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T-4300-81
Island and Worldwide Shipping Agency Inc. (Demanderesse)
c.
Le navire Astron et Costar Shipping Co. (Défendeurs)
Division de première instance, le juge Mahoney— Ottawa, 4 décembre 1981.
Pratique Demande de permission de déposer une déclara- tion modifiée L'intitulé initial de la cause contient une erreur matérielle La demande a été faite malgré la Règle 421(1) Les défendeurs n'ont pas encore répondu à la déclaration Le greffe de la Cour refusait d'autoriser la modification de l'intitulé d'une cause selon la procédure prévue à la Règle 421(1), c'est-à-dire sans permission de la Cour Ce refus était fondé sur l'obiter dictum du juge en chef Jackett dans la cause Robert Simpson Il échet d'exa- miner si la Règle 421(1) s'applique Requête rejetée La demanderesse a le droit d'effectuer l'amendement sans permis sion Aucune modification ne peut être apportée à l'intitulé d'une cause sans amendement formel Il est cependant possible de modifier l'intitulé d'une cause de la façon prévue par les Règles de la Cour, quel que soit l'amendement envisagé Règle 421(1) de la Cour fédérale.
Arrêt interprété: La Compagnie Robert Simpson Montréal Liée c. Hamburg-Amerika Linie Norddeutscher [1973] C.F. 1356.
REQUÊTE fondée sur la Règle 324. AVOCATS:
Marc de Man pour la demanderesse. PROCUREURS:
Stikeman, Elliott, Tamaki, Mercier & Robb, Montréal, pour la demanderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
LE JUGE MAHONEY: La demanderesse sollicite la permission de la Cour pour déposer une déclara- tion modifiée, la «Coastal Shipping Limited» sera substituée à la «Costar Shipping Co.» à titre de défenderesse. La première désignation était le résultat d'une erreur matérielle. La déclaration est datée du 1 er septembre 1981 et les défendeurs n'y ont pas encore répondu. Depuis quelque temps déjà, je me suis demandé pourquoi, malgré la Règle 421(1), il y a eu tant de requêtes de ce genre.
Règle 421. (1) Une partie peut, sans permission, amender n'importe laquelle de ses plaidoiries à tout moment avant que l'autre partie n'y ait répondu.
J'ai été informé que ces requêtes font suite au refus du greffe de la Cour d'autoriser la modifica tion de l'intitulé d'une cause selon la procédure prévue à la Règle 421(1). Ce refus tient à son interprétation d'une note en bas de page du juge- ment La Compagnie Robert Simpson Montréal Limitée c. Hamburg-Amerika Linie Norddeuts- cher', le juge en chef Jackett a fait cette observation la page 1371]:
Mon examen des conclusions écrites en l'espèce me pousse à souligner (cette observation n'est aucunement liée à l'appel) qu'autant que je sache, l'intitulé de la cause est un titre ou un moyen permettant d'identifier une action. J'estime que, norma- lement tout document déposé devrait porter l'intitulé de la cause du document introductif (même s'il y a eu un change- ment de parties), sinon l'intitulé de la cause ne joue plus son rôle principal, soit d'identifier l'action. Si, dans un cas particu- lier, on estime qu'il est plus important d'avoir un moyen facile permettant d'identifier toutes les parties à l'action dans l'inti- tulé de la cause que de retenir dans toute l'action le même intitulé, on doit demander à la Cour une ordonnance autorisant un changement dans l'intitulé de la cause. A ma connaissance, il faut une ordonnance de la Cour pour permettre au greffe d'accepter le dépôt, dans une action donnée, d'un document comportant un intitulé de cause autre que celui figurant sur le document introductif d'instance. [C'est moi qui souligne.]
Il n'est pas nécessaire d'apprécier la valeur juris- prudentielle d'une observation faite en bas de page d'un jugement par un membre d'une formation de jugement de la Cour d'appel. L'observation rappe- lée ci-dessus constituait expressément un obiter dictum, dont le greffe doit cependant tenir compte.
En lui donnant une interprétation littérale et une application systématique, le greffe n'a pas tenu compte du contexte dans lequel cette observa tion a été faite et auquel elle s'applique toujours; il a également rendu inopérante la disposition, claire, de la Règle 421(1) sur la modification des intitulés de cause. Le rappel suivant des faits de cette cause permettra de bien saisir le contexte dans lequel le juge en chef a fait cette observation:
1. Cette action a d'abord été intentée devant la Cour de l'Échiquier par voie de bref portant l'inti- tulé suivant:
' [1973] C.F. 1356, aux pp. 1370 sqq.
[TRADUCTION] LA COMPAGNIE ROBERT SIMPSON MONTREAL LIMITÉE, une société commerciale dont le siège social et la principale place d'affaires sont situés dans la ville de Montréal, province de Québec,
Demanderesse,
c.
HAMBURG-AMERIKA LINIE NORDEUTCHER LLOYD ERNST RUSS, pendant toute la période en cause, les propriétaires ou les exploitantes, ou les deux à la fois, et, en tout cas, les parties intéressées au navire «BUCHENSTEIN», étant représentées par des mandataires et possédant des biens au 360, rue St-Jacques ouest, dans la ville de Montréal,
et
MONTREAL SHIPPING COMPANY LIMITED, une société com- merciale dont le siège social et la principale place d'affaires sont situés dans la ville de Montréal, province de Québec,
Défenderesses,
2. Il s'en est suivi une déclaration déposée devant la Cour de céans, avec l'intitulé suivant:
[TRADUCTION] ENTRE:
LA COMPAGNIE ROBERT SIMPSON MONTRÉAL LIMITÉE,
Demanderesse,
ET:
HAMBURG-AMERIKA LINIE NORDDEUTSCHER,
et
LLOYD ERNST RUSS,
et
MONTREAL SHIPPING COMPANY LIMITED,
Défenderesses.
3. Après le dépôt du mémoire de défense, des tiers ont été mis en cause par certaines des défenderes- ses et l'intitulé suivant a été adopté par la suite:
[TRADUCTION] LA COMPAGNIE ROBERT SIMPSON MONTRÉAL LIMITÉE
Demanderesse
c.
HAMBURG-AMERIKA LINIE NORDDEUTSCHER,
LLOYD ERNST RUSS et
MONTREAL SHIPPING COMPANY LIMITED,
Défenderesses
et
HAMBURG-AMERIKA UNIE NORDDEUTSCHER et LLOYD ERNST RUSS,
Tierces parties demanderesses,
c.
WARNOCK HERSEY INTERNATIONAL LTD.
et MONTREAL SHIPPING COMPANY LIMITED,
Tierces parties défenderesses.
Aucune de ces modifications n'a été opérée par amendement conforme aux Règles de la Cour. Elles ont simplement été adoptées par les parties et admises par le greffe. Voilà ce qui a suscité l'ob- servation du juge en chef.
Les requêtes en justice prennent beaucoup de temps, le temps que doivent leur consacrer les avocats, les fonctionnaires du greffe et les juges. Le temps, c'est de l'argent. Les requêtes inutiles font perdre de l'argent, tant au demandeur qu'au Trésor public.
Selon la pratique en vigueur, un demandeur peut modifier sa déclaration avant que la partie adverse ne réponde aux points les plus importants; il peut ajouter ou soustraire des causes d'action et des recours invoqués sans l'autorisation de la Cour, mais il ne peut rien corriger dans l'intitulé de la cause, ne serait-ce qu'une erreur matérielle, sans un ordre de la Cour. Le greffe a eu tort de tirer de l'observation du juge en chef une conclusion dont la logique est poussée jusqu'à l'absurde.
Proprement appliquée, cette observation signifie qu'aucune modification ne peut être apportée à l'intitulé d'une cause sans amendement formel, et que le greffe doit continuer à instruire et à refuser d'accepter le dépôt des plaidoiries et autres docu ments ne portant pas l'intitulé de cause en cours, que ce soit le titre initial ou, en cas d'amendement formel, l'intitulé de cause modifié. Il est cependant possible de modifier l'intitulé d'une cause de la façon prévue par les Règles de la Cour, quel que soit l'amendement envisagé. En l'espèce, la deman- deresse peut effectuer sans permission l'amende- ment souhaité.
ORDONNANCE
La requête de la demanderesse en autorisation de déposer une déclaration modifiée est rejetée sans préjudice de son droit d'effectuer l'amende- ment sans permission, en vertu de la Règle 421(1).
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