Ainsi, les usines de traitement de Westcoast, qui offrent aux expéditeurs de gaz brut un service qui permet l’acheminement de leur produit vers les marchés, font partie de son entreprise de transport aux fins du premier volet du critère de l’arrêt Central Western Railway.

Il s’ensuit, selon moi, que la conclusion selon laquelle les installations de collecte et de traitement que possède et qu’exploite Westcoast font partie de son entreprise de transport n’implique pas nécessairement que les activités de collecte et de traitement exercées par d’autres sont fondamentales ou essentielles à l’entreprise de Westcoast au point de devenir elles-mêmes assujetties à la compétence fédérale. Mais il s’agit d’une toute autre question, et je m’abstiens de me prononcer à ce sujet.

La question de l’interprétation législative

Reste donc à trancher la question de l’interprétation du terme « pipeline » défini à l’article 2 de la Loi sur l’Office national de l’énergie.

Par souci de commodité, je reprends le libellé de la définition :

2.

« pipeline » Canalisation servant ou destinée à servir au transport du pétrole ou du gaz, seul ou avec un autre produit, et reliant une province et une ou plusieurs autres provinces, ou s’étendant au-delà des limites d’une province ou de la zone extracôtière, au sens de l’article 123, y compris les branchements, extensions, citernes, réservoirs, installations de stockage ou de chargement, pompes, rampes de changement, compresseurs, systèmes de communication entre stations par téléphone, télégraphe ou radio, ainsi que les ouvrages, ou autres biens immeubles ou meubles, connexes.

La question est donc de savoir si cette définition comprend les usines de traitement de Westcoast.

À mon avis, les conclusions tirées sur le plan constitutionnel permettent de répondre en partie à la question; une fois qu’il est établi que Westcoast constitue une entreprise unique, il me semble en effet beaucoup plus facile de considérer que les usines de traitement font partie intégrante des pipelines auxquels elles sont reliées de part et d’autre. En fait, le seul argument substantiel avancé à l’effet contraire est que l’énumération des installations dans la deuxième partie de la définition devrait circonscrire la portée des termes généraux employés à la fin.

Je ne suis pas d’accord. La deuxième partie de la définition, qui revêt un caractère inclusif, ne devrait pas être interprétée comme restreignant la portée des termes plus généraux qui la précèdent et de ceux qui la suivent. Ces termes sont en soi très généraux et tout à fait aptes à englober les usines de traitement. De plus, il me semble exister une bonne raison d’ordre constitutionnel pour laquelle les usines de traitement n’auraient pas pu figurer dans l’énumération. En effet, ces usines constituent habituellement des ouvrages de nature locale soumis à la compétence provinciale. Elles ne sont assujetties à la compétence fédérale que lorsqu’elles font partie d’une entreprise fédérale de transport interprovincial. Il serait inusité que le législateur inclue dans la définition des ouvrages qui ne sont habituellement pas soumis à la compétence fédérale et qui ne le deviennent qu’en raison de facteurs étrangers à la loi.

J’estime que l’Office a compétence à l’égard des usines de traitement visées en l’espèce.

Dispositif

Je suis d’avis d’accueillir l’appel (numéro du greffe A-545-95), d’annuler la décision de l’Office déclinant toute compétence et de renvoyer l’affaire à l’Office afin qu’il se prononce sur le bien-fondé de la demande.

En ce qui concerne le renvoi portant le numéro du greffe A-606-95, je suis d’avis de répondre aux deux questions par l’affirmative.

Aucune raison spéciale n’ayant été avancée, je ne rendrais aucune ordonnance concernant les dépens.

Le juge Pratte, J.C.A. : Je souscris à ces motifs.

Le juge Stone, J.C.A. : Je souscris à ces motifs.



[1] L.R.C. (1985), ch. F-7 [édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5].

[2] L.R.C. (1985), ch. N-7.

[3] Le tableau est une version simplifiée des renseignements qui figurent à la p. 968 du dossier d’appel.

[4] La compétence fédérale à l’égard de l’agrandissement projeté des installations de la principale canalisation de transport en aval de l’usine Aitken Creek (tout comme sur les installations analogues en aval de l’usine Pine River dans le cadre du projet Grizzly Valley) n’était pas et n’a pas été remise en cause à une étape ou à une autre des procédures. Cependant, ces installations correspondent à une partie relativement peu importante des deux agrandissements projetés.

[5] 30 & 31 Vict., ch. 3 (R.-U.) [mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1 [L.R.C. (1985), appendice II, no 5]].

[6] Ces deux parties ont tenté de faire annuler le renvoi sur la base de prétendus vices de procédure. La Cour a rejeté leurs requêtes à l’audience le jour où elle a commencé à entendre le présent appel.

[7] [1990] 3 R.C.S. 1112, aux p. 1124 et 1125.

[8] [1954] A.C. 541 (P.C.), lord Porter, aux p. 581 et 582.

[9] [1950] A.C. 122 (P.C.), lord Reid, à la p. 143.

[10] [1905] A.C. 52 (P.C.), lord Macnaghten, à la p. 59.

[11] [1968] R.C.S. 118, à la p. 127.

[12] Peter W. Hogg, Constitutional Law of Canada, 3e éd., (édition augmentée), Scarborough (Ontario) : Carswell, 1992, à la p. 22-11.

[13] L’hydrogène sulfuré subit une modification importante lorsqu’il est transformé en soufre, ce qui n’a lieu qu’une fois qu’il est séparé du gaz combustible.

[14] [1927] A.C. 925, lord Warrington of Clyffe, aux p. 932 et 933.

[15] Si une explication est nécessaire; l’omission de l’exercer dans le passé a très peu d’importance aux fins de déterminer si la compétence existe.

[16] (1987), 73 N.R. 135 (C.A.F.), aux p. 139 et 140.

[17] [1988] 2 C.F. 196(C.A.), à la p. 218.

[18] (1984), 55 N.R. 95 (C.A.F.), le juge d’appel Mahoney, aux p. 102 et 103.

[19] [1993] 3 R.C.S. 327.

[20] (1983), 44 O.R. (2d) 560 (C.A.), à la p. 568.

[21] [1980] 1 R.C.S. 115 (Northern Telecom no 1).

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