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Nissan Automobile Co. (Canada) Ltd. (Demande- resse)
c.
Les propriétaires du navire Continental Shipper et United Steamship Corporation, Federal Com merce and Navigation Company Limited et Fed eral Pacific Lakes Line (Défendeurs)
Division de première instance (T-342-72), le juge Urie—Ottawa, les 27 et 28 mars 1974.
Pratique—Demande de nouvel examen d'un jugement pour obtenir des intérêts sur les dommages-intérêts accordés, à compter de la date de l'introduction de l'action—Discrétion de la Cour—Règle 337(5) de la Cour fédérale—Loi sur la Cour fédérale, art. 40; Loi sur l'intérêt, art. 3.
La Cour a le pouvoir discrétionnaire d'accorder des inté- rêts, que les droits en cause soient ex contractu ou ex delicto. La question en litige n'avait jamais été résolue par un tribunal canadien et c'est pourquoi les défendeurs, ayant nié toute responsabilité en se fondant sur ce qui, selon eux, étaient des motifs raisonnables, ne doivent pas être pénali- sés par le paiement d'intérêts antérieurement au jugement.
Arrêt suivi: N. M. Paterson & Sons Limited c. Canadi- an Vickers Limited [1959] R.C.É. 289.
REQUÊTE par écrit en vertu de la Règle 324, demandant le nouvel examen o'un jugement.
AVOCATS:
Vincent Prager pour la demanderesse. Edouard Baudry pour les défendeurs.
PROCUREURS:
Stikeman, Elliott & Cie Montréal, pour la demanderesse.
Brisset, Bishop & Cie, Montréal, pour les défendeurs.
LE JUGE URIE—Par voie de requête par écrit en vertu de la règle 324, la demanderesse solli- cite un nouvel examen, en vertu de la Règle 337(5) des Règles de la Cour fédérale, du juge- ment rendu par cette cour le 3 janvier 1974; elle demande que les défendeurs soient condamnés à payer des intérêts sur les dommages-intérêts qui lui ont été accordés, et ce, à compter de la date de l'introduction de l'action, savoir le 15 janvier 1971, jusqu'à la date du paiement des dommages-intérêts, au motif que ledit jugement n'accorde pas d'intérêts, bien qu'elle en ait réclamé, et qu'une telle lacune a peut-être
résulté d'un oubli ou d'une omission accidentelle.
Il ressort nettement des précédents que j'ai étudiés, que la Cour a le pouvoir discrétionnaire d'accorder des intérêts que les droits en cause soient ex contractu ou ex delicto. La règle géné- rale veut que tous les jugements en vertu des- quels une somme est versée, en matière d'ami- rauté, portent intérêt à compter du moment le jugement est rendu ou à compter de toute autre date fixée par le juge ou le jugement. L'article 40 de la Loi sur la Cour fédérale dis pose que les jugements portent intérêt à comp- ter du jour le jugement est rendu au taux prescrit par l'article 3 de la Loi sur l'intérêt. Il semble donc évident qu'il est inutile de fixer un intérêt sur les dommages-intérêts accordés pour la période postérieure à la date du jugement.
En l'espèce, dans l'exercice de ma discrétion, j'estime qu'aucun intérêt ne devrait être accordé à compter de la date de l'introduction de l'action ni à compter de la date à laquelle les dépenses faisant l'objet de cette action ont été engagées. La question en litige dans cette action, m'avait-on signalé, n'avait jamais été résolue par un tribunal canadien et c'est pourquoi les défendeurs avaient nié toute responsabilité en se fondant sur ce qui, selon eux, étaient des motifs raisonnables; mais, en fin de compte, comme ma décision le montre, ils avaient tort. Je pense cependant qu'en raison de l'absence de jurisprudence antérieure à cet égard, ils ne devraient être pénalisés par le paiement d'inté- rêts sur les dommages-intérêts accordés par ce jugement. Le fait que les intérêts n'ont pas été accordés à compter de la date de l'introduction de l'action, ou à compter d'une autre date, n'était donc pas un oubli et, à mon avis, les dispositions de la Règle 337(5) ne s'appliquent pas.
J'estime qu'il y a d'autres raisons pour ne pas accéder à la requête de la demanderesse. En premier lieu, j'ai fait remarquer que les défen- deurs ont interjeté appel du jugement et il va de soi que l'omission d'accorder des intérêts peut à juste titre être soulevée en appel. En deuxième lieu, comme le signalait le juge suppléant A. I. Smith dans l'affaire N. M. Paterson & Sons
Limited c. Canadian Vickers Limited [1959] R.C.É. 289, la page 291:
[TRADUCTION] Accueillir la présente requête et décider que la défenderesse est condamnée à payer des intérêts à compter de la date (ou des dates) du paiement des frais de réparation ... reviendrait à rendre un jugement différent au fond de celui qui fut rendu le 19 mars 1959 [dans l'affaire présente le 3 janvier 1974]; je n'ai pas la compétence pour le faire.
Pour tous motifs susmentionnés, la requête de la demanderesse visant à obtenir un nouvel examen est donc rejetée.
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