Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

A-570-78
Le procureur général du Canada (Requérant)
c.
Matador Inc. (Intimée)
et
Matador Converters Co. Ltd. (Cointimée)
Cour d'appel, les juges Pratte et Ryan, le juge suppléant Lalande—Montréal, 21 novembre; Ottawa, 17 décembre 1979.
Examen judiciaire Impôt sur le revenu Calcul du revenu Vente de terrain bâti Répartition du produit de la vente entre le terrain et l'immeuble Le Ministre demande que certaines questions soient tranchées en application de l'art. 174 de la Loi de l'impôt sur le revenu et que l'acheteuse soit mise en cause Ordonnance de mise en cause rendue Questions tranchées par la Commission de révision de l'impôt
Aucun montant ventilé à l'immeuble et aucun coût en capital assumé par l'acheteuse Demande d'examen et d'an- nulation de la décision de la Commission de révision de l'impôt Il échet d'examiner si la Commission de révision de l'impôt était tenue de se prononcer sur les questions soumises
II échet d'examiner si la Commission de révision de l'impôt a rendu une décision juste en matière de répartition Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, c. 63, art. 68, 174 Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, art. 28.
Demande fondée sur l'article 28 et tendant à l'examen et à l'annulation de la décision de la Commission de révision de l'impôt qui, se prononçant sur des questions soumises par le ministre du Revenu national en application de l'article 174 de la Loi de l'impôt sur le revenu, a conclu que par suite de la vente d'une propriété composée d'un terrain et d'un immeuble, le produit touché par la vendeuse intimée et le coût en capital assumé par l'acheteuse cointimée s'élevaient respectivement à zéro. L'intimée soutient en premier lieu que la demande fondée sur l'article 28 vise une décision inexistante. Elle soutient en outre, pour ce qui est du fond de l'affaire, que la Commission a eu raison de conclure que la juste valeur marchande de toute la propriété ne dépassait pas celle du terrain nu.
Arrêt: la demande est accueillie; la décision de la Commis sion concernant les deux questions soumises par le Ministre est annulée et l'affaire renvoyée pour nouvelle instruction. En cas d'ordonnance rendue conformément à l'alinéa 174(3)b), la Commission doit non seulement se prononcer sur l'appel, mais encore rendre une décision ayant force obligatoire sur les questions soumises par le Ministre. Dans la répartition du produit de vente entre le terrain et l'immeuble, la Commission est certes tenue d'appliquer l'article 68 de la Loi de l'impôt sur le revenu, mais elle doit effectuer cette répartition raisonnable- ment, compte tenu de toutes les circonstances. Elle ne peut avoir aveuglément recours à un principe inapplicable à une répartition à effectuer sous le régime de cet article.
DEMANDE d'examen judiciaire.
AVOCATS:
Roger Roy et Guy Laperrière pour le
requérant.
Mario Ménard pour l'intimée.
Michael Vineberg pour la cointimée.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour le requérant.
Verchère, Gauthier, Noël & Eddy, Montréal, pour l'intimée.
Phillips & Vineberg, Montréal, pour la cointimée.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE PRATTE: Cette demande d'examen et d'annulation déposée au titre de l'article 28 vise une décision rendue en octobre 1978 par la Com mission de révision de l'impôt relativement à une question exposée dans une demande présentée par le ministre du Revenu national en vertu de l'article 174 de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, c. 63.
Par acte de vente daté du 12 janvier 1973, Matador Inc. a vendu à Matador Converters Co. Ltd. une propriété, composée d'un terrain et d'un immeuble, située aux n°a 9450 et 9470 de l'avenue de l'Esplanade, à Montréal. L'acte de vente ne précise pas comment fut réparti entre le terrain et l'immeuble le prix de vente de $185,000.
En décembre 1975, dans un avis de nouvelle cotisation pour l'année d'imposition 1973 de Mata dor Inc., le Ministre a réparti ce prix de vente comme suit: $124,000 pour l'immeuble et $61,000 pour le terrain. Dans son appel interjeté contre cette cotisation devant la Commission de révision de l'impôt, Matador Inc. a allégué que le montant total de $185,000 représentait le prix du terrain et qu'elle n'avait, par conséquent, rien reçu pour l'immeuble. Cet appel était encore pendant lorsque le Ministre a présenté une demande à la Commis sion en vertu de l'article 174 de la Loi de l'impôt
sur le revenu) Dans cette demande, le Ministre a requis la Commission de se prononcer sur les deux questions suivantes:
174. (1) Lorsque le Ministre est d'avis qu'une même tran saction ou un même événement ou qu'une même série de transactions ou d'événements a donné naissance à une question de droit, de fait ou de droit et de fait qui se rapporte à des cotisations relatives à deux ou plusieurs contribuables, il peut demander à la Commission de révision de l'impôt ou à la Cour fédérale—Division de première instance, de se prononcer sur la question.
(2) Une demande présentée en vertu du paragraphe (1) doit faire état
a) de la question au sujet de laquelle le Ministre demande une décision,
b) des noms des contribuables que le Ministre désire voir liés par la décision relative à cette question, et
c) des faits et motifs sur lesquels le Ministre s'appuie et sur lesquels il s'est fondé ou a l'intention de se fonder pour établir la cotisation d'impôt payable par chacun des contri- buables nommés dans la demande,
et un exemplaire de la demande doit être signifié par le Ministre à chacun des contribuables nommés, dans cette demande et à toutes autres personnes qui, de l'avis de la Commission de révision de l'impôt ou de la Cour fédérale— Division de première instance, selon le cas, sont susceptibles d'être touchées par la décision rendue sur cette question.
(3) Lorsque la Commission de révision de l'impôt ou la Cour fédérale—Division de première instance, est convaincue que la décision rendue concernant la question exposée dans une demande présentée en vertu du présent article influera sur des cotisations intéressant deux ou plusieurs contribuables à qui une copie de la demande a été signifiée et qui sont nommés dans une décision de la Commission ou de la Cour, selon le cas, elle peut, conformément au présent paragraphe,
a) si aucun des contribuables ainsi nommés n'en a appelé d'une de ces cotisations, entreprendre de statuer sur la question de la façon qu'elle juge appropriée, ou
b) si un ou plusieurs des contribuables ainsi nommés se sont pourvus en appel, rendre une décision groupant dans cet ou ces appels les parties appelantes comme elle le juge à propos.
(4) Lorsque la Commission de révision de l'impôt ou la Cour
fédérale—Division de première instance, statue sur une ques tion exposée dans une demande dont elle a été saisie en vertu du présent article, la décision rendue est, sous réserve de tout appel interjeté en vertu de la Loi sur la Cour fédérale, finale et définitive aux fins de l'établissement de toute cotisation d'impôt payable par les contribuables nommés dans la décision, en vertu du paragraphe (3).
(5) La période comprise entre la date à laquelle une demande faite en vertu du présent article est signifiée à un contribuable conformément au paragraphe (2), et
a) dans le cas d'un contribuable nommé dans une ordonnance de la Commission de révision de l'impôt ou de la Cour fédérale—Division-de première instance, selon le cas, confor- mément au paragraphe (3), la date à laquelle la question est définitivement tranchée en vertu de l'alinéa (3)a) ou à laquelle une ordonnance est rendue en vertu de l'alinéa (3)b), ou
(Suite à la page suivante)
1. Quel produit la vente du bien amortissable à Matador Converters Co. Ltd. a-t-elle rapporté à Matador Inc.?
2. Quel coût en capital Matador Converters Co. Ltd. a-t-elle assumer pour acquérir ce bien amortissable?
Dans la conclusion de sa demande, le Ministre a requis la Commission de rendre une ordonnance joignant Matador Converters Co. Ltd. à l'appel interjeté par Matador Inc.
Le 31 octobre 1977, M. St-Onge, c.r., membre de la Commission, a rendu une ordonnance joi- gnant Matador Inc. à Matador Converters Co. Ltd. Les parties ont interprété cette ordonnance comme joignant Matador Converters Co. Ltd. à l'appel déjà interjeté par Matador Inc.
L'appel de Matador Inc. a été entendu par la Commission en janvier 1978. Celle-ci a rendu jugement le 23 octobre de la même année. Dans ce jugement, Matador Inc. est désignée comme l'«ap- pelante réelle» et Matador Converters Co. Ltd. comme l'«appelante présumée». Le jugement se lit comme suit:
Par les présentes, il est ordonné que l'appel de l'appelante réelle en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, à l'égard de l'année d'imposition 1973 soit admis et le tout déféré à l'intimé pour nouvelle cotisation selon les Motifs du jugement ci-joints.
Par les présentes, il est de plus ordonné que l'appel de l'appelante présumée en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, à l'égard de l'année d'imposition 1973 soit rejeté selon les Motifs du jugement ci-joints.
Dans ses motifs de jugement, M. Tremblay, qui présidait l'audition de cet appel devant la Commis sion, a d'abord exprimé l'opinion suivante quant aux conséquences de l'ordonnance joignant Mata-
(Suite de la page précédente)
b) dans le cas de tout autre contribuable, la date à laquelle il lui est signifié un avis portant qu'il n'a pas été nommé dans une ordonnance de la Commission ou de la Cour, selon le cas, en vertu du paragraphe (3),
est exclue du calcul
c) de la période de 4 ans visée au paragraphe 152(4),
d) du délai de signification d'un avis d'opposition à une cotisation en vertu de l'article 165, ou
e) du délai d'appel en vertu de l'article 169 ou du paragraphe 172(2),
aux fins d'établir la cotisation d'impôt payable par le contribua- ble, aux fins de la signification d'un avis d'opposition à cette cotisation ou aux fins d'en appeler de celle-ci, selon le cas.
dor Converters Co. Ltd. à l'appel interjeté par Matador Inc.:
... vu la jonction des causes, on présume d'une part qu'une cotisation a été établie à l'égard de Matador Converters Co. Limited dans laquelle aucune valeur n'a été attribuée à l'im- meuble et d'autre part que le contribuable a interjeté appel devant la Commission ... 2 .
Quant aux questions posées par le Ministre, M. Tremblay a conclu, dans ses motifs, que le mon- tant total de $185,000 représentait uniquement le prix du terrain et qu'en conséquence:
a) Matador Inc. n'a rien touché suite à la vente de son immeuble à Matador Converters Co. Ltd.
et que
b) Matador Converters Co. Ltd. n'a eu à assu- mer aucun coût en capital pour en faire
l'acquisition.
A la suite de cette décision le requérant a déposé une demande au titre de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10:
[TRADUCTION] ... en vue d'obtenir l'annulation d'une décision rendue par la Commission de révision de l'impôt le 2 novembre 1978 concernant une question exposée par le ministre du Revenu national dans sa demande présentée en vertu de l'arti- cle 174 de la Loi de l'impôt sur le revenu, décision dans laquelle la Commission a conclu que par suite de la vente d'une propriété située aux 9450 et 9470 de l'avenue de l'Esplanade, à Montréal, le produit touché par la vendeuse Matador Inc. et le coût en capital assumé par l'acheteuse Matador Converters Co. Ltd. s'élevaient respectivement à zéro.
Pour sa part, l'intimée fait valoir, comme pre mier argument contre cette demande d'annulation, que celle-ci vise une décision inexistante. En effet, elle estime que [TRADUCTION] «la Commission n'a rendu aucune décision concernant la question exposée dans la demande . présentée en vertu de l'article 174 ...». Voici en quels termes l'intimée explique, dans son factum, sa position à cet égard:
[TRADUCTION] 3. En vertu de l'article 174(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, le Ministre peut, dans un cas comme celui-ci, demander à la Commission de se prononcer sur une question commune aux cotisations de deux contribuables. Dans un tel cas, la Commission peut, en vertu de l'article 174(3), trancher dans l'un des deux sens suivants, selon les circons-
2 Il s'agit évidemment d'une interprétation erronée des conséquences de l'ordonnance rendue au titre de l'alinéa 174(3)b). Une telle ordonnance a simplement pour effet de joindre comme partie à l'appel la personne ainsi visée, de sorte qu'elle sera liée par la décision rendue sur cet appel.
tances. Elle peut «statuer» sur la question «si» aucun des contri- buables n'en a appelé d'une de ces cotisations (article 174(3)a)). Toutefois, si l'un des contribuables s'est pourvu en appel, elle ne peut, en vertu de l'article 174, faire autre chose que rendre une décision groupant dans cet appel l'autre contri- buable (article 174(3)b)).
En l'espèce, l'un des deux contribuables a interjeté appel. Par conséquent, aux termes de l'article 174, la Commission n'avait pas le pouvoir de «statuer» sur la question.
4. Puisqu'un seul des deux contribuables, à savoir l'intimée, avait interjeté appel, la Commission n'était autorisée, par l'arti- cle 174, qu'à joindre Matador Converters à l'appel logé par l'intimée. La raison à cela est évidente. Le législateur a voulu que les deux contribuables soient liés par la décision de la Commission, quelle qu'elle soit. Dès que l'on joint le second contribuable à l'appel interjeté par le premier, il obtient le droit d'y faire valoir ses intérêts et d'interjeter appel dans la mesure ses droits ont été lésés et il devient assujetti au principe de la res judicata.
5. Par conséquent, comme l'a compris M. Tremblay, la Com mission n'avait, en l'espèce, en vertu de l'article 174, aucun pouvoir pour «statuer» sur les questions exposées par le Ministre dans sa demande présentée en vertu de ce même article. En effet, pour autant que l'intimée soit concernée, la Commission ne pouvait que «statuer» sur son appel conformément à l'article 171....
6. Pour ces motifs, nous alléguons que la demande présentée en vertu de l'article 28 vise une décision que la Commission n'a jamais rendue. C'est pourquoi cette demande doit être rejetée.
A mon avis, cette allégation est fondée sur une interprétation erronée de l'article 174. En effet, celui-ci prévoit qu'en certaines circonstances le Ministre peut demander à la Commission de se prononcer sur une question. Une demande sembla- ble, selon moi, doit être suivie d'une décision dans les cas visés par l'alinéa 174(3)b) et ceux de l'alinéa 174(3)a) et cette décision peut, par la suite, faire l'objet d'une demande d'examen au titre de l'article 28. Lorsqu'une ordonnance joi- gnant une partie à un appel est rendue conformé- ment à l'alinéa 174(3)b), cette ordonnance n'a pas seulement pour effet d'ajouter une partie à cet appel, elle modifie le caractère de la décision à rendre sur celui-ci. Elle oblige le tribunal à se prononcer, non seulement sur l'appel, mais aussi sur la question posée par le Ministre. En d'autres termes, le tribunal doit rendre deux décisions: l'une relative à l'appel et l'autre à la question posée. Si l'ordonnance rendue conformément à l'alinéa 174(3)b) n'avait pas cet effet, la décision sur la question posée, rendue par le tribunal saisi de l'appel, ne constituerait pas une véritable décision, mais seulement un maillon dans la chaîne du
raisonnement conduisant au jugement prononcé sur l'appel. Il s'ensuivrait que, dans pareil cas, la décision sur la question posée par le Ministre ne pourrait faire l'objet d'une demande d'examen au titre de l'article 28 (parce qu'il ne s'agirait pas d'une décision) et elle ne pourrait faire l'objet d'un appel (puisqu'on ne fait pas appel contre les motifs du jugement, mais contre le jugement même). Cela me paraît inadmissible.
Je suis donc d'avis qu'en l'espèce, la Commission avait l'obligation de rendre une décision sur les deux questions posées par le Ministre. Je suis aussi d'avis qu'elle a effectivement rendu une décision sur ces questions. Il est vrai qu'à cause de l'erreur commise par M. Tremblay quant à l'effet d'une ordonnance prononcée conformément à l'alinéa 174(3)b), elle n'a pas rendu de décision formelle sur ces deux questions. Toutefois, il est clair à la lecture et du jugement et des motifs, qu'elle a répondu aux deux questions posées. L'article 174 ne prescrit aucune forme spéciale en laquelle la décision doit être rendue et, à mon avis, il importe peu qu'elle soit rendue dans le jugement même ou dans les motifs du jugement, pourvu qu'il soit clair, comme c'est le cas en l'espèce, qu'elle lie toutes les parties concernées.
Examinons maintenant le fond du litige.
Dans l'examen des réponses données par M. Tremblay aux deux questions posées par le Minis- tre, nous devons tenir compte du fait qu'il s'est senti lié, dans l'application de l'article 68 de la Loi 3 , par un principe applicable en matière d'éva- luation, selon lequel, en cas de vente d'un terrain
3 Cet article se lit comme suit:
68. Lorsqu'une somme peut raisonnablement être considérée comme étant en partie la contrepartie de la disposition de tout bien d'un contribuable, et comme étant en partie la contrepartie de quelque chose d'autre, la partie de la somme qui peut raisonnablement être considérée comme étant la contrepartie de cette disposition est réputée être le produit de la disposition de ce bien, quelle que soit la forme ou les effets juridiques du contrat ou de la convention; et la personne qui a acquis le bien à la suite de sa disposition est réputée l'avoir acquis à un prix égal à la même partie de cette somme.
Je n'admets pas l'allégation de l'avocat de l'intimée, selon laquelle l'article 68 n'est pas applicable en l'espèce. A mon avis, cet article est applicable «lorsqu'une somme peut raisonnable- ment être considérée comme étant en partie la contrepartie de la disposition de tout bien d'un contribuable, et comme étant en partie la contrepartie» de la disposition d'un autre type de bien ou de quelque chose d'autre.
bâti à un prix inférieur à celui du marché, il faut d'abord imputer ce prix au terrain. Puisqu'il était reconnu que le prix de $185,000 payé pour la propriété de Matador Inc. était inférieur à la valeur marchande du terrain non bâti, la Commis sion, considérant ce principe comme une règle de droit, en a conclu qu'il fallait imputer au terrain le montant total des $185,000. Il est clair, à mon avis, qu'elle a ainsi commis une erreur de droit. Dans la répartition de ce montant entre le terrain et l'immeuble, elle était tenue d'appliquer l'article 68. Elle devait répartir ce montant raisonnable- ment, en tenant compte de toutes les circonstances de l'espèce. A cet égard, elle ne pouvait, sans commettre d'erreur, avoir aveuglément recours à un principe inapplicable à une répartition à effec- tuer sous l'empire de l'article 68.
L'avocat de l'intimée a essayé de justifier la décision de la Commission en affirmant qu'elle est fondée sur la conclusion voulant que la juste valeur marchande de toute la propriété (terrain et immeuble) ne dépassait pas celle du terrain nu. A mon avis, c'est une interprétation erronée de la décision. Loin d'avoir conclu que l'immeuble n'ajoutait rien à la juste valeur marchande de la propriété vendue par Matador Inc., la Commission a jugé non seulement que la juste valeur mar- chande du terrain s'élevait à $200,000 mais aussi que celle de toute la propriété s'élevait à $500,000.
Des circonstances relatées par le dossier, il res- sort clairement qu'on aurait répartir la somme de $185,000 entre le terrain et l'immeuble en tenant compte:
a) de la conclusion de la Commission selon laquelle la juste valeur marchande du terrain (sans l'immeuble) s'élevait à $200,000 et
b) de l'avis de la Commission quant au montant dont fut augmentée la juste valeur marchande du terrain en raison de la présence de l'immeuble. 4
Pour ces motifs, je suis d'avis d'accueillir la demande, d'annuler la décision de la Commission
4 A mon avis, la Commission ne doit pas essayer de détermi- ner la valeur de l'immeuble comme s'il s'agissait d'une entité distincte du terrain. Pour déterminer la juste valeur marchande de l'immeuble, elle doit comparer la valeur du terrain nu à celle du terrain bâti.
concernant les deux questions exposées dans la demande du Ministre et de renvoyer l'affaire afin que la décision y afférente tienne compte de ce que la répartition du montant de $185,000 entre le terrain et l'immeuble doit être effectuée conformé- ment aux conclusions de la Commission quant à la valeur marchande du terrain nu et celle du terrain bâti.
* *
LE JUGE RYAN: Je suis d'accord.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT LALANDE: Je suis d'ac- cord avec le jugement prononcé par mon collègue le juge Pratte.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.