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A-61-73
Cam Gard Supply Limited (Appelante)
c.
Le ministre du Revenu national (Intime)
Cour d'appel, les juges Thurlow et Ryan, le juge suppléant Bastin —Winnipeg, les 24 juin et 3 juillet 1974.
Impôt sur le revenu—Plan de retraite—Contribution versée par la compagnie—Il n'y avait aucune «obligation du fonds ou du plan envers les employés»—Rejet de la déduction de la contribution—Loi de l'impôt sur le revenu, art. 76.
La compagnie appelante versa, le 15 avril 1965, la somme de $309,414 aux fiduciaires d'un régime de retraite établi le 1°" avril 1965, pour ses administrateurs. Le Ministre dans les nouvelles cotisations établies pour les années 1964 à 1967 rejeta la déduction de ce montant. Un appel de cette déci- sion interjeté devant la Division de première instance fut rejeté.
Arrêt (les juges Thurlow et Ryan): il y a lieu de confirmer la décision de la Division de première instance, qui a suivi le raisonnement de la Cour suprême du Canada dans l'affaire M.N.R. c. Inland Industries Limited [1974] R.C.S. 514. La Division de première instance décida 1. que la compagnie n'avait aucunement l'obligation de faire ces paiements au fonds et qu'en conséquence, il n'existait, pendant toute la période en cause, aucune «obligation du fonds ou du plan envers les employés» y participant, au sens de l'article 76(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu; 2. que la période en cause, aux termes de l'article 76(1) était la période immédiatement antérieure au paiement effectué par la compagnie.
Le juge Bastin (dissident): le terme «obligation» se rap- porte au barême spécifique des prestations prévues au plan de pension. Aux termes du plan considéré dans l'affaire M.R.N. c. Inland Industries (précitée), le fiduciaire n'était pas tenu de verser des prestations déterminées, alors que dans l'affaire présente cette exigence était remplie. S'étant conformé en tous points à l'article 76, l'appelante avait droit à cette déduction.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu. AVOCATS:
G. R. Hunter, c.r., et A. J. Irving pour l'appelante.
J. A. Scollin, c.r., et C. H. Fryers pour l'intimé.
PROCUREURS:
Pitblado & Hoskin, Winnipeg, pour l'appelante.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcés par
LE JUGE THURLOW: Il s'agit d'un appel d'un jugement de la Division de première instance qui rejeta l'appel interjeté par l'appelante de ses nouvelles cotisations à l'impôt sur le revenu établies pour les années 1964, 1965, 1966 et 1967. La question en litige pour chacune de ces quatre années consiste à déterminer si l'appe- lante était autorisée à déduire la somme de $309,414.00 versée le 15 avril 1965 aux fidu- ciaires d'un régime de retraite établi le l er avril 1965 pour les administrateurs de la compagnie appelante. Ce paiement particulier constitue une contribution pour fournir aux administrateurs des pensions pour services antérieurs rendus à la compagnie appelante.
Au sujet des plans de pension, l'article 76 de la Loi de l'impôt sur le revenu prévoit que:
76. (1) Lorsqu'un contribuable est un employeur et qu'il a effectué un paiement spécial dans une année d'imposition au titre d'un fonds ou plan de pension ou de retraite d'employés à l'égard de services antérieurs rendus par des employés, en conformité de la recommandation d'un actuaire compétent d'après qui les ressources du fonds ou plan devraient être augmentées d'un montant non inférieur à celui du paiement spécial afin d'assurer que toutes les obligations du fonds ou plan envers les employés puissent être pleinement acquit- tées, et a effectué le paiement de manière qu'il soit irrévoca- blement dévolu au fonds ou plan ou pour le fonds ou plan, et que le paiement a été approuvé par le Ministre, sur l'avis du surintendant des assurances, on peut déduire, dans le calcul du revenu du contribuable pour l'année d'imposition, le montant du paiement spécial.
(2) Pour plus de certitude et sans restreindre la généralité du paragraphe (1), il est par les présentes déclaré que le paragraphe (1) s'applique dans les cas il est nécessaire d'augmenter les ressources d'un fonds ou plan en raison de l'accroissement des prestations de pension de retraite ou de pension payables sur le fonds ou plan, ou en , vertu de ce fonds ou plan.
L'appel interjeté devant la Division de pre- mière instance fut entendu à partir d'un exposé conjoint des faits et des questions en litige. L'exposé est cité en totalité dans les motifs du jugement du savant juge de première instance et il n'est pas nécessaire de le citer à nouveau. Il suffit, aux fins du présent appel, de rappeler que les parties avaient admis que les conditions pré- vues au paragraphe 76(1) relativement à la déductibilité de la somme de $309,414.00 étaient remplies, excepté la question de savoir
s'il existait aux époques en cause des «obliga- tions du fonds ou régime envers les employés» qui exigeaient l'augmentation du fonds.
A ce sujet le plan prévoyait que:
[TRADUCTION] ARTICLE IX-CONTRIBUTIONS
a) Contributions exigées des membres
Les participants à ce régime n'y font pas de contributions, ni ne sont autorisés à en faire, ledit régime ne prévoyant pas la contribution des participants.
b) Contributions de la compagnie
Pour chaque participant, la compagnie verse le montant maximum autorisé par la Loi canadienne de l'impôt sur le revenu, soit $1,500 par année par participant, selon les modalités indiquées ci-après. La compagnie se propose, sous réserve de la disponibilité de fonds à cette fin, de verser, conformément à l'attestation d'un actuaire, les sommes nécessaires au versement des pensions pour services anté- rieurs visées par l'article Xa).
ARTICLE X-MONTANT DE LA PENSION a) Services antérieurs
La compagnie se propose d'établir, sous réserve de la disponibilité de fonds à cette fin, une pension pour services antérieurs au bénéfice de chacun des administrateurs dési- gnés participant au régime à la date de sa mise en vigueur, notamment du président et du secrétaire. La pension pour services antérieurs correspondra dans chaque cas aux états de service du participant au sein de la compagnie jusqu'à la date de mise en vigueur; à compter de l'âge normal de la retraite, chaque pensionné touchera la somme suivante pour chacune de ses années complètes de services:
Pour le président—$180 .90 par mois
le secrétaire—$285 .85 par mois.
Lors du calcul du nombre d'années aux fins du présent article, toute fraction d'année sera considérée comme une année complète. Dans le calcul du nombre d'années de services antérieurs créditées qui doit être autorisé et inclus dans le calcul des prestations pour les services antérieurs, la décision du conseil d'administration de la compagnie sera définitive et obligatoire pour toutes les parties, mais en aucun cas ce nombre d'années ne doit excéder le nombre réel d'années que l'employé a passé jusqu'à cette époque au service de la compagnie ou de ses prédécesseurs.
Pour le calcul ou la détermination du montant des presta- tions de retraite pour services antérieurs pouvant être ainsi payées, toutes prestations de retraite reçues par l'employé en contrepartie de contributions à tout fonds général de la compagnie faites avant sa participation au présent régime, sont comprises et sont censées faire partie des prestations de retraite pour services antérieurs telles que décrites ici.
Le savant juge de première instance décida qu'aux termes de ces dispositions, l'appelante n'avait aucunement l'obligation d'effectuer des
Les avocats ont admis que le mot «compagnie» résulte d'une erreur et que cette stipulation doit se lire de la manière suivante: «les fiduciaires se proposent ...».
paiements et qu'en conséquence, le fonds ou plan n'avait aucune obligation envers les employés y participant. Selon lui, il n'existait avant le paiement aucune obligation au sens du paragraphe 76(1) et il n'était plus du tout néces- saire, après le paiement, d'augmenter les res- sources du fonds. Il conclut donc que l'appe- lante n'était pas autorisée à déduire la somme de $309,414.00 qu'elle avait versée.
Je souscris à l'opinion du savant juge de pre- mière instance selon laquelle le raisonnement de la Cour suprême du Canada dans l'affaire M.R.N. c. Inland Industries Limited 2 s'applique en l'espèce ainsi qu'à sa conclusion; je souscris en outre à l'essentiel des motifs de cette conclu sion. A mon avis, le moment important, du moins en ce qui concerne l'application de l'arti- cle 76(1), se situait immédiatement avant le paiement. A cette époque, l'appelante n'avait aucune obligation envers le fonds ou plan et ni le fonds ou plan, ni ses fiduciaires n'avaient d'obligations envers les participants au plan. Un prérequis essentiel à l'application de l'article 76(1) fait donc défaut puisque le paiement ne peut être considéré comme ayant été fait «afin d'assurer que les obligations du fonds ou plan envers les employés puissent être pleinement acquittées» au sens de l'article 76(1), car il n'existait en fait aucune obligation de ce genre. Voir l'arrêt M.R.N. c. Inland Industries Limited [précité]. Le fait que des obligations du fonds et des fiduciaires envers les employés aient pu naître dès le paiement n'est pas pertinent à mon avis.
On prétendit au nom de l'appelante que l'af- faire présente était différente de l'affaire Inland Industries, en ce que, même si l'énoncé de l'arti- cle IXb) du plan était inepte et n'imposait à la compagnie appelante aucune obligation exécu- toire de verser certains montants au fonds ou plan, ces imperfections de langage avaient été corrigées par le fait que, sur la recommandation de l'actuaire, elle avait vraiment versé ce mon- tant aux fiduciaires avant de demander au Ministre l'enregistrement du plan et l'approba- tion du paiement, aux termes de l'article 76(1).
2 [1974] R.C.S. 514.
A ce sujet, on prétendit que si l'appelante, une heure avant d'effectuer le paiement avait exercé son droit conféré par l'article IX du contrat de fiducie et avait modifié le plan en changeant l'énoncé des articles IX et X de manière à impo- ser à l'appelante l'obligation exécutoire de faire ledit paiement et à imposer aux fiduciaires l'obligation d'acheter une pension pour services antérieurs, le paiement fait par la suite aurait alors pu être déduit. En supposant que l'article IX du contrat de fiducie autorisait une telle modification du plan et que cette modification aurait entraîné la possibilité de déduire le paie- ment, il est malheureux pour l'appelante qu'elle n'ait pas ainsi procédé; je ne vois pas cependant en vertu de quel principe cette cour pourrait changer les faits réels en ce qu'ils auraient pu être et il me semble que la décision en cette affaire ne peut s'appuyer sur autre chose que l'énoncé même des documents tels qu'ils exis- taient à l'époque en cause. On ne peut non plus, à mon avis, considérer que le fait d'effectuer le paiement permettait à l'appelante de contourner l'exigence statutaire selon laquelle l'existence d'une obligation du fonds envers les employés est une condition de la déductibilité du paie- ment, ou que ce fait suffise à considérer que cette condition est remplie. A mon sens, la disposition législative doit se limiter à ce qui peut raisonnablement relever du sens des termes utilisés et il n'y a pas lieu d'étendre son application, en raison d'une intention supposée, à des situations qui ne correspondent pas à cet énoncé.
L'appelante prétendit aussi que l'approbation du Ministre, une fois qu'elle avait été donnée, ne pouvait être retirée; à mon avis, cette ques tion aussi est tranchée par le jugement Inland Industries et ce point de vue ne peut être sou- tenu. Lorsque n'est pas remplie une exigence statutaire visant une déduction, celle-ci doit alors être rejetée, même si l'approbation du paiement, qui constitue aussi une condition essentielle de la déductibilité, a été donnée.
A mon avis donc, l'appel doit être rejeté avec dépens.
LE JUGE RYAN: J'y souscris.
* * *
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcé par
LE JUGE SUPPLÉANT BASTIN (dissident): Il s'agit ici d'un appel d'un jugement de la Division de première instance, prononcé le 22 février 1973, rejetant un appel interjeté par l'appelante de ses cotisations établies en vertu de la Partie I de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1964 à 1967. Voici la chro- nologie des événements qui ont mené à cet appel:
1. L'appelante a établi ce que l'on appelle com- munément un régime de pension pour adminis- trateurs. Il s'agit d'un plan de pension dont les bénéficiaires sont les actionnaires et employés principaux de la compagnie appelante. Relative- ment à ce plan:
i. le 1 e1 avril 1965, l'appelante a voté et adopté le règlement 13 de la compagnie, autorisant l'établissement du plan de pension;
ii. le l ei avril 1965, elle conclut un contrat de fiducie relativement à ce plan, avec des fidu- ciaires devant en détenir et administrer les fonds.
2. Le plan de pension était adjoint à la fiducie et en faisait partie.
3. Le plan de pension prévoyait deux sortes de prestations de retraite:
i. une pension pour services antérieurs basée sur les états de service du participant jusqu'à la date de mise en vigueur, soit le ler avril 1965;
ii. une pension pour services futurs.
4. Pour fournir les fonds devant servir aux prestations de retraite, l'appelante devait verser:
i. $1,500.00 l'an par participant au titre des pensions pour services futurs;
ii. un montant déterminé par un actuaire au titre des pensions pour services antérieurs.
5. L'appelante retint les services d'un actuaire qui évalua à $309,414.00 le montant le 1er
avril 1965 pour services antérieurs, selon le plan de pension.
6. Le 15 avril 1965, l'appelante versa aux fidu- ciaires du plan de pension ladite somme de $309,414.00 au titre des services antérieurs.
7. Le 15 avril 1965, l'appelante transmit à l'in- timé une demande d'enregistrement du plan de pension, selon la formule T510, ainsi que d'au- tres documents.
8. L'intimé:
i. le 31 mai 1965, accepta le plan de pension en fiducie, aux fins d'enregistrement en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu;
ii. le 28 juillet 1965, informa l'appelante que les calculs de l'actuaire avaient été confirmés et que les «paiements spéciaux pour services antérieurs versés au plan» pouvaient faire l'objet d'une déduction en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu.
9. L'appelante déduisit effectivement le mon- tant susmentionné de $309,414.00 lors du calcul de son revenu pour son année d'imposition 1965 et, par la suite, l'intimé établit de nouvelles cotisations en 1969, refusant la déduction ainsi réclamée.
Les questions en litige dans cet appel sont les suivantes:
1. En supposant, comme les parties l'on reconnu, que les autres conditions posées par l'article 76(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu sont remplies, le versement de $309,414.00 relève-t-il de l'article 76(1) dans la mesure cette somme correspond aux obligations du fonds ou plan envers les employés?
2. L'intimé avait-il épuisé sa compétence, de sorte qu'on pouvait opposer une fin de non- recevoir à la nouvelle cotisation en question?
L'avocat de l'appelante n'a pas abandonné la seconde question mais ne l'a pas fait valoir. Compte tenu de ma décision sur la première question en litige, il ne sera pas nécessaire de l'examiner.
Le savant juge de première instance dans ses motifs du jugement s'appuya sur la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire
M.R.N. c. Inland Industries Limited [1974] R.C.S. 514. A mon avis, il convient d'établir une distinction claire entre l'affaire présente et le jugement rendu dans l'affaire Inland Industries. En outre, le savant juge de première instance a donné au terme «obligations», à l'article 76, une interprétation différente de celle que la Cour suprême du Canada lui a attribué dans l'arrêt Inland Industries.
L'article 76 se lit comme suit:
76. (1) Lorsqu'un contribuable est un employeur et qu'il a effectué un paiement spécial dans une année d'imposition au titre d'un fonds ou plan de pension ou de retraite d'employés à l'égard de services antérieurs rendus par des employés, en conformité de la recommandation d'un actuaire compétent d'après qui les ressources du fonds ou plan devraient être augmentées d'un montant non inférieur à celui du paiement spécial afin d'assurer que toutes les obligations du fonds ou plan envers les employés puissent être pleinement acquit- tées, et a effectué le paiement de manière qu'il soit irrévoca- blement dévolu au fonds ou plan ou pour le fonds ou plan, et que le paiement a été approuvé par le Ministre, sur l'avis du surintendant des assurances, on peut déduire, dans le calcul du revenu du contribuable pour l'année d'imposition, le montant du paiement spécial.
(2) Pour plus de certitude et sans restreindre la généralité du paragraphe (1), il est par les présentes déclaré que le paragraphe (1) s'applique dans les cas il est nécessaire d'augmenter les ressources d'un fonds ou plan en raison de l'accroissement des prestations de pension de retraite ou de pension payables sur le fonds ou plan, ou en vertu de ce fonds ou plan.
Je commenterais cet article de la manière suivante:
Un employeur contribuable peut déduire de son revenu, lors du calcul de l'impôt sur le revenu, le montant d'un paiement spécial versé pendant l'année aux fiduciaires d'un fonds de pension d'employés pour services antérieurs si:
1. Le paiement spécial, de l'avis d'un actuaire compétent, est nécessaire pour fournir les res- sources qui permettront au fonds d'acquitter ses obligations envers les employés, savoir, le mon- tant exigé pour permettre aux fiduciaires du fonds de payer les pensions en conformité du barème spécifique des prestations prévues par le plan en question.
2. La compagnie a versé le paiement spécial au fonds de manière qu'il soit irrévocablement dévolu au fonds en fiducie.
3. Le paiement spécial a été approuvé par le ministre du Revenu national sur l'avis du surin- tendant des assurances.
A mon avis, le terme «obligations» à l'article 76 se rapporte au barème spécifique des presta- tions prévu dans le plan de pension. Tel est le sens donné à ce terme par le juge Pigeon dans l'arrêt Inland Industries, comme l'indique l'ex- trait suivant de son jugement à la page 523:
De plus, le par. 2 de l'art. 76 indique clairement que «les obligations du fonds ou plan envers les employés» signifie les «prestations de pension de retraite ou de pension paya- bles». Il est évident que la situation à laquelle on a voulu faire face au moyen des paiements spéciaux est celle qui se présente quand un plan de pension contient un barème des prestations à verser.
Le savant juge de première instance conclut que le mot «obligations» signifiait, du point de vue juridique, des engagements déjà exécutoires et ce sens ne correspond pas, à mon avis, à l'inten- tion du Parlement.
Il est inutile d'exposer ici tous les faits relatifs au plan de pension dans l'affaire Inland Indus tries. Il semble probable que l'importance de nombreux de ces faits incita le ministre du Revenu national à conclure qu'il ne s'agissait pas d'un plan de pension d'employés authenti- que et que c'est sur ce motif qu'il a refusé la déduction, aux fins de l'impôt sur le revenu, du montant versé au fonds par la compagnie. Le juge Pigeon conclut cependant qu'il n'était ni nécessaire ni souhaitable d'exprimer une opi nion sur un point autre que la question juridique dont il aborda alors la discussion. Voici un extrait des motifs du jugement, aux pages 521-524:
... la déduction demandée ne peut être accordée parce qu'il n'y a pas d'«obligations» du fonds ou du plan envers M. Lloyd Parker exigeant un paiement spécial afin qu'elles puissent être pleinement acquittées, comme le veut expres- sément l'art. 76 de la Loi de l'impôt sur le revenu:
Le fait qu'il n'y a pas d'«obligations» du fonds de pension envers M. Parker exigeant des paiements spéciaux ressort clairement des termes du plan. Les seules obligations envers un participant sont d'utiliser de la façon prescrite les fonds qui deviennent disponibles. De fait, on n'a pas prétendu à l'audition qu'avait été créée, à la charge du fonds ou de la compagnie, une obligation d'assurer à M. Parker les presta- tions que devaient couvrir les paiements spéciaux.
On a soutenu que le mot «obligation» devait s'entendre comme l'entendait l'actuaire faisant une recommandation. D faut d'abord observer que dans sa note, le département des assurances ne dit pas, comme il est énoncé dans le certificat de l'actuaire, que le fonds doit être augmenté [TRADUCTION] «afin que toutes les obligations du fonds à l'égard de servi ces antérieurs puissent être pleinement acquittées» mais [TRADUCTION] «que le fonds devrait être augmenté d'un montant au moins égal à celui ci-dessus mentionné afin que le maximum des prestations possibles en vertu du plan puisse être versé». Cette phrase suit celle l'on dit que [TRADUCTION] «le plan ne prévoit pas un montant de pension précis, mais se borne à fixer le maximum de la pension totale». La différence entre les termes de cette note et ceux du certificat de l'actuaire est assez importante et il est pour le moins surprenant que, malgré cet avis, le ministère ait approuvé les paiements, au nom du ministre. Toutefois, il me paraît clair qu'une approbation donnée sans que les conditions prescrites par la loi ne soient remplies ne lie pas le ministre.
De plus, le par. 2 de l'art. 76 indique clairement que «les obligations du fonds ou plan envers les employés» signifie les «prestations de pension de retraite ou de pension paya- bles». Il est évident que la situation à laquelle on a voulu faire face au moyen des paiements spéciaux est celle qui se présente quand un plan de pension contient un barème des prestations à verser.
On ne peut pas dire qu'en déclarant au ministère, dans la demande d'enregistrement du plan, l'intention de faire à une date ultérieure des paiements s'élevant au montant réclamé, on a créé l'obligation de faire ces paiements. Au contraire, les termes du plan indiquent de façon parfaitement claire qu'il ne naît d'obligation envers M. Parker, quant à. ces sommes, que si la compagnie choisit d'effectuer et effectue les paiements prévus au fonds, et pas avant.
J'en conclus donc que le plan soumis par la Inland Industries Ltd. a été considéré comme irrégulier pour les raisons suivantes:
1. le plan ne spécifiait pas de barème des pres- tations payables, de sorte que les termes du plan lui-même n'étaient pas définis;
2. à la date de la présentation du plan au minis- tre du Revenu national pour approbation, la compagnie n'avait fait aucun paiement spécial aux fiduciaires du fonds, de sorte que la compa- gnie ne s'était pas engagée, ni par contrat, ni par un paiement irrévocable au fonds, à mettre en oeuvre ce régime de pension, et qu'il ne s'agis- sait donc que d'une simple proposition.
En l'espèce, les termes du plan de pension ont créé une obligation pour les fiduciaires de payer
des prestations déterminées. Celles-ci sont décrites de la manière suivante à la page 8 du plan:
[TRADUCTION] La pension pour services antérieurs corres- pondra dans chaque cas aux états de service du participant au sein de la compagnie jusqu'à la date de mise en vigueur; à compter de l'âge normal de la retraite chaque pensionné touchera la pension suivante pour chacune de ses années complètes de services:
Pour le président—$180 .90 par mois Pour le secrétaire—$285 .85 par mois.
Lors des calculs du nombre d'années aux fins du présent article, toute fraction d'année sera considérée comme une année complète.
En outre, à la date l'appelante demanda l'approbation, le montant qui, selon les calculs de l'actuaire, devait être payé au fonds afin d'assurer que toutes les obligations du fonds ou plan envers les employés puissent être pleine- ment acquittées, savoir un montant de $309,- 414.00, avait déjà été versé irrévocablement par l'appelante aux fiduciaires du fonds. A mon avis, les termes du contrat indiquant que le plan dépendait de la possibilité pour la compagnie d'effectuer ce paiement spécial, ne constituent pas une irrégularité et ne sont pas déraisonna- bles lorsqu'il s'agit d'une petite compagnie. Un plan pourrait évidemment être abandonné après la rédaction et l'adoption du règlement ainsi qu'après la signature du contrat, en raison de l'importance du paiement spécial par rapport à ses propres ressources et en raison de l'attitude de sa banque et de ses créanciers. L'article 76 ne mentionne pas l'obligation de la compagnie à cet égard. Il exige simplement que la compagnie prenne un engagement à l'égard du plan, non par contrat, mais en versant de manière irrévocable aux fiduciaires le montant du paiement spécial. Pour tous ces motifs, je considère que l'appe- lante s'est conformée à tous égards aux exigen- ces de l'article 76 de la Loi de l'impôt sur le revenu et a droit à la déduction demandée.
J'accueillerais donc l'appel, avec les dépens, en cette cour et en première instance, à la charge de l'intimé.
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