Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Richard Paul Kukan (Appelant) c.
Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigra- tion (Intimé)
Cour d'appel (73-A-30), le juge en chef Jac- kett—Ottawa, le 7 janvier 1974.
Pratique—Demande de prorogation du délai imparti pour demander la permission d'interjeter appel—Procédure—Loi sur la Commission d'appel de l'immigration, art. 23—Règles 319(2), 324 et 1107 de la Cour fédérale.
Une demande de prorogation du délai imparti relativement à l'autorisation d'interjeter appel doit être faite par écrit conformément aux Règles 324 et 1107 de la Loi sur la Cour fédérale, sans qu'il soit besoin de tenir compte de la date ni de l'endroit siège la Cour. Conformément à la Règle 319(2), le requérant doit, dans un affidavit déposé à l'appui de sa demande, convaincre la Cour qu'il existe un motif défendable sur la base duquel l'appel envisagé pourrait être accueilli. Il doit en outre soumettre à la Cour le dossier des procédures et le jugement ou les motifs du tribunal ou de la Cour dont il est interjeté appel.
REQUÊTE. AVOCATS:
Requête par écrit conformément à la Règle 1107.
PROCUREURS:
Dickins et Richards, Edmonton, pour l'appelant.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé.
LE JUGE EN CHEF JACKETT—Il s'agit en l'es- pèce d'une demande de prorogation du délai imparti pour demander la permission d'interjeter appel, conformément à l'article 23 de la Loi sur la Commission d'appel de l'immigration, qui se lit comme suit:
23. (1) Sur une question de droit, y compris une question de juridiction, il peut être porté à la Cour d'appel fédérale un appel d'une décision de la Commission visant un appel prévu par la présente loi, si permission d'interjeter appel est accordée par ladite Cour dans les quinze jours après le prononcé de la décision dont est appel ou dans tel délai supplémentaire qu'un juge de cette Cour peut accorder pour des motifs spéciaux.
La partie essentielle de l'avis de requête se lit comme suit:
[TRADUCTION] SACHEZ que le requérant sollicite par la présente une prorogation du délai imparti pour demander, par voie de requête, la permission d'interjeter appel de la décision de la Commission d'appel de l'immigration datée du 8 novembre 1973 et signée le 9 novembre 1973 à Vancouver (Colombie-Britannique), dossier 71-3197; l'appel se fonde sur les motifs suivants:
1. La composition de la Commission n'était pas conforme à l'article 6(3) de la Loi sur la Commission d'appel de l'immigration.
2. La décision de la Commission est invalide.
3. On n'a soumis à la Commission aucune preuve en bonne et due forme lui permettant de rendre une décision correcte.
4. La preuve soumise à la Commission était insuffisante pour étayer une décision correcte de sa part.
5. La Commission aurait ordonner de surseoir à l'exécu- tion de l'ordonnance d'expulsion en cause conformément à l'article 15 de la Loi sur la Commission d'appel de l'immi- gration, en raison de l'existence, en l'espèce, de certaines circonstances prévues audit article.
6. Le crime dont fait mention l'ordonnance d'expulsion n'implique aucunement la «turpitude morale..
7. L'ordonnance d'expulsion est invalide en ce qu'elle invo- que l'article 19 de la Loi sur l'immigration.
8. Tout autre motif que la Cour estimera juste.
ET SACHEZ EN OUTRE qu'un affidavit de l'avocat du requé- rant-appelant a été déposé au dossier à l'appui de la présente requête.
La partie essentielle de cet affidavit se lit comme suit:
[TRADUCTION] 1. Je suis l'avocat du requérant-appelant dans l'affaire susmentionnée.
2. Le présent affidavit vient appuyer une demande adressée à cette cour, visant la prorogation du délai imparti pour demander, par voie de requête, la permission d'interjeter appel d'une décision de la Commission d'appel de l'immigra- tion rendue le 8 novembre 1973 et signée le 9 novembre 1973 à Vancouver (Colombie-Britannique), dossier 71-3197.
3. J'ai reçu le 15 novembre 1973 une copie de la décision susmentionnée rendue le 8 novembre 1973.
4. Le 15 novembre 1973, j'ai écrit au registraire de la Commission d'appel de l'immigration, à Vancouver (Colom- bie-Britannique), pour l'aviser que le requérant-appelant avait l'intention d'interjeter appel et demandait un exposé des conclusions de fait ainsi que les motifs du jugement relatifs à la, décision du 8 novembre 1973.
5. Le 20 novembre 1973, j'ai reçu une réponse du regis- traire de la Commission d'appel de l'immigration, à Vancou- ver (Colombie-Britannique), datée du 16 novembre 1973, m'informant que la demande faite le 15 novembre 1973 avait été communiquée à la Commission.
6. La Cour ne doit pas siéger à Edmonton avant les 10, 11 et 12 décembre 1973, comme me l'a fait savoir le greffier de la Cour à Edmonton, ce que je tiens pour vrai.
7. En raison des circonstances susdites, on ne peut présen- ter à la Cour une demande d'autorisation d'interjeter appel dans le délai fixé à l'article 23 de la Loi sur la Cour fédérale [sic], tel que modifié, et, pour les raisons susdites, le requé- rant-appelant demande une prorogation du délai suffisante pour lui permettre de présenter à la Cour une telle demande.
On peut répondre facilement à la demande, telle qu'exposée dans l'avis de requête consi- déré en corrélation avec l'affidavit, en se repor- tant au fait que ladite demande est fondée sur une prétendue impossibilité de demander une autorisation dans les délais prévus à l'article 23 de la Loi sur la Commission d'appel de l'immi- gration, du fait que l'affidavit a été déposé le 22 novembre 1973 alors que «la Cour ne devait pas siéger à Edmonton avant les 10, 11 et 12 décembre 1973». Ce fait n'est absolument pas pertinent. Vu la Règle 1107,' la demande d'au- torisation d'interjeter appel aurait pu être faite par écrit conformément à la Règle 324, 2 (c'est en fait la seule façon de la présenter), et, comme l'indique la Règle 324, une telle demande peut être présentée sans qu'il soit besoin de tenir
' La Règle 1107 se lit en partie comme suit:
i
Règle 1107. (1) A moins que, d'office ou sur requête ex parte, le juge en chef ou un juge qu'il aura désigné n'en ordonne- autrement pour un motif spécial,
a) une demande de permission d'appeler d'un jugement de la Cour d'appel à la Cour suprême du Canada, faite en vertu de l'article 31(2) comme l'indique la règle 1106(1)[i),
b) une demande de permission d'appeler à la Cour d'appel, ou
c) une demande de prorogation de délai adressée à la Cour d'appel ou à un juge de cette Cour,
doit être faite de la manière prévue par la règle 324 et les dispositions des paragraphes (2), (3) et (4) de la règle 324 s'appliquent à toute pareille demande comme si elle était faite aux termes du paragraphe (1) de la règle 324.
2 La Règle 324 se lit en partie comme suit:
Règle 324. (1) La décision relative à une requête pour le compte d'une partie peut, si la partie le demande par lettre adressée au greffe, et si la Cour ou un protonotaire, selon le cas, l'estime opportun, être prise sans comparution en personne de cette partie ni d'un procureur ou solicitor pour son compte et sur la base des observations qui sont soumises par écrit pour son compte ou d'un consentement signé par chaque autre partie.
(2) Une copie de la demande de prise en considération d'une requête sans comparution personnelle et une copie des observations écrites doivent être signifiées à chaque partie opposante en même temps que lui est signifiée la copie de l'avis de requête.
compte de la date ni de l'endroit siège la Cour.'
Étant donné que la Règle 1107 traite dans les mêmes termes des demandes de permission d'interjeter appel et des demandes de proroga- tion de délai et que cette demande de proroga- tion de délai a été présentée en conformité de la Règle 1107, il est difficile de comprendre com ment on a pu penser qu'il était impossible de présenter la demande de permission d'interjeter appel dans les délais prévus à l'article 23 de la Loi sur la Commission d'appel de l'immigration.
Même s'il s'agissait d'une raison justifiant un retard dans la présentation d'une demande de permission, une prorogation du délai ne serait pas accordée à moins que le requérant n'ait convaincu la Cour qu'il existe un motif défenda- ble sur la base duquel l'appel envisagé pourrait être accueilli. Or, dans les prétentions écrites déposées au nom de l'intimé, on a soulevé le fait que le dossier déposé à la Cour par le requérant
(3) Une partie qui s'oppose à une requête présentée en vertu du paragraphe (1) peut adresser des observations par écrit au greffe et à chaque autre partie ou elle peut déposer une demande écrite d'audition orale et en adres- ser une copie à la partie adverse.
(4) La Cour ne doit rendre aucune décision au sujet d'une requête présentée en vertu du paragraphe (1) avant d'être convaincue que toutes les parties intéressées ont eu une possibilité raisonnable de présenter des observations écrites ou orales, à leur choix.
Si la requête était de celles qui doivent être présentées verbalement à la Cour, on aurait alors demander au greffe de fixer une séance spéciale avant d'affirmer qu'il n'y avait aucune séance appropriée. Voir la Règle 317(4), qui se lit comme suit:
(4) On peut, sans formalité spéciale, demander au greffe de fixer spécialement les temps et lieu d'une séance de la Cour d'appel ou d'un juge de cette Cour destinée à l'audition d'une requête quelconque ou les temps et lieu d'une séance de la Division de première instance destinée à l'audition d'une requête qui pourra prendre un temps Considérable ou qui, pour quelque raison, doit être enten- due à un autre moment qu'au cours d'un jour réservé à l'audition des requêtes ou d'un jour de séance générale.
On peut faire une telle demande par un appel téléphoni- que interurbain au greffe d'Ottawa si des difficultés surgissent.
n'était pas suffisant pour établir l'existence d'un tel motif défendable; le requérant y répliqua de la manière suivante:
[TRADUCTION] 1. Les moyens de l'appel sont énoncés dans l'avis de requête ci-joint.
2. L'appel est fondé en outre sur un autre moyen, savoir, le fait qu'il y a au dossier des faits erronés sur lesquels était fondée la décision portée en appel; notamment, le crime commis aux États-Unis était «un détournement de biens par un fonctionnaire» et non «une appropriation frauduleuse de biens», il n'a pas quitté son épouse, mais c'est elle qui l'a quitté en emmenant les enfants, il a subvenu aux besoins des enfants et ne peut comprendre comment son épouse a pu bénéficier de l'assistance sociale alors qu'elle tenait deux emplois concurremment; en outre, la mention de «détourne- ment de fonds» est erronée et la déclaration portant qu'«il semble être de caractère très irrégulier sans aucune possibi- lité d'amélioration» est incorrecte et préjudiciable.
3. Le dossier soumis à la Cour permet d'étayer les points mentionnés dans ledit avis de requête et ledit motif addition- nel, car il comprend:
a) le jugement, le dossier de la Commission d'appel de l'immigration ainsi que l'enquête préalable;
b) l'avis de requête ci-joint et l'affidavit soumis à l'appui de celui-ci;
c) les présentes prétentions écrites.
Ces prétentions révèlent une conception erro- née de la pratique de cette cour (et, autant que je sache, de tout autre tribunal canadien). La Règle 319 de la Cour fédérale se lit en partie comme suit:
Règle 319. (1) Lorsqu'il est permis de faire une demande à la Cour, à un juge ou un protonotaire, la demande doit être faite par voie de requête.
(2) Une requête doit être appuyée par un affidavit certi- fiant tous les faits sur lesquels se fonde la requête sauf ceux qui, ressortent du dossier; cet affidavit doit être déposé, et une partie adverse peut déposer un affidavit en réponse.
Les exposés des faits présentés dans un avis de requête ou dans une plaidoirie écrite doivent être établis par un ou plusieurs affidavits versés à l'appui de ladite requête conformément à la Règle 319(2).' On n'a soumis à la Cour aucun autre document concernant cette affaire, si ce n'est l'affidavit susmentionné. On a notamment omis de lui soumettre l'ordonnance d'expulsion, le dossier des procédures engagées devant la Commission d'appel de l'immigration, le juge- ment de la Commission et les motifs dudit jugement.
^ L'exception concernant des faits qui «ressortent du dos sier» ne s'applique pas en l'espèce, car l'avis de requête présenté à l'appui de cette demande constitue la première procédure relative à cette affaire devant la Cour.
Je mentionne cet aspect de l'affaire parce que, si le requérant décide de poursuivre des procédures, il doit être clair qu'il lui faut sou- mettre à la Cour, de la manière prévue dans les Règles, les faits permettant d'appuyer sa requête, à défaut de quoi la requête devra être rejetée.
La demande est rejetée, mais elle peut être reprise, sur dossier approprié, si la nouvelle demande est présentée sans retard. Je suggère que, si la demande de prorogation du délai est renouvelée, on présente conjointement une demande d'autorisation, par voie d'avis de requête séparé, mais fondé sur le dossier déposé à l'appui de la demande de prorogation de délai, auquel elle renverrait.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.