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A-274-74
La Reine (Appelante) (Défenderesse)
c.
Irish Shipping Ltd. (Intimée) (Demanderesse)
et
Leslie Arthur Davis Jones et Arthur Joseph Warren et l'Administration de pilotage du Pacifi- que (Intimés) (Défendeurs)
Cour d'appel, les juges Pratte et Urie et le juge suppléant Smith—Vancouver, les 25 et 26 novem- bre 1975.
Pratique—Droit maritime—La Division de première ins tance enjoint le témoin de répondre à des questions qui lui ont été posées au cours de son interrogatoire préalable—Les ques tions cherchaient à obtenir l'opinion d'un expert—Les ques tions font-elles partie de l'exception à la règle voulant qu'on ne demande pas l'opinion d'un expert qui subit un interroga- toire préalable?—Règles 465 et 482 de la Cour fédérale.
Il s'agit d'un appel d'un jugement de la Division de première instance enjoignant un témoin expert de répondre à deux questions qui lui ont été posées au cours de son interrogatoire préalable. Le juge de première instance a décidé que ces questions recherchaient l'avis d'un expert; l'intimée a admis que, d'une façon générale, il n'est pas permis de demander l'opinion d'un expert qui subit un interrogatoire préalable sauf lorsque l'application de ses connaissances techniques est mise en doute par les faits allégués dans les plaidoyers.
Arrêt: l'appel est accueilli; même en supposant qu'il n'existe aucune différence entre les Règles de cette cour et celles de la Cour suprême de la Colombie-Britannique sur le sujet, et que cette cour doit suivre les décisions de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique qu'invoque l'intimée, les deux questions ne relavent pas de l'exception. Puisque les questions ne se rapportaient pas au «dispositif de séparation du trafic», elles ne sont pas admissibles du fait qu'on ait mis en doute les connais- sances techniques du capitaine à titre d'intéressé. Et l'allégation concluant à la négligence n'a pas mis en doute les connaissances techniques du capitaine.
Arrêts discutés: Westcoast Transmission Co. Ltd. c. Canadian Phoenix Steel and Pipe Limited [1971] 1 W.W.R. 241 et Shickele c. Rousseau (1966) 55 W.W.R. 568.
APPEL. AVOCATS:
G. O. Eggertson pour l'appelante.
P. D. Lowry pour l'intimée, Irish Shipping Ltd.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour l'appelante.
Macrae, Montgomery, Hill et Cunningham, Vancouver, pour l'intimée Irish Shipping Ltd. Bull, Housser & Tupper, Vancouver, pour` les intimés Jones et Warren.
Owen, Bird, Vancouver, pour l'intimée l'Ad- ministration de pilotage du Pacifique.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcés oralement par
LE JUGE PRATTE: Il s'agit d'un appel d'un jugement de la Division de première instance' enjoignant le capitaine Burrill de répondre à deux questions qui lui ont été posées au cours de son interrogatoire préalable à titre d'officier de la Couronne.
L'intimée réclame à la Couronne des domma- ges-intérêts à la suite de l'échouement d'un de ses navires près de l'île de Haddington, en Colombie- Britannique, à un endroit le ministère des Transports avait préconisé l'utilisation d'un «dispo- sitif volontaire de séparation du trafic». La décla- ration allègue que l'une des causes de l'accident était la conception fautive du «dispositif de sépara- tion du trafic» imputable à des préposés de la Couronne. Dans sa défense, la Couronne allègue que les dommages qu'a subis l'intimée sont dus à sa propre négligence.
On ne conteste pas que le capitaine Burrill est un marin d'expérience ni qu'il a participé à la préparation du «dispositif de séparation du trafic».
On a ordonné au capitaine Burrill de répondre aux deux questions suivantes:
73. Dites-moi, je vous prie, comment vous navigueriez à travers ce passage si vous vous dirigiez du nord vers le sud. Je veux que vous me le disiez.
77. Je veux savoir quelle est, selon vous, la bonne façon de naviguer à travers ce passage du nord vers le sud. Je veux connaître Ies éléments dont vous tiendriez compte, ceux dont il faut d'après vous tenir compte; je veux parler de la marée, du temps, de l'utilisation du dispositif de séparation, etc. Êtes-vous disposé à me donner ces renseignements?
Comme l'a dit le savant juge de première ins tance, ces questions «visent manifestement non pas
T-1107-73.
à obtenir des renseignements réels relatifs à la carte, au passage ou aux balisages, mais l'avis d'un expert dûment qualifié sur la bonne façon de naviguer à travers le passage en question».
L'avocat de l'intimée a admis que, d'une façon générale, il n'est pas permis de demander l'opinion d'une personne qui subit un interrogatoire préala- ble. Il a affirmé cependant qu'il existe une excep tion à cette règle; il a dit que la décision dont on appelle [TRADUCTION] «est en accord avec la jurisprudence qui permet que l'on demande l'opi- nion d'un témoin ayant qualité d'expert si l'appli- cation de ses connaissances techniques est mise en doute par les faits allégués dans les plaidoyers.» L'avocat s'est reporté en particulier à deux déci- sions de la Cour d'appel de la Colombie-Britanni- que 2 .
A supposer, sans nous prononcer sur ce sujet,
(1) qu'il n'existe aucune différence importante entre les Règles de cette cour relatives à l'inter- rogatoire préalable et celles de la, Cour suprême de la Colombie-Britannique,
et
(2) que cette cour doit suivre les décisions de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique qu'in- voque l'intimée,
nous serions quand même d'avis que les deux questions auxquelles on a enjoint le capitaine Bur- rill de répondre n'étaient pas admissibles parce qu'elles ne relevaient pas de l'exception que ces décisions ont établie.
Selon nous, contrairement à ce qu'a dit l'avocat de l'intimée, puisque les questions ne se rappor- taient pas au «dispositif de séparation du trafic», elles ne sont pas devenues admissibles du fait que les allégations de la déclaration ont mis en doute les connaissances techniques du capitaine Burrill à titre de personne ayant participé à la préparation du dispositif. De plus, à notre avis, le fait que ces questions puissent avoir rapport à la partie des conclusions de la défense on allègue l'a négli- gence de l'intimée ne modifie pas la situation puisque l'allégation concluant à la négligence n'a pas mis en doute les connaissances techniques du capitaine Burrill.
2 Westcoast Transmission Co. Ltd. c. Canadian Phoenix Steel and Pipe Limited [1971] 1 W.W.R. 241; Shickele c. Rousseau (1966) 55 W.W.R. 568.
Pour ces raisons, l'appel est accueilli avec dépens.
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LE JUGE URIE y a souscrit.
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LE JUGE SUPPLÉANT SMITH y a souscrit.
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