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T-4578-73
Barberlines A/S Barber Steamship Lines, Inc., Wilh. Wilhelmsen D/A A/S Den Norske Afrika- OG Australieline, Wilhelmsens Damp-Skibsak- tieselskap A/S Tonsberg, A/S Tankfart I A/S Tankf art VI (Demanderesses)
c.
Ceres Stevedoring Company Ltd., Metropolitan Marine Terminais Ltd. (Défenderesses)
Division de première instance, le juge Maho- ney—Montréal, le 18 février; Ottawa, le 22 février 1974.
Droit maritime—Cargaison d'un navire déchargée par des acconiers et remise d un sous-traitant pour livraison—Récla- mations des propriétaires du navire relatives aux pertes et dettes résultant de la livraison incomplète ou de la livraison de marchandises en mauvais état—Compétence de la Cour— Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970, c. 10 (2° Supp.), art. 22.
La demanderesse, Barberlines, compagnie de transport maritime appartenant aux autres demanderesses, avait conclu un contrat avec la Ceres Stevedoring Company Ltd., défenderesse, pour les services d'acconage à Montréal. Un navire utilisé par la Barberlines arriva à Montréal et sa cargaison fut déchargée par la Ceres Stevedoring Company Ltd., défenderesse, et remise à la garde de la Marine Termi nals Ltd. pour que celle-ci la livre à divers consignataires conformément aux obligations incombant aux demanderes- ses aux termes des contrats d'affrètement. Certaines de ces marchandises ne furent pas livrées ou le furent avec des retards excessifs, ou furent livrées en mauvais état et de façon incomplète.
Arrêt: l'exécution des obligations incombant au transpor- teur de décharger la cargaison, d'en prendre soin et de la livrer aux personnes ayant qualité pour la recevoir est une situation qui relève «tout autant du domaine maritime qu'un contrat portant sur le transport de marchandises par mer». La réclamation des demanderesses appartient à la catégorie «navigation et marine marchande» et relève donc de la compétence de la Cour, en vertu de l'art. 22 de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970, c. 10 (2° Supp.).
Arrêt suivi: La Compagnie Robert Simpson Montréal Limitée c. Hamburg-Amerika Linie Norddeutscher [1973] C.F. 1356, infirmant le jugement [1973] C.F. 304.
DEMANDE visant à obtenir une décision sur un point de droit (Règle 474).
AVOCATS:
Sean Harrington pour les demanderesses. David Wood pour les défenderesses.
PROCUREURS:
McMaster, Meighen & Cie, Montréal, pour les demanderesses.
Wood & Aaron, Montréal, pour les défenderesses.
LE JUGE MAHONEY—La présente requête déposée par les demanderesses, en vertu de la Règle 474, demande à la Cour de rendre une décision préliminaire sur un point de droit, savoir, si la Cour a compétence pour connaître de l'objet de la présente demande. Aux fins de la présente requête, les défenderesses n'ont pas contesté la véracité des faits allégués dans la déclaration.
Les demanderesses sont propriétaires, exploi- tants et agents de la Barberlines, compagnie de transport maritime par affrètement qui exerce notamment son activité commerciale entre l'Ex- trême-Orient et Montréal. Les demanderesses sont également propriétaires du navire N.M. Tai Ping, un des navires utilisés sur cette ligne. La défenderesse, Ceres Stevedoring Company Ltd., (ci-après appelée «Ceres») assure pour la Bar- berlines les services d'arrimage et de manuten- tion portuaire à Montréal conformément à un contrat écrit conclu avec cette compagnie. La défenderesse Metropolitan Marine Terminals Ltd. est présentée comme étant le sous-traitant de Ceres.
Chargé de marchandises diverses, le Tai Ping est arrivé à Montréal, le 9 novembre 1971 ou vers cette date. Une partie de la cargaison a été déchargée par Ceres et remise à la garde des défenderesses pour que celles-ci la livrent à divers consignataires conformément aux obliga tions incombant aux demanderesses aux termes des contrats d'affrètement. Certaines de ces marchandises ne furent pas livrées ou le furent avec des retards excessifs ou furent livrées en mauvais état et de façon incomplète.
Les demanderesses tentent de recouvrer les sommes qu'elles ont versées, conformément au contrat, pour cette cargaison précise ainsi que des dommages-intérêts pour rupture de contrat. Elles cherchent en outre, en responsabilité quasi délictuelle, la réparation du préjudice causé à leur réputation et à leur entreprise. Elles enten- dent également, en tant que subrogées aux
droits des propriétaires de la cargaison et ces- sionnaires desdits droits, recouvrer les sommes qu'elles ont déjà versées ou qu'elles s'attendent à devoir verser auxdits propriétaires en règle- ment des réclamations imputables à la mauvaise exécution des obligations découlant des contrats d'affrètement.
J'ai utilisé l'expression «propriétaires de la cargaison» pour signifier non seulement les pro- priétaires de la cargaison, mais également les consignataires, les détenteurs de connaisse- ments, ainsi que d'autres personnes qui sont censées avoir subi un dommage, et respective- ment, leurs mandataires et les cessionnaires de leurs droits. Je- note en passant que deux actions semblables ont été intentées devant cette cour contre les mêmes défenderesses par divers groupes des demanderesses présentes ainsi que d'autres demanderesses pour les pertes subies à la suite du déchargement d'une cargaison des navires N.M. Traviata et N.M. Fernbrook, navi- res desservant la même ligne, à la suite de leur arrivée à Montréal au mois d'octobre 1971.
A mon avis, la Cour d'appel fédérale, dans l'arrêt La Compagnie Robert Simpson Montréal Limitée c. Hamburg-Amerika Linie Norddeuts- cher' a tranché la question de droit posée en l'espèce.
Les faits essentiels de cette affaire sont énon- cés dans le sommaire des motifs 2 .
La demanderesse a intenté une action contre un transpor- teur et armateur au motif qu'à l'arrivée du navire à Montréal, la demanderesse a constaté que sa cargaison était endommagée et qu'il en manquait une partie. Le transporteur et armateur nie toute responsabilité et sou- tient que les dommages se sont produits après la remise de la cargaison aux soins de l'entreprise de manutention et, par voie d'avis à tierce partie, il demande une indemnité à cette dernière.
Il fut décidé que l'article 22 de la Loi sur la Cour fédérale ne donnait pas compétence à la Cour pour connaître de l'action intentée par une tierce partie; le transporteur et armateur a inter- jeté appel de cette décision.
En Cour d'appel, le juge Thurlow a défini la question en cause la page 1366] comme suit:
' [1973] C.F. 1356. 2 [1973] C.F. 304.
... savoir si la Division de première instance de cette Cour est compétente pour statuer sur une réclamation présentée par un transporteur maritime contre une entreprise de manu- tention portuaire et réclamant une indemnité pour perte ou avarie subie par la cargaison lors de l'exécution par ladite entreprise des obligations qui incombaient au transporteur, en vertu du contrat de transport, de décharger la cargaison, d'en prendre soin et de la livrer.
La Cour d'appel a établi, comme constatation de fait, que l'exécution des obligations incombant au transporteur de décharger la cargaison, d'en prendre soin et de la livrer aux personnes ayant qualité pour la recevoir est une situation qui semble «tout autant relever du domaine mari time qu'un contrat portant sur le transport de marchandises par mer». A l'unanimité, la Cour d'appel a accueilli l'appel au motif que la procé- dure à tierce partie introduite par le transporteur contre l'entreprise de manutention constituait une demande de redressement faite à la fois en vertu du «droit maritime canadien» et «d'une autre loi du Canada en matière de navigation ou de marine marchande» et que cette question relevait ainsi de la compétence de la Division de première instance en vertu de l'article 22(1) de la Loi sur la Cour fédérale.
22. (1) La Division de première instance a compétence concurrente en première instance, tant entre sujets qu'autre- ment, dans tous les cas une demande de redressement est faite en vertu du droit maritime canadien ou d'une autre loi du Canada en matière de navigation ou de marine mar- chande, sauf dans la mesure cette compétence a par ailleurs fait l'objet d'une attribution spéciale.
Je ne vois pas qu'il faille attacher d'impor- tance au titre auquel les demanderesses deman- dent redressement, que ce soit à titre personnel ou en tant que cessionnaires des droits des autres ou subrogées à ces droits, ou à la nature de leurs demandes, que celles-ci soient fondées sur le contrat ou sur la responsabilité quasi délictuelle. Le fait est que la demande de redressement est faite en vertu du droit mari time canadien et d'une loi du Canada en matière de navigation ou de marine marchande; cela suffit à résoudre la question.
J'en conclus par conséquent que la Cour a effectivement, en vertu de l'article 22(1) de la Loi sur la Cour fédérale, compétence en la matière dont relève ce litige.
Aucuns dépens ne furent demandés.
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