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T-3972-78
Pacific Western Airlines Ltd. et Canadian Accep tance Corporation Limited (Demanderesses)
c.
La Reine du chef du Canada, l'Honorable Otto E. Lang, Walter M. McLeish, P. E. Arpin, J. P. Cadieux, J. P. Vaillancourt, R. L. Bolduc, H. R. Merritt, J. M. Belcher, P. P. Bowes, T. C. Calow, R. A. Harley, M. D. Jelenick, K. D. J. Owen, D. F. Heakes, Donald J. Dewar, Frederick G. Lowe, Douglas Ellis, Allan Bach, Ernest Hanover, Harry Allan Fooks, la Corporation de la ville de Cran- brook, C. W. Purdy, George Stanley Swirski, Terry George, La Boeing Company, E. H. Bouil- lioun, Benjamin Wheat, C. E. Dillon, James L. Copenhaver, Frederick D. Frajola, Gary Soffe, Max Witters, John Doe I, John Doe II, John Doe III, Rohr Industries Inc., Kenneth W. Goebel, Garrette Arthur Brummett Jr., Herman O. Light Jr., John Doe IV, John Doe V et John Doe VI (Défendeurs)
Division de première instance, le juge Collier— Vancouver, le 20 novembre 1978; Ottawa, le 2 avril 1979.
Pratique Demande de radiation fondée sur la Règle 419(1)a) Compétence Dans une action intentée à la suite d'un écrasement d'aéronef à Cranbrook (C.-B.), les demande- resses invoquaient la responsabilité délictuelle (faute et inexé- cution d'obligations légales) et l'inexécution d'un contrat Requête formulée par la Couronne et ses employés nommés, la ville de Cranbrook et ses employés nommés, et La Boeing Company et ses employés nommés Loi sur la responsabilité de la Couronne, S.R.C. 1970, c. C-38, art. 3(1)a), 7(1), 8(2) Loi sur l'aéronautique, S.R.C. 1970, c. A-3, art. 3, 6 Règlement de l'Air, DORS/61-10, art. 104, 305, 313, 314 Règle 419(1)a) de la Cour fédérale.
Dans une action en responsabilité délictuelle pour cause de faute et d'inexécution d'obligations légales et en inexécution de contrat, intentée à la suite d'un écrasement d'aéronef à Cran- brook (Colombie-Britannique), trois groupes de défendeurs contestent la compétence de la Cour à l'égard des demandes dont ils ont à se défendre et concluent à la radiation de la déclaration conformément à la Règle 419(1)a). Ces groupes de défendeurs sont: la Couronne et ses fonctionnaires nommés, la ville de Cranbrook et trois de ses fonctionnaires et enfin, La Boeing Company (constructeur de l'aéronef), quatre de ses cadres supérieurs et trois personnes inconnues. Le quatrième groupe, composé de Rohr Industries (fabricant du système de freinage de l'aéronef), de quatre de ses cadres supérieurs nommés et de trois personnes inconnues, n'a présenté aucune requête.
Arrêt: la Cour a compétence exclusive pour connaître des demandes dont doit se défendre la Couronne mais non de celles
engagées contre les autres défendeurs. Il n'existe aucune règle de droit fédéral en matière de faute, qu'il s'agisse de loi, de règlement ou de common law, qui permette de poursuivre ces défendeurs, la Couronne exceptée, devant la Cour. Bien que de par l'alinéa 17(4)b) de la Loi sur la Cour fédérale, il soit possible de poursuivre un fonctionnaire de la Couronne devant la Cour fédérale, on ne peut dire que cet alinéa constitue la loi fédérale sur laquelle on peut fonder une action en faute ou autre et en saisir la Cour. La Loi sur l'aéronautique et son Règlement d'application ne créent pas une obligation dont l'inexécution ouvrirait un recours aux particuliers. Quand bien même les défendeurs des groupes Boeing et Rohr auraient, comme le prétendent les demanderesses, manqué aux obliga tions légales prévues par les U.S. Federal Aviation Regula- tions—que les demanderesses considèrent comme applicables au Canada en vertu d'un traité—la déclaration n'indique aucun fait matériel constituant violation de ce règlement. La déclara- tion fait état de faute au regard de laquelle les U.S. Federal Aviation Regulations sont cités à titre de norme de prudence en la matière. Il ne suffit pas d'affirmer qu'il y a eu inobservation de certains règlements, que l'on dit applicables au Canada, pour se prévaloir de la compétence de la Cour. Même en supposant qu'il y a eu contrat et inexécution de ce contrat, celui-ci n'est fondé sur aucune règle de droit fédéral en vigueur. Par ailleurs, les détails de l'inexécution n'impliquent en aucune façon Cranbrook comme mandant. La Cour ne saurait sous- crire à la notion de compétence accessoire. Il ressort des arrêts Quebec North Shore et McNamara que les conclusions formu- lées dans l'action principale et contre chaque codéfendeur doivent être toutes fondées sur la législation fédérale, et non sur une combinaison ou un mélange de législation fédérale et non fédérale.
Arrêts appliqués: Quebec North Shore Paper Co. c. Cana- dien Pacifique Ltée [1977] 2 R.C.S. 1054; McNamara Construction (Western) Ltd. c. La Reine [1977] 2 R.C.S. 654; Tomossy c. Hammond [1979] 2 C.F. 232; Green c. La Reine (non publié, T-5984-78). Arrêts considérés: Davie Shipbuilding Ltd. c. La Reine [1979] 2 C.F. 235; Alda Enterprises Ltd. c. La Reine [1978] 2 C.F. 106.
REQUÊTE. AVOCATS:
E. M. Lane et R. Allen pour les demanderes- ses.
G. Donegan et G. Heinmiller pour les défen- deurs la Reine et al.
D. I. Brenner pour les défendeurs La Boeing Company et al.
H. J. Grey, c.r. pour les défendeurs la ville de Cranbrook et al.
PROCUREURS:
Lane, Breck & Associates, Toronto, pour les demanderesses.
Le sous-procureur général du Canada pour les défendeurs la Reine et al.
Brenner & Co., Vancouver, pour les défen- deurs La Boeing Company et al.
Harper, Grey, Easton & Co., Vancouver, pour
les défendeurs la ville de Cranbrook et al.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par.
LE JUGE COLLIER: Il s'agit en l'espèce de trois requêtes qu'ont présentées certains des codéfen- deurs, excipant, relativement aux demandes dont ils ont à se défendre, de la compétence de la Cour. On invoque la Règle 419(1)a).
Aux fins desdites requêtes, il faut présumer que tous les faits allégués dans la déclaration sont vrais et qu'ils ont été reconnus comme tels. La déclara- tion ici consiste en un document substantiel de 69 pages comprenant 94 paragraphes. Elle ne se limite pas, comme le demande la Règle 408, aux faits bruts. On y invoque certaines règles de droit. Dans plusieurs paragraphes, les demanderesses allèguent infraction aussi bien à certains articles de la Loi sur l'aéronautique', et au Règlement de l'Aire qu'aux Federal Aviation Regulations des États-Unis. Les faits matériels qui constitueraient cette inexécution n'ont pas été décrits. Pour les fins des présents motifs, je n'ai reconnu que les faits matériels expressément invoqués.
La demanderesse Canadian Acceptance Corpo ration Limited (ci-après la «Canadian Accep tance») était propriétaire et bailleur d'un aéronef de type Boeing 737/275 (ci-après «le 737»). C'est la demanderesse Pacific Western Airlines Ltd. (ci- après la «P.W.A.») qui avait loué et exploitait le 737. Celui-ci avait été conçu, fabriqué et vendu par La Boeing Company (ci-après la «Boeing») une société américaine faisant affaire à Seattle (Wash- ington). L'aéronef comportait, comme partie inté- grante de son système de freinage, un mécanisme appelé inverseur de poussée Rohr du type à déflec- teurs. C'est la société maintenant devenue la Rohr Industries Inc. (ci-après la «Rohr») qui avait conçu et fabriqué ce système. La Rohr fait affaire en Californie.
La P.W.A. fait affaire au Canada comme trans- porteur régulier. Le 11 février 1978, le 737 en cause effectuait un vol régulier de Calgary
' S.R.C. 1970, c. A-3.
2 DORS/61-10, modifié.
(Alberta) à Cranbrook (C.-B.) (vol 314). Une partie du paragraphe 26 de la déclaration donne la version des faits des demanderesses:
[TRADUCTION] Les demanderesses affirment en outre qu'im- médiatement après avoir touché le sol et sorti les inverseurs de poussée à l'aéroport de Cranbrook, alors que la neige et la poudrerie réduisaient la visibilité, le pilote a été forcé de remettre plein les gaz lorsqu'il s'est rendu compte qu'un engin chasse-neige était demeuré, ou avait été autorisé à demeurer, sur la piste bloquant la course à l'atterrissage. Au début, ce décollage en catastrophe fut couronné de succès, l'appareil C-FPWC évitant l'obstacle mais au cours du décollage les inverseurs de poussée ne furent pas complètement rétractés ni refermés. Les demanderesses affirment que la pression hydrau- lique employée pour rétracter, refermer et effacer les inverseurs a été coupée puis a commencé à disparaître une fois que l'avion C-FPWC eût quitté la piste. Au cours de l'ascension, les forces et influences aérodynamiques firent que l'inverseur de poussée gauche revint en position sortie échappant à tout contrôle du pilote et du copilote de l'avion C-FPWC. Le brusque retour en position sortie de l'inverseur de poussée gauche bloqua la commande d'arrivée des gaz en position fermée coupant ainsi l'alimentation en carburant du moteur gauche. Les demande- resses affirment aussi que la poussée asymétrique résultante, le moteur droit en poussée normale et le gauche inversé, créa ainsi une résistance aérodynamique et fit que l'aéronef devint incon- trôlable et s'écrasa, nez contre terre, au coin sud-est de l'aéro- port. L'impact, et l'incendie qui s'ensuivit, tuèrent 43 person- nes. Les six survivants subirent des blessures de gravité différente. L'aéronef fut une perte totale.
Le 31 août 1978, les demanderesses introduisent cette action devant la Cour. Il y a 43 défendeurs dont six désignés comme John Doe I, John Doe II, John Doe III, John Doe IV, John Doe V et John Doe VI.
On peut classer les défendeurs en quatre groupes.
Il y a d'abord Sa Majesté la Reine du chef du Canada. Dans certains cas je l'appellerai la Cou- ronne fédérale ou simplement la Couronne. Il y a aussi comme défendeurs vingt fonctionnaires de la Couronne: le ministre des Transports et certains hauts fonctionnaires de son Ministère.
Dans un autre groupe de défendeurs on peut classer la Corporation de la ville de Cranbrook (ci-après «Cranbrook») et trois de ses fonctionnai- res.
Vient ensuite le groupe Boeing. La compagnie est elle-même poursuivie de même que sept de ses dirigeants et cadres supérieurs. John Doe I, II et
III, suivant la pratique de certaines juridictions américaines, ont été aussi inscrits comme défen- deurs (voir les paragraphes 43 48). Du groupe Boeing, seule la compagnie et trois des individus codéfendeurs ont, en cet état de la cause, excipé de la compétence. Je présume que c'est parce que signification de l'action n'a pas encore été faite aux autres individus du groupe.
Enfin il y a le groupe Rohr. La compagnie elle-même et quatre de ses cadres supérieurs sont nommés. En sus, John Doe IV, V et VI sont aussi inclus dans ce groupe. Ni Rohr ni les cadres n'ont présenté de requêtes au sujet de la compétence. Il se peut qu'au moment de l'instruction la déclara- tion ne leur ait pas encore été signifiée.
J'examine d'abord les demandes dont la Cou- ronne doit se défendre ainsi que la position que celle-ci a prise à cet égard.
La demande principale se fonde sur la responsa- bilité délictuelle résultant tant de la faute que de l'inexécution d'obligations légales. Précisément, c'est aux vingt fonctionnaires de la Couronne qu'on impute soit une faute soit l'inexécution d'une obligation légale. La Couronne serait responsable en tant que commettant.
On allègue aussi inexécution d'un contrat (voir paragraphe 86).
C'est dans la Loi sur la responsabilité de la Couronne que se trouve le droit fédéral de la responsabilité délictuelle de la Couronne. 3 L'alinéa 3(1)a) de cette loi dispose que la Couronne «est responsable» à l'égard d'un délit civil commis par un préposé de la Couronne. Si l'inexécution d'une obligation légale doit être considérée comme un délit différent de la faute, et il semble que ce soit et la position canadienne et la position anglaise°, alors l'alinéa 3(1)a) s'applique aussi.
La Canadian Acceptance réclame comme dom- mages-intérêts la valeur de son avion et la perte des profits qu'elle aurait retirés de sa location. La P.W.A. réclame le prix du sauvetage, de l'évacua-
3 S.R.C. 1970, c. C-38. Qu'il faille une norme de droit fédéral applicable pour attribuer compétence à la Cour, est exigé par les arrêts Quebec North Shore et McNamara cités ultérieure- ment.
London Passenger Transport Board c. Upson (lord Wright, aux pages 168 et 169).
tion et du nettoyage, le coût de remplacement de l'avion, la perte de revenu subie et la hausse du coût de remplacement. En tout les demanderesses réclament $12,100,000.
En l'espèce la Cour a compétence exclusive pour ce qui est de la demande engagée contre la Cou- ronne. La compétence des juridictions supérieures, ou de comté ou de district, des provinces est exclue (voir les paragraphes 7(1) et 8(2) de la Loi).
J'examine maintenant le cas des autres défen- deurs, en tant que groupe.
Ils ont engagé deux catégories de demandes: une fondée sur la faute et l'autre sur l'inexécution d'obligations légales. L'inexécution d'un contrat est aussi reprochée à Cranbrook (paragraphe 86).
Je traiterai d'abord de la question de la faute.
Le point de départ, quant au droit applicable, ce sont les deux arrêts bien connus de la Cour suprême du Canada: Quebec North Shore Paper Co. c. Canadien Pacifique Ltée et McNamara Construction (Western) Ltd. c. La Reine. 5
Dans l'arrêt Quebec North Shore, il s'agissait d'une action, engagée par des citoyens contre d'au- tres citoyens, en inexécution de contrat. Les demanderesses concluaient à la compétence de la présente cour en vertu de l'article 23 de la Loi sur la Cour fédérale 6 . La Cour suprême du Canada a statué que l'article 23 doit être interprété en fonc- tion du libellé de l'article 101 de l'Acte de l'Amé- rique du Nord britannique, 1867. Le juge en chef Laskin a énoncé aux pages 1065 et 1066, les conditions autorisant la Cour à se déclarer compétente:
Il convient également de souligner que l'art. 101 ne traite pas de la création des tribunaux pour connaître des sujets relevant de la compétence législative fédérale, mais «pour assurer la meilleure exécution des lois du Canada». Le terme «exécution» est aussi significatif que le mot pluriel «lois». A mon avis, ils supposent tous deux l'existence d'une législation fédérale appli-
5 J'énumérerai dans une annexe aux présents motifs les affai- res que je vais citer. J'insérerai aussi les décisions auxquelles m'ont référé les avocats. Depuis que ces requêtes ont été débattues, la Cour d'appel fédérale a réformé certaines des affaires sur lesquelles s'étaient appuyés les avocats. De plus certains arrêts récents tant de la Cour d'appel fédérale que de la Cour suprême du Canada portent sur certains aspects de l'espèce, d'où les raisons de cette annexe.
6 S.R.C. 1970 (2' Supp.), c. 10.
cable, que ce soit une loi, un règlement ou la common law, comme dans le cas de la Couronne, sur lesquels la Cour fédérale peut fonder sa compétence. L'article 23 exige que la demande de redressement soit faite en vertu de pareille loi.
Dans l'affaire McNamara, la Couronne fédérale poursuivait plusieurs compagnies en dommages- intérêts pour inexécution d'un contrat de construc tion. Certains des défendeurs appelèrent en garan- tie un codéfendeur ainsi que certaines autres com- pagnies. On jugea que la Cour fédérale n'était pas compétente dans les matières en cause. Le juge en chef Laskin, à la page 658, a écrit:
En bref, la principale question en litige dans ces pourvois est de savoir si la Cour fédérale du Canada a compétence sur un sujet dans une action en dommages-intérêts intentée par la Couronne du chef du Canada pour inexécution d'un contrat. Cette compétence relèverait de l'art. 101 de l'Acte de l'Améri- que du Nord britannique qui confère notamment au Parlement le pouvoir législatif d'établir des tribunaux «pour la meilleure administration des lois du Canada». Dans l'arrêt Quebec North Shore Paper Company c. Le Canadien Pacifique Limitée ([1977] 2 R.C.S. infra), (arrêt rendu après les jugements de la Cour d'appel fédérale en l'espèce), cette Cour a statué que les dispositions de l'art. 101 posent comme condition préalable à l'exercice par la Cour fédérale de sa compétence, l'existence d'une législation fédérale applicable sur laquelle on puisse fonder les procédures. Il ne suffit pas que le Parlement du Canada puisse légiférer sur un domaine dont relève la question soumise à la Cour fédérale. Comme l'a indiqué cette Cour dans l'arrêt Quebec North Shore Paper Company, la compétence judiciaire en vertu de l'art. 101 ne recouvre pas le même domaine que la compétence législative fédérale.
et aux pages 659 et 660:
Dans l'arrêt Quebec North Shore Paper Company, cette Cour a souligné au sujet de cette disposition que pour traduire des personnes devant la Cour de l'Echiquier, la Couronne du chef du Canada doit au préalable établir que son action relève de la législation fédérale applicable, que ce soit une loi, un règlement ou la common law.
Il ne s'agit donc pas de décider en l'espèce si la demande de redressement de la Couronne relève d'un domaine de compé- tence législative fédérale, mais de déterminer si elle est fondée sur la législation fédérale applicable. Je ne pense pas que, pris littéralement, le par. 17(4), qui vise à habiliter la Cour fédérale à connaître de tout genre d'action d'ordre civil du seul fait que la Couronne du chef du Canada fait une réclamation à titre de demanderesse, constitue une législation fédérale valide en vertu de l'art. 101 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. La règle de common law selon laquelle la Couronne peut poursui- vre devant tout tribunal ayant compétence dans le domaine pertinent, élaborée dans le régime unitaire anglais, ne peut s'appliquer intégralement au Canada, un état fédéral, les pouvoirs législatifs et exécutifs sont répartis entre les législatu- res et gouvernements centraux et provinciaux et où, en outre, le pouvoir du Parlement d'établir des tribunaux est limité par la Constitution.
et encore aux pages 663 et 664:
J'en conclus donc que la contestation de la compétence de la Cour fédérale par les appelants est fondée et, en conséquence, je suis d'avis d'accueillir leurs pourvois avec dépens dans toutes les cours. Les jugements des tribunaux d'instance inférieure doivent être infirmés et les déclarations signifiées aux appelants radiées. Compte tenu de cette conclusion, les procédures résul- tantes entre co-défendeurs et les procédures de mise en cause doivent être tenues pour invalides et il n'est pas nécessaire de traiter de leur validité ou de leur opportunité. Je tiens toutefois à souligner que si la Cour fédérale avait eu compétence, il est assez vraisemblable que les demandes de contributions ou d'indemnités auraient été recevables, du moins entre les parties, dans la mesure la législation fédérale pertinente s'appliquait aux questions soulevées en l'espèce.
Il existe maintenant plusieurs espèces, dont ont eu à connaître les Divisions de première instance et d'appel de la Cour ont été appliqués les princi- pes ainsi posés par la Cour suprême du Canada.'
La revue de cette jurisprudence m'amène à con- clure qu'il n'y a pas dans le droit fédéral existant, de loi, de règlement ou de règle de common law, traitant de la faute, qui autoriserait ces défen- deurs, la Couronne exceptée, à ester en la présente cour.
Les avocats des demanderesses ont fait valoir que la compétence, à l'égard des vingt fonctionnai- res de la Couronne, pourrait être fondée sur l'ali- néa 17(4)b) de la Loi sur la Cour fédérale:
17....
(4) La Division de première instance a compétence concur- rente en première instance
a) dans les procédures d'ordre civil dans lesquelles la Cou- ronne ou le procureur général du Canada demande redresse- ment; et
b) dans les procédures dans lesquelles on cherche à obtenir un redressement contre une personne en raison d'un acte ou d'une omission de cette dernière dans l'exercice de ses fonc- tions à titre de fonctionnaire ou préposé de la Couronne.
7 Associated Metals & Minerals Corp. c. L'.Evie W»; Le .Capricorn» c. Antares Shipping Corp.; Hawker Industries Ltd. c. Santa Maria Shipowning and Trading Co., S.A.; Benson Bros. Shipbuilding Co. (1960) Ltd. c. Mark Fishing Co. Ltd.; Western Caissons (Quebec) Ltd. c. McNamara Corp. of Newfoundland Co. Ltd.; The Foundation Co. of Canada Ltd. c. La Reine; Nations Unies c. Atlantic Seaways Corp.; La Reine c. Rhine; La Reine c. Prytula; McGregor c. La Reine; Haida Helicopters Ltd. c. Field Aviation Co. Ltd.; Alda Enter prises Ltd. c. La Reine.
Je n'ai pas cherché à énumérer toutes les décisions des deux divisions portant sur le sujet. J'ai omis aussi un certain nombre d'espèces portant plus particulièrement sur la compétence .d'amirauté».
Je reconnais que l'alinéa 17(4)b) autorise à pour- suivre un fonctionnaire de la Couronne devant la Cour fédérale. Mais je n'admets pas que l'on puisse dire que cet alinéa constitue une norme de droit fédéral positif en vigueur qui autoriserait à saisir la Cour d'une demande, fondée ou non sur quelque faute.
Autrefois la Loi sur la Cour de l'Échiquier 8 ne comportait aucune disposition semblable à l'alinéa 17(4)b). Un demandeur ne pouvait pas, si je com- prends bien, engager une action contre un fonc- tionnaire de la Couronne devant la Cour de l'Échi- quier. Parfois le demandeur devait donc engager deux actions, une devant la Cour de l'Échiquier contre la Couronne, et une autre contre le fonc- tionnaire devant une juridiction provinciale. L'ob- jet de l'alinéa 17(4)b) a donc été, semble-t-il, de supprimer cette anomalie.
Je dis donc que l'alinéa 17(4)b) se borne à autoriser à ester contre un fonctionnaire de la Couronne. Pour ce qui est de la compétence, il faut chercher ailleurs le droit fédéral applicable.
Le juge Mahoney a étudié ce point dans deux espèces récentes: Tomossy c. Hammond et Green c. La Reine. Je cite un extrait de la page 233 des motifs de l'affaire Tomossy:
La responsabilité personnelle d'un individu pour un délit qu'il a commis naît de la common law. Elle existe qu'il ait agi ou non dans le cadre de son emploi. Qu'un individu soit un préposé de la Couronne et ait commis un délit dans le cadre de cet emploi ne change rien au fondement juridique de sa responsabilité. Celle-ci n'est pas créée par les alois du Canada» ou le «droit fédéral» tel que défini par les décisions McNamara et Quebec North Shore. La portée de ces décisions a été étudiée à fond par la Cour d'appel fédérale dans Associated Metals & Miner- ais Corporation c. L'aEvie et il serait superflu de ma part de citer ou de résumer cette analyse.
Le juge Mahoney réfère alors à d'autres espèces on en est arrivé au même résultat. Elles sont incluses dans l'annexe aux présents motifs. J'ai aussi ajouté deux affaires jugées en sens contraire: Desbiens c. La Reine (avant l'arrêt McNamara) et Attridge c. La Reine (après l'arrêt McNamara).
Quant à moi je partage l'opinion du juge Mahoney.
8 S.R.C. 1970, c. E-11.
J'examine maintenant la demande, fondée sur l'inexécution d'obligations légales, dont doivent se défendre les vingt fonctionnaires du ministère des Transports et les défendeurs du groupe Cranbrook.
Les demanderesses s'appuient, dans leur décla- ration, pour trouver une norme de droit fédéral à ce sujet, sur la Loi sur l'aéronautique et son Règlement de l'Air. Les défendeurs auraient, notamment, inexécuté les obligations prévues par les articles 3 et 6 de la Loi et par les articles 104, 305, 313 et 314 du Règlement. Ces dispositions, dit-on, créent des obligations en faveur non seule- ment du public en général mais aussi des deman- deresses et de certains autres individus; inexécuter ces obligations ouvre un recours à l'individu qui en subit le préjudice; la Loi sur l'aéronautique et le Règlement de l'Air contiennent donc le droit fédé- ral actuel qu'exigent les arrêts Quebec North Shore et McNamara pour l'attribution de compé- tence.
Que la Loi sur l'aéronautique et son Règlement d'application ouvrent un recours aux individus, ou ne profitent qu'au public en général, a été débattu dans plusieurs espèces. 9 Elles ont toutes été déci- dées dans le même sens. La Loi sur l'aéronautique et son Règlement d'application ne créent pas une obligation dont l'inexécution ouvrirait un recours au justiciable individualisé.
Les portions spécifiques des articles 3 et 6 de la Loi, et des articles 104, 305, 313 et 314 du Règle- ment, qu'invoquent les demanderesses dans leur procédure, n'ouvrent pas, à mon avis, un recours aux demanderesses qui serait fondé sur le droit fédéral actuel.
Les demanderesses concluent, dans leur déclara- tion, à l'inexécution d'obligations légales de la part du groupe Boeing et du groupe Rohr. Voici quelle serait la cause de la demande. Les membres de ces deux groupes n'auraient pas respecté [TRADUC- TION] «l'esprit, la lettre et l'intention» de plusieurs dispositions des United States Federal Aviation Regulations ( les «FAR»). Les paragraphes 28g) et 30 48 réfèrent au groupe Boeing; les paragraphes 49 62 au groupe Rohr. Au paragraphe 87 on prétend que les dispositions des FAR ont été par
9 Lignes aériennes Canadien Pacifique, Ltée c. La Reine; McGregor c. La Reine; Haida Helicopters Ltd. c. Field Aviation Co. Ltd.; Millardair Ltd. c. La Reine.
traité introduites dans le droit canadien. Voici la dernière phrase de ce paragraphe:
[TRADUCTION] Les demanderesses prétendent que les prépo- sés, mandataires et salariés des défenderesses Boeing et Rohr n'ont pas exécuté les obligations réglementaires prévues aux FAR, aux Parties 21, 25 et 33, et affirment notamment que ces préposés, agents et salariés des défenderesses Boeing et Rohr ont enfreint les FAR 25.143, FAR 25.149, FAR 25.671, FAR 25.672, FAR 25.697, FAR 25.933, FAR 25.934, FAR 25.1141, FAR 25.1309, FAR 25.1529, FAR 25.1581, FAR 25.1585 et FAR 33.97.
Que les FAR soient partie intégrante du droit canadien c'est probablement une question mixte de droit et de fait. Pour les fins de cette requête je suis prêt à présumer cet énoncé vrai et reconnu comme tel. Mais le paragraphe 87 n'indique aucun fait matériel constituant une infraction aux FAR spécifiés. On ne peut à mon avis recourir aux paragraphes antérieurs de l'acte de procédure les FAR sont cités. Ces paragraphes, que j'ai
précédemment signalés, (28g) et 30 62), ne constituent pas des allégations d'inexécution d'obligations légales par les individus défendeurs membres des groupes Boeing et Rohr. C'est une faute qu'ils auraient commise, les FAR n'étant mentionnés que comme la norme de prudence à laquelle il faut manquer pour qu'il y ait faute.
Il ne suffit pas d'affirmer simplement, et gratui- tement, dans un acte de procédure, qu'il y a eu inexécution de certaines obligations réglementai- res, lesquelles seraient de droit canadien ]°, et rien de plus, pour invoquer la compétence de la Cour, voire l'attirer à soi. En d'autres mots, la présomp- tion de véracité du paragraphe 87 ne saurait attri- buer compétence. Le plaidoyer est fautif. Je ne puis voir comment il pourrait y avoir attribution de compétence en vertu d'un tel plaidoyer, dénué qu'il est de tout fait d'où on pourrait décider de la question de l'attribution ou non de compétence.
J'examine maintenant la demande en inexécu- tion de contrat contre Cranbrook. Elle se trouve au paragraphe 86. En fait il y aurait deux contrats: le premier avec la Couronne et le second avec Cran- brook. Leurs conditions ne sont à mon avis énon- cées que d'une façon fort imprécise. Elles seraient fondées, en quelque manière, sur la Loi -sur l'aéro- nautique et le Règlement de l'Air et sur certaines taxes imposées à la P.W.A. A la lecture que j'en
1 0 Mais je présume naturellement pour les fins de la requête que cette affirmation est fondée.
fais, les détails de l'inexécution n'impliquent en aucune façon Cranbrook comme mandant. Le paragraphe 28c) cependant mentionne Cranbrook comme mandataire du ministère des Transports.
Je vais présumer néanmoins l'existence d'un contrat et son inexécution. Il n'est pas à mon avis fondé sur le droit fédéral actuel. Les principes des arrêts Quebec North Shore et McNamara s'appliquent.
Reste la dernière prétention qu'on a faite au nom des demanderesses. La voici: la Cour pourrait connaître des demandes contre la Couronne fon- dées sur la faute et l'inexécution des obligations légales et des contrats; en vérité ce serait même la seule juridiction au Canada compétente pour en connaître; la faute des fonctionnaires de la Cou- ronne et l'inexécution de leurs obligations légales, si on les présume vraies, rendent responsable la Couronne qui est leur commettant; les demandes contre le groupe Cranbrook, le groupe Boeing et le groupe Rohr découlent essentiellement des mêmes faits; il y aurait un mélange de droit fédéral (la créance contre la Couronne) et de common law provinciale (au moins la créance dont les citoyens canadiens sont débiteurs); les demandes des demanderesses [TRADUCTION] «découlent d'un noyau commun de faits générateurs» et sont telles qu'on [TRADUCTION] «s'attendrait à ce qu'elles soient toutes jugées en une seule instance»;" la Cour devrait adopter cette notion de compétence suspensive. Les avocats des demanderesses ont invoqué l'affaire Davie Shipbuilding Ltd. c. La Reine le juge Gibson a jonglé avec la notion de compétence subsidiaire.
Je vais d'abord commenter l'affaire Davie Ship building. Dans cette espèce, un constructeur de navires engagea une action en paiement de sommes d'argent dues ou retenues par la Cou- ronne, le propriétaire du navire, relativement à un contrat de construction maritime. Une fois le navire délivré, la machine principale tomba en panne. La Couronne présenta une demande recon- ventionnelle pour la somme requise pour réparer ou remplacer la machine. En défense à la demande
" United Mine Workers of America c. Gibbs, à la page 725. Je dois cette référence au professeur J. M. Evans du Osgoode Hall Law School of York University qu'on trouvera, avec ses commentaires sur la notion de compétence suspensive dans un de ses articles non encore publié.
reconventionnelle la demanderesse appela en garantie le fournisseur de la machine. La compé- tence de la Cour relativement à la demande princi- pale n'était pas contestée mais celle relative à la demande reconventionnelle et à l'appel en garantie l'était. Le juge Gibson rejeta l'exception. 12 Il fonda sa décision principalement sur le fait que la demande reconventionnelle et l'appel en garantie relevaient du droit maritime canadien, corps de droit fédéral, et non du droit provincial.
Parlant de «compétence subsidiaire», le juge Gibson écrivit ceci à la page 240:
L'objet de la demande reconventionnelle et des procédures relatives à tierce partie peut aussi relever de la compétence de cette cour à un autre titre: l'action principale en l'espèce relève de la compétence de cette cour. Comme la demande reconven- tionnelle et les procédures relatives à tierce partie sont en réalité subordonnées à l'objet de l'action principale, cette cour est donc compétente. Le juge en chef Laskin s'est ainsi exprimé dans McNamara Construction (Western) Limited c. La Reine ([1977] 2 R.C.S. 654) à la page 664:
Je tiens toutefois à souligner que si la Cour fédérale avait eu compétence, il est assez vraisemblable que les demandes de contributions ou d'indemnités auraient été recevables, du moins entre les parties, dans la mesure la législation fédérale pertinente s'appliquait aux questions soulevées en l'espèce.
Et il poursuit en invoquant à son appui certains passages de l'affaire Le «Sparrows Point».
Je note tout de suite que le juge Gibson pour faire droit aux demandes contestées a employé le mot «peut» lorsqu'il a parlé de compétence subsi- diaire. Cet emploi de la théorie du «subsidiaire» peut fort bien se révéler justifié et permissible dans les limites des arrêts Quebec North Shore et McNamara lorsqu'il s'agit de demandes reconven- tionnelles et d'appels en garantie. Un arrêt subsé- quent de la Division d'appel de la Cour, The Foundation Company of Canada Limited c. La Reine, suggérerait toutefois que cette notion sort du périmètre imposé par ces décisions de la Cour suprême du Canada.
Je m'attache maintenant à cette invitation, faite à la Cour, de promouvoir la notion de compétence suspensive. Cette avenue n'est pas à mon avis ouverte. Les arrêts Quebec North Shore et McNa- mara indiquent clairement que les demandes don
12 Voir, pour une décision en sens inverse, relative à une demande reconventionnelle semblable à celle de l'affaire Davie, l'affaire La Reine c. Canadian Vickers Ltd.
nant ouverture au recours, dans une action princi- pale, et contre chaque codéfendeur, doivent toutes être fondées sur le droit fédéral et non sur une combinaison, une mixture de droit fédéral et non fédéral. En l'espèce dont j'ai à connaître, la ques tion que je me suis déjà posée (et que d'autres se sont déjà posée), devrait l'être aussi: 13
Un critère parfois utile pour trancher une question de compé- tence consiste à se demander si la Cour serait compétente si l'action était intentée contre un seul des défendeurs au lieu d'être greffée à une action contre d'autres défendeurs qui sont à bon droit soumis à la compétence de la Cour. (Voir McGregor c. La Reine [1977] 2 C.F. 520, à la page 522.)
Ici je dois répondre à cette question au détriment des demanderesses.
Je ne dis pas qu'il faille toujours nécessairement se poser cette question. Chaque espèce est différente.
Enfin, quant à la notion de compétence suspen- sive, je ne pense pas que l'affaire Le «Sparrows Point» vienne en aide aux demanderesses. Je me contenterai de répéter ce que j'ai dit dans l'affaire Alda:
J'ai étudié l'arrêt Le «Sparrows Point» ([1951] R.C.S. 396). Le juge Kellock, qui a confirmé la compétence de la Cour de l'Échiquier en matière d'amirauté pour juger un défendeur en particulier, a fait observer que toutes les demandes dans cette affaire précise devraient être réglées par une seule action introduite devant un seul tribunal [TRADUCTION] «afin d'éviter le scandale possible de jugements différents.... (Page 404). Dans ses conclusions, le juge Rand a déclaré que la manoeuvre du navire poursuivi était le produit de la négligence conjointe de ceux qui étaient à bord du navire et de l'autre défendeur. Il conclut qu'ils sont coauteurs du préjudice. A la page 411, il déclare ce qui suit:
[TRADUCTION] Des considérations pratiques autant que la justice même militent en faveur d'un système une seule cause d'action doit être réglée sous une seule branche du droit et par une seule procédure au cours de laquelle le demandeur peut invoquer tous les recours auxquels il a droit: toute autre solution irait à l'encontre du but des dispositions législatives. La demande porte sur le dommage causé «par un navire»; les recours in personam sont contre les responsables du fait du navire. Selon mon interprétation des dispositions législatives, les coauteurs d'un dommage peuvent être adjoints dans une action régulièrement intentée.
A mon avis, l'affaire Le »Sparrows Point» se distingue quant aux faits (Voir Anglophoto Limited c. L'«Ikaros» [1973] C.F. 483 j'ai essayé de le distinguer) et il faut la lire en tenant compte des arrêts Quebec North Shore et McNamara.
' 3 Aida Enterprises Ltd. c. La Reine, à la page 110. Voir aussi Anglophoto Ltd. c. L'«Ikaros».
En résumé, je conclus que la Cour a compétence exclusive pour connaître des demandes dont doit se défendre la Couronne mais non pour celles engagées contre les autres défendeurs.
Cette conclusion crée une situation fort indésira- ble. Les demanderesses, si elles désirent continuer à agir contre tous les défendeurs, doivent le faire devant plusieurs juridictions. La multiplication des instances soulève le spectre de résultats différents selon les juridictions. Les demanderesses doivent aussi répondre à la question, au sujet des défen- deurs autres que la Couronne: la cour de quelle province, ou, même, de quelles provinces? Certains des fonctionnaires de la Couronne habitent et exer- cent leurs fonctions en Ontario, d'autres à Edmon- ton, à Vancouver, à Calgary et à Cranbrook. Le groupe Cranbrook habite et aurait commis les fautes alléguées en Colombie-Britannique. Peut-on ester contre les groupes américains, ou avoir un recours, dans les juridictions d'une province par- ticulière? Il peut fort bien y avoir d'autres ques tions de compétence. Je ne sais quelles solutions leur apporter, ni ne m'aventure à en suggérer.
Cette situation est lamentable. Il y a probable- ment beaucoup d'autres justiciables auxquels est ouvert un recours consécutif à cette catastrophe aérienne. Ces écueils de la compétence doivent leur paraître et nébuleux et iniques.
Mais il se peut que toutes ces conséquences indésirables découlent de l'existence même d'un système fédéral comme celui que nous avons au Canada, comportant un partage des compétences législatives semblable à celui opéré par l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867.
Restent à trancher certaines questions de procé- dure. Celles-ci ont été débattues le 20 novembre 1978. Les fonctionnaires de la Couronne ont introduit une requête en radiation, en excipant de l'incompétence, du moins à leur égard, d'engager cette action. Le groupe Cranbrook et certains défendeurs du groupe Boeing ont demandé, le même jour, afin de pouvoir exciper de l'incompé- tence, l'autorisation de produire une comparution conditionnelle. Une ordonnance en ce sens, à laquelle tous ont consenti, a été rendue. Par la même occasion, et, encore une fois du consente-
ment de toutes les parties, j'ai autorisé le groupe Cranbrook, et ceux du groupe Boeing qui en fai- saient la demande, à produire, nunc pro tunc, des requêtes excipant de la compétence. Toutes les parties ont souhaité pouvoir traiter de l'ensemble
du litige à cette même audience.
Les deux groupes précités devront donc, le ou avant le 16 avril 1979, produire des comparutions conditionnelles et les requêtes appropriées d'exci- pation de la compétence. Ces requêtes devront être datées du 20 novembre 1978 et seront présumées avoir été produites alors. Les diver s actes pourront être signifiés .aux autres parties, représentées par
procureur, par la poste.
L'action, en ce qui concerne les défendeurs ayant gain de cause, est rejetée. Ces défendeurs ont droit de recouvrer leurs dépens des deman- deresses.
La Couronne a jusqu'au 30 avril 1979 pour produire une défense.
Je ne remettrai pas le dispositif formel avant le 16 avril 1979.
ANNEXE
Aida Enterprises Ltd. c. La Reine [1978] 2 C.F. 106 (P.I.—le juge Collier).
Anglophoto Ltd. c. Le «Ferncliff» [1972] C.F. 1337 (P.I.—le juge Collier).
Anglophoto Ltd. c. L'«Ikaros» [1973] C.F. 483 (P.I.—le juge Collier); infirmé [1974] C.F. 327 (C.A.F.).
Associated Metals & Minerals Corp. c. L'«Evie [1978] 2 C.F. 710 (C.A.F.).
Attridge c. La Reine (1978) 86 D.L.R. (3e) 543 (P.I.—le juge suppléant Primrose).
Bensol Customs Brokers Ltd. c. Air Canada, A-264-78 (non publié—le 19 mars 1979) (C.A.F.) infirmant [1979] 1 C.F. 167 (P.I.—le juge Walsh).
Benson Bros. Shipbuilding Co. (1960) Ltd. c. Mark Fishing Co. Ltd. (1979) 89 D.L.R. (3e) 527 (C.A.F.).
Lignes aériennes Canadien Pacifique, Limitée c. La Reine
[1979] 1 C.F. 39 (C.A.F.) confirmant [1977] 1 C.F. 715. Le «Capricorn» c. Antares Shipping Corp. [1978] 2 C.F. 834
(C.A.F.).
Davie Shipbuilding Ltd. c. La Reine [1979] 2 C.F. 235 (P.1.— le juge Gibson).
Desbiens c. La Reine [1974] 2 C.F. 20 (P.I.—le juge Heald). The Foundation Co. of Canada Ltd. c. La Reine [1979] 1 C.F. 877 (C.A.F.).
Green c. La Reine, T-5984-78 (non publié—le lee mars 1979) (P.1.—le juge Mahoney).
Haida Helicopters Ltd. c. Field Aviation Co. Ltd. [1979] 1 C.F. 143 (P.1.—le juge Mahoney).
Hawker Industries Ltd. c. Santa Maria Shipowning and Trad- ingCo., S.A. [1979] 1 C.F. 183 (C.A.F.).
Lewis Insulations Ltd. c. Goodram Bros. Ltd. (1979) 21 O.R. (2e) 236 (Ont. H.C.—le juge Hughes).
London Passenger Transport Board c. Upson [1949] A.C. 155 (C.L.)
McGregor c. La Reine [1977] 2 C.F. 520 (P.I.—le juge Addy). McNamara Construction (Western) Ltd. c. La Reine [1977] 2 R.C.S. 654 (C.S.C.).
Millardair Ltd. c. La Reine, T-3337-78 (non publié—le 6 mars 1979) (P.I.—le juge suppléant Smith).
Parsons c. La Reine, T-463-77 (non publié—le 3 mai 1978) (P.I.—le juge en chef adjoint Thurlow).
Quebec North Shore Paper Co. c. Canadien Pacifique Ltée [1977] 2 R.C.S. 1054 (C.S.C.).
La Reine c. Canadian Vickers Ltd. [1978] 2 C.F. 675 (P.I.—le juge en chef adjoint Thurlow).
La Reine c. Prytula, infra à la page 516 infirmant [1978] 1 C.F. 198.
La Reine c. Rhine, A-405-77 (non publié—le 8 mars 1979) (C.A.F.) infirmant [1978] 1 C.F. 356.
La Reine c. Saskatchewan Wheat Pool [1978] 2 C.F. 470 (P.I.—le juge suppléant Smith).
Sivaco Wire & Nail Co. c. Atlantic Lines & Navigation Co., Inc. [1978] 2 C.F. 720 (P.I.—le juge Walsh) confirmé en C.S.C. Sivaco Wire and Nail Co. c. Tropwood, A.G. (1979) 26 N.R. 313.
Sunday c. L'Administration de la voie maritime du St-Laurent [1977] 2 C.F. 3 (P.I.—le juge Marceau).
Tomossy c. Hammond [1979] 2 C.F. 232 (P.I.—le juge Mahoney).
United Mine Workers of America c. Gibbs 383 U.S. 715 (1966) U.S.S.C.
Nations Unies c. Atlantic Seaways Corp., infra à la page 541 (C.A.F.).
Western Caissons (Quebec) Ltd. c. McNamara Corp. of New- foundland Co. Ltd. [1979] 1 C.F. 509 (C.A.F.).
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