Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

S. Thomas, D. Frost et D. Carlson (Demandeurs)
c.
Le procureur général du Canada (Intime')
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, le juge Thurlow et le juge suppléant Smith—Toronto, les 22, 23 et 24 février; Ottawa, le 24 février 1972.
Fonction publique—Examen judiciaire—Compétence de la Commission des relations de travail dans la Fonction publi- que—Convention collective entre les employés des postes et le Gouvernement—Affectation des itinéraires postaux aux facteurs—Droit d'employer des employés intérimaires sur les itinéraires sans titulaire—Interprétation de la convention— Décision de l'arbitre renversée par la Commission—Examen par la Cour fédérale—Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-35, art. 23—Loi sur la Cour fédérale, art. 28.
Une convention collective entre un syndicat des employés des postes et le Gouvernement du Canada, établie en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, prévoyait, entre autres, en cas d'absence des facteurs, l'affectation de leurs itinéraires aux facteurs surveillants. Elle ne prévoyait rien pour le cas le nombre de facteurs surveillants serait insuffisant. Trois facteurs présentèrent des griefs soutenant que l'employeur avait violé la convention en utilisant des employés intérimaires pour effectuer les itinéraires temporairement sans titulaire par suite de l'absence pour maladie des facteurs titulaires au lieu de faire appel à d'autres facteurs en heures supplémen- taires à la fin de leur propre journée de travail sur d'autres itinéraires. L'arbitre a fait droit à leurs griefs mais sa sentence fut infirmée par la Commission des relations de travail dans la Fonction publique à qui l'employeur avait renvoyé la question en vertu de l'article 23 de la Loi. Cet article prévoit le renvoi à la Commission «d'une question de droit ou de compétence» qui «se pose à propos d'une affaire qui a été renvoyée à ... un arbitre, en conformité de la présente loi». En vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, les facteurs ont demandé l'annulation de la déci- sion de la Commission.
Arrêt: 1) rejet de la demande. Rien dans la convention collective n'accorde à un employé des postes le droit de faire retarder le travail du service postal pour qu'il puisse le faire à la fin de ses propres heures de travail.
2) La Commission des relations de travail dans la Fonc- tion publique a une compétence illimitée en vertu de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique pour juger toute question de droit, y compris l'interprétation d'une convention, qui se pose à propos d'une affaire renvoyée à un arbitre en vertu de la Loi.
DEMANDE d'examen judiciaire d'une déci- sion de la Commission des relations de travail dans la Fonction publique.
W. Z. Estey, c.r. et M. L. Levinson pour les demandeurs.
C. R. O. Munro, c.r. et P. Y. Delage pour l'intimé.
LE JUGE EN CHEF JACKETT (oralement)—Il s'agit en l'espèce d'une demande adressée à la Cour d'appel fédérale en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, sollicitant l'examen et l'annulation d'une décision de la Commission des relations de travail dans la Fonction publi- que en date du 7 janvier 1972, qui a annulé une décision du 9 octobre 1971 de l'arbitre, M. H. Arthurs, statuant sur des griefs présentés par les demandeurs.
Les décisions en question ont été rendues en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, promulguée en premier lieu sous le chapitre 72 des Statuts du Canada de 1966-1967 et qui, depuis le 15 juillet 1971, est devenue le chapitre P-35 des Statuts révisés de 1970.
La Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique prévoit des négociations col lectives entre les employés de la Fonction publi- que du Canada et le Gouvernement du Canada en qualité d'employeur. Les 89 premiers articles de la Loi traitent principalement de certains droits et interdictions fondamentaux et créent des mécanismes destinés à réaliser des conven tions collectives ou à obtenir des décisions arbi- trales concernant les conditions d'emploi et les problèmes connexes. Au coeur de ces disposi tions législatives, il est créé une Commission connue sous le nom de Commission des rela tions de travail dans la Fonction publique, qui est chargée de l'application générale de la Loi ainsi que de différentes fonctions importantes et précises. En outre, il existe un tribunal, appelé Tribunal d'arbitrage de la Fonction publique, qui fonctionne dans certains cas la Loi prévoit l'arbitrage lorsque les négociations collectives n'ont pas abouti à une convention collective. La partie IV de la Loi sur les rela tions de travail dans la Fonction publique, qui s'intitule «Griefs», prévoit une procédure de présentation d'un «grief» lorsqu'un employé s'estime lésé, notamment par «l'interprétation ou l'application à son égard ... d'une disposi tion d'une convention collective ...». (Article
90(1)). En outre, lorsqu'un grief n'a pas été réglé d'une manière satisfaisante pour l'employé qui le présentait, la partie IV l'autorise à «ren- voyer le grief à l'arbitrage». (Article 91(1)). Un grief de ce genre est renvoyé à un conseil d'arbitrage ou à un «arbitre». (Article 94).
Une convention collective a été signée le 16 octobre 1970 entre le Conseil des unions des Postes et le Gouvernement du Canada en ce qui concerne les employés des postes visés par le certificat d'accréditation. (Articles 3.01 et 3.02). Il est précisé dans cette convention collective qu'elle s'applique aux facteurs ainsi qu'à un certain nombre d'autres employés des postes. La convention prévoit de manière assez détail- lée la procédure de règlement des griefs envisa gée par la Loi ainsi que la possibilité de porter les griefs à «l'arbitrage» (article 9.25), bien qu'elle ne prévoie pas le mécanisme de cet arbitrage. La convention contient en outre des dispositions détaillées concernant de nombreux sujets, notamment l'ancienneté, les affectations, les heures de travail, les heures supplémentai- res, les jours fériés et les congés.
Avant d'en venir aux «griefs» des deman- deurs, qui ont institué les présentes procédures, il est opportun de se reporter à certaines des dispositions de la convention collective qui s'appliquent aux facteurs. Il est nécessaire de se mettre quelque peu au courant de ces disposi tions pour apprécier la légitimité des réclama- tions des demandeurs, réellement contenues dans les griefs.
La première partie de l'article 10 de la con vention collective traite de l'ancienneté pour la catégorie des facteurs. Il devient évident qu'il existe ici deux groupes de facteurs, savoir, les facteurs à proprement parler et un groupe plus chevronné appelé «facteurs surveillants (relève)» qui sont payés à des taux supérieurs et qui ont des «fonctions de remplacement en cas de congés annuels ou de congés de maladie». L'article 10 prévoit (10.01 et 10.02) des règles permettant de déterminer l'ancienneté à l'inté- rieur de chaque groupe, selon les dates de nomi nation, et expose (10.03) que l'ancienneté sert de base de référence «pour satisfaire les préfé- rences des employés» dans les domaines suivants:
a) choix des affectations conformément aux articles 13, 14 et 15,
b) choix de la période de congé annuel con- formément à l'article 21, clauses 21.14 et 21.15, et
c) choix des remplacements pour les facteurs à qui on a accordé une autorisation d'absence de 15 jours ou plus.
Les articles 13, 14 et 15 contiennent des règles détaillées concernant l'affectation des «itinérai- res» aux facteurs ordinaires et des «groupes d'itinéraires» aux facteurs surveillants (relève), compte tenu de l'ancienneté. L'article 21 (21.14 et 21.15) fixe les règles d'octroi des congés annuels en fonction de l'ancienneté. L'article 10 lui-même (10.04) contient des règles sur le choix du «remplacement» des facteurs qui ont été autorisés à s'absenter. Selon la première de ces règles, en cas «d'absence» de moins de 15 jours, l'employeur «désigne» des facteurs sur- veillants (relève) disponibles. Selon la deuxième, dans le cas «d'absence autorisée» d'une durée de 15 jours à 2 mois et 15 jours (autres que des congés annuels), les facteurs surveillants (relève) qui n'ont pas choisi d'affec- tation à des fonctions de remplacement pour congés annuels, «se verront offrir» une affecta tion sur la base de l'ancienneté. Selon la troi- sième, dans le cas «des absences autorisées» au delà de 2 mois et 15 jours, les affectations «se font» tout d'abord aux «facteurs sans affecta tion selon l'ancienneté», ensuite aux «facteurs surveillants (relève) disponibles» et enfin «par d'autres moyens». Selon la quatrième et der- nière règle concernant les «remplacements» dans le cas des absences pour congé annuel de 15 jours ou plus, les facteurs surveillants (relève) exécutant des fonctions de remplace- ment pour congés annuels «choisissent les affectations» sur la base de l'ancienneté.
[A ce stade, il peut être utile d'essayer de résumer la situation qu'envisagent les disposi tions que je viens juste de rapporter, ainsi qu'elle m'apparaît. La distribution du courrier est répartie en «itinéraires», chacun étant affecté, sans doute pour une période indéfinie, à un facteur. Pendant les congés annuels ou les congés de maladie, le travail est effectué par un facteur surveillant (relève) et à cette fin, les «itinéraires» sont réunis en «groupes d'itinérai-
res», dont chacun est affecté à un facteur sur- veillant (relève). En conséquence, chaque itiné- raire et chaque groupe d'itinéraire étant normalement affectés, il y aura toujours un facteur pour distribuer le courrier de chaque itinéraire, soit le facteur qui y est affecté, soit le facteur surveillant (relève) chargé du groupe d'itinéraires en question, selon que ce facteur est de service, en congé annuel ou en congé de maladie. Toutefois, il peut y avoir des circons- tances dans lesquelles cette organisation de base ne convient pas; c'est pourquoi l'article 10 (10.04) contient des règles spéciales pour les circonstances extraordinaires. En règle géné- rale, les règles de l'article 10 semblent exiger que
a) en cas d'absences de moins de 15 jours quelle qu'en soit la raison,
b) en cas d'absences pour congés annuels, et
c) en cas d'absences autorisées jusqu'à 2 mois et 15 jours,
les remplacements doivent être assurés par les facteurs surveillants (relève), et ces règles ne prévoient pas ce qu'il faut faire pour les rempla- cements dans le cas il n'y a pas suffisam- ment de facteurs surveillants (relève) disponi- bles pour assurer tous les services. Par contre, en cas d'absences autorisées autres que les absences pour congés annuels de plus de deux mois et 15 jours, ce sont d'abord «les facteurs sans affectation», par ordre d'ancienneté, qui doivent être affectés, ensuite «les facteurs sur- veillants (relève) disponibles» et, si ces services sont épuisés, les affectations se font «par d'au- tres moyens».]
A la suite des dispositions traitant spéciale- ment des affectations d'emploi selon l'ancien- neté, on trouve un article traitant des heures normales de travail (article 16) et un article traitant des indemnités dues pour les heures supplémentaires (article 17). La règle de base porte que la semaine de travail normale est de 5 jours de 8 heures chacun (16.01a)) et que les «heures supplémentaires» doivent être rémuné- rées à taux et demi pour toutes les heures travaillées en excédent des 8 heures par jour. Le cas des «heures supplémentaires» sont nécessaires parce qu'il y a plus de travail à faire qu'il n'en peut être fait dans les heures norma- les est régi, quant au trajet d'un facteur (itiné-
raire), par l'article 17.06 qui expose que «dans la mesure cela est pratique les heures supplé- mentaires dans un itinéraire de facteur sont accomplies par le facteur ou le facteur surveil- lant (relève) faisant le service de cet itinéraire particulier». L'article 17.07 prévoit une règle qui n'est pas applicable au facteur: «Afin d'éga- liser les chances de faire le travail supplémen- taire requis». En bref, il s'agit d'une exigence offrant des chances de faire des heures supplé- mentaires «lorsque moins d'une équipe com- plète d'employés est requise pour accomplir du travail supplémentaire» selon une règle dont le but est d'assurer l'égalité des chances de faire ce travail. Enfin, nous en venons à l'article (article 19) précisément à l'origine du présent litige. L'article 19 traite de trois choses. En premier lieu, il prévoit qu'un employé doit être rémunéré à taux et demi durant toutes les heures travaillées son jour de repos. En deuxième lieu, il prévoit (article 19.02a)) que tout employé rappelé au travail, après avoir terminé son horaire normal de travail de la journée et après avoir quitté les locaux de l'em- ployeur, se voit attribuer un minimum de 3 heures de «travail ou de salaire correspondant au temps de travail» à taux et demi. Enfin, l'article 19 contient une clause spéciale concer- nant «les itinéraires de facteur sans titulaire», subdivisée en deux parties. La première partie (article 19.03a)) s'applique à la période allant jusqu'au 29 novembre 1970 et expose que «lorsqu'un facteur ou un facteur surveillant (relève) fait du travail dans un autre itinéraire après avoir complété les fonctions de l'itinéraire qui lui est attribué», la garantie minimale prévue à la clause 19.02a) s'applique (c'est-à-dire, un minimum de trois heures de «travail ou de salaire correspondant au temps de travail» à taux et demi). La deuxième partie s'applique à partir du 30 novembre 1970. Elle prévoit a) que l'exécution des itinéraires de facteurs sans titu- laire est assujettie à la disposition principale sur les heures supplémentaires (17.01), qui prévoit une rémunération à taux et demi pour toutes les heures travaillées en excédent des huit heures par jour et b) que «dans la mesure du possible, lorsque des facteurs ou des facteurs surveillants (relève) sont requis d'exécuter des heures sup- plémentaires dans des itinéraires de facteurs sans titulaire, ces heures supplémentaires sont
réparties conformément au principe de l'égalité des chances prévu à la clause 17.07».
J'en viens maintenant aux griefs des demandeurs.
Les trois demandeurs avaient tous rédigé leurs griefs primitifs le 26 février 1971. Voici la déclaration de M. Thomas concernant son grief:
[TRADUCTION] Je fais le grief que l'employeur a enfreint les articles 19.03b) et 17 et d'autres articles connexes de la convention en faisant appel, les 22, 23, 24, 25 et 26 février 1971, à des employés temporaires pour la distribution du courrier dans des itinéraires sans titulaire et en ne suivant pas la liste des heures supplémentaires, comme l'exige la convention pour l'exécution des itinéraires sans titulaire.
Je demande à être payé en qualité de volontaire qualifié à l'ancienneté, qui était disposé à faire des heures supplémen- taires sur l'itinéraire sans titulaire le jour en question, pen dant toutes les heures l'employé temporaire a travaillé.
L'exposé du grief de M. Frost et celui du grief de M. Carlson étaient identiques, si ce n'est dans le détail des heures.
La décision de l'employeur du 3 mars 1971 était la même dans chaque cas. La voici:
[TRADUCTION] La convention collective ne contient aucune disposition prévoyant le retard de la distribution du courrier dans le but de permettre aux employés de faire des heures supplémentaires.
En conséquence, votre grief est rejeté.
Le ler avril 1971, une décision a été rendue dans chaque cas au deuxième palier. La voici:
[TRADUCTION] En votre nom, l'Union des Facteurs du Canada a présenté des observations.
Suivant la manière de procéder du Ministère, des employés temporaires ont été engagés pour exécuter des itinéraires sans titulaire. La convention collective ne contient aucune disposition exigeant que le service de la poste soit retardé pour permettre aux employés qui ont déjà accompli leur journée de travail de faire des heures supplémentaires. Il n'y a pas eu violation de la convention actuelle du C.U.P.
Votre grief est rejeté.
La décision au troisième palier a été pronon- cée le 26 avril 1971 dans chacun des cas:
[TRADUCTION] Votre grief a été examiné et votre cause discutée avec un représentant de votre syndicat.
La convention collective ne contient aucune disposition donnant priorité à l'utilisation des heures supplémentaires pour couvrir un itinéraire qui était sans titulaire un jour
donné. Des employés temporaires ont été engagés afin d'éviter un retard dans la distribution du courrier ce jour-là.
Pour ces motifs, votre grief est rejeté.
Au quatrième palier, la décision suivante a été rendue le 26 mai 1971 dans chaque cas:
[TRADUCTION] Votre grief a été examiné et la question discutée avec un représentant de l'Union des Facteurs du Canada.
Les mesures prises pour l'exécution des itinéraires sans titulaire l'ont été pour assurer la distribution du courrier et n'ont pas constitué une violation de la convention collec tive; en conséquence, votre grief est rejeté.
Le 4 juin 1971, chacun des demandeurs a signé un avis de renvoi à l'arbitrage.
Le 15 octobre 1971, l'arbitre a entendu les parties, mais cette Cour n'a aucun renseigne- ment quant aux faits qui, le cas échéant, ont été établis devant lui.
L'arbitre a rendu sa sentence le 19 octobre 1971. Il a déclaré que l'union soutenait que l'employeur avait violé la convention collective en affectant des employés «temporaires» à la distribution du courrier dans des itinéraires restés sans titulaire par suite de la maladie des facteurs habituels et que, du point de vue de l'union, ce travail aurait être effectué par des facteurs ou des facteurs surveillants (relève) [TRADUCTION] «à la fin de leur propre itinéraire, au tarif des heures supplémentaires». Dans le cas particulier qui lui était soumis, on a «admis» qu'aucun facteur surveillant (relève) n'était dis- ponible pour être affecté aux itinéraires «sans titulaire». La réclamation, selon lui, était fondée sur l'article 19.03b) que voici:
b) A partir du 30 novembre 1970, l'exécution des itinérai- res de facteurs sans titulaire est assujettie à la disposition sur les heures supplémentaires de la clause 17.01. Dans la mesure du possible, lorsque des facteurs ou des facteurs surveillants (relève) sont requis d'exécuter des heures supplémentaires dans des itinéraires de facteur sans titu- laire, ces heures supplémentaires sont réparties confor- mément au principe de l'égalité des chances prévu à la clause 17.07.
Selon l'opinion de l'arbitre, ces termes portaient à première vue [TRADUCTION] «à une conclu sion favorable en faveur de l'union», sous réserve de l'argument de l'employeur selon lequel l'article 19.03b) prévoit simplement une méthode de calcul de la rémunération [TRADUC-
TION] «au cas l'employeur choisirait de demander l'exécution d'heures supplémentai- res». Après avoir étudié les diverses disposi tions de la convention collective, il a décidé [TRADUCTION] «que l'employeur avait violé la convention en omettant d'affecter le travail dis- ponible au personnel des unités de négociation bien qu'il s'agisse d'heures supplémentaires». L'arbitre terminait sa sentence en disant que [TRADUCTION] «pendant toute l'audience, on a supposé (bien qu'on ne l'ait pas expressément prouvé) que, si les dispositions de l'article 19.03b) avaient été observées, les demandeurs auraient été affectés aux itinéraires sans titu- laire et qu'ils auraient reçu une rémunération en tarif des heures supplémentaires pour l'exécu- tion de ce travail»; en conséquence, l'arbitre a ordonné qu'on leur verse une compensation pour le revenu qu'ils avaient pu perdre à la suite de l'emploi irrégulier de travailleurs temporaires par l'employeur.
A la suite de cette sentence, il y a eu un renvoi en vertu de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, dont la partie qui s'applique en l'espèce est rédigée ainsi:
23. Lorsqu'une question de droit ou de compétence se pose à propos d'une affaire qui a été renvoyée à ... un arbitre, en conformité de la présente loi,...!'une des parties peut renvoyer la question à la Commission, pour audition ou décision ... .
Conformément à cet article, l'employeur a ren- voyé certaines questions à la Commission pour décision. La Commission des relations de tra vail dans la Fonction publique a prononcé, le 7 janvier 1972, les motifs de sa décision relative- ment à ce renvoi.
Il ressort des motifs de la Commission que la seule question de droit sur laquelle l'employeur s'appuyait à la fin de son exposé devant- la Commission était le suivant:
[TRADUCTION] L'arbitre a-t-il commis une erreur en inter- prétant la convention collective comme empêchant l'em- ployeur d'engager du personnel temporaire dans ces circonstances?
Ayant conclu que, bien qu'on ait prétendu le contraire au nom des demandeurs, elle était en droit de prendre une décision sur cette question, la Commission a examiné les diverses disposi tions de la convention collective qui se rappor-
tent à cette question, et elle est arrivée aux conclusions suivantes:
[TRADUCTION] Toutefois, dans le contexte dans lequel le mot «requis» est employé dans la clause 19.03b), la deuxième phrase s'applique lorsqu'il est nécessaire que des facteurs ou des facteurs surveillants fassent des heures supplémen- taires dans des itinéraires de facteur sans titulaire. Rien, dans cette phrase, ne limite la discrétion de l'employeur à décider s'il est nécessaire que des facteurs ou des facteurs surveillants fassent des heures supplémentaires pour doter ces itinéraires en personnel. C'est seulement quand l'em- ployeur décide qu'il est nécessaire que des facteurs ou des facteurs surveillants fassent des heures supplémentaires dans des itinéraires sans titulaire qu'il est tenu d'octroyer les heures supplémentaires en conformité du principe de l'égalité des chances. Si les parties avaient voulu prévoir que, lorsqu'il y avait des heures supplémentaires à faire pour couvrir des itinéraires sans titulaire, s'il fallait des heures supplémentaires pour les couvrir, elles seraient octroyées aux facteurs ou aux facteurs surveillants, cette intention aurait été formulée de la même façon que dans la clause 17.07d).
Toutes les considérations ci-dessus nous portent à con- clure que la deuxième phrase de la clause 19.03b) ne crée pas de droit statutaire pour les facteurs et les facteurs surveillants de se voir affecter les itinéraires de facteurs sans titulaire. Nous estimons que cette clause signifie sim- plement que, s'ils sont requis, si on leur demande, de faire des itinéraires de facteurs sans titulaire, cela doit être fait en conformité du principe général de l'égalité des chances exposé à l'article 17.07. En conséquence, nous estimons que l'arbitre a commis une erreur de droit en jugeant que l'employeur avait violé la convention en omettant d'affecter le travail disponible au personnel de l'unité de négociation, bien qu'il s'agisse d'heures supplémentaires. En consé- quence, la décision de l'arbitre est infirmée.
C'est la décision susmentionnée de la Com mission des relations de travail dans la Fonction publique qui fait l'objet de la présente demande, portée devant la Cour en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale.
Je pense qu'il est juste de dire que, devant cette Cour, les demandeurs ont fait la demande d'examen et d'annulation de la décision de la Commission des relations de travail dans la Fonction publique au motif principal que la Commission n'avait pas le pouvoir de trancher la question de droit qu'on lui avait renvoyée en vertu de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique parce que
a) l'arbitre n'avait commis aucune erreur de droit inséparable de la sentence qu'il a rendue sur l'ensemble de la question qu'on lui avait soumise, et
b) l'arbitre a examiné l'ensemble de la con vention collective et lui a donné une interpré- tation qu'elle pouvait raisonnablement avoir.
Avec la plus grande déférence envers ceux qui estiment la question difficile, je ne doute pas que la Commission des relations de travail dans la Fonction publique a le pouvoir absolu, en vertu de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, de tran- cher toute question de droit soulevée à l'occa- sion d'une affaire qui a été renvoyée à un arbitre en vertu de ladite Loi. Les dispositions de la Loi qui s'y rapportent, semblent claires et sans ambiguité. Tout d'abord, l'article 91(1) expose que, lorsqu'un employé a présenté un «grief» jusqu'au dernier palier de la procédure applicable aux griefs inclusivement, au sujet de «l'interprétation ou de l'application, en ce qui le concerne, d'une disposition d'une convention collective» et que son «grief» n'a pas été réglé d'une manière satisfaisante pour lui, il peut ren- voyer le «grief» à l'arbitrage. Ensuite, nous constatons que l'article 100(1) prévoit que «toute ... décision . .. d'un arbitre» est «défini- tive» sous réserve «de la présente loi». Enfin, nous trouvons, à l'article 23, l'exception à ce caractère définitif: «lorsqu'une question de droit ... se pose à propos d'une affaire qui a été renvoyée à . .. un arbitre, en conformité de la présente loi,» l'une des parties peut renvoyer «la question» à la Commission «pour ... déci- sion». Pas plus que dans une loi ordinaire pré- voyant un appel sur une question de droit, je ne trouve dans la Loi de restriction, expresse ou implicite, au pouvoir de trancher une telle ques tion de droit.
En me reportant à la jurisprudence sur laquelle les demandeurs se sont appuyés à cet égard, je crois pouvoir expliquer la confusion qui semble s'être produite à cet égard. Si je les comprends bien, tous ces précédents concer- nent des affaires où, même si un tribunal arbi- tral ou un tribunal créé par la loi avaient rendu une décision ayant apparemment un caractère définitif par suite d'un accord entre les parties ou en vertu de la loi, les cours ont conclu qu'elles avaient compétence quoique de façon limitée pour examiner la décision du tribunal. Je n'ai pas pu trouver de décision établissant qu'un pouvoir absolu de trancher une question de
droit tel que celui que l'on trouve à l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique est soumis à des restrictions implicites.
Il ne fait pas de doute, selon moi, que la Commission des relations de travail dans la Fonction publique était compétente, en vertu de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, pour trancher la question de droit relative aux effets de la con vention collective que soulevaient les griefs que les demandeurs ont renvoyés à l'arbitrage.
En conséquence, on ne peut juger cette demande sans étudier la question de droit con- sistant à savoir si une interprétation correcte de la convention collective justifie les griefs des demandeurs.
Avant d'envisager cette question de droit, il convient de faire une observation préliminaire. La convention collective concerne les condi tions d'emploi de certains employés des postes, notamment les facteurs. Les dispositions de cette convention ont été manifestement conçues en fonction des rapports existant entre les fac- teurs et entre ces derniers et le Gouvernement en tant qu'employeur, au moment la conven tion collective est entrée en vigueur. En étu- diant l'effet de la convention collective ou de chacune de ses dispositions précises, il est donc opportun, et en fait tout à fait souhaitable, de connaître la situation à laquelle elle devait s'ap- pliquer. Il en est ainsi non seulement pour rendre intelligibles les dispositions de la con vention et pour les appliquer aux faits, mais aussi pour déterminer si l'on a pu inclure impli- citement dans la convention une condition que l'on n'y a pas formulée expressément. (Voir Kelantan Government c. Duff Development Co., [1923] A.C. 395, le lord chancelier, Vicomte Cave, aux pp. 411 et 412.) Dans cette affaire, il n'y a aucune preuve quelle qu'elle soit concer- nant ces rapports, si ce n'est des renseigne- ments suffisamment notoires pour que l'on puisse en prendre acte. Dans ces conditions, je suis d'avis qu'on ne doit exprimer aucune opi nion sur l'effet de la convention collective, autre que celle qui est nécessaire pour trancher la question soumise à cette cour.' Si d'autres questions devaient s'élever quant à l'effet des dispositions de la convention qui est ici en
cause, on peut espérer que l'on établira les circonstances qui l'entourent de manière à per- mettre de se former avec assez de certitude l'opinion, quant à l'effet de la convention, qu'elle est applicable aux rapports réellement en cause.
J'en viens maintenant à la question de droit qui doit être envisagée.
Il ressort de la décision de l'arbitre que ce qui est en cause dans chacun de ces cas, c'est une situation dans laquelle un «itinéraire» a été laissé sans titulaire par suite de la maladie du facteur habituel, et le demandeur invoque que l'exécution de cet itinéraire aurait être retardée jusqu'à ce qu'il ait terminé son propre itinéraire, pour qu'il puisse remplacer le facteur malade au tarif des heures supplémentaires. Ceci soulève au moins deux questions concer- nant l'effet de la convention collective. Tout d'abord, les demandeurs ont-ils le droit de faire retarder le travail jusqu'à ce qu'ils puissent le faire? Cela soulève une question concernant leur droit contractuel de le faire s'ils avaient été disponibles. A mon avis, il suffit dans cette affaire de considérer la première de ces ques tions. Le point de droit qu'il faut donc juger, à mon avis, est de savoir si une interprétation correcte de la convention collective imposait à l'employeur de retarder la desserte d'un itiné- raire sans titulaire ou des itinéraires en question de façon à pouvoir les offrir aux demandeurs respectifs lorsque ceux-ci avaient terminé leurs propres itinéraires, pour que ces derniers puis- sent, s'ils le désiraient, remplacer le ou les fac- teurs malades. Selon moi, comme je l'ai déjà indiqué, cette question est la seule à laquelle il faille absolument répondre. Si la réponse y est affirmative, il se peut que la sentence de l'arbi- tre doive être rétablie. Si la réponse y est néga- tive, la Commission a eu raison d'infirmer cette sentence. Dans ce dernier cas, il est inutile de formuler une opinion sur le point de savoir si la convention collective contient expressément ou implicitement un accord concernant"I'embab chage de certaines catégories de personnes appelées temporaires et il s'avère donc inutile d'exprimer une opinion à ce sujet.
Je peux exprimer brièvement mon point de vue sur ce que je considère comme étant la question de droit essentielle. En ce qui con-
cerne la desserte d'un «itinéraire» qui est resté sans titulaire par suite de «maladie», on trouve une disposition de la convention collective (arti- cle 10.04) portant que ce travail reviendra aux facteurs surveillants (relève). En elle-même, cette disposition n'a aucune utilité pour les demandeurs parce qu'ils n'entrent pas dans cette catégorie. Par ailleurs, on constate aussi que la convention envisage la possibilité que ce travail soit fait, soit par les facteurs, soit par les facteurs surveillants (relève), du moins quand on leur demande de faire des heures supplémen- taires pour exécuter cette tâche. Voir l'article 19.03. Il se peut que, lus en corrélation, ces articles imposent à l'employeur l'obligation de donner ce travail soit aux facteurs, soit aux facteurs surveillants (relève). Il s'agit d'un pro- blème sur lequel j'estime que je ne dois pas exprimer d'opinion parce qu'à mon avis, il ne profite pas en lui-même aux requérants, car je ne trouve rien dans la convention collective sur quoi on puisse se fonder pour prétendre qu'un employé des postes a le droit de faire retarder une partie du service postal pour qu'on puisse lui accorder la possibilité de le faire après avoir effectué son propre travail. En conséquence, j'estime que la demande doit être rejetée.
LE JUGE THURLOW (oralement)—A mon avis, cette requête soulève deux problèmes. Le pre mier est celui de l'étendue des pouvoirs que la Commission des Relations de travail dans la Fonction publique tient de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique. Cet article prévoit que «lorsqu'une question de droit ou de compétence se pose à propos d'une affaire qui a été renvoyée» à un tribunal d'arbitrage ou à un arbitre, en confor- mité de la Loi, le tribunal ou l'arbitre, selon le cas, ou l'une ou l'autre des parties, peut ren- voyer la question à la Commission pour audi tion et décision. Il ne me semble pas qu'il y ait de raison valable de donner un sens restreint à l'expression «une question de droit ou de com- pétence» employée dans cette disposition. En particulier, rien ne justifie, à mon avis, que l'on restreigne le genre de question de droit que l'on peut renvoyer à la Commission en vertu de
l'article 23, celui qui justifierait, d'après les principes applicables aux procédures de certio-
rani, un examen de la décision d'un arbitre, que cet examen soit prévu par la loi ou ait été accepté d'un commun accord par les parties. L'interprétation d'un contrat est présumée constituer une question de droit et, à mon avis, l'interprétation de la convention collective qui est ici en question, en ce qui concerne les griefs des demandeurs, soulevait une ou plusieurs questions de droit qui peuvent être valablement renvoyées à la Commission pour audition et décision, en vertu de l'article 23.
En outre, comme la compétence que cette Cour tient de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, plus particulièrement de l'article 28(1)b), ne se limite pas à traiter de points de droit dont elle pourrait traiter si cette procédure avait été engagée par voie de certiorari, il semble manifeste que cette cour n'est pas tenue de choisir entre l'interprétation de la convention collective qu'a faite l'arbitre et celle qu'a faite la Commission ou de donner effet à l'une ou l'au- tre, mais qu'elle a le pouvoir d'y substituer son propre point de vue et d'ordonner que son inter- prétation prévale.
L'autre problème soulevé par la requête est celui de la réponse exacte à la question de droit qu'ont soulevée les griefs, et qui a été renvoyée à la Commission pour audition et décision. Tant dans la décision de la Commission que dans l'argumentation présentée devant cette Cour, on a considéré que cette question comprenait ce qui constitue en réalité deux questions de droit, savoir, la question de savoir si l'employeur a violé la convention collective en embauchant des employés temporaires pour effectuer les itinéraires de facteur temporairement sans titu- laire par suite de la maladie des facteurs titulai- res, et l'autre question de savoir si les deman- deurs avaient le droit de faire en heures supplémentaires le travail pour lequel ce per sonnel temporaire a été employé, alors que les demandeurs n'étaient pas disponibles pour le faire parce qu'ils étaient occupés à effectuer leur propre itinéraire à ce moment-là.
Comme on l'a indiqué au cours de la plaidoi- rie, il m'apparaît très difficile et peu satisfaisant de conclure de manière définitive quant au sens d'une telle convention, en l'espèce une conven tion collective adoptée pour réglementer cer- tains rapports existant dans un cadre général
préétabli entre le syndicat, l'employé et l'em- ployeur, en se fondant sur les éléments succints dont dispose la Cour pour décrire la situation à laquelle la convention doit s'appliquer. En l'ab- sence de plus amples renseignements, toute conclusion quant à la signification de la conven tion doit inévitablement résulter presque entiè- rement de la seule signification des mots et expressions que les parties ont utilisés dans leur convention. Étant donné que je ne pense pas que ceci soit propre à conduire à une interpréta- tion satisfaisante ou parfaite des buts de la convention, je prends la précaution de préciser que mes conclusions ne sont fondées que sur les seuls éléments dont dispose la Cour et sur ce qui peut être suffisamment notoire pour être pris en considération, et que je ne propose pas de conclusion définitive sur tout point autre que le point assez étroit autour duquel le résultat de la requête semble, selon moi, tourner.
La convention même semble envisager que, lorsque l'employeur a un travail normal à faire faire pendant les heures de travail normales, il s'adressera aux membres de l'unité de négocia- tion pour le faire. Je déduis ceci du fait que la convention prévoit un système complexe de droits d'ancienneté et la mise au choix de l'af- fectation des itinéraires des facteurs. On peut en dire autant pour les heures supplémentaires, lorsque l'employeur a du travail à faire à ce titre. Il semble donc possible d'en déduire que l'employeur s'est engagé à n'employer que les membres de l'unité de négociation pour effec- tuer ce travail, ou à n'employer que les mem- bres de l'unité de négociation dans la mesure ils sont disponibles à cette fin. Toutefois, il semble inutile de trancher définitivement cette question, car rien dans les dispositions de la convention, à mon sens, lorsqu'on les examine ensemble ou séparément, ne me permet de déduire, et encore moins de conclure obligatoi- rement, que l'employeur s'est engagé envers l'unité de négociation à faire appel, dans une situation de ce genre, à des personnes occupant des postes comme ceux des demandeurs pour faire le travail en heures supplémentaires. Il me semble que ce que la convention prévoit au sujet des heures supplémentaires, c'est les con ditions dans lesquelles ce travail sera exécuté lorsque l'employeur demande aux employés de le faire. Mais il ne me semble pas que la con-
vention prévoit que des employés occupant des postes comme ceux des demandeurs puissent obliger l'employeur à leur demander de faire des heures supplémentaires pour effectuer les itinéraires sans titulaire après qu'ils ont achevé leurs propres itinéraires.
Toutefois il ne s'ensuit pas que l'employeur a le droit d'engager des employés temporaires pour faire effectuer des itinéraires sans titulaire aux heures normales, simplement parce qu'il n'a pas décidé de les faire faire par un employé en heures supplémentaires. Dans un tel cas, en supposant que la convention ait pour effet de faire effectuer le travail de l'employeur par les membres de l'unité de négociation ou par ceux-ci dans la mesure ils sont disponibles, en ce qui concerne la convention collective, l'employeur, à mon avis, avait le choix
(1) de faire faire le travail en se conformant à la convention, c'est-à-dire
a) de suivre les dispositions de l'article 10.04a) en y affectant les facteurs surveil- lants (relève) disponibles, ou
b) par une autre méthode que la conven tion peut prévoir, comme d'y affecter des facteurs sans itinéraire ou à temps partiel (bien que je n'exprime pas d'opinion sur le point de savoir si ce système est permis par la convention), ou
c) en faisant appel aux facteurs ou aux facteurs surveillants (relève) pour effectuer des heures supplémentaires, ou
(2) de laisser le travail non accompli.
En se fondant sur la même hypothèse, il me semble en découler que l'employeur n'était pas dans son droit et qu'il a violé la convention quand il a employé du personnel temporaire pour effectuer le travail des itinéraires sans titulaire alors qu'il n'avait pas épuisé les moyens de faire faire ce travail par le personnel de l'unité de négociation, comme l'exigeait la convention.
D'autre part, à moins que ces employés tem- poraires n'aient été embauchés pour effectuer les itinéraires sans titulaire alors que certains membres réguliers de l'unité de négociation, aptes à le faire étaient disponibles, il ne me semble pas possible d'affirmer que lesdits mem- bres de l'unité de négociation ont été par là-
même privés d'heures supplémentaires, puisque nul n'a prétendu que les employés temporaires ont - été embauchés pour travailler à ce tarif, et qu'ils ont fait leur travail à un moment lesdits membres de l'unité de négociation n'é- taient pas disponibles pour effectuer les itinérai- res sans titulaire; en outre, même si les employés intérimaires n'avaient pas été embau- chés pour faire ce travail, la convention n'obli- geait pas l'employeur à le faire faire par les demandeurs en heures supplémentaires. Il est sans doute probable que, si l'employeur n'avait pas réussi à trouver des employés temporaires pour effectuer les itinéraires, il aurait peut-être eu recours auxdits membres de l'unité de négo- ciation pour faire ce travail en heures supplé- mentaires, mais c'est une question différente et ce n'est, certes, qu'une question de fait. A mon avis, on ne peut pas dire que l'employeur a violé les dispositions de la convention en ce qui concerne les heures supplémentaires et a par là-même privé lesdits requérants de la possibi- lité de faire des heures supplémentaires, car ils n'ont jamais été dans une situation ils pou- vaient exiger de faire ce travail en heures sup- plémentaires et d'être employés pour le faire.
Étant donné que ceci conduit à la même conclusion que celle de la Commission, c'est-à- dire que la décision de l'arbitre doit être infir- mée, je suis d'avis de rejeter la requête.
Le juge suppléant Smith souscrit à l'avis du juge en chef.
I A mon avis, quand il y a renvoi d'une question de droit soulevée par une décision dans une affaire ou un appel sur une question de droit, ce qu'il faut trancher, c'est la ques tion de droit qui est déterminante dans l'affaire en question et pas nécessairement la question de droit que les parties ou le tribunal de première instance ont formulée. A cet égard, je renvoie à une décision récente de la Cour suprême du Canada dans l'appel d'une affaire d'immigration (arrêt Leiba c. Le ministre de la Main-d'œuvre et de l'Immigration, rendu le 25 janvier 1972).
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.