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T-3265-75
La Banque Canadienne Nationale (Demanderesse)
c. i La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Walsh— Montréal, le 6 février; Ottawa, le 19 février 1979.
Couronne Sûreté donnée à la demanderesse conformé- ment à l'art. 88 de la Loi sur les banques Antérieurement à la notification réglementaire à la défenderesse de cette cession, cette dernière a passé un contrat avec le débiteur de la deman- deresse pour la livraison de marchandises Auparavant, des dettes comptables avaient été cédées à la demanderesse par le débiteur conformément à une loi provinciale La défende- resse veut compenser le montant de la taxe d'accise due par le débiteur avec le montant qu'elle lui doit aux termes du contrat La demanderesse réclame ce montant Loi sur les ban- ques, S.R.C. 1970, c. B-1, art. 88 Loi sur la taxe d'accise, S.R.C. 1970, c. E-13, art. 27 et 52 Loi sur l'administration financière, S.R.C. 1970, c. F-10, art. 79, 80, 81 et 82 Code civil du Québec, art. 1571d.
Après avoir signé un formulaire indiquant son intention de donner à la demanderesse des garanties aux termes de l'article 88 et après l'avoir enregistré à la Banque du Canada, Canabu- reau Ltd. a, par acte notarié, cédé toutes ses dettes comptables et a enregistré cette cession générale en mars 1973 conformé- ment au Code Civil de la province de Québec. Après un contrat conclu en avril 1973 pour définir les pouvoirs de la banque, Canabureau Ltd. a donné en septembre 1973 à la demande- resse, sous le régime de l'article 88, une garantie sur les matières, produits en cours de transformation, produits finis et récépissés d'entrepôts lui appartenant. La demanderesse a pris possession de ces biens le 8 mars 1974 au su de la défenderesse. Un contrat avait été signé entre Canabureau Ltd. et la défende- resse en février 1974 et des marchandises commandées par cette dernière furent livrées en avril et mai 1974 par la deman- deresse. La défenderesse a réclamé à la demanderesse le mon- tant de la taxe d'accise exigible d'après les livres de Canabu- reau Ltd. et a compensé cette créance avec la dette qu'elle lui devait aux termes du contrat; ce n'est qu'en août 1974 que la cession a été dûment notifiée au receveur général. La demande- resse réclame cette somme.
Arrêt: l'action est rejetée. Alors que la créance dont la Couronne est débitrice est certainement celle de la banque et non celle de Canabureau Ltd., on doit interpréter cela à la lumière des dispositions de l'article 82 de la Loi sur l'adminis- tration financière qui doit être respecté si on veut opposer à la Couronne la cession faite par Canabureau Ltd. à la banque. La créance fut sans aucun doute validement cédée par Canabureau Ltd. à la banque mais, en ce qui concerne les relations de la banque et de la Couronne, cette dernière ne pouvait se voir opposer la cession tant qu'avis n'en était pas donné, ce qui s'est produit après la date de la compensation. Tant que cet avis n'était pas donné, la Couronne devait considérer Canabureau Ltd. comme créancière des montants qu'elle lui devait par suite de la vente du mobilier, nonobstant la cession par Canabureau Ltd. de ses comptes à la banque, et donc Canabureau Ltd. était au même moment à la fois créancière et débitrice de la
Couronne jusqu'à concurrence des montants dus en vertu des dispositions de la Loi sur la taxe d'accise, de sorte que l'on a régulièrement appliqué les dispositions de l'article 52(9) en opérant la compensation. Il n'est toutefois que d'un intérêt tout théorique de savoir si la compensation a lieu entre la Couronne et Canabureau Ltd. ou entre la Couronne et la banque puisque dans les deux cas on ne peut faire droit à la créance de la demanderesse celle-ci étant régulièrement éteinte par la compensation.
Arrêt mentionné: The Clarkson Co. Ltd. c. La Reine [1979] 1 C.F. 630. Arrêts examinés: Persons c. La Reine [1966] R.C.E. 538; Flintoft c. La Banque Royale du Canada [1964] R.C.S. 631 et Banque Canadienne Natio- nale c. Lefaivre [1951] B.R. (Qué.) 83.
ACTION. AVOCATS:
Maurice Lebel pour la demanderesse.
J. C. Ruelland, c.r. et Jean-Marc Aubry pour
la défenderesse.
PROCUREURS:
Reinhardt, Deschamps & Lebel, Montréal, pour la demanderesse.
Le sous-procureur général du Canada pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: Le 31 juillet 1972 une compa- gnie appelée Canabureau Ltd. signe un formulaire indiquant son intention de donner à la demande- resse des garanties aux termes de l'article 88 de la Loi sur les banques, S.R.C. 1970, c. B-1, lequel fut dûment enregistré près la Banque du Canada à Montréal le 10 août 1972.
Par acte notarié du 23 mars 1973, Canabureau Ltd. cède à la banque tous ses biens incorporels, ses créances, ses réclamations, y compris toutes les dettes comptables en souffrance, ou qui éventuelle- ment le deviendront, de même que tous les juge- ments ou autres sûretés les garantissant et tous les autres droits et bénéfices appartenant à la compa- gnie qui viendraient à lui appartenir; elle autorise la banque à les réaliser en la manière qu'elle pourrait juger opportune. La compagnie en outre accepte que si lesdits biens incorporels, créances, réclamations ou autres sûretés venaient à lui être payés, en tout ou en partie, elle les recevrait à titre de mandataire de la banque et les lui remettrait aussitôt. Cette cession générale des dettes compta-
bles fut dûment enregistrée au bureau d'enregis- trement de Montréal le 26 mars 1973 sous le numéro 2414366. Notification de la cession, con- formément à l'article 1571d du Code civil fut dûment publiée en français dans Le Devoir le 31 décembre 1973 et en anglais dans le Montreal Gazette le 2 janvier 1974. Voici le libellé dudit article du Code civil de la province de Québec:
Art. 1571d. La vente de l'universalité, d'une partie ou d'une catégorie particulière des créances ou comptes de livres, actuels ou futurs, d'une personne, société ou corporation faisant des affaires de commerce, peut être enregistrée au bureau de chaque division d'enregistrement le vendeur a une place d'affaires.
Cet enregistrement tient lieu, à toute fin, de la signification et de la délivrance exigées par l'article 1571, sauf quant aux créances ou comptes de livres payés ou autrement acquittés avant la publication d'un avis de cet enregistrement en français dans un journal quotidien publiée en cette langue dans le district judiciaire le vendeur a sa principale place d'affaires au Québec et en anglais dans un journal quotidien publié en cette langue dans ce même district; s'il n'existe pas de journal quotidien publié en langue française ou en langue anglaise, selon le cas, dans ledit district, la publication peut être faite dans un journal quotidien publié en langue française ou en langue anglaise, selon le cas, dans la localité la plus proche de ce district, un tel journal est publié.
Le 9 avril 1973, Canabureau Ltd. a conclu un contrat avec la banque, suivant une formule nor malisée, lequel énonce les pouvoirs de celle-ci con- cernant les avances et les sûretés qui lui ont été données en contrepartie. La clause 5 du contrat se lit comme suit:
5. Dans le cas de vente par le client des effets, en tout ou en partie, le produit de cette vente, y compris les espèces, les effets de commerce, billets à ordre, titres et valeurs qui en seront la considération, de même que les créances contre les acheteurs, appartiendront à la banque à qui ils devront être immédiate- ment versés ou remis et, jusqu'à ce versement ou cette remise, le client ne les détiendra qu'en fidéicommis pour la banque. L'exécution par le client et l'acceptation par la banque d'un transport de dettes de livres seront censés résulter de la présente convention et ne constitueront pas une reconnaissance de la part de la banque que le client a des droits ou un titre quelconque à ces dettes de livres.
Le 20 septembre 1973, comme sûreté pour l'ob- tention d'une marge de crédit renouvelable, Cana- bureau Ltd. a donné à la demanderesse, sous le régime de l'article 88 de la Loi sur les banques, une garantie sur des biens dont elle était ou deviendrait éventuellement propriétaire consistant en matériaux bruts, ou en voie de fabrication, et en produits finis de tous genres, c.-à-d. mobilier de bureau en bois tels: bureaux, fauteuils, etc. de tous
genres et de toutes qualités, ainsi que sur des récépissés d'entrepôts et des connaissements visant des biens de cette espèce se trouvant, ou destinés éventuellement à se trouver, au 1200, boul. Jules Poitras, à St-Laurent (Québec) ou ailleurs. Quoi- que cette garantie ait été donnée sur un formulaire employé pour l'article 88(1)a),b),c) ou e) de la Loi sur les banques, seul l'article 88(1)b) nous occupe ici. Le voici:
88. (1) La banque peut prêter de l'argent et consentir des avances
b) à toute personne faisant des affaires en qualité de fabri- cant, sur la garantie d'effets, denrées et marchandises qu'elle fabrique ou produit ou qui sont obtenus pour cette fabrica tion ou production, et sur celle des effets, denrées et mar- chandises utilisés ou fournis pour l'emballage des effets, denrées et marchandises ainsi fabriqués ou produits;
La déclaration modifiée du 16 janvier 1976 montre que Canabureau Ltd. doit $151,216.67, capital et intérêt, à la demanderesse; des billets pour ces prêts ont été mis en preuve. Quoique le montant exact de la dette ne soit pas pertinent, ni reconnu par la défenderesse, on ne conteste pas qu'il reste à la banque une somme supérieure à celle réclamée à la défenderesse en l'espèce. La demanderesse en outre prétend avoir pris posses sion des actifs nantis le 8 mars 1974, que la défenderesse en a eu connaissance et que subsé- quemment, la demanderesse, à la demande de la défenderesse, a fabriqué, délivré et facturé à la défenderesse du mobilier de bureau d'une valeur de $49,254.30 que cette dernière a refusé de lui payer quoique mise en demeure de le faire par lettre du 14 juillet 1975.
La défenderesse quant à elle prétend que les contrats conclus entre la demanderesse et Canabu- reau Ltd. ne l'obligent pas, ses propres obligations résultant d'un contrat conclu par elle et Canabu- reau Ltd. le ou vers le 12 février 1974, que la cession des comptes intervenue entre Canabureau Ltd. et la demanderesse ne lui est pas opposable vu les dispositions des articles 79 et suivants de la Loi sur l'administration financière' sous la rubrique «Cession des dettes de la Couronne«.
' S.R.C. 1970, c. F-10.
La défenderesse fait en outre valoir qu'elle ne doit nullement à la demanderesse la somme récla- mée suite à la compensation qui en vertu de la Loi sur la taxe d'accise 2 peut être invoquée contre la demanderesse aussi bien que contre Canabureau Ltd. La défenderesse reconnaît qu'en vertu d'un contrat, daté du 13 février 1974, conclu entre Canabureau Ltd. et le ministère des Approvision- nements et Services, il y a eu livraison de mar- chandises valant $49,254.30 au cours des mois d'avril et mai 1974. Le 18 mars 1974 le Directeur pour la perception de la taxe d'accise pour le ministère du Revenu national réclama à la deman- deresse le montant de la taxe d'accise en souf- france d'après les livres de Canabureau Ltd. et le 25 mars 1974 il demanda officiellement au minis- tre des Approvisionnements et Services de lui payer toutes les sommes que la défenderesse pour- rait devoir à Canabureau Ltd. suite audit contrat afin de compenser les deux dettes conformément à l'article 52(9) de la Loi sur la taxe d'accise que voici:
52....
(9) Lorsqu'une personne est endettée envers Sa Majesté sous le régime de la présente loi, le Ministre peut exiger la retenue, par voie de déduction ou de compensation, de la somme qu'il spécifie, sur tout montant pouvant être ou devenir payable à cette personne par Sa Majesté.
Subséquemment, les 10 avril et 10 juin 1974, le Directeur pour la perception de la taxe d'accise notifia le ministre des Approvisionnements et Ser vices que le montant de la taxe d'accise que devait Canabureau Ltd. s'élevait à un total de $49,312.54. Fin juin, début juillet 1974, le ministre des Approvisionnements et Services versa au ministre du Revenu national $49,254.30, la somme due à Canabureau Ltd., à titre de compensation partielle des $49,312.54 dont cette compagnie était toujours débitrice, au titre de la taxe d'accise. On prétend que par l'opération de cette compensation, la dette de la défenderesse envers Canabureau Ltd., ou la demanderesse, est éteinte.
On fait en outre valoir que les garanties données et les cessions effectuées par Canabureau Ltd. en faveur de la demanderesse les 23 mars et 30 septembre 1973 ont eu pour effet de rendre la demanderesse responsable envers la défenderesse du paiement de la taxe d'accise en souffrance ou
2 S.R.C. 1970, c. E-13.
devant le devenir, sur les matériaux et la marchan-
dise déjà fabriqués,' en cours de fabrication ou qui éventuellement seraient fabriqués et que ces garan-
ties jouaient toujours le 8 mars 1974 lorsque la demanderesse prit possession des actifs assujettis à la réalisation de ces garanties. La défenderesse plaide en outre que, postérieurement au. 8 mars 1974, on doit considérer la demanderesse comme un fabricant au sens de l'article 27 de la Loi sur la taxe d'accise et donc, comme responsable du paie- ment, à elle la défenderesse, de la taxe d'accise sur les marchandises sur lesquelles elle a exercé ses droits. L'article 27(3) de ladite loi se lit comme suit:
27....
(3) Si une personne qui n'est pas le fabricant, producteur, importateur, cessionnaire, ni le marchand en gros muni de licence ou l'intermédiaire ci-dessus mentionnés, acquiert de l'une de ces personnes ou contre elle le droit de vendre des marchandises, que ce soit par suite de l'application de la loi ou en conséquence d'une opération non sujette à l'impôt établi au présent article, la vente de ces marchandises par cette personne est imposable comme si elle était faite par le fabricant, le producteur, l'importateur, le cessionnaire, ou par le marchand en gros muni de licence ou l'intermédiaire, selon le cas, et la personne qui vend ainsi est assujettie au paiement de la taxe.
Il n'est pas contesté que la défenderesse ait connu les intérêts de la banque dans les montants payables en vertu des factures. Les factures ont toutes été envoyées au ministère des Approvision- nements et Services soit à l'attention du Directeur régional de l'accise, ministère du Revenu national, soit aussi au ministère des Approvisionnements et Services, mais à l'attention du gérant du district de Montréal et, sauf une exception, portent toutes l'annotation suivante au-dessus des signatures: [TRADUCTION] «Cette facture appartient à la Banque Canadienne Nationale en vertu de l'article 88 de la Loi sur les banques du Canada». Toute- fois ce n'est pas avant le 19 août 1974 que le receveur général fut régulièrement notifié que par une convention du 14 août 1974, Canabureau Ltd. avait cédé à la banque les sommes, au montant de $107,432.85, que la Couronne, représentée par le ministre des Approvisionnements et Services, devait, ou devrait bientôt, payer pour du mobilier de bureau et que paiement devrait être fait à la banque. Sur la formule d'avis, on a tamponné l'expression [TRADUCTION] «Approuvé au nom du sous-receveur général» mais, notamment, les factu- res portant les numéros 66600-3-5059 ont été
incluses dans le total, ces factures ayant déjà été comptées dans la compensation opérée par la défenderesse.
L'importance de ce fait et de cette date résulte des dispositions de l'article 80 de la Loi sur l'ad- ministration financière que voici:
80. Sauf ce que prévoient la présente loi ou toute autre loi du Parlement du Canada,
a) une dette de la Couronne n'est pas cessible, et
b) aucune opération présentée comme étant une cession d'une dette de la Couronne n'a l'effet de conférer à qui que ce soit des droits ou recours à l'égard de cette dette.
L'article 81 tempère cette interdiction générale; voici le paragraphe (1) de cet article:
81. (1) Toute cession absolue, faite par écrit et signée de la main du cédant, non présentée comme étant faite par voie d'imputation seulement, d'une dette de la Couronne décrite de l'une ou l'autre des façons suivantes, savoir:
a) une dette de la Couronne qui est un montant échu ou à échoir aux termes d'un contrat, ou
b) toute autre dette de la Couronne d'une catégorie prescrite par règlement,
dont avis a été donné à la Couronne ainsi que le prévoit l'article 82, est valide en droit, sous réserve de toutes les equities qui auraient pris rang avant le droit du cessionnaire si le présent article n'avait pas été édicté, pour transférer et transmettre, à compter de la date la signification dudit avis est faite,
c) le droit, reconnu par la loi, à la dette de la Couronne,
d) tous les recours juridiques et autres concernant la dette de la Couronne, et
e) le pouvoir d'accorder une libération valable à l'égard de la dette de la Couronne sans l'assentiment du cédant.
La cession a l'effet et doit être faite en la forme que prévoit l'article 82 que voici:
82. (1) Un avis de toute cession dont fait mention le para- graphe 81(1) doit être donné à la Couronne au moyen d'une signification ou d'un envoi par poste recommandée, au receveur général ou à un agent payeur, d'un avis de ladite cession selon la forme prescrite, ainsi que d'une copie de la cession accompa- gnée des autres documents, dont la signification ou l'envoi sont prescrits, complétés de la manière qui est prescrite.
(2) La signification de l'avis dont fait mention le paragraphe (1) est censée n'avoir pas été effectuée tant qu'une reconnais sance de l'avis, selon la forme prescrite, n'est pas adressée au cessionnaire, par poste recommandée, portant la signature de l'agent payeur compétent.
C'est l'avis qui fut donné le 19 août 1974 et qui fut éventuellement approuvé. Il est notoire qu'il s'ensuit que les sommes dont la Couronne serait débitrice après cette date seraient payables à la banque. La banque, pour sa part, ne conteste pas que les créances de la Couronne au titre de taxe d'accise et d'autres dettes courantes de Canabu- reau Ltd., comme par exemple les déductions d'as-
surance-chômage et d'impôt sur le revenu des salaires des ouvriers, résultant de ses opérations postérieures aux cessions faites à la banque, seraient payables à la Couronne. Mais la défende- resse ne reconnaît pas que cet avis ait un effet rétroactif anéantissant la compensation qui a résulté, prétend la défenderesse, des factures en souffrance antérieurement à l'avis. A ce sujet la défenderesse réfère à l'arrêt de la Cour d'appel dans l'affaire The Clarkson Company Limited, syndic des biens et de l'entreprise de la Compa- gnie de Systèmes et d'Équipement Rapid Data Limitée c. La Reine [1979] 1 C.F. 630. Il ne s'agissait pas d'une cession en vertu de la Loi sur les banques mais de l'effet d'un acte d'obliga- tion par lequel Rapid Data avait créé une garantie flottante au profit de la Banque de Montréal; Clarkson ayant été nommée par la banque syndic à l'entreprise et aux biens de Rapid Data, assurait la gestion de l'entreprise. La réclamation visait un droit de drawback que la Couronne avait com- pensé par des taxes que la compagnie devait à Sa Majesté. Le juge en chef Jackett après avoir dit que la convention d'obligation était une forme de bien incorporel qui avait l'effet d'une cession en equity «par voie d'imputation seulement» a dit [aux pages 638 et 639]:
Il s'ensuit que l'obligation est nulle en vertu de l'article 80, au moins relativement au cessionnaire et à Sa Majesté, et sous réserve de dispositions contraires de l'article 81 ou de quelque autre texte législatif. On n'a attiré notre attention sur aucune autre disposition législative qui viserait la cession d'une récla- mation de drawback, et par ailleurs, l'article 80 ne dispose rien de tel puisque cet article s'applique seulement à une [TRADUC- TION] «cession absolue ... non présentée comme étant faite par voie d'imputation».
Il reste à se demander si, quoique en vertu de l'article 80 entre la banque et Sa Majesté la cession en equity du droit de Rapid Data de se faire payer le drawback n'existe pas, ce droit existe néanmoins entre Rapid Data et la banque; Rapid Data dans ce cas agit en tant que fiduciaire de la banque et non en son propre nom, et en conséquence les parties ne sont pas mutuellement créancière et débitrice l'une de l'autre, ce qui est essentiel pour pouvoir invoquer la compensation en défense. La réponse à cette question, je pense, c'est que l'exception de l'article 81, soit la cession faite «par voie d'imputation seule- ment», montre que l'article 80 ne s'applique qu'à une telle cession. Il s'ensuit qu'à mon avis, il n'est pas possible en l'instance engagée contre Sa Majesté de s'appuyer sur la ces sion faite «par voie d'imputation seulement» pour montrer que Rapid Data, la cédante, ne réclame pas en son propre nom mais seulement à titre de fiduciaire.
Ma conclusion est donc qu'il y a présence de l'élément nécessaire à la défense de compensation, c'est-à-dire que les parties sont mutuellement créancière et débitrice l'une de l'au- tre....
La question de l'effet de ces articles de la Loi sur l'administration financière avait précédem- ment été étudiée par le juge Noël, alors simple juge, dans l'affaire Persons c. La Reine 3 . Le péti- tionnaire avait signé un document par lequel il voulait céder à la Banque Royale du Canada certaines créances y énoncées résultant d'un con- trat administratif de construction en vertu duquel il demandait réparation en l'instance en cause. La banque avait écrit à l'agent en chef du Trésor du gouvernement du Canada annexant à la missive le contrat type de cession en cause. Après avoir signalé que suite à la décision du président Thor- son, dans l'affaire Banque de Nouvelle-Écosse c. La Reine 4 , des modifications avaient été apportées à la Loi sur l'administration financière par S.C. 1960-61, c. 48, le juge Noël réfère à l'article 88c ajouté par ladite modification (l'actuel article 81). Il traite ensuite, à la page 544, de la procédure légale pour faire cession de cette sorte de créances et, comme elle ne fut pas respectée, au bas de la page, il conclut:
[TRADUCTION] Dans ces circonstances, il est clair que la cession à la Banque Royale du Canada n'était pas, encore, devenue «valide en droit» en vertu de l'article 88c de la Loi sur l'administration financière et, autant que je sache, il n'existe aucune disposition de cette loi, ou de quelque autre loi du Parlement du Canada, qui puisse lui donner force de loi.
A la page 545 il dit:
[TRADUCTION] Sans m'aventurer dans le domaine fort com- plexe et difficile de l'application des lois provinciales à l'établis- sement des droits et obligations de Sa Majesté du chef du Canada, je suis certain qu'une norme comme la Partie VITIA de la Loi sur l'administration financière, lorsque adoptée par le Parlement, supplante toute norme provinciale qui pourrait autrement s'appliquer dans les circonstances au moins dans la mesure elle est en conflit avec la norme provinciale. L'article 88B joue donc tel que le prévoient les mots y employés et a manifestement pour effet que, tant que la cession en cause ici ne sera pas devenue valide en droit en vertu de l'article 88c, les créances de Persons dont la Couronne est débitrice sont incessi- bles et la cession n'a pas l'effet de conférer quelque droit ou recours à la Banque Royale du Canada.
La demanderesse fait valoir cependant qu'on peut établir une distinction entre ces affaires et celle qui nous occupe car elles ne portent pas sur des cessions faites en vertu de l'article 88 de la Loi sur les banques; à l'appui de ses dires elle appelle l'attention sur la partie suivante de l'article 89(1) de cette loi:
3 [1966] R.C.É. 538.
4 (1961) 27 D.L.R. (2e) 120.
89. (1) Tous les droits et pouvoirs de la banque relatifs aux biens mentionnés ou visés dans un récépissé d'entrepôt ou un connaissement acquis et détenu par la banque, et les droits et pouvoirs de la banque à l'égard des biens affectés à une garantie à elle donnée en vertu de l'article 88, qui sont les mêmes que si la banque eût acquis, un récépissé d'entrepôt ou un connaissement dans lequel ces biens étaient décrits, priment, sous réserve des dispositions du paragraphe 88(4) et des para- graphes (2) et (3) du présent article, tous les droits subséquem- ment acquis dans, sur ou concernant ces biens, ainsi que la réclamation de tout vendeur impayé; ..
On prétend que, vu que les créances de la banque résultent d'une cession de ce genre, elles sont prioritaires sur celles même du vendeur impayé, lui-même ayant priorité sur les créances de la Couronne (article 1994 du Code civil de la pro vince de Québec) de sorte que la créance de la banque prévaudrait. La demanderesse mentionne à l'appui deux arrêts, le premier étant Banque Canadienne Nationale c. Lefaivres, un litige oppo- sant la banque et les syndics d'une compagnie faillie au sujet des paiements en souffrance suite à une vente d'effets qui avaient été cédés en garantie à la banque sous le régime de l'article 88 de la Loi sur les banques. L'arrêt dit que la créance de la banque prévaut dans la mesure de sa créance contre la faillie et que le transport des comptes que la faillie avait fait à la banque par convention spéciale n'était même pas soumis aux formalités des articles 1571 et suivants du Code civil de la province de Québec. Deux opinions dissidentes jugeaient qu'une sûreté sous le régime de l'article 88 de la Loi sur les banques ne pouvait s'appliquer qu'à des biens corporels et non aux comptes résul- tant de la vente de ceux-ci, ces créances étant soumises aux formalités des articles 1571 et sui- vants. Les opinions dissidentes ne sont pas en cause ici puisque la banque s'est conformée aux disposi tions de ces articles en publiant les avis requis à la fin de décembre et au début de janvier 1974 avant que les comptes ne soient remis à la défenderesse. En prononçant l'arrêt de la majorité, le juge Gali- peault dit, à la page 88:
Quant à l'étendue du droit que possède la banque ici par le jeu des art. 86, 88 et 89, et avec l'appelante j'estime que c'est le droit de propriété qu'il faut reconnaître et qui ne saurait être primé par personne posant un acte subséquent à la garantie. Je me rends encore à l'argument de l'appelant que ce droit de propriété créé de toutes pièces par le Parlement du Canada est
5 [1951] B.R. (Qué.) 83.
sui generis et ne doit être interprété qu'à la seule lumière de la Loi des banques et non en regard du Code civil.
A la page 89 il ajoute:
C'est bien encore là, il me paraît, d'accord avec l'appelante, reconnaître l'économie de l'art. 88, permettant au grossiste ou au fabricant, forcé d'obtenir des avances pour son commerce, de se dessaisir de tous ses droits à la marchandise qu'il trans- porte à la banque sans s'en déposséder, de façon à ne pas paralyser ses affaires. Cette possession de la marchandise dont il continue à se servir et dont il dispose avec le consentement de la banque, il le fait pour le compte de cette dernière, agissant comme son agent, mandataire ou préposé de cette dernière, la propriétaire.
La demanderesse a aussi mentionné l'arrêt de la Cour suprême Flintoft, syndic à la faillite de Canadian Western Millwork Ltd. c. La Banque Royale du Canada 6 , un autre litige opposant la banque intimée, détentrice d'une sûreté selon l'ar-
ticle 88(1)b) de la Loi sur les banques, et le syndic à la faillite d'un client de la banque, portant sur la propriété de certaines dettes non perçues dont le
client était créancier au moment de la faillite. Le syndic prétendait qu'il avait droit à la saisine de
ces créances car la cession des dettes comptables dont bénéficiait la banque était nulle pour défaut d'enregistrement dans les délais. En rendant l'ar- rêt, le juge Judson écrit à la page 634:
[TRADUCTION] L'article 88 constitue une forme unique de sûreté. Je ne connais aucune autre juridiction cette forme existe. L'article permet à certaines catégories de personne qui n'ont nullement le caractère de gardiens, en l'espèce un manu- facturier, de grever leurs propres effets d'une sûreté avec les conséquences définies ci-dessus. En dépit de cela, du consente- ment de la banque, celui qui donne la sûreté peut vendre les biens dans le cours ordinaire de ses affaires et donner bon et valable titre à ses acheteurs. Mais cela ne veut pas dire que les dettes comptables lui appartiennent une fois vendus les effets. Pour moi l'erreur de l'opinion dissidente réside dans la pré- somption qu'une fois les effets vendus les dettes comptables appartiennent au client de la banque et que celle-ci ne peut ainsi recouvrer ces dettes comptables que si elles lui ont été cédées.
Après revue de la jurisprudence, y compris de l'arrêt Banque Canadienne Nationale c. Lefaivre (précité) et avoir trouvé qu'on ne peut en distin- guer les faits de ceux en cause devant lui, il dit [aux pages 636 et 637]:
[TRADUCTION] L'arrêt de la majorité est carrément fondé sur le motif que les créances dont les acheteurs des marchandises sont débiteurs appartiennent à la banque en vertu de sa sûreté
6 [1964] R.C.S. 631.
selon l'article 88 et n'ont jamais appartenu au client de sorte qu'elles ne peuvent être touchées par la cession de biens.
Ces deux derniers arrêts traitent de litiges oppo- sant la banque, à titre de propriétaire des comptes recevables de son client, qui lui ont été dûment cédés en vertu de la Loi sur les banques, et le syndic à la faillite du client; ni dans l'un ni dans l'autre cas la Couronne n'était débitrice de quelque compte à recevoir et conséquemment ils ne s'appli- quent pas directement. Ils soutiennent toutefois deux propositions:
1. Lorsqu'il s'agit de créances résultant de ces sions selon l'article 88 de la Loi sur les banques, c'est au droit fédéral seul qu'il faut s'adresser pour déterminer leur rang sans égard au droit provincial, lequel ne joue aucun rôle (voir aussi le jugement du juge Noël dans l'affaire Persons (précitée) à cet égard).
2. La banque est elle-même titulaire du droit de réclamer paiement du compte recevable même si la créance est en fait facturée par le client.
Il s'ensuit qu'il ne peut y avoir aucune compensa tion que l'acheteur des marchandises du client de la banque pourrait opérer contre ledit client. La banque est devenue créancière véritable du compte recevable par suite de la cession mais n'a assumé aucune responsabilité pour les dettes du client dont lui seul reste débiteur.
Cependant lorsqu'on traite de cessions de créan- ces dont la Couronne est débitrice, la situation est fort différente vu les dispositions de la Loi sur l'administration financière (précitée). L'arrêt du juge en chef Jackett de la Cour d'appel dans l'affaire Clarkson (précitée) établit comme règle que les articles 80 et 81 de la Loi sur l'administra- tion financière, l'un interprété à la lumière de l'autre, veulent dire que l'interdiction absolue de faire une cession de l'article 80 ne s'applique qu'aux cessions «par voie d'imputation seulement». Si je comprends bien, l'actuelle créance portant sur les comptes à recevoir est un bien incorporel mais comme la créance de la banque n'en est pas une «par voie d'imputation seulement», elle peut faire l'objet d'une cession quoique pour que celle-ci soit opposable à la défenderesse, il faut que les disposi tions rigoureuses de l'article 82 de la Loi sur l'administration financière soient respectées. Cette conclusion est conforme à celle du juge Noël dans l'affaire Persons (précitée).
La dette de la défenderesse résulte d'un contrat, daté du 13 février 1974, conclu avec Canabureau Ltd. pour l'achat de marchandises qui ont été livrées entre avril et mai 1974, donc avant notifica tion de la cession par Canabureau Ltd. de ses comptes à la banque en la forme requise par l'article 82 de la Loi sur l'administration finan- cière; le fait que la défenderesse ait connu la cession faite à la banque par suite d'une note sur les factures ne change rien à cet état de choses vu qu'il faut donner à la Loi une interprétation rigoureuse.
Il n'y a rien au dossier qui indique quelle est l'origine des créances au titre de la taxe d'accise, mais il est évident qu'elles ne découlent pas, ou du moins pas entièrement, de la taxe de vente sur la fabrication des marchandises vendues à la défen- deresse, mais qu'elles étaient antérieures. En fait la demanderesse concède qu'en permettant à sa cliente Canabureau Ltd. de poursuivre le cours ordinaire de ses affaires en dépit de la cession à son profit des comptes à recevoir, elle doit prévoir le paiement des taxes et autres comptes payables en conséquence directe de la poursuite des affaires. La première lettre du directeur général de l'Admi- nistration centrale des opérations du ministère du Revenu national au ministère des Approvisionne- ments et Services, section de la comptabilité, en date du 25 mars 1974, réfère à une dette de $29,000 en taxes de vente et attire l'attention sur le contrat conclu avec Canabureau Ltd. deman- dant que lorsque les factures seront approuvées pour paiement, les chèques soient faits payables au receveur général du Canada. Une deuxième lettre dans le même sens, en date du 10 avril 1974, précise que le montant de la dette s'élève mainte- nant à $40,000. La dernière lettre, en date du 10 juin 1974, donne comme chiffre définitif $49,312.54. On réfère à l'article 52(9) de la Loi sur la taxe d'accise (précité) qui prévoit la com pensation et je crois que cet article peut et doit être opposé à la demanderesse. Qu'il puisse l'être après qu'avis de la cession d'une créance dont la Cou- ronne est débitrice a été dûment donné et accepté en vertu des dispositions de l'article 82 de la Loi sur l'administration financière, je n'ai pas à en décider en l'espèce. La demanderesse fait valoir pour répondre à cela qu'il ne peut y avoir compen sation vu que c'est Canabureau Ltd. qui est débi- trice de la Couronne en vertu des dispositions de la
Loi sur la taxe d'accise alors que c'est la banque qui est créancière, de la Couronne, des montants payables en vertu du contrat de vente. Je crois que la réponse la plus simple à cela c'est qu'alors qu'en vertu de l'arrêt Flintoft de la Cour suprême (pré- cité) la créance dont la Couronne est débitrice est certainement celle de la banque et non celle de Canabureau Ltd., on doit interpréter cela à la lumière des dispositions de l'article 82 de la Loi sur l'administration financière qui doit être res pecté si on veut opposer à la Couronne la cession faite par Canabureau Ltd. à la banque. La créance fut sans aucun doute validement cédée par Cana- bureau Ltd. à la banque mais, en ce qui concerne les relations de la banque et de la Couronne, cette dernière ne pouvait se voir opposer la cession tant qu'avis n'en était pas donné, ce qui s'est produit après la date de la compensation. Tant que cet avis n'était pas donné, la Couronne devait considérer Canabureau Ltd. comme créancière des montants qu'elle lui devait par suite de la vente du mobilier, nonobstant la cession par Canabureau Ltd. de ses comptes à la banque, et donc Canabureau Ltd. était au même moment à la fois créancière et débitrice de la Couronne jusqu'à concurrence des montants dus en vertu des dispositions de la Loi sur la taxe d'accise, de sorte que l'on a régulière- ment appliqué les dispositions de son article 52(9) en opérant la compensation.
La défenderesse prétend en outre que la Cou- ronne n'est pas liée par les dispositions des articles 88 et suivants de la Loi sur les banques. Elle justifie ceci en référant à l'article 16 de la Loi d'interprétation' que voici:
16. Nul texte législatif de quelque façon que ce soit ne lie Sa Majesté ni n'a d'effet à l'égard de Sa Majesté ou sur les droits et prérogatives de Sa Majesté, sauf dans la mesure y mention- née ou prévue.
Elle fait valoir qu'il n'y a aucune disposition dans la Loi sur les banques qui lie expressément Sa Majesté, contrairement à la Loi sur la faillite 8 où, par exemple, l'article 183 dit expressément:
183. Aucune disposition de la présente loi ne doit gêner ou restreindre les droits et privilèges que la Loi sur les banques confère aux banques et aux corporations bancaires.
7 S.R.C. 1970, c. I-23.
8 S.R.C. 1970, c. B-3.
Il y a du vrai dans cet argument mais je ne dirai rien de définitif à ce sujet vu les conséquences importantes que cela pourrait avoir. Si l'article 88 n'oblige jamais la Couronne, alors cela serait vrai aussi dans le cas des créances au titre de l'impôt sur le revenu, de l'assurance-chômage, des remises selon le Régime de pensions du Canada etc.; cela ne saurait être limité aux créances en vertu de la taxe d'accise, celles qui concernent la Cour en l'espèce et, comme le signale la demanderesse, cela nuirait considérablement au commerce bancaire si une banque, lorsqu'elle accorde un prêt garanti par une cession selon l'article 88, doit s'assurer de l'absence de toute créance en souffrance pour taxe de quelque sorte qui serait due à la Couronne et dont le montant pourrait fort bien surpasser la valeur de la sûreté obtenue par le jeu de l'article 88 de la Loi sur les banques.
La défenderesse soulève un autre argument, basé sur l'article 27(3) de la Loi sur la taxe d'accise (précité): quiconque, autre que le fabri- cant ou le producteur (comme c'est le cas de la banque en l'espèce), acquiert de ceux-ci le droit de vendre des marchandises, que ce soit par suite de l'application de la loi ou en conséquence d'une opération non autrement sujette à l'impôt, devient lui-même assujetti à l'impôt dès la vente de ces marchandises. Le paragraphe 2(1) de l'article des définitions de ladite loi se lit comme suit:
2.(1)...
«fabricant ou producteur» comprend
a) le cessionnaire, le syndic de faillite, le liquidateur, l'exécu- teur testamentaire ou le curateur de tout fabricant ou pro- ducteur et, d'une manière générale, quiconque continue les affaires d'un fabricant ou producteur ou dispose de ses valeurs actives en qualité fiduciaire, y compris une banque exerçant des pouvoirs qui lui sont conférés par la Loi sur les banques ainsi qu'un fiduciaire pour des porteurs d'obliga- tions, [c'est moi qui souligne].
En vertu de cet argument, la banque en poursui- vant les affaires du fabricant Canabureau Ltd. et en vendant à son propre profit ces marchandises est devenue elle-même responsable du paiement de la taxe. Si on devait faire droit à cet argument il y aurait un droit manifeste à la compensation entre la Couronne et la banque.
La demanderesse fait valoir que cette définition, rapprochée des articles 27(3) et 52(9), signifie simplement que la banque, si elle poursuit ou permet la poursuite des affaires d'un client suite à
la cession des comptes de ce dernier à son nom, est responsable des taxes grevant les ventes du client, et que ces taxes peuvent bien entendu être compen- sées par les dettes de la Couronne. Le libellé de l'article 52(9) ne limiterait pas les créances de la Couronne au titre de la taxe d'accise aux taxes d'une vente précise toutefois; en l'espèce, il est évident que la créance vise des taxes d'accise dues pour d'autres ventes et, d'après la somme en cause, on peut raisonnablement conclure que les taxes réclamées sont postérieures à la cession faite à la banque selon l'article 88, laquelle a eu lieu en 1973.
Il n'est toutefois que d'un intérêt tout théorique de savoir si la compensation a lieu entre la Cou- ronne et Canabureau Ltd. conformément à ma première conclusion ou entre la Couronne et la banque conformément à la dernière prétention de la défenderesse puisque dans les deux cas on ne peut faire droit à la créance de la demanderesse celle-ci étant régulièrement éteinte par la compen sation.
L'action de la demanderesse est donc rejetée avec dépens.
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