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T-5774-78
Saskatchewan Tele-Communications (Requé- rante)
c.
Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommu- nications canadiennes, Cablenet Limited, Estevan, C.A.T.V. Co-operative, Eston (Sask.), Community T.V. Limited, Prince Albert (Sask.), Prairie Co -Ax T.V. Limited, Moose Jaw (Sask.), The Battleford Community Cablevision Co-operative, North Battleford (Sask.), Regina Cablevision Co-operative, Regina (Sask.), Saskatoon Teleca- ble Limited, Saskatoon (Sask.) (Intimés)
Division de première instance, le juge suppléant Maguire—Saskatoon, le 30 janvier; Regina, le 1" mai 1979.
Radiodiffusion Brefs de prérogative Le CRTC ayant été saisi de demandes de renouvellement de licences, la requé- rante a soumis des interventions écrites conformément à la Loi et aux Règles de procédure applicables Le CRTC a conclu que la requérante n'avait pas qualité pour intervenir dans l'audition prévue Cette décision a été faite sans notification ni audition, et a été annoncée à l'ouverture de l'audition consacrée par le CRTC aux demandes de renouvellement de licences 11 échet d'examiner s'il faut accueillir le recours contre cette décision du CRTC Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, art. 18 Loi sur la radiodiffu- sion, S.R.C. 1970, c. B-11, art. 19(2),(3), 26(5) Règles de procédure du CRTC, DORS/71-330, art. 146).
Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes a donné avis d'audition publique relative aux demandes faites par les intimés l'exception du Conseil) en vue du renouvellement de leurs licences de radiodiffusion et, pour deux d'entre eux, de l'augmentation des taxes mensuelles payées par les abonnés. La requérante a soumis des interven tions écrites conformément aux conditions prévues par la Loi et par les Règles de procédure. A l'ouverture de l'audition, le président du jury constitué par le Conseil fait savoir que les membres permanents du Conseil ont conclu que la requérante n'avait pas qualité d'intervenante. La requérante fait valoir que le Conseil n'est pas compétent pour connaître des demandes en cause car: (1) il n'a pas reconnu la qualité d'intervenante de la requérante alors que celle-ci l'a de droit, en vertu de la Loi sur la radiodiffusion et des Règles de procédure du CRTC; (2) il a refusé à la requérante la qualité d'intervenante sans même lui donner l'occasion de se faire entendre à cet égard et sans lui notifier que sa qualité était contestée; (3) il a rendu publique son intention de nier à la requérante le droit de répondre aux arguments présentés à l'appui des demandes de renouvellement et le droit de demander des renseignements supplémentaires. Subsidiairement, la requérante fait valoir que le Conseil a perdu toute compétence qu'il eût pu avoir; (4) lorsqu'il a refusé un ajournement pour que la Cour fédérale puisse se prononcer sur la qualité d'intervenante de la requérante; (5) lorsqu'il a sursis à la décision sur la qualité de la requérante sans ajourner
les demandes de renouvellement de licences, privant ainsi la requérante de l'occasion de répondre aux arguments à l'appui du renouvellement des licences. En outre, également à titre subsidiaire, (6) les circonstances énoncées dans les alinéas 2, 3, 4 et 5 ci-dessus, considérées séparément ou dans leur ensemble, suffisent pour créer un doute raisonnable sur l'impartialité du Conseil.
Arrêt: la requête est accueillie, sauf à l'égard d'un avis. La conclusion, tirée par le Conseil, que la requérante n'avait pas qualité d'intervenante ne constitue pas une décision du Conseil au sens de l'article 25 de la Loi sur la radiodiffusion. Pour chacune des intimées, la demande de renouvellement de licence tombe dans le domaine d'application de l'article 19(3) de la Loi. Ni la Loi ni le Règlement ne contient une disposition prévoyant expressément que le Conseil est habilité à conclure si une requête déposée constitue une intervention ou une doléance. Lorsque, comme en l'espèce, la requête est déposée sous forme d'intervention, contient tous les éléments requis d'une interven tion et satisfait à tous autres égards aux exigences de la Loi et du Règlement, le Conseil ne peut pas y voir une doléance plutôt qu'une intervention. En ce qui concerne la demande de renou- vellement de licence introduite par Eston C.A.T.V. Co-opera tive, l'avis d'intervention de Saskatchewan Tele-Communica tions a articulé les faits pertinents qui ne sont pas contestés. Dans ces conditions, rien ne justifie l'octroi d'un bref de prohibition à l'égard de cette demande de renouvellement de licence.
REQUÊTE. AVOCATS:
G. Taylor, c.r. pour la requérante.
S. Halyk, c.r. pour l'intimé Conseil de la
radiodiffusion et des télécommunications
canadiennes.
P. Miquelon pour l'intimée Cablenet Limited.
R. Caskey pour l'intimée C.A.T.V. Co-opera tive, Eston (Saskatchewan).
J. Beke pour l'intimée Regina Cablevision Co-operative, Regina (Saskatchewan). R. Laing pour l'intimée Saskatoon Telecable Limited, Saskatoon (Saskatchewan).
PROCUREURS:
Goldenberg, Taylor, Randall, Buckwold & Halstead, Saskatoon, pour la requérante. Halyk, Priel, Stevenson & Hood, Saskatoon, pour l'intimé Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes.
Agra Industries, Saskatoon, pour l'intimée Cablenet Limited.
R. Caskey, Eston, pour l'intimée C.A.T.V. Co-operative, Eston (Saskatchewan).
Griffin, Beke & Thorson, Regina, pour l'inti- mée Regina Cablevision Co-operative, Regina (Saskatchewan).
McKercher, McKercher, Stack, Korchin & Laing, Saskatoon, pour l'intimée Saskatoon Telecable Limited, Saskatoon (Saskatche- wan).
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
LE JUGE SUPPLÉANT MAGUIRE: Par ordon- nance en date du 5 octobre 1978, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications cana- diennes (ci-après désigné le Conseil) a donné avis d'audition publique relative aux demandes faites par les intimées susnommées l'exception du Conseil) en vue du renouvellement des licences de radiodiffusion détenues par ces intimées et aux demandes d'augmentation, faites séparément par deux d'entre eux, des taxes mensuelles payables par les abonnés aux services de câblodiffusion.
La requérante a soumis des interventions écrites, en date du 9 ou 10 novembre 1978, relatives aux demandes précitées, conformément aux articles 13, 14 et 15 des Règles de procédure du Conseil. Aucune des intimées susnommées n'a répliqué à ces interventions, ainsi qu'elle auraient pu le faire en vertu de l'article 16 des Règles de procédure.
L'avocat de Regina Cablevision Co-operative a fait valoir que l'intervention visant cette dernière ne spécifie pas que la requérante s'oppose au renouvellement de la licence, ainsi que le requiert l'article 14b) des Règles ainsi libellé:
14....
b) comporter un exposé clair et succinct des faits et des motifs pour lesquels l'intervenant appuie la demande, s'y oppose ou propose de la modifier;
A mon avis, cette intervention satisfait aux con ditions prévues par l'article ci-dessus.
La demande est fondée sur les motifs suivants:
[TRADUCTION] 1. Le Conseil n'est pas compétent pour connaî- tre de ces demandes parce qu'il n'a pas reconnu la qualité d'intervenante de la requérante, alors que celle-ci l'a de droit, en vertu des dispositions de la Loi sur la radiodiffusion, SRC, c. B-11, modifiée, et des Règles de procédure du CRTC adoptées en vertu de l'art. 21 de la Loi (DORS/71-330, Gazette du Canada du 28 juillet 1971, page 1154) avec les modifications.
2. De même, le Conseil n'est pas compétent parce qu'il a refusé à la requérante la qualité d'intervenante sans même lui donner l'occasion de se faire entendre à cet égard et sans l'aviser que sa qualité était contestée.
3. Le Conseil est d'autant plus incompétent qu'il a rendu publique son intention de nier à la requérante le droit de répondre aux arguments présentés à l'appui de ces demandes de renouvellement de licences de câblodiffusion et de demander des renseignements supplémentaires lors de l'audition publique ces demandes doivent être instruites.
4. Subsidiairement, le Conseil a perdu toute compétence qu'il eût pu avoir lorsqu'il a refusé une demande d'ajournement pour permettre de tester la qualité d'intervenante de la requérante devant la Cour fédérale, privant ainsi la requérante d'une occasion raisonnable de répondre aux arguments à l'appui du renouvellement des licences.
5. En outre, le Conseil a perdu sa compétence lorsqu'il a sursis à une décision sur la question de la qualité de la requérante, décision à rendre ultérieurement à Ottawa, sans ajourner les demandes précitées de renouvellement de licences, privant ainsi la requérante d'une occasion raisonnable de répondre aux argu ments à l'appui du renouvellement de licences, sans décider si la requérante avait le droit d'y répondre en qualité d'intervenante.
6. En outre, également à titre subsidiaire, le Conseil n'est pas compétent parce que les circonstances énoncées dans les para- graphes «2», «3», «4» et «5» ci-dessus, considérées séparément ou dans leur ensemble, suffisent pour susciter un doute raisonnable sur l'impartialité du Conseil.
A l'ouverture de l'audition, le président du jury constitué par le Conseil fait savoir que les mem- bres permanents du Conseil ont conclu que la requérante n'avait pas qualité d'intervenante. Je ne vois pas en cette conclusion une décision du Con- seil au sens de l'article 25 de la Loi sur la radio- diffusion, S.R.C. 1970, c. B-11, et suivant la défi- nition de l'article 26(5) dont voici le libellé:
26....
(5) Toute minute ou autre pièce du Conseil ou tout docu ment qu'il émet sous forme de décision ou d'ordonnance, s'il concerne l'attribution, la modification, le renouvellement, l'an- nulation, ou la suspension d'une licence de radiodiffusion, est censé, aux fins de l'article 25 et du présent article, être une décision ou une ordonnance du Conseil.
C'est l'article 19(3) de la Loi qui détermine la procédure à appliquer, et non l'article 19(2) ainsi que l'a soutenu l'avocat de Regina Cablevision Co-operative dans ses plaidoiries faites par écrit.
Voici le libellé de l'article 19(3):
19....
(3) Le Conseil doit tenir une audition publique au sujet du renouvellement d'une licence de radiodiffusion à moins qu'il ne soit convaincu qu'une telle audition n'est pas nécessaire et, nonobstant le paragraphe (2), le Conseil peut tenir une audition
publique au sujet de toute autre question pour laquelle le Conseil estime qu'une telle audition est souhaitable.
Rien n'indique que le Conseil ou son Comité exécutif étaient convaincus ou ont conclu qu'une telle audition n'était pas requise. La Loi et le Règlement ne contiennent aucune disposition spé- cifique permettant au Conseil de rendre une telle décision lorsque des interventions ont été déposées conformément à la Loi et au Règlement. Il se peut que le Conseil soit à même de rendre une telle décision s'il accueille les points soulevés par une intervention. Tel n'est pas le litige en l'espèce; je ne conclurai donc pas sur cette question.
L'avocat de Regina Cablevision Co-operative a admis que l'avis d'audition publique a été fait en vertu de l'article 27 des Règles.
En l'espèce, certaines des intimées ont effective- ment demandé une modification de leurs licences qui venaient d'ailleurs à expiration. Cependant, pour chacune des intimées, la demande, de renou- vellement tombe dans le domaine d'application de l'article 19(3) précité de la Loi.
En ce qui concerne la demande de renouvelle- ment de licence introduite par Eston C.A.T.V. Co-operative, l'avis d'intervention de Saskatche- wan Tele-Communications a articulé les faits per- tinents qui ne sont pas contestés. Saskatchewan Tele-Communications a déclaré appuyer la demande de renouvellement, tout en insistant sur une modification de la licence de façon à obliger le titulaire à avoir ses propres amplificateurs et ses propres branchements chez les abonnés. Elle a également déclaré ne pas vouloir comparaître devant le Conseil.
Dans ces conditions, rien ne justifie l'octroi d'un bref de prohibition à l'égard de cette demande de renouvellement de licence. La requête est rejetée à cet égard. L'avocat de cette intimée n'a soumis aucune plaidoirie. 11 ne sera fait aucune adjudica tion quant aux dépens.
On a soutenu que le Conseil doit avoir le pouvoir de conclure si une requête déposée constitue une intervention ou une doléance. Ni la Loi ni le Règlement ne contient aucune disposition spécifi- que à cet égard. A mon avis, lorsque la requête est déposée sous forme d'intervention, contient tous les éléments requis d'une intervention et satisfait à
tous autres égards à toutes les exigences de la Loi et du Règlement concernant une intervention, le Conseil ne peut pas la traiter comme une doléance plutôt qu'une intervention.
Je note que, dans certains de ses avis d'interven- tion, la requérante a demandé qu'au minimum, les titulaires de licences possèdent les équipements énumérés, en partie, dans la décision du Conseil en date du 14 février 1978. Ce minimum ressort d'une analyse approfondie des politiques du gouverne- ment fédéral et du gouvernement provincial, et des fonctions et obligations que le Conseil tient de la loi. Je n'arrive, cependant, à trouver aucun texte législatif ou autre qui interdise à un intervenant de demander la modification de ce minimum ou de tout autre minimum établi. Il est loisible au Con- seil de rejeter pareille demande si, à son avis, il y a lieu de poursuivre la politique établie par la ou les décisions antérieures.
En résumé, le Conseil est tenu d'instruire beau- coup de faits énoncés et de requêtes faites dans plusieurs avis d'intervention, à la suite d'une audi tion publique tenue conformément à la Loi et au Règlement, avec la participation de l'intervenante reconnue comme telle.
En conséquence, je suis obligé d'accueillir la demande sauf en ce qui concerne l'avis qui a été évoqué le premier.
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