Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

74-A-5
L'Association des consommateurs du Canada et Pollution Probe de l'Université de Toronto (Requérants)
c.
La Commission d'énergie hydro-électrique de l'Ontario, l'Office national de l'énergie et Sa Majesté la Reine du chef de la province de l'Onta- rio (le ministre de l'Énergie de l'Ontario) (Intimés)
[N ° 2]
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, les juges Pratte et Heald—Ottawa, le 19 mars 1974.
Pratique—Demande d'annulation d'une décision de l'Of- fice national de l'énergie—Demande de prorogation du délai imparti—Ajournement selon les mêmes termes que la demande d'autorisation (No 11 précitée—Loi sur la Cour fédérale, art. 28.
Arrêt: le dossier soumis à la Cour est insuffisant et ne peut justifier l'octroi d'un délai supplémentaire. La Cour a jugé que la décision sur cette demande suivrait la décision sur la demande d'autorisation d'interjeter appel ([No 1] précitée) à condition que, si elle est soumise à un débat oral, ce débat ait lieu en même temps que celui portant sur la demande d'autorisation.
Arrêt examiné: Aly c. Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration [1971] C.F. 540.
DEMANDE. AVOCATS:
Aucune comparution, demande par écrit en vertu de la Règle 324.
PROCUREURS:
Andrew J. Roman, Ottawa, pour les requérants.
Weir & Foulds, Toronto, pour la Commis sion d'énergie hydro-électrique, intimée.
F. H. Lamar, Ottawa, pour l'Office national de l'énergie, intimé.
Morris Manning, Toronto, pour Sa Majesté la Reine du chef de l'Ontario, intimée.
Le sous-procureur général du Canada pour Sa Majesté la Reine du chef du Canada.
LE JUGE EN CHEF JACKETT—I1 s'agit d'une demande présentée au nom de «l'Association
des consommateurs du Canada et Pollution Probe de l'Université de Toronto» visant à obte- nir une ordonnance accordant un délai supplé- mentaire pour introduire une demande en vertu de l'article 28 «pour interjeter appel d'une déci- sion de l'Office national de l'énergie, en date de novembre 1973, accordant la licence EL-76, et signifiée aux requérants le 7 janvier 1974». (Vu le contexte, il convient de considérer que l'expression «interjeter appel» est erronée et devrait être «demander l'annulation».)
Le seul document soumis à l'appui de cette demande consiste en un affidavit dont la partie essentielle se lit comme suit:
[TRADUCTION] Je, Michael J. Trebilcock, de la ville de Toronto (province de l'Ontario), professeur de droit à l'Uni- versité de Toronto, déclare, sous serment:
1. Que je suis président du Comité de la défense du con- sommateur de l'Association des consommateurs du Canada et qu'en cette qualité, j'ai connaissance des questions sur lesquelles porte cette déposition.
2. On m'a présenté un communiqué de presse de l'Office national de l'énergie, daté du 3 janvier 1974, que je joins à mon affidavit, comme pièce «A».
3. Le communiqué de presse mentionné au paragraphe 2, ainsi que les motifs de la décision de l'Office national de l'énergie intitulée: «Rapport de l'Office national de l'énergie au gouverneur en conseil, concernant une demande faite sous l'empire de la Loi sur l'Office national de l'énergie par la Commission d'énergie hydro-électrique de l'Ontario», ont été envoyés, par courrier ordinaire, aux intervenants dans cette affaire, les requérants susmentionnés, et leur sont parvenus, le 7 janvier 1974.
4. Pollution Probe de l'Université de Toronto n'a pas de conseil juridique et doit donc compter sur les services de l'avocat de l'Association des consommateurs du Canada; c'est pourquoi Pollution Probe a attendre, pour déposer un avis introductif d'instance en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, que l'Association des consomma- teurs du Canada ait pris la décision d'interjeter appel.
5. L'avocat de l'Association des consommateurs du Canada n'est en aucun cas autorisé à introduire un appel sans l'approbation du comité que je préside.
6. Ce comité comprend dix citoyens spécialisés dans tous les domaines y compris le droit, les sciences économiques, les libertés civiles et la consommation, assistés d'un comité consultatif comprenant 12 autres membres, résidant à tra- vers le Canada. Compte tenu du temps nécessaire pour prendre contact avec un nombre suffisant des personnes susmentionnées, il n'était pas possible de convoquer une réunion avant le mercredi 30 janvier 1974.
7. II était donc impossible, vu les circonstances, de deman- der à l'avocat d'introduire une action en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale dans les dix jours à compter de la date ladite décision a été signifiée aux requérants.
8. Le présent affidavit vient appuyer une demande soumise à la Cour d'appel fédérale visant à obtenir un délai supplé- mentaire pour présenter un avis introductif d'instance dans cette action selon les dispositions de l'article 28.
On trouve, jointe à cet affidavit, une pièce qui se lit comme suit:
POUR DIFFUSION IMMÉDIATE
L'OFFICE NATIONAL DE L'ÉNERGIE DÉLIVRE UNE LICENCE D'EXPORTATION DE FORCE MOTRICE A L'HYDRO-ONTARIO
OTTAWA—le 3 janvier 1974—Le ministre de l'Énergie, des Mines et des Ressources, l'honorable Donald S. Macdonald, annonce aujourd'hui que l'Office national de l'énergie, sur approbation du gouverneur en conseil, a délivré la licence EL-76 à l'Hydro-Ontario, éliminant ainsi la clause du trans- fert d'équivalents qui figurait dans l'ancienne licence d'ex- portation de force motrice EL-33.
La nouvelle licence, qui expire le 31 décembre 1975, supprime la limite nette à l'exportation et permet d'exporter le total brut de 8,250 gigawatts-heures par année qui était autorisé en vertu de la licence EL-33. Les livraisons devront être interrompues ou diminuées lorsque la puissance sera nécessaire à l'approvisionnement en énergie-primaire au Canada. La plus grande partie de l'électricité à exporter proviendra de houille importée.
En 1965, à l'audition préalable à la délivrance de la licence EL-33, il apparaissait clairement que 70 80% de l'énergie exportée serait constituée de transferts non contrô- lés d'équivalents acheminés vers les États-Unis sur des lignes de transmission et, simultanément, réacheminés vers le Canada sur d'autres. L'Office jugea donc indispensable d'inclure dans la licence EL-33 une clause qui stipulait que l'exportation était permise sous réserve du réachemine- ment continu vers le Canada de quantités déclarées d'équi- valents. Cette exigence imposait effectivement une limite maximum implicite à l'exportation nette de 3,850 gigawatts- heures. Dans les faits, les quantités d'équivalents ont été sensiblement moindres que ce que l'on avait prévu, et la limite nette implicite a empêché l'Hydro-Ontario d'exporter la quantité annuelle totale possible de 8,250 gigawatts-heu- res.
A l'audition publique tenue à Ottawa en octobre 1973, Pollution Probe et l'Association canadienne des consomma- teurs ont fait une intervention commune. Les intervenants soutenaient notamment que l'Hydro-Ontario n'avait pas tenu compte du coût social de l'augmentation d'exportation nette. Un estimé du coût social a donc été déposé. Le gouverne- ment de l'Ontario est intervenu en faveur de la demande de licence.
L'Office a jugé que le montant estimatif d'environ $8.5 millions de dollars au titre du coût social ne constituait pas un motif suffisant pour rejeter la demande de licence d'ex- portation car il avait été calculé à partir de données contes- tables provenant des É.-U. et ne prenait pas en considéra- tion d'autres éléments fournis par l'Hydro-Ontario. Le président a déclaré qu'à son avis, on pouvait conclure des preuves présentées que le coût social serait inférieur aux
prévisions estimatives et au profit que 1'Hydro-Ontario escomptait retirer de l'exportation. La nouvelle licence expi- rera à la fin de 1975 et l'on peut s'attendre à ce que l'Hydro-Ontario présente dans les deux ans une nouvelle demande à l'Office. L'Office recommande que tout intéressé examine à fond la question du montant du coût social pendant cette période.
L'article 28(1) donne à la Cour la compétence pour annuler certaines décisions ou ordonnan- ces rendues par tout office, commission ou autre tribunal fédéral, en se fondant sur un des motifs énoncés dans ledit article. L'article 28(2) dispose qu'une demande présentée en vertu de l'article 28 peut l'être par le procureur général du Canada «ou toute partie directement âffectée par la décision ou ordonnance», dans les 10 jours qui suivent la première communication de cette décision ou ordonnance, ce délai pouvant être prorogé.
On n'accordera un délai supplémentaire pour présenter une demande en vertu de l'article 28 que si certains éléments du dossier soumis à la Cour permettent à cette dernière de s'assurer que non seulement le défaut de faire la demande dans le délai de 10 jours est justifié, mais aussi que
a) l'on peut au moins soutenir que l'ordon- nance ou décision faisant l'objet de la demande que l'on se propose de présenter en vertu de l'article 28, relève dudit article, et
b) que l'on peut soutenir qu'il existe une cause d'annulation de l'ordonnance ou déci- sion, faisant l'objet de la demande, fondée sur l'un des motifs prévus à l'article 28.
La Cour a invariablement décidé de ne pas accorder de délai supplémentaire pour présenter une demande en vertu de l'article 28 lorsque cette demande, si elle avait été présentée à temps, aurait été radiée en vertu de l'article 52a) de la Loi sur la Cour fédérale.
Rien dans le dossier soumis à la Cour à l'ap- pui de cette demande ne lui permet de s'assurer qu'une de ces conditions est remplie.
Une demande d'autorisation d'interjeter appel de cette même décision a été présentée concur- remment en vertu de l'article 18 de la Loi sur l'Office national de l'énergie, et l'on a accordé aux mêmes requérants la possibilité de soumet- tre l'affaire à un débat oral. Si l'on accorde,
dans ce cas, l'autorisation d'interjeter appel, il se peut que le dossier versé à l'appui de cette demande d'autorisation justifie l'octroi d'un délai supplémentaire pour présenter une demande en vertu de l'article 28. Comparez avec l'arrêt Aly c. Le ministre de la Main-d'oeu- vre et de l'Immigration.' Je propose donc que la décision sur cette demande suive la décision concernant l'autorisation d'interjeter appel, à condition que, si elle est soumise à un débat oral, ce débat ait lieu en même temps que celui portant sur la demande d'autorisation d'interje- ter appel.
* * *
LE JUGE PRATTE—Je souscris à l'ordonnance proposée par le juge en chef.
* * *
LE JUGE HEALD—Je souscris aussi à l'ordon- nance proposée par le juge en chef.
' [1971] C.F. 540.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.