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A-538-78
Le procureur général de Terre-Neuve pour le compte de la Reine du chef de la province de Terre-Neuve (Appelant)
c.
La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (Intimée)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, les juges Heald et Ryan—Ottawa, le 27 octobre 1978.
Compétence Appel contre la décision du Comité des transports par véhicule â moteur rejetant une demande en vue d'obtenir une ordonnance Ordonnance demandée en vue de suspendre l'augmentation de taux aussi longtemps que la Commission n'aura pas rendu une décision sur le tarif La Commission a-t-elle le pouvoir d'accorder l'ordonnance demandée? Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, c. N-17, art. 40(1) et (3).
Il s'agit d'un appel contre une décision du Comité des transports par véhicule à moteur de la Commission canadienne des transports qui a rejeté la demande faite par l'appelant en vue d'obtenir une ordonnance dont l'effet aurait été de retarder pour une période déterminée la date d'entrée en vigueur d'un tarif déposé par l'intimée en vertu de l'article 40 de la Loi nationale sur les transports relativement au service opération- nel des autocars à Terre-Neuve. La demande est présentée en vue d'obtenir une ordonnance visant à retarder l'augmentation de taux aussi longtemps que la Commission n'aura pas rendu une décision sur le tarif, de sorte que, en cas de rejet, la décision ait tout son effet. Le seul litige consiste à déterminer si la Commission a le pouvoir d'accorder l'ordonnance demandée.
Arrêt: l'appel est accueilli. Si la Commission ne peut pas rendre une ordonnance prononçant la suspension du tarif aux fins pour lesquelles l'ordonnance est demandée, elle ne peut pas arriver au même résultat aux mêmes fins par modification d'une ordonnance procédurale. En cas de «rejet», le pouvoir général prévu à l'article 40(3) ne peut s'exercer que sous réserve des conditions exposées par la loi aux alinéas a) et b). De prime abord, le terme «rejet» dans le contexte de cet article, s'applique à toute ordonnance rejetant le tarif proposé, qu'elle soit rendue avant ou après la date d'entrée en vigueur de ce tarif. Cependant, au moins une réserve doit être faite à cette interprétation, à savoir qu'une décision prescrivant la suspen sion d'un tarif proposé pendant une période à compter du jour du dépôt ne constitue pas un rejet. Également, une autre réserve doit être faite à l'égard de cette interprétation, à savoir qu'elle ne s'applique pas à une ordonnance, rendue avant ou après l'entrée en vigueur du tarif, qui prononce la suspension du tarif pour ce qui constitue, de l'avis de la Commission, un motif sérieux relatif à des procédures pouvant aboutir à un «rejet».
APPEL. AVOCATS:
O. Noel Clarke pour l'appelant.
K. J. G. Pye, c.r., pour l'intimée.
G. W. Nadeau pour la Commission cana- dienne des transports.
PROCUREURS:
Martin, Easton, Woolridge & Poole, Corner Brook, pour l'appelant.
Service du contentieux, Compagnie des che- mins de fer nationaux du Canada, Montréal, pour l'intimée.
Service du contentieux, Commission cana- dienne des transports, Ottawa, pour la Com mission canadienne des transports.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcés à l'audience par
LE JUGE EN CHEF JACKETT: Il s'agit d'un appel contre une décision du Comité des transports par véhicule à moteur de la Commission canadienne des transports qui a rejeté une demande faite par l'appelant en vue d'obtenir une ordonnance dont l'effet aurait été de retarder pour une période déterminée la date d'entrée en vigueur d'un tarif déposé par la Compagnie des chemins de fer natio- naux du Canada (ci-après appelée l'«intimée») en vertu de l'article 40 de la Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, c. N-17', relativement au service opérationnel des autocars dans la province
I Voici, en partie, le libellé de l'article 40, qui figure dans la Partie III de la Loi:
40. (1) Une personne exploitant une entreprise de trans port par véhicule à moteur visée par la présente Partie ne doit pas imposer de droits autres que les droits spécifiés dans un tarif en vigueur déposé à la Commission.
(3) La Commission peut rendre des ordonnances relatives à toutes les questions concernant le trafic, les droits et les tarifs d'une entreprise de transport par véhicule à moteur visée par la présente Partie, et elle peut rejeter tout tarif de droits, ou toute partie d'un semblable tarif,
a) que la Commission estime n'être pas compensatoire et n'être pas justifié par l'intérêt public; ou
b) que la Commission estime être un tarif qui tire un avantage indu de la situation de monopole favorisant les transporteurs par véhicule à moteur s'il n'existe aucun service efficace et concurrentiel fourni par un autre trans- porteur en commun qui n'est pas un autre transporteur par véhicule à moteur ou une combinaison de transporteurs par véhicule à moteur;
et la Commission peut exiger que l'entreprise de transport par véhicule à moteur substitue à ce tarif un tarif de droits qu'elle juge satisfaisant, ou elle peut prescrire d'autres tarifs en remplacement du tarif ainsi rejeté en tout ou en partie.
de Terre-Neuve. Le seul litige consiste à détermi- ner si la Commission a le pouvoir d'accorder l'or- donnance demandée.
Le tarif litigieux a été tenu pour régi par une ordonnance rendue en vertu de l'article 40(3) rela- tivement au service opérationnel des autocars en vertu de laquelle il devait [TRADUCTION] «entrer en vigueur à la date énoncée dans le tarif et au moins 90 jours à compter de la date de dépôt». Le dépôt a été fait le lei novembre 1978.
La demande visant à faire retarder l'entrée en vigueur du tarif est, en vérité, une demande faite en vue d'obtenir une ordonnance qui suspendrait l'augmentation des tarifs qui seraient touchés par cette entrée en vigueur, aussi longtemps que la Commission n'aura pas rendu une décision sur ce tarif, de sorte que, en cas de rejet, la décision ait tout son effet.
Bien que la demande soit rédigée sous une forme subsidiaire aux fins d'obtenir:
a) ou une ordonnance prescrivant directement de retarder ou de suspendre la date d'entrée en vigueur proposée,
b) ou une modification de l'ordonnance déjà mentionnée qui régit l'entrée en vigueur d'un tarif semblable,
à mon avis, le pouvoir de la Commission de sus- pendre toute augmentation de taux ne dépend pas de la forme sous laquelle elle rend une ordonnance à cet effet. En d'autres termes, si elle ne peut pas rendre une ordonnance prononçant la suspension du tarif proposé aux fins pour lesquelles l'ordon- nance est demandée, elle ne peut pas arriver au même résultat aux mêmes fins par modification d'une ordonnance procédurale.
Si on s'en tient au premier membre de phrase de l'article 40(3), la Commission semble avoir un pouvoir illimité de rendre des ordonnances «relati- ves à toutes les questions concernant ... les tarifs d'une entreprise de transport» visée par la Partie III. A mon avis, ce pouvoir général doit cependant être interprété sous réserve du fait que le même membre de phrase lui confère le pouvoir spécifique de «rejeter tout tarif» qui remplit les conditions exposées aux alinéas a) et b). Par conséquent, en cas de «rejet», le pouvoir général ne peut s'exercer que sous réserve de ces conditions spécifiées par la loi.
A mon avis, il s'agit donc de déterminer si la suspension demandée constitue un «rejet» au sens de ce terme dans l'article 40(3).
De prime abord, le terme «rejet», dans le con- texte de cet article, s'applique à toute ordonnance rejetant le tarif proposé, qu'elle soit rendue avant ou après la date d'entrée en vigueur de ce tarif. Cependant, au moins une réserve doit être faite à cette interprétation, à savoir qu'une décision pres- crivant la suspension d'un tarif proposé pendant une période à compter du jour du dépôt ne consti- tue pas un rejet. Avec quelque hésitation, j'en suis venu à la conclusion qu'elle est soumise à une autre réserve, à savoir qu'elle ne s'applique pas à une ordonnance, rendue avant ou après l'entrée en vigueur du tarif, qui prononce la suspension du tarif pour ce qui constitue, de l'avis de la Commis sion, un motif sérieux relatif à des procédures pouvant aboutir à un «rejet».
Je suis d'avis qu'il faut accueillir l'appel et remettre un avis attesté à la Commission en conséquence.
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LE JUGE HEALD y a souscrit.
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LE JUGE RYAN y a souscrit.
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