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Norman L. Wright (Requérant) c.
La Commission des relations de travail dans la Fonction publique (Intimée)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, les juges Thurlow et Pratte —Ottawa, les 5 et 8 juin 1973.
Fonction publique—Arbitrage des griefs—Compétence— Employé illégalement renvoyé après la période de stage— Renvoi à l'arbitre-11 décide que le renvoi de l'employé est justifié pour d'autres motifs—Confirmation par la Commis sion des relations de travail—Examen judiciaire—Annula- tion de la décision—Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-35, art. 23, 91(1).
W, un «préposé au soin des enfants» dans la Fonction publique, a été renvoyé pour un motif déterminé après l'expiration de sa période de stage, ce qui est illégal. Il a présenté un grief allégant l'illégalité de son renvoi. Le grief a été renvoyé à l'arbitrage. L'arbitre a décidé que le renvoi était nul mais que le congédiement de W était justifié car sa personnalité était incompatible avec ses fonctions. Au cours du renvoi introduit en vertu de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, la Commis sion des relations de travail dans la Fonction publique a décidé que l'arbitre n'avait pas commis d'erreur de droit en statuant ainsi.
Arrêt: il convient d'annuler la décision de la Commission. Le renvoi de W était nul car il a eu lieu une fois la période de stage terminée et on ne pouvait pas non plus le considé- rer comme un congédiement pour inconduite. En consé- quence, il ne s'agissait pas «d'une mesure disciplinaire» au sens de l'article 91(1) de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique qui pouvait faire l'objet d'un renvoi comme grief et l'arbitre aurait donc rejeter le renvoi pour défaut de compétence.
EXAMEN judiciaire. AVOCATS:
M. W. Wright et J. L. Shields pour le requérant.
J. E. Smith et P. Delage pour l'intimée. PROCUREURS:
Soloway, Wright, Houston, Killeen et Greenberg, Ottawa, pour le requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimée.
LE JUGE EN CHEF JACKETT (oralement) —La présente demande introduite en vertu de l'article 28 1 ! vise l'examen et l'annulation d'une décision de la Commission des relations de travail dans
la Fonction publique qui répondait à des ques tions de droit ou de compétence soulevées à la suite d'une décision de l'arbitre en chef à l'égard d'un grief présenté par le requérant, lesdites questions ayant été renvoyées à la Commission en vertu de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-35.
Le requérant était employé à titre de «pré- posé au soin des enfants» au foyer scolaire pour Indiens d'Alberni quand, le l er avril 1969, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien en prit la gestion.
En vertu de l'article 39 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, son poste a été «soustrait» à l'application de ladite loi et soumis à un règlement dont voici un extrait:
3. Lorsque le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien requiert les services d'un administrateur de foyer scolaire ou d'un préposé au soin des enfants, le sous-chef de ce ministère
a) doit recruter et sélectionner une personne pour fournir ces services, en tenant compte des exigences linguistiques du poste précisées à l'article 20 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique; et
b) peut titulariser dès sa sélection la personne qui doit fournir ces services.
4. Une personne nommée au poste d'administrateur de foyer scolaire ou de préposé au soin des enfants est assujet- tie aux articles 21, 26, 27, 31 et 32 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique et à toute disposition du Règle- ment sur l'emploi dans la Fonction publique qui s'y rapporte.
5. (1) Une personne nommée au poste d'administrateur de foyer scolaire ou de préposé au soin des enfants est en stage pendant douze mois à compter de la date de sa nomination.
(2) Le sous-chef peut, à tout moment au cours du stage, prévenir une personne qu'il se propose de la renvoyer pour un motif déterminé le jour précisé dans le préavis, c'est-à- dire au moins trente jours après la remise du préavis, et cette personne cesse d'être un employé ce jour-là.
Le requérant était à l'emploi de la Fonction publique depuis plus de douze mois lorsque, le 25 juin 1970, le ministère lui a adressé une lettre l'avisant de son intention de le «renvoyer pour un motif déterminé». Le requérant a, par la suite, présenté un grief à l'égard de son renvoi; l'«exposé du grief» se lit comme suit:
[TRADUCTION] Le 30 juin 1970, j'ai reçu une lettre datée du 25 juin 1970 m'avisant que j'étais renvoyé en vertu des dispositions de l'article 28(3) de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique et qu'à dater du 31 juillet 1970, je cessais d'être employé par le ministère.
Aux termes de l'annexe «A» du règlement relatif à la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, ma période de stage se terminait le ler octobre 1969 et il ne peut être mis fin à mon emploi en vertu de l'article 28(3) de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique.
Par la suite, le grief a été renvoyé à l'«arbitrage» et l'arbitre en chef s'est occupé de la question.
L'arbitre en chef a réglé une objection préli- minaire de l'«employeur», selon laquelle ce renvoi n'était pas susceptible d'être porté «en arbitrage», étant donné qu'est «nul ce qu'on appelle le «renvoi» de l'employé s'estimant lésé, décidé aux termes de l'article 28 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique; ... que l'employé en question doit être considéré comme ayant terminé sa période de stage le 31 mars 1970 et qu'il avait depuis cette date été de fait congédié.» Il a donc ordonné «qu'une audi tion soit tenue sur le bien-fondé du grief». Après l'audition sur le bien-fondé du grief, l'ar- bitre en chef a expliqué son point de vue dans le passage suivant de sa décision:
Naturellement et avec raison, le grief primitif contestait ce qui est appelé le «renvoi en période de stage»; ce n'est toutefois que quelques semaines après le renvoi de cette affaire à l'arbitrage que l'avocat de l'employeur a admis que le Ministère a fait erreur en se fondant sur l'article 28 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, article qui ne s'applique pas au cas de M. Wright. Je dois préciser, toute- fois, que je statue sur le bien-fondé, c'est-à-dire sur le fond du différend, et non sur une question de droit ou de procé- dure. Il s'agit de déterminer si la décision du 30 juin 1970 de mettre fin à l'emploi de M. Wright était justifiée, peu importe le nom dont on veut appeler cette cessation d'emploi.
Après l'audition sur le bien-fondé du grief, l'arbitre en chef a conclu de la façon suivante, ainsi qu'il ressort de cet extrait de ses motifs:
Ma décision relative à la présente affaire se fonde sur des arguments quelque peu différents de ceux que préconisent les parties. Bien que les motifs invoqués par l'employeur ne soient pas des infractions au sens courant du mot, la cessa tion d'emploi de M. Wright constitue une mesure discipli- naire aux termes de l'article 91(1)b) de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique. L'employeur soutient que le congédiement est justifié pour raison «d'in- compétence». L'agent négociateur affirme qu'en fait M.
Wright s'est trop bien acquitté de ses fonctions et que les difficultés découlant de son emploi sont attribuables aux autres employés plutôt qu'à son client.
Je pense que ni «l'incompétence» ni le «souci de perfec tion» de M. Wright ne constitue le véritable fond de la présente affaire. L'interaction des nombreux facteurs qui ont abouti à la cessation d'emploi de ce dernier ne peut se résumer en un mot ni même en une phrase.
La présente affaire concerne une institution engagée pres- que exclusivement dans une forme très spéciale de relations humaines. Les préposés au soin des enfants ne font partie ni d'une industrie ni d'un commerce; on ne peut les classifier comme enseignants, infirmiers, ou tuteurs. Leur tâche pre- mière est décrite (pièce 10) de la façon suivante: «Le préposé au soin des enfants essaie constamment de créer l'atmosphère d'un véritable foyer pour les enfants dont il est chargé.»
Il est donc évident que les relations personnelles d'un préposé tant avec ses collègues qu'avec les enfants revêtent une très grande importance. Quinze préposés au soin des enfants ne peuvent s'acquitter de leurs fonctions avec succès qu'en formant équipe et en collaborant étroitement entre eux et avec leur administrateur. C'est un fait que les enfants se rendent rapidement compte de toute tension chez leurs aînés qui, pour gagner la confiance des enfants dont ils ont la charge, doivent mériter leurs respect.
Malheureusement, la conception que se fait M. Wright du soin des enfants diffère de celle de la plupart de ses collè- gues et de l'administrateur. Sa compétence marquée, jointe à sa forte personnalité, l'a graduellement amené à faire office, en quelque sorte, de chef de l'opposition. Ses activités ont eu tendance, peut-être sans qu'il s'en rende tout à fait compte, à polariser les opinions chez les préposés au soin des enfants et à créer deux camps distincts. La situation qui existait au foyer scolaire au printemps et au début de l'été 1970 ne pouvait évidemment durer.
Je ne prétends pas le moindrement que M. Wright a tous les torts. Comme le dit M. Andrews dans son rapport de stage, personne n'est parfait et peu de gens sont meilleurs que les autres. Cependant, M. Wright a réussi, étant donné les circonstances et son caractère, à se faire des partisans et des adversaires parmi le personnel du foyer scolaire. Des dépositions, que j'accepte, ont établi que depuis le départ de M. Wright, durant l'année en cours, les tensions et les dissensions se sont résorbées.
Je ne puis croire qu'il ne se soit rien produit entre mars et juin 1970 qui puisse justifier la décision de mettre fin à l'emploi de M. Wright. La plainte relative à l'incident du gymnase fermé à clé a été formulée le 20 mai par un surveillant qui ne faisait partie du personnel que depuis la fin de mars et qui était déjà en mauvais termes avec M. Wright. Au début de juin certains membres du personnel ont menacé de démissionner. Bien qu'en mars il ait été claire- ment mis au courant de son appréciation défavorable, M. Wright ne dit pas qu'il en reconnaît le bien-fondé ni qu'il l'a déjà reconnu. Il demande sa réintégration, alléguant qu'il a fait du bon travail, que ses vues et ses méthodes étaient
justes et que les motifs de son congédiement ne sont pas acceptables.
Je ne doute pas que M. Wright soit énergique et capable et qu'il se conforme à des normes élevées de conduite et d'efficacité. Il pourrait rendre de précieux services dans un autre domaine. A mon avis, la société fait tragiquement erreur lorsqu'elle répugne à employer des hommes d'une soixantaine d'années qui sont encore capables d'apporter une contribution appréciable. Les hommes comme M. Wright, physiquement et mentalement vigoureux et loin d'être mûrs pour la retraite, devraient être plus en demande. J'estime toutefois que les exigences du poste de préposé au soin des enfants ne conviennent pas à M. Wright. (J'ai moi-même souligné)
Dans ces circonstances, l'arbitre en chef a déclaré qu'à son avis, «un renvoi en période de stage aurait été approprié»; mais «cependant, l'employé s'estimant lésé a, ... été congédié trois mois après la fin de son stage».
Voici la partie de la «décision» de l'arbitre en chef qu'on a considéré comme en étant le dispositif :
Je conclus avec regret que la cessation d'emploi de M. Wright était justifiée et qu'elle était nécessaire à la bonne marche de l'institution il était employé. A mon avis, le Conseil du Trésor aurait sanctionner ce congédiement en juin et je demande qu'il le fasse dès maintenant.
Le requérant a alors soumis les questions suivantes à la Commission des relations de tra vail dans la Fonction publique:
a) L'arbitre en chef a-t-il commis une erreur de droit en n'acceptant pas l'allégation de M. Wright selon laquelle son congédiement était illégal en ce que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien n'avait pas demandé ou obtenu l'approbation du Conseil du Trésor, comme le stipule l'article 106d) du Règlement sur les conditions d'emploi dans la Fonction publique (DORS/67- 118, modifié)?
b) L'arbitre en chef a-t-il outrepassé sa compétence en ordonnant au Conseil du Trésor d'approuver le congédie- ment de M. Wright?
La décision de la Commission, telle qu'exposée dans la «décision motivée» de la majorité por- tait que [TRADUCTION] «l'arbitre en chef n'a pas commis d'erreur de droit en ce qui concerne les points» soulevés dans la première question. La Commission ne s'est pas prononcée sur la direc tive de l'arbitre en chef au conseil du Trésor.
C'est cette «décision» de la Commission des relations de travail dans la Fonction publique qu'on demande à cette Cour d'examiner et d'an-
nuler en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale.
On demande à la Cour d'annuler la décision de la Commission en vertu de l'article 28 au motif que la Commission aurait «rendu une décision ... entachée d'une erreur de droit». Pour décider de l'accueil de la demande, il faut donc déterminer quelles étaient, en droit, les obligations de la Commission en l'espèce.
Le renvoi à la Commission a été introduit en vertu de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique qui est rédigé comme suit:
23. Lorsqu'une question de droit ou de compétence se pose à propos d'une affaire qui a été renvoyée au tribunal d'arbitrage ou à un arbitre, en conformité de la présente loi, le tribunal d'arbitrage ou l'arbitre, selon le cas, ou l'une des parties peut renvoyer la question à la Commission, pour audition ou décision conformément aux règlements établis par la Commission à ce sujet. Toutefois le renvoi d'une question de ce genre à la Commission n'aura pas pour effet de suspendre les procédures relatives à cette matière à moins que le tribunal d'arbitrage ou l'arbitre, selon le cas, ne décide que la nature de la question justifie une suspension des procédures ou que la Commission n'en ordonne la suspension.
La partie de l'article qui se rapporte directe- ment à la question à l'étude est la suivante:
Lorsqu'une question de droit ou de compétence se pose à propos d'une affaire qui a été renvoyée ... à un arbitre, en
conformité de la présente ,...l'uneune des parties peut renvoyer la question à la Commission, pour audition ou décision ... .
Malgré l'utilisation du mot «ou» dans l'ex- pression «audition ou décision» à l'article 23, je suis d'avis qu'on doit interpréter cet article comme visant le renvoi d'une question de droit pour «décision». Un renvoi pour «audition» seulement serait absolument inutile et ce ne peut avoir été l'intention du législateur.
Une fois admis que l'article 23 vise le renvoi d'une question de droit pour «décision», il me semble que la nature d'un tel renvoi est très semblable à celle d'un renvoi devant cette Cour en vertu de l'article 28(4) de la Loi sur la Cour fédérale et, à mon avis, la plus grande partie du raisonnement que j'ai tenu dans une décision récente relative à l'article 28 s'applique égale- ment à l'article 23?z
Il est important de remarquer que l'article 23 ne permet pas de donner des avis consultatifs comme le permet l'article 55 de la Loi sur la Cour suprême, selon lequel une question peut être soumise à la Cour suprême du Canada pour «audition et pour examen» et la Cour est alors tenue d'exprimer «son opinion» sur la question.
La signification, dans le contexte de l'article 23, du terme «décidé» est la clef permettant de déterminer ce que doit faire la Commission aux termes dudit article. A mon avis, une question de fait est «décidée» quand, d'après la preuve, on statue sur les faits, à la suite d'une contesta- tion à leur égard. De même, j'estime qu'une question de droit est «décidée» quand on statue sur les conséquences juridiques découlant des faits tels qu'établis ou admis, quand il y a eu un litige sur le point de savoir quelles étaient ces conséquences. A mon avis, il s'ensuit que, s'il y a un litige quant à l'exactitude en droit de la décision d'un arbitre, la première question de droit, et peut-être la seule, que la Commission peut «décider» est de savoir si, d'après les faits établis par l'arbitre, ses conclusions quant aux conséquences juridiques en découlant sont vala- bles et, dans la négative, quelles sont les consé- quences juridiques en découlant. Il me semble difficile d'envisager d'autres questions de droit, par opposition aux questions de compétence, qui pourraient faire l'objet d'un renvoi en vertu de l'article 23 après que l'arbitre a statué sur la question qu'on lui a soumise. Sans aucun doute, selon mon interprétation de l'article 23, ce der- nier ne vise pas la solution d'une question de droit exprimée en termes hypothétiques ou théoriques.
Il faut examiner un autre aspect de l'article 23. Il autorise la «décision» sur une question de droit qui se pose à propos d'une affaire ren- voyée à un arbitre mais n'accorde aucun pou- voir exprès à la Commission pour donner effet à sa décision, soit en renvoyant l'affaire devant l'arbitre, soit en substituant une décision cor- recte à la décision de l'arbitre qui a été jugée entachée d'une erreur de droit. Toutefois, nonobstant l'absence de directives législatives précises, on doit, à mon sens, interpréter l'arti- cle 23 et l'appliquer de telle façon que le redres- sement qu'il accorde soit efficace. Dans une
affaire telle que la présente, un tel résultat découle naturellement de la loi. Quand la Com mission doit décider des conséquences juridi- ques découlant des faits tels qu'établis par l'ar- bitre, parce que la décision définitive de l'arbitre les reflète de façon erronée, en vertu de la loi la décision de la Commission vient remplacer celle de l'arbitre. En conséquence, si la Commission décide que, vu les faits, la décision «exige» en droit «qu'une mesure soit prise par l'em- ployeur», ce dernier sera tenu, en vertu de l'arti- cle 96(4), de prendre toute mesure ainsi requise et non de prendre les mesures que la décision incorrecte de l'arbitre demandait. En fait, aux fins de l'article 96, la décision de la Commission dans un tel cas remplace la décision de l'arbitre et elle doit être rédigée en conséquence.
Selon le point de vue que j'ai exprimé quant à l'effet de l'article 23, on peut sérieusement mettre en doute que les questions renvoyées à la Commission constituent un renvoi de la seule question que, dans les circonstances, on pouvait à bon droit soumettre à la Commission en vertu de l'article 23. La question a) vise, en fait, à obtenir un avis sur un problème juridique qui influerait sur l'exactitude de la décision de l'ar- bitre en chef en utilisant la réponse à un autre problème juridique soulevé par les faits établis par l'arbitre en chef. La question b) présume aussi une solution donnée, en réponse à un problème juridique soulevé par ces faits, et cherche à obtenir une réponse à un autre problè- me juridique. Je me réfère au fait que les deux questions présupposent qu'il y a eu «congédie- ment» du requérant. (Comme je l'indiquerai plus loin, à mon avis, les faits ne permettaient aucu- nement de fonder une telle présomption.) En envisageant le problème de façon très rigou- reuse, on pourrait donc soutenir qu'il n'y a jamais eu renvoi à la Commission pour «déci- sion» d'une question en la forme prévue à l'arti- cle 23 et que la Commission aurait trancher en conséquence.' Il est possible que je sois indûment influencé par la longue période de temps qui s'est écoulée, mais j'ai conclu qu'il est inutile d'adopter en l'espèce un point de vue aussi rigoureux. Manifestement le requérant renvoyait à la Commission une question de droit portant sur le point de savoir si la décision de
l'arbitre en chef reflétait correctement les con- séquences juridiques découlant des faits tels qu'il les avaient établis et je pense qu'on peut en déduire qu'on demandait à la Commission de rendre une «décision» qui reflète avec exacti tude les conséquences juridiques découlant de ces faits, compte tenu de la compétence accor- dée à l'arbitre par les dispositions législatives.
Si l'on adopte ce point de vue, ce qu'il faut établir en l'espèce est quelle décision la Com mission aurait rendre dans un renvoi en vertu de l'article 23, savoir,
a) La solution de l'arbitre en chef dans le renvoi qu'on lui avait soumis est-elle entachée d'une erreur de droit? et
b) Dans l'affirmative, quelle solution aurait-il adopter?
Avant d'étudier cette question, il est néces- saire de se rapporter à certaines dispositions législatives relatives aux différents points soulevés.
Le renvoi d'un grief à l'arbitrage fait partie de la procédure des griefs établie par la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, dont les articles pertinents sont rédigés ainsi:
PARTIE IV
GRIEFS
Droit d'exposer des griefs
90. (1) Lorsqu'un employé s'estime lésé
a) par l'interprétation ou l'application à son égard
(i) de quelque disposition d'une loi, d'un règlement, d'une instruction ou d'un autre instrument établi ou émis par l'employeur, concernant des conditions d'em- ploi, ou
(ii) d'une disposition d'une convention collective ou d'une décision arbitrale; ou
b) par suite d'un événement ou d'une question qui vise ses conditions d'emploi, sauf une disposition indiquée au sous-alinéa a)(i) ou (ii),
relativement à laquelle ou auquel aucune procédure adminis trative de réparation n'est prévue en vertu d'une loi du Parlement, il a le droit, sous réserve du paragraphe (2), de présenter ce grief à chacun des paliers, y compris le dernier palier, que prévoit la procédure applicable aux griefs établie par la présente loi.
Arbitrage des griefs Renvoi à l'arbitrage
91. (1) Lorsqu'un employé a présenté un grief jusqu'au dernier palier de la procédure applicable aux griefs inclusi- vement, au sujet
a) de l'interprétation ou de l'application, en ce qui le concerne, d'une disposition d'une convention collective ou d'une décision arbitrale, ou
b) d'une mesure disciplinaire entraînant le congédiement, la suspension ou une peine pécuniaire,
et que son grief n'a pas été réglé d'une manière satisfaisante pour lui, il peut renvoyer le grief à l'arbitrage.
Décision de l'arbitre
96. (2) Après avoir étudié le grief, l'arbitre doit rendre une décision à son sujet et
a) en faire parvenir copie à chaque partie et à son repré- sentant ainsi qu'à l'agent négociateur, s'il en est, pour l'unité de négociation à laquelle appartient l'employé qui a présenté le grief, et
b) remettre une copie de la décision au secrétaire de la Commission.
(4) Lorsqu'une décision au sujet d'un grief renvoyé à l'arbitrage exige qu'une mesure soit prise par l'employeur ou de sa part, l'employeur doit prendre cette mesure.
(5) Lorsqu'une décision au sujet d'un grief exige qu'une mesure soit prise par l'employé, par un agent négociateur ou par les deux, ou de leur part, l'employé ou l'agent négocia- teur, ou les deux, selon le cas, doivent prendre cette mesure.
La différence frappante entre l'étendue des sujets à l'égard desquels un employé peut «faire un grief» en vertu de l'article 90(1) et l'étendue des sujets à l'égard desquels on peut faire un renvoi à l'«arbitrage» en vertu de l'article 91(1) est imputable à l'omission dans cette disposition des sujets couverts par l'article 90(1) à l'alinéa a)(i). En d'autres mots, alors qu'il existe un droit à l'«arbitrage» à l'égard de
a) l'interprétation ou l'application en ce qui concerne la personne s'estimant lésée, d'une disposition d'une convention collective ou d'une décision arbitrale, ou
b) d'une mesure disciplinaire entraînant le congédiement, la suspension ou une peine pécuniaire,
il n'existe pas de droit à l'arbitrage proprement dit relativement aux griefs portant sur l'interpré- tation ou l'application, à l'égard de la personne s'estimant lésée, d'une disposition d'une loi, d'un règlement, d'une instruction ou d'un autre
instrument établi ou émis par l'employeur, con- cernant des conditions d'emploi.
Il semble que le point de vue sur lesquel l'arbitre en chef s'est appuyé pour se déclarer compétent en l'espèce', se reflète dans le para- graphe suivant tiré d'une partie de la décision motivée de la majorité de la Commission dans laquelle les prétentions de «l'avocat de l'em- ployeur» étaient résumées:
9. Une question peut se poser à première vue, et cette question est celle de savoir si un arbitre possède l'autorité voulue pour enquêter au sujet d'une plainte présentée par un employé et faisant suite à la cessation de son emploi aux termes des dispositions de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique. A prime abord, la réponse peut sembler négative. Toutefois, un arbitre a effectivement compétence pour établir si ce qu'on prétend être une cessation d'emploi aux termes de quelque disposition de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique est en fait une mesure discipli- naire entraînant le congédiement. Si les faits produits comme élément de preuve dans toute affaire en particulier établissent que la cessation d'emploi est de caractère disci- plinaire, l'arbitre a le droit d'entendre les deux parties et de décider si oui ou non la peine était justifiée.
Il semble que les dispositions législatives régissant la Fonction publique, telles que modi fiées par la législation de 1966-67, celles portant sur la retraite avec plan de pension exceptées, prévoient différentes façons par lesquelles une personne peut perdre son emploi dans la Fonc- tion publique. Les façons suivantes font l'objet de dispositions expresses:
1. La démission
Voir l'article 26 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, qui se lit comme suit:
26. Un employé peut démissionner de la Fonction publi- que en donnant au sous-chef un avis écrit de son intention de démissionner. Cet employé cesse de l'être à compter du jour le sous-chef accepte, par écrit, sa démission.
2. Le renvoi
Voir l'article 28 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, qui se lit comme suit:
28. (1) Un employé est considéré comme stagiaire depuis la date de sa nomination jusqu'au terme de la période que la Commission peut fixer pour tout employé ou classe d'employés.
(2) Si la personne nommée fait déjà partie de la Fonction publique, le sous-chef peut, s'il le juge opportun, dans un cas quelconque, réduire le stage ou en dispenser l'employé.
(3) A tout moment au cours du stage, le sous-chef peut prévenir l'employé qu'il se propose de le renvoyer, et
donner à la Commission un avis de ce renvoi projeté, pour un motif déterminé, au terme du délai de préavis que la Commission peut fixer pour tout employé ou classe d'em- ployés. A moins que la Commission ne nomme l'employé à un autre poste dans la Fonction publique avant le terme du délai de préavis qui s'applique dans le cas de cet employé, celui-ci cesse d'être un employé au terme de cette période.
(4) Lorsqu'un sous-chef prévient qu'il se propose de ren- voyer un employé pour un motif déterminé, conformément au paragraphe (3), il doit fournir à la Commission les raisons de son intention.
(5) Nonobstant la présente loi, une personne qui cesse d'être un employé conformément au paragraphe (3)
a) doit, si elle a accédé à son poste alors qu'elle était déjà membre de la Fonction publique, et
b) peut, dans tout autre cas,
être inscrite par la Commission sur telle liste d'admissibilité et à tel rang sur cette liste qui, de l'avis de la Commission, correspondent à ses aptitudes.
3. L'expiration de la période d'emploi
Voir l'article 25 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, qui se lit comme suit:
25. Un employé nommé pour une période spécifiée cesse d'être un employé à l'expiration de ladite période.
4. L'abandon
Voir l'article 27 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, qui se lit comme suit:
27. Lorsqu'un employé s'absente de son poste pendant une semaine ou davantage, sauf pour des raisons qui, de l'avis du sous-chef, sont indépendantes de sa volonté, ou sauf en conformité de ce qui est autorisé ou prévu par une loi du Parlement ou sous son régime, le sous-chef peut, au moyen d'un écrit approprié adressé à la Commission, décla- rer que l'employé a abandonné le poste qu'il occupait. Cet employé cesse dès lors d'être un employé.
5. La mise en disponibilité
Voir l'article 29 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, qui se lit comme suit:
29. (1) Lorsque les services d'un employé ne sont plus requis, soit faute de travail, soit par suite de la suppression d'une fonction, le sous-chef peut, en conformité des règle- ments de la Commission, mettre l'employé en disponibilité.
(2) Un employé cesse d'être un employé lorsqu'il est mis en disponibilité en vertu du paragraphe (1).
(3) Nonobstant la présente loi, la Commission doit, dans le délai et selon l'ordre qu'elle peut fixer, étudier la possibi- lité de nommer, sans concours et, sous réserve des articles 30 et 37, en priorité absolue un employé mis en disponibilité à tout poste de la Fonction publique pour lequel la Commis sion le juge qualifié.
6. Le congédiement ou renvoi
Il existe trois catégories de congédiement ou renvoi, savoir:
a) Le renvoi pour incompétence ou incapa- cité
Voir l'article 31 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, qui se lit comme suit:
31. (1) Lorsque, de l'avis du sous-chef, un employé est incompétent dans l'exercice des fonctions de son poste, ou qu'il est incapable de remplir ces fonctions, et qu'il devrait
a) être nommé à un poste avec un traitement maximum inférieur, ou
b) être renvoyé,
le sous-chef peut recommander à la Commission que l'em- ployé soit ainsi nommé ou renvoyé, selon le cas.
(2) Le sous-chef doit donner à un employé un avis écrit de toute recommandation visant la nomination de l'employé à un poste avec un traitement maximum inférieur ou son renvoi.
(3) Dans tel délai subséquent à la réception de l'avis mentionné au paragraphe (2) que prescrit la Commission, l'employé peut en appeler de la recommandation du sous- chef à un comité établi par la Commission pour faire une enquête au cours de laquelle il est donné à l'employé et au sous-chef en cause, ou à leurs représentants, l'occasion de se faire entendre. La Commission doit, après avoir été informée de la décision du comité par suite de l'enquête,
a) avertir le sous-chef en cause qu'il ne sera pas donné suite à sa recommandation, ou
b) nommer l'employé à un poste avec un traitement maxi mum inférieur ou le renvoyer,
selon ce qu'a décidé le comité.
(4) S'il n'est interjeté aucun appel d'une recommandation du sous-chef, la Commission peut prendre, relativement à cette recommandation, la mesure qu'elle estime opportune.
(5) La Commission peut renvoyer un employé en confor- mité d'une recommandation formulée aux termes du présent article; l'employé cesse dès lors d'être un employé.
b) Le congédiement en tant que sanction de manquements à la discipline ou de l'inconduite
Voir l'article 7(1)f) de la Loi sur l'adminis- tration financière:
7. (1) Sous réserve des dispositions de tout texte législatif concernant les pouvoirs et fonctions d'un employeur dis tinct, mais nonobstant quelque autre disposition contenue dans tout texte législatif, le conseil du Trésor peut, dans l'exercice de ses fonctions relatives à la direction du person nel de la fonction publique, notamment ses fonctions en matière de relations entre employeur et employés dans la fonction publique, et sans limiter la généralité des articles 5 et 6,
f) établir des normes de discipline dans la fonction publi- que et prescrire les sanctions pécuniaires et autres, y compris la suspension et le congédiement, qui peuvent
être appliquées pour manquements à la discipline ou pour inconduite et indiquer dans quelles circonstances, de quelle manière, par qui et en vertu de quels pouvoirs ces sanctions peuvent être appliquées, ou peuvent être modi fiées ou annulées, en tout ou en partie;
c) Divers
Voir l'article 24 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, qui se lit comme suit:
24. Un employé occupe sa charge durant le bon plaisir de Sa Majesté sous réserve de la présente loi et de toute autre loi ainsi que des règlements établis sous leur régime et, à moins qu'une autre période ne soit spécifiée, pendant une période indéterminée.
«Durant le bon plaisir de Sa Majesté» est l'expression traditionnelle utilisée pour quali fier l'emploi des préposés de la Couronne auquel il peut être mis fin sans avis et sans motif déterminé.
Il convient de remarquer que toutes ces façons de mettre fin à un emploi peuvent éventuelle- ment donner lieu à des litiges sur le point de savoir si les mesures nécessaires ont effective- ment été prises et peuvent éventuellement donner lieu à des litiges quant à l'effet de la loi. Toutefois, ce n'est que dans le cas «d'une mesure disciplinaire entraînant le congédie- ment» que la méthode appropriée pour trancher le litige est le renvoi à l'arbitrage.
En l'espèce, l'employeur a d'abord prétendu «congédier» le requérant après la fin de la période durant laquelle il pouvait être congédié. Il est admis que ce prétendu congédiement était nul.
Le grief de l'employé relatif à cette tentative de «congédiement» a été renvoyé à l'arbitre en chef. Ayant admis que le congédiement était nul, l'arbitre en chef a néanmoins décidé qu'il devait, en prenant pour acquis que le congédie- ment nul était en fait un renvoi à caractère disciplinaire, entendre le grief et décider si ledit congédiement était justifié. Sans établir de «manquement à la discipline» ni d'«inconduite», l'arbitre en chef a estimé que «les exigences du poste de préposé au soin des enfants ne conve- naient pas» au requérant et a conclu notamment «que la cessation d'emploi ... était justifiée».
Tout en reconnaissant que l'arbitre en chef a tenté de manière très rigoureuse de trancher le bien-fondé de la question en toute équité, ce pour quoi on doit le féliciter, je suis obligé de conclure qu'il n'existe pas de fondement juridi- que à sa décision.
Selon mon interprétation, aucun élément de preuve ressortant des documents soumis aux tribunaux en cause, y compris cette Cour, ne permet de conclure que le requérant a perdu son emploi. Les parties ont admis que le renvoi était nul en tant que tel. Elles ne prétendent pas qu'il s'agissait d'un congédiement et encore moins d'un congédiement pour inconduite. A mon avis, ayant essayé de faire perdre son emploi à un employé en le renvoyant après l'expiration de la période du stage, l'employeur ne pouvait, dans ce cas, s'appuyer après coup sur le document de renvoi pour dire que l'employé avait perdu son emploi par suite d'un congédiement pour incon- duite. Non seulement le document de renvoi ne relève pas, en sa forme, des pouvoirs de congé- diement accordés par la loi mais encore un employé ne peut, sur le fond, être renvoyé pour des raisons disciplinaires ou pour inconduite sans être informé des motifs de ce renvoi de façon à lui permettre d'y répondre, avant d'être congédié et à chaque étape de la procédure de grief. Je répète que d'après les éléments de preuve soumis, à mon avis, le requérant n'a jamais perdu son emploi. En outre, il est diffi- cile de voir comment, étant donné les conclu sions de fait de l'arbitre en chef, il pourrait être question de congédiement pour des raisons dis- ciplinaires. Ayant déterminé que «les exigences du poste de préposé aux enfants ne convenaient pas» au requérant, il semble que la disposition la plus appropriée est l'article 31 qui prévoit une procédure particulière et un choix de traite- ments applicables à un employé qui est «incom- pétent dans l'exercice des fonctions de son poste».
Vu sous cet angle, aucune «mesure discipli- naire» 5 n'était soumise à l'arbitre en chef. Ce qu'on lui soumettait, c'était un renvoi illégal et il ne semble pas y avoir de fondement possible pour décider qu'il était compétent pour trancher un grief à cet égard. A mon avis, il aurait donc
rejeter le renvoi au motif qu'il n'avait pas compétence.
Il s'ensuit que la Commission, lors du renvoi en vertu de l'article 23, aurait déclarer, au lieu de décider que la cessation d'emploi était justifiée et de demander au conseil du Trésor de la valider, que l'arbitre en chef aurait rejeter le renvoi du grief du requérant à l'arbitrage au motif qu'il n'avait pas compétence.
En conséquence, j'estime que la décision de la Commission doit être annulée et l'affaire ren- voyée à la Commission pour décision prenant pour acquis a) que ce qu'elle devait déterminer dans le renvoi en vertu de l'article 23, c'était quelle décision l'arbitre en chef aurait rendre eu égard aux faits qu'il a établis, et b) que l'arbitre en chef n'était pas compétent pour con- naître du renvoi à l'arbitrage du grief du requérant.
* W *
LE JUGE THURLOW (oralement)—En sub stance, je suis d'accord avec les motifs de juge- ment du juge en chef mais je préfère appuyer mon point de vue sur un cheminement quelque peu différent.
A mon sens, ce qu'on soumet à l'examen de cette Cour en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, comme étant la décision de la Commission, ce n'est ni le raisonnement de cette dernière ni les réponses qu'elle a apportées aux questions présentées dans le renvoi. A mon avis, sa décision est la confirmation de l'action de l'arbitre. J'utilise le mot «décision» parce que c'est le mot utilisé à l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique. Dans son contexte, il me semble signifier la décision, l'ordonnance, le jugement ou la con clusion juridique de la Commission. En consé- quence, ce qui est soumis à cette Cour est la légalité de la décision selon laquelle Wright a été effectivement congédié à la suite du prétendu renvoi.
A mon avis, cette décision n'a aucune valeur en droit pour plusieurs raisons. Le prétendu
renvoi de Wright était nul. Le grief de Wright ne pouvait pas faire l'objet d'un renvoi à l'arbi- trage. L'arbitre n'avait pas compétence pour déclarer le renvoi nul en tant que renvoi et il n'existait aucun fondement lui permettant de déclarer qu'il s'agissait d'un congédiement. Ce n'est en aucune façon un congédiement à carac- tère disciplinaire. Il n'y a aucun fait permettant de le considérer comme une mesure discipli- naire quelle quelle soit. On ne peut le considérer comme un congédiement et, a fortiori, comme un congédiement valable.
J'annule donc la décision de la Commission et renvoie la question à cette dernière pour qu'elle l'examine comme l'ordonne le juge en chef.
* * *
LE JUGE PRATTE—Pour les motifs exposés par le juge en chef, je suis d'avis que l'arbitre en chef n'avait pas compétence pour entendre le grief du requérant et rendre une décision. Dans ces circonstances, la question de savoir si l'arbi- tre en chef a par ailleurs commis une erreur de droit en rendant sa décision à cet égard est absolument théorique et, en conséquence, elle ne pouvait être renvoyée à la Commission des relations de travail dans la Fonction publique en vertu de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-35. La Commission n'était pas compétente pour trancher les deux questions de droit soumi- ses par le requérant; elle aurait refuser d'y répondre.
Pour ces motifs, je suis d'avis que la décision actuellement contestée doit être annulée.
28. (1) Nonobstant l'article 18 ou les dispositions de toute autre loi, la Cour d'appel a compétence pour entendre et juger une demande d'examen et d'annulation d'une déci- sion ou ordonnance, autre qu'une décision ou ordonnance de nature administrative qui n'est pas légalement soumise à un processus judiciaire ou quasi judiciaire, rendue par un office, une commission ou un autre trinunal fédéral ou à l'occasion de procédures devant un office, une commission ou un autre tribunal fédéral, au motif que l'office, la com mission ou le tribunal
a) n'a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d'exercer sa compétence;
b) a rendu une décision ou une ordonnance entachée d'une erreur de droit, que l'erreur ressorte ou non à la lecture du dossier; ou
c) a fondé sa décision ou son ordonnance sur une conclu sion de fait erronée, tirée de façon absurde ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.
2 Voir In re l'article 107 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique [1973] C.F. 604. Comme je l'ai indiqué en l'espèce, les pouvoirs de la Cour aux termes d'une disposition de ce genre ne sont pas très diffé- rents des pouvoirs d'un tribunal pour trancher une question de droit avant le procès. Comparer avec l'arrêt Libbey- Owens-Ford Glass Company c. Ford Motor Company (1968) 38 Fox 76 (et les arrêts y mentionnés).
3 C'est-à-dire, rendre une décision portant que, comme les questions posées n'étaient pas des questions de la catégorie de celles envisagées à l'article 23, la Commission ne pouvait les trancher.
Toutefois, je ne pense pas qu'un point de vue aussi rigoureux ou technique soit approprié dans la mise en oeuvre de cette législation. Ce n'est pas la chasse gardée des avocats; une interprétation qui favorise l'exercice de la compétence de la Commission pour trancher une question de droit qui est effectivement soulevée dans une affaire, et ainsi permet de corriger les erreurs de droit, semble plus en harmonie avec l'intention du législateur.
4 Il déclarait: «Je suis obligé de considérer ce renvoi à l'arbitrage comme portant sur un congédiement discipli- naire».
Je n'exprime aucune opinion sur l'exactitude de certai- nes décisions de la Commission ou des arbitres mentionnées au dossier. Les cas auxquels je fais allusion sont ceux un arbitre s'est déclaré compétent bien que l'action porte, par la forme, sur un renvoi, au motif que ce dernier, dans le cas particulier, constitue un congédiement résultant d'une mesure disciplinaire. Si je saisis bien ce qu'on a dit au sujet de ces décisions (je n'ai pas eu la possibilité de les lire), dans chaque cas le renvoi était valide, mais par ailleurs il s'est en fait avéré que ce n'était pas un exercice bona fide du pouvoir de renvoi ou que, de toute façon, il s'agissait en fait d'un congédiement résultant d'une mesure disciplinaire; l'ar- bitre se trouvait ainsi compétent dans des cas où, par ailleurs, l'employé aurait perdu son emploi par «renvoi». On doit trancher chaque cas d'après les faits en cause. En l'espèce, l'employé n'a pas été valablement renvoyé et l'em- ployeur prétend, après coup, que le renvoi était un congédie- ment, ce qui n'était pas le cas, de façon à justifier son point de vue selon lequel l'employé avait perdu son emploi alors qu'aucune action valable n'avait été prise pour ce faire. En examinant si l'on peut considérer l'action prise pour que l'employé perde son emploi, c'est-à-dire la procédure for- melle, en vertu d'un pouvoir comme l'ayant été en vertu d'un autre, il faudrait tenir compte d'une décision très récente de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Bell Canada c. L'Union internationale des employés profession- nels et de bureau, local 131, datée du 28 mai 1973—pas encore publiée.
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