Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

T-3937-78
Jack Clinton Magrath (Demandeur) c.
La Commission nationale des libérations condi- tionnelles du Canada, M. MacBrayne, L. Hobbs et R. Brown, le Service canadien des pénitenciers, T. Crozier, D. Howard et B. Smyth du camp de correction d'Agassiz (Défendeurs)
Division de première instance, le juge Walsh— Vancouver, le 17 avril; Ottawa, le 3 mai 1979.
Pratique Demande de permission de poursuivre l'action in forma pauperis sans avoir à acquitter les frais prévus au tarif A des Règles Les Règles de la Cour ne prévoient pas la procédure in forma pauperis Il échet d'examiner si la procédure in forma pauperis fait partie intégrante non seule- ment des lois de la Colombie-Britannique mais encore du droit fédéral, et est de ce fait applicable aux actions devant la Cour fédérale English Law Act, S.R.C.-B. 1960, c. 129 A Mean to Help and Speed Poor Persons in their Suits, Hen. VII, c. 12.
Le demandeur, qui est un détenu sans grands moyens finan ciers, demande la permission de poursuivre l'action in forma pauperis sans avoir à acquitter les frais prévus au tarif A des Règles de la Cour. Le droit invoqué pour la procédure in forma pauperis est fondé sur une loi d'Angleterre de 1495 et sur la loi dite English Law Act de la Colombie-Britannique. Les Règles de la Cour fédérale ne prévoient pas la procédure in forma pauperis. Le demandeur fait valoir que la loi d'Angleterre qui prévoit les procédures in forma pauperis fait partie non seule- ment du droit de la Colombie-Britannique mais aussi du droit du Canada et est donc applicable en Cour fédérale au titre du droit positif que celle-ci applique dans les procédures qui sont de sa compétence.
Arrêt: la demande est rejetée. L'absence dans les Règles d'une disposition relative aux procédures in forma pauperis n'a pas été le résultat d'un oubli et il est plus probable qu'après mûre réflexion, une telle disposition n'a pas été jugée néces- saire. Il appert que ces règles ne laissent à la Cour aucun pouvoir discrétionnaire en la matière et, à moins que la loi d'Angleterre ne s'applique au même titre que le droit positif en vigueur devant la Cour, rien ne l'autorise à dispenser des droits et frais prévus au tarif. La loi d'Angleterre ne doit pas s'appli- quer devant la Cour pour suppléer à l'absence d'une disposition _ des Règles de la Cour en matière de procédures in forma pauperis. Cette conclusion est étayée par le principe général adopté dans la Loi sur la Cour fédérale et par le fait que le Parlement a cru nécessaire de prévoir les appels in forma pauperis dans la Loi sur la Cour suprême mais non dans la Loi sur la Cour fédérale.
REQUÊTE. AVOCATS:
J. W. Conroy pour le demandeur. J. R. Haig pour les défendeurs.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour les défendeurs.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: L'action principale en l'espèce a été intentée le 29 août 1978 par le demandeur qui, sans l'assistance d'un avocat, prétend que la décision rendue par la Commission nationale des libérations conditionnelles à la suite d'une audition tenue le 20 juin 1978, lui refusant une libération de jour, une libération complète et des absences temporaires en attendant une nouvelle audition en juin 1979, n'était pas justifiée par les faits et qu'il a droit à une audition juste et équitable. L'action a été contestée et la cause mise en l'état. Dans une requête à la Cour, il demande maintenant la per mission de poursuivre l'action in forma pauperis sans avoir à acquitter les frais prévus au tarif A des Règles de la Cour. Un avocat du service d'Abbotsford Community Legal Services a com- paru en son nom pour plaider la requête. Le requérant justifie son droit de poursuivre l'action in forma pauperis par une vieille loi d'Angleterre A.D. 1495 Anno II Hen. VII, c. 12 et par la loi dite English Law Act, S.R.C.-B. 1960, c. 129. Les Règles de la Cour ne prévoient pas la procédure in forma pauperis.
A l'ouverture de l'audience, l'avocat des défen- deurs a indiqué que la Couronne était prête à faire comparaître à ses frais les témoins requis par le demandeur pour l'interrogatoire préalable, ce qui lui éviterait la nécessité de signifier des subpoenas à cette fin. Cependant les défendeurs n'ont pris aucun engagement quant aux frais de sténographie ou de transcription, ou aux frais pour la mise au rôle de l'action par le greffe.
Dans l'affidavit produit à l'appui de sa requête, le demandeur fait valoir que comme prisonnier, il touche un salaire de $1.40 par jour, dont 25 cents sont déduits chaque jour à titre d'épargne obliga- toire à laquelle il ne peut toucher avant sa libéra- tion, et qu'il n'a que $10 dans son compte au fonds de fiducie des détenus. Son épouse qui habite Vancouver, reçoit une aide financière pour elle- même et pour leurs quatre enfants qui habitent tous à la maison, trois d'entre eux fréquentant
l'école, le quatrième touchant de l'assurance-chô- mage. Il ne possède aucun bien de valeur et agit pour son propre compte quoiqu'il reçoive de temps à autre des conseils gracieux de l'avocat qui l'a représenté à l'audition de cette requête. Voici ce que dit la loi d'Angleterre invoquée par le demandeur:
[TRADUCTION] DU MOYEN D'ASSISTER LES PAUVRES DANS LES ACTIONS EN JUSTICE
Les Communes réunies en ce Parlement veuillent prendre connaissance:
... que le Roi notre Souverain, de par Sa très haute bienveil- lance, désire que la même justice soit rendue conformément aux lois du royaume, à tous ses loyaux sujets, aux riches comme aux pauvres, lesquels pauvres sujets ne sont pas capables de deman- der, conformément à nos lois, la réparation des injustices et des torts qu'ils subissent tous les jours, tant dans leur personne que dans leurs biens, ainsi qu'à d'autres égards; (2) qu'afin d'y remédier et ce, au profit des pauvres qui ne peuvent demander réparation en justice conformément aux lois du Royaume, Votre Altesse, les Seigneurs spirituels et temporels, et les Communes, réunis en ce Parlement et investis de ses pouvoirs, veuillent décréter que chaque pauvre qui a ou aura une ou des causes d'action contre toute personne en ce Royaume, aura droit, sous réserve du pouvoir discrétionnaire du Chancelier du Royaume, à l'émission, selon le cas, d'un ou de brefs de justice ou d'assignation, sans qu'il ait à payer des deniers à Votre Altesse pour le sceau apposé sur lesdits brefs, ni à qui que ce soit pour leur établissement; (3) que ledit Chancelier affectera à l'établissement desdits brefs des clercs compétents ainsi que des avocats compétents, sans émoluments aucuns; (4) et qu'une fois le ou les brefs présentés devant la Cour du Banc du Roi, les juges qui y siègent auront le pouvoir discrétionnaire de désigner des conseillers compétents pour assister, sans honoraires aucuns, ledit ou lesdits pauvres; (5) que de même, les juges nommeront un ou des avocats ainsi que tout autre auxiliaire nécessaire pour aider sans rémunération aucune, ledit ou lesdits pauvres à donner suite à leur action avec diligence; (6) et que la même loi s'applique à toutes les actions intentées devant les juges des Plaids communs, devant les Barons de l'Échiquier et devant tous les autres juges des cours d'archives.
L'avocat du requérant reconnaît que selon cette loi d'Angleterre, l'autorisation de poursuivre l'action in forma pauperis relève des pouvoirs discrétion- naires du Chancelier; il fait valoir qu'en appli- quant cette loi au Canada, la Cour aurait le pou- voir souverain de prendre cette décision, et à la lumière des faits de la cause, personne ne conteste
que le demandeur soit indigent et ait droit à pareille assistance si la loi et les Règles de la Cour le permettent.
L'avocat du requérant soutient que la loi ci-des- sus a été incorporée au droit de la Colombie-Bri- tannique par les dispositions de la loi dite English Law Act, dont l'article 2 porte:
[TRADUCTION] 2. Sous réserve de l'article 3, les règles de droit civil et pénal d'Angleterre existantes le 19 novembre 1858 sont, dans la mesure les conditions locales ne les rendent pas inapplicables, en vigueur dans toute la province; mais lesdites règles sont réputées modifiées par toute loi en vigueur dans la province ou dans une ancienne colonie située dans ses limites géographiques.
Ni les règles de droit ni les règles de procédure de la Colombie-Britannique ne prévoient rien qui rende cette loi inapplicable; au contraire, sa vali- dité a été confirmée par des décisions de ses tribu- naux. Dans l'arrêt Bland c. Agnew', le juge en chef McDonald s'est prononcé en ces termes aux pages 8 et 9, à propos d'une règle exigeant la constitution d'une caution judicatum solvi en appel:
[TRADUCTION] Si telle donc est notre conclusion, la Cour a le droit de rendre une ordonnance dérogeant à cet article. Elle en a le droit parce que la loi d'Henry VII prévoit, tant en Angleterre qu'ici, l'aide aux pauvres personnes sur le point d'être poursuivies ou de se pourvoir en justice. Le droit que peut se voir accorder une pauvre personne, sur preuve de certains faits relatifs à sa situation, de procéder in forma pauperis est un droit positif, pour employer l'expression sur laquelle on a tant insisté ce matin, c'est-à-dire qu'elle ne devrait avoir aucun frais à payer. Bien sûr, cela veut aussi dire qu'elle ne sera pas tenue de fournir caution pour des frais qui ne sauraient être recouvrés d'elle.
Il a ajouté à la page 9:
[TRADUCTION] Une fois le droit établi, la Cour si nécessaire, accordera la procédure. Car, si quelqu'un a un droit, la Cour a jugé qu'il ne doit pas le perdre faute de procédure prévue à cet effet, et dans une large mesure la procédure est régie par cette loi même.
Il rappelle ensuite que ce droit a été reconnu dans deux cas semblables au Manitoba, mais refusé une fois en Alberta la Cour le jugeait contraire à ses règles de pratique. Voici ce qu'il dit à ce sujet:
[TRADUCTION] ... [cette juridiction] semble avoir adopté la position que l'avocat de l'intimé a soutenue en l'espèce, à savoir
1 47 B.C. Reports 7.
que le droit positif et la procédure sont des choses fondamenta- lement différentes. A mon avis, il ne fait pas de doute que la procédure est une partie de notre droit. C'est une branche du droit, tout autant que n'importe quelle autre branche. Ceci dit, il n'y a pas de problème de procédure à moins qu'une disposi tion de nos règles ne nous empêche d'accorder le redressement demandé.
Ce précédent a été suivi par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans Ruddick c. British Columbia Electric Railway Company 2 , puis de nouveau dans Dennis c. Minister of Rehabilitation and Social Improvement 3 , qui portait sur le droit de se pourvoir en justice in forma pauperis et était cité l'arrêt Benson c. Harrison 4 de la Cour suprême du Canada. Dans ce dernier, le juge Rand a souligné le caractère correctif de la Règle de cette cour aux termes de laquelle seul un requérant ne possédant même pas $500 pouvait se pourvoir en justice in forma pauperis, et a rappelé qu'il ne fallait pas la mettre sur le trébuchet lorsqu'il s'agissait d'appliquer cette règle. Voici ce que dit l'arrêt Dennis à la page 221:
[TRADUCTION] Il ne faut pas faire obstacle aux recours en justice, si ce n'est pour des motifs les plus graves. Si l'on envisage de priver un sujet du droit, établi de longue date, d'accès aux cours de justice de Sa Majesté ou encore d'assujet- tir ce droit au paiement d'une taxe, que le plaideur indigent serait peut-être incapable d'acquitter, une telle mesure doit être, à mon avis, énoncée expressément et sans équivoque.
Selon l'avocat du requérant, le British Columbia Legal Aid Plan n'accorde normalement pas une assistance financière aux demandeurs dans les actions civiles quoiqu'il y ait eu certaines excep tions, comme dans l'affaire McCann c. La Reines. Le service d'Abbotsford Community Legal Ser vices qui l'emploie est un cabinet juridique com- munautaire subventionné par la Legal Services Commission de la province de la Colombie-Britan- nique: il n'a pas de fonds disponibles pour ce genre d'actions et, en l'espèce, le requérant n'a fait aucune demande d'assistance judiciaire.
Le requérant invoque la Règle de la Cour qui embrasse les cas non prévus ailleurs, comme suit:
Règle 5. Dans toute procédure devant la Cour, lorsque se pose une question non autrement visée par une disposition d'une loi du Parlement du Canada ni par une règle ou ordonnance générale de la Cour (hormis la présente règle), la Cour déter- minera (soit sur requête préliminaire sollicitant des instruc-
2 (1953) 8 W.W.R. (N.S.) 416.
3 [1972] 6 W.W.R. 214.
4 [1952] 2 R.C.S. 333.
5 [1976] 1 C.F. 570.
tions, soit après la survenance de l'événement si aucune requête de ce genre n'a été formulée) la pratique et la procédure à suivre pour cette question par analogie
a) avec les autres dispositions des présentes Règles, ou
b) avec la pratique et la procédure en vigueur pour des procédures semblables devant les tribunaux de la province à laquelle se rapporte plus particulièrement l'objet des procédures;
selon ce qui, de l'avis de la Cour, convient le mieux en l'espèce.
mais je ne suis pas d'avis qu'elle soit applicable en l'espèce. L'absence dans les Règles d'une disposi tion relative aux procédures in forma pauperis n'a pas été, à mon avis, le résultat d'un oubli et il est plus probable qu'après mûre réflexion, une telle disposition n'a pas été jugée nécessaire. Et qui plus est, le requérant lui-même soutient qu'il s'agit d'une question de droit positif et non de procédure, auquel cas elle devrait faire l'objet d'une loi et non d'une règle de la Cour. En Angleterre, elle a fait l'objet d'une loi et non d'une règle de la Cour, et les tribunaux de la Colombie-Britannique ont conclu que le droit de se pourvoir en justice in forma pauperis est un droit positif, non une simple question de procédure.
Il est significatif que dans la Loi sur la Cour suprême, S.R.C. 1970, c. S-19, les procédures in forma pauperis sont expressément prévues par l'article 65(4). Voici le texte de cet article:
65....
(4) Nonobstant ce qui est contenu dans la présente loi, un juge de la Cour suprême peut, sur une demande d'autorisation d'en appeler in forma pauperis, admettre un appel en donnant au requérant la permission de signifier un avis d'appel, bien que le délai prescrit par l'article 64 soit expiré.
Il n'y a pas de disposition équivalente dans la Loi sur la Cour fédérale. Le requérant fait valoir que l'article 46(1) est suffisamment général pour auto- riser la Cour fédérale à établir la même règle, puisqu'il l'autorise à établir des règles et ordon- nances qui ne sont pas incompatibles ni avec cette loi ni avec aucune autre loi du Parlement du Canada pour réglementer la pratique et la procé- dure, notamment b) «pour la bonne application de la présente loi et la réalisation de ses objets et de l'intention du législateur». Les alinéas d) à g) prévoient la fixation des droits payables au greffe et la réglementation des dépens. L'article 3 énonce que la Cour est « [un] tribunal supplémentaire pour la bonne application du droit du Canada».
Le requérant fait valoir que la loi d'Angleterre qui prévoit les procédures in forma pauperis fait partie non seulement du droit de la Colombie-Bri- tannique mais aussi du droit du Canada et est donc applicable en Cour fédérale au titre du droit positif que celle-ci applique dans les procédures qui sont de sa compétence. Que cette loi fasse ou non partie du droit du Canada, il m'est difficile d'accepter l'argument qu'elle doit s'appliquer aux procédures en Cour fédérale simplement parce que rien dans la Loi sur la Cour fédérale ne s'y oppose, alors que, par analogie, le Parlement a cru bon de conférer expressément à la Cour suprême le droit d'autoriser les appels in forma pauperis. Conclure que cette omission n'était pas délibérée serait con- traire aux règles fondamentales d'interprétation des lois. Quoiqu'on puisse conjecturer que le déve- loppement des régimes d'assistance judiciaire a réduit la nécessité d'une telle disposition, et il n'est ni nécessaire ni correct de conjecturer sur les raisons pour lesquelles aucune disposition sembla- ble n'a été incluse dans la Loi sur la Cour fédé- rale, il demeure qu'elle a été omise. Le tarif A du Tarif des frais de la Cour fédérale relatif aux droits payables au greffe porte: 2(1)a) «Il sera payé» (c'est moi qui souligne). Bien que l'article 1(3) emploie les termes suivants:
1. ...
(3) Sauf instructions contraires données par la Cour au sujet d'une certaine démarche ou mesure dans une procédure, ou de toutes les démarches et mesures dans une certaine procédure,
il ressort clairement du contexte qu'il ne s'applique qu'à la classification des procédures. Aux termes de l'alinéa 1(4)b) par exemple «en rendant une ordonnance ou un jugement concernant des frais, [la Cour pourra] donner des instructions pour que ces frais ou certains d'entre eux soient taxés en considérant que les démarches ou mesures en cause font partie d'une ou plusieurs classes spéci- fiées». Les Règles 351 à 353 qui traitent des témoins, des frais de greffe et des huissiers utili- sent également une formulation impérative. Il appert que ces règles ne laissent à la Cour aucun pouvoir discrétionnaire en la matière et, à moins que la loi d'Angleterre ne s'applique au même titre que le droit positif en vigueur devant la Cour, rien ne l'autorise à dispenser des droits et frais prévus au tarif. Deux arrêts de la Cour de céans se rapportent dans une certaine mesure à cette ques-
tion. Le premier, William Smith c. Le procureur général du Canada, a été rendu par le juge en chef adjoint Thurlow, le 3 novembre 1976, T-1350- 75 6 . Le demandeur, qui était le protagoniste de nombreux procès devant la Cour, désirait que le greffe accepte le dépôt d'une demande visant à fixer les temps et lieu du procès sans qu'il eût à payer le droit de $50 prévu au tarif A et que le greffe n'avait pas réclamé dans une affaire précé- dente. En concluant que l'omission invoquée ne constituait pas un précédent, mais plutôt une erreur, le juge en chef adjoint s'est prononcé en ces termes:
«Pour pareille action, le tarif A exige le versement par le demandeur d'un droit de $50, lequel droit est exigible au dépôt de la demande d'une ordonnance fixant les temps et lieu de l'audition. A mon avis donc, le droit est exigible et il n'existe aucune disposition qui en justifierait l'exemption. Et je ne suis pas convaincu que l'on doive accorder l'exemption de ce droit.
L'autre arrêt, (1978) 19 N.R. 239, émane de la Cour d'appel fédérale devant laquelle Tabitha Smith et le même William Smith étaient appelants dans une action contre le procureur général du Canada. Ils demandaient des frais de déplacement d'Old Crow à Vancouver et fondaient leur appel sur le fait qu'ils n'avaient pas l'argent pour le voyage, et demandaient qu'une action à laquelle ils étaient partie devant la Division de première ins tance soit entendue en même temps. Dans son jugement, le juge en chef Jackett a déclaré que la Cour n'avait g... ni le devoir ni le pouvoir de prendre des mesures concernant le financement des frais de procès d'une partie». Dans une note en bas de page, il a fait cette remarque:
A tort ou à raison, nous ne nous sommes pas départis en principe du système accusatoire par lequel les parties, avec l'assistance de l'aide judiciaire, doivent prendre les mesures prévues par les dispositions de la loi et des Règles (lesquelles sont destinées à maintenir un équilibre entre les parties) et le rôle de la Cour est de régler les questions qui lui sont présentées au moment elles sont mûres pour être examinées. La Cour ne dispose pas de fonds pour mener une enquête du type inquisitoire et il n'existe pas de règle pouvant l'autoriser à le faire. Ceci étant, il me semble que la Cour doit résister à la tentation de se prévaloir dans certains cas de son influence, lorsqu'elle est touchée de compassion, pour obliger l'une des parties (en l'espèce le gouvernement) à dépenser des sommes d'argent pour venir en aide à l'autre partie. Faut-il le faire? C'est une question de politique pour la partie qui doit verser les sommes d'argent. En l'absence de règle ou de principe pour la guider, l'intervention de la Cour sera plus ou moins arbitraire.
6 [Non publié—Éd.]
Il faut souligner que dans ni l'une ni l'autre de ces affaires, le demandeur n'a soutenu qu'il s'agis- sait d'une question de droit positif et non d'une question de procédure gouvernée par les Règles, ni que le droit de se pourvoir en justice in forma pauperis était un droit positif reconnu par une loi d'Angleterre toujours applicable au Canada.
Les remarques du juge en chef dans la note citée ci-dessus énoncent cependant le principe général adopté dans la Loi sur la Cour fédérale et les Règles et, attendu que le Parlement a cru néces- saire de prévoir les appels in forma pauperis dans la Loi sur la Cour suprême mais non dans la Loi sur la Cour fédérale, j'en conclus que la loi d'An- gleterre ne doit pas s'appliquer devant la Cour pour suppléer à l'absence de dispositions à cet effet dans les Règles de'la Cour.
Le demandeur devrait donc chercher à bénéfi- cier de l'assistance judiciaire en Colombie-Britan- nique, telle qu'elle aurait été accordée dans l'af- faire McCann, les affidavits versés au dossier indiquant que sa cause était défendable.
La demande d'autorisation de poursuivre l'ac- tion in forma pauperis est donc rejetée, mais sans dépens, attendu qu'elle a soulevé une question nouvelle et importante.
ORDONNANCE
La demande du demandeur de l'autorisation de poursuivre l'action in forma pauperis est rejetée, sans dépens.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.