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A-670-81
Donald James Morgan (requérant) (appelant) c.
La Commission nationale des libérations condi- tionnelles (intimée) (intimée)
Cour d'appel, juge en chef Thurlow, juges Heald et Ryan—Ottawa, 20 et 26 janvier 1982.
Contrôle judiciaire Brefs de prérogative Certiorari Libération conditionnelle Appel du rejet d'une demande de cassation d'une décision de la Commission des libérations conditionnelles révoquant une libération conditionnelle Appelant non assisté d'un avocat à l'audience en dépit de l'art. 20(2) du Règlement sur la libération conditionnelle de détenus qui accorde ce droit au détenu Allégations à l'audience de comportement criminel sans en avoir informé l'appelant ni lui avoir offert un ajournement pour mandater un avocat Révocation de la libération conditionnelle en raison notam- ment des allégations de comportement criminel En cause: le manquement de la Commission à son obligation d'agir équita- blement Appel accueilli Loi sur la libération condition- nelle de détenus, S.R.C. 1970, c. P-2, art. 9(1)g),h),i),j),k), 11, 16(3),(4), 20(2),(3) Règlement sur la libération condition- nelle de détenus, C.R.C. 1978, Vol. XIII, c. 1249, art. 20, 20.1, 21, 22.
Appel formé d'un jugement de la Division de première instance rejetant la demande de cassation de la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles qui révo- quait la libération conditionnelle de jour de l'appelant. La libération conditionnelle a été suspendue pour avoir «Quitté Centre Osborne sans autorisation». Le cas a été renvoyé à la Commission en vertu du paragraphe 16(3) de la Loi sur la libération conditionnelle de détenus et l'appelant, aux termes du paragraphe 20(2) du Règlement sur la libération condition- nelle de détenus, a demandé une audition postérieure à la suspension. Aucun avocat n'était présent à l'audience bien que l'article 20.1 du Règlement dispose que le détenu peut, dans ce cas, être défendu par une personne de son choix. A l'audience, ont été débattues, notamment, des allégations de comportement criminel sans que l'appelant en ait été notifié au préalable. L'appelant n'a pas été informé de son droit à l'assistance d'un avocat et il ne lui a pas été offert d'ajourner l'audience pour lui permettre d'en mandater un, avant de répondre aux allégations retenues contre lui. La décision de la Commission de révoquer la libération conditionnelle était en partie motivée par ce prétendu comportement criminel. Il échet d'examiner si la Commission a manqué à son devoir d'agir équitablement.
Arrêt: l'appel est accueilli. C'est à tort que le juge de première instance a conclu que l'équité avait entièrement été respectée. L'alinéa 20(2)b) du Règlement prescrit qu'un détenu dans sa situation a droit à un préavis d'audience d'au moins 14 jours. Une telle disposition ne peut avoir pour objet que de permettre au détenu de se préparer à ce qui sera débattu à l'audience. L'obligation d'agir équitablement n'est pas observée lorsque sont abordées à l'audience certaines questions dont un détenu n'a pas été préalablement informé, et sans qu'il lui soit donné la possibilité d'examiner sa situation ou de préparer ses
réponses. Bien qu'aux termes de l'article 20.1 du Règlement, elle ne fût pas tenue de signaler à l'appelant qu'il avait le droit de se faire assister d'un avocat, la Commission, sachant que le Règlement venait d'être modifié afin de conférer ce droit, a en fait aggravé l'iniquité de la situation en s'abstenant d'en infor mer l'appelant.
APPEL. AVOCATS:
Arne Peltz pour l'appelant. Theodore Tax pour l'intimée.
PROCUREURS:
Ellen Street Community Legal Services, Winnipeg, pour l'appelant.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE EN CHEF THURLOW: Cette espèce est l'appel formé d'un jugement de la Division de première instance [[1982] 2 C.F. 63] qui rejeta la demande de l'appelant à la Cour d'évoquer et de casser la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles rendue vers le 5 mai 1981 révoquant la libération conditionnelle de jour qui lui avait été accordée vers le 18 mars 1981. Le seul point en litige dans cet appel est de savoir si la Commission, en exerçant son pouvoir incontesté de révocation d'une libération conditionnelle, a res pecté son obligation de procéder d'une manière équitable à l'égard de l'appelant compte tenu des dispositions de la Loi sur la libération condition- nelle de détenus, S.R.C. 1970, c. P-2, de ses règlements d'application et des faits de l'espèce.
La libération conditionnelle de l'appelant fut suspendue le 22 mars 1981, cette suspension lui étant notifiée par voie d'un rapport de violation qui lui fut remis et expliqué vers le 25 mars 1981. Le motif unique de suspension mentionné dans le rapport .était: [TRADUCTION] «Quitté Centre Osborne sans autorisation».
En ce cas, les paragraphes 16(3) et (4) de la Loi prévoient:
16....
(3) La personne qui a signé le mandat visé au paragraphe (1), ou toute personne que le président désigne à cette fin, doit, dès que le détenu en liberté conditionnelle qui y est mentionné
est renvoyé en détention, réexaminer son cas, et, dans les quatorze jours qui suivent, si la Commission ne décide pas d'un délai plus court, annuler la suspension ou renvoyer l'affaire devant la Commission.
(4) La Commission doit, lorsque lui est renvoyé le cas d'un détenu à liberté conditionnelle dont la libération conditionnelle a été suspendue, examiner le cas et faire effectuer toutes les enquêtes y relatives qu'elle estime nécessaires et immédiate- ment après que ces enquêtes et cet examen sont terminés, elle doit soit annuler la suspension, soit révoquer la libération conditionnelle.
Les alinéas 9(1)g), h), i), j) et k) ainsi que l'article 11 prévoient aussi:
9. (1) Le gouverneur en conseil peut, par règlement,
g) prévoir en quelles circonstances un détenu a droit à une audition lors de l'examen de son cas en vue de lui accorder la libération conditionnelle;
h) fixer la forme et le contenu des renseignements que la Commission doit fournir à un détenu ou à d'autres personnes ou, du moins, mettre à leur disposition, avant de tenir une audition au sujet de sa libération conditionnelle;
i) prévoir quelles circonstances donnent droit au détenu d'obtenir aide et assistance lors d'une audition devant la Commission, sa nature, son étendue et les personnes ou la catégorie de personnes autorisées à la lui fournir;
j) prévoir dans quelles circonstances et sous quelle forme la Commission doit donner au détenu les motifs d'une décision qu'elle rend à son égard au sujet de sa libération conditionnelle;
k) fixer, lorsqu'un cas est soumis à la Commission, en vertu du paragraphe 16(3), les délais dont elle dispose pour siéger et rendre sa décision;
11. Sous réserve des règlements que peut établir à ce sujet le gouverneur en conseil, la Commission n'est pas obligée, lors- qu'elle étudie la possibilité d'accorder ou de révoquer une libération conditionnelle, de donner au détenu l'occasion de se faire entendre personnellement ou par l'intermédiaire d'une autre personne.
Le Règlement [Règlement sur la libération con- ditionnelle de détenus, C.R.C. 1978, Vol. XIII, c. 1249] pris en application de l'article 9 dispose comme suit:
Audition postérieure à la suspension
20. (1) Lorsque, dans le cas d'un détenu sous juridiction fédérale,
a) la libération conditionnelle qui lui a été accordée a été suspendue,
b) le détenu est sous garde, et
c) son cas a été soumis à la Commission conformément au paragraphe 16(3) de la loi,
celle-ci ne peut révoquer la libération conditionnelle que quinze jours après avoir été saisie de l'affaire.
(2) Lorsque le cas d'un détenu a été soumis à la Commission conformément au paragraphe 16(3) de la loi et que le détenu a fait une demande d'audition en vue de l'examen de son cas pendant la période visée au paragraphe (1), la Commission doit
a) tenir l'audition dès que possible après avoir reçu la demande; et
b) informer le détenu de la date de l'audition au moins quatorze jours avant l'audition.
Aide et assistance lors des auditions
20.1 (1) Lors d'une audition selon le paragraphe 15(1) ou 20(2), la Commission doit permettre au détenu d'obtenir aide et assistance d'une personne de son choix.
(2) Il incombe au détenu de voir à ce que la personne visée au paragraphe (1) soit présente à l'audition.
(3) La personne visée au paragraphe (1) a le droit
a) d'être présente à l'audition tant que le détenu qu'elle assiste y est présent;
b) de conseiller le détenu relativement aux questions adres- sées à ce détenu par la Commission pendant l'audition; et
c) à la fin de l'audition, de s'adresser au nom du détenu et pendant une période de dix minutes, aux membres de la Commission qui dirigent l'audition.
Révocation de la libération conditionnelle
21. Lorsque la Commission révoque la libération condition- nelle d'un détenu sous juridiction fédérale qui est sous garde, elle doit, dans les quinze jours suivant la révocation de la libération conditionnelle, informer par écrit le détenu du motif de la révocation.
L'article 20.1 a pris effet le 9 avril 1981, c'est-à- dire postérieurement à la suspension de la libéra- tion conditionnelle de l'appelant du 22 mars 1981, mais antérieurement à la révocation du 5 mai 1981. Aucun règlement applicable selon l'alinéa 9(1)h) ne prescrivait de fournir des informations à un détenu sous le coup d'une suspension, ou d'en porter à sa connaissance avant l'audience.
Postérieurement aux événements des 22 et 25 mars 1981 déjà mentionnés, le cas de l'appelant avait été renvoyé à la Commission aux termes du paragraphe 16(3) de la Loi et l'appelant, aux termes du paragraphe 20(2) du Règlement, avait demandé une audience. Par lettre datée du 14 avril 1981, dont la teneur suit, on notifiait à l'appelant que l'audience aurait lieu vers le 7 mai 1981:
[TRADUCTION] Monsieur Morgan,
Nous accusons réception de votre demande d'une audition
postérieure à la suspension.
Vous êtes, par la présente, notifié que certains membres de la Commission nationale des libérations conditionnelles instrui- ront votre cas vers le 7 mai 1981.
La lettre ne mentionne pas l'objet de l'audience mais la Commission savait, comme l'appelant, que le 22 mars 1981 la police de Winnipeg avait arrêté ce dernier, qu'il avait été inculpé de possession de biens volés, lesquels avaient été trouvés dans la chambre qu'il occupait au Centre Osborne, et que son enquête préliminaire aurait lieu en août 1981.
La déposition sous serment de l'appelant montre qu'antérieurement à l'audience de la Commission des libérations conditionnelles du 5 mai 1981, il communiqua avec son avocat et lui demanda de comparaître à l'audience et d'obtenir le rétablisse- ment de sa libération conditionnelle de jour. Il croyait que les avocats ne pouvaient comparaître à de telles audiences. Que ce soit son avocat qui lui ait fait croire cela, rien ne l'indique. Dans la déposition, on affirme aussi que:
[TRADUCTION] ... par suite d'une conversation avec un autre détenu immédiatement avant l'instruction sur la révocation, j'avais cru comprendre que la Commission des libérations conditionnelles ne pouvait prendre en compte des accusations criminelles pendantes sans la présence d'un avocat.
Il n'y a pas eu contre-interrogatoire au sujet de la déposition; son contenu n'a pas été contredit.
Les parties ont reconnu ce qui suit:
[TRADUCTION] 1. Aucun avocat n'était présent lors de l'au- dience de la Commission nationale des libérations conditionnel- les.
2. Ont été débattues, à l'audience, entre autres choses, certaines allégations de comportement criminel.
3. Aucune notification n'avait été donnée à l'appelant que l'on débattrait à l'audience de son prétendu comportement criminel.
La déposition sous serment de l'appelant dit aussi qu'au cours de l'audience, il en est arrivé à la conclusion, par suite des commentaires qui étaient faits, que la Commission croyait qu'il y avait eu comportement criminel, aussi a-t-il demandé un ajournement pour se faire représenter par un avocat à l'audience, mais cette demande lui a été refusée. Comme la déposition sous serment de l'un des deux membres de la Commission présents à l'audience contredit cette affirmation, on ne peut la considérer comme prouvée. On doit aussi consi- dérer comme avéré ce qu'énonce la déposition sous serment de ce commissaire:
[TRADUCTION] 9. Qu'au cours de l'audience de post-suspen sion, DONALD JAMES MORGAN s'est fait demander s'il avait quelque chose à dire au sujet des renseignements dont disposait la Commission nationale des libérations conditionnelles au sujet de son arrestation, par la police de Winnipeg, au petit matin du
22 mars 1981, et de la découverte ultérieure de biens volés dans la chambre qu'il occupait au Centre correctionnel communau- taire Osborne et la Commission nationale des libérations condi- tionnelles a fait savoir à DONALD JAMES MORGAN qu'il n'était pas obligé de répondre aux questions portant sur ces incidents, mais il lui a été donné la possibilité de donner sa version des faits et les raisons de son implication s'il le désirait.
10. QUE, avant de rendre sa décision, la Commission nationale des libérations conditionnelles a demandé à DONALD JAMES MORGAN s'il avait quelque chose à dire au sujet de son comportement alors qu'il était en libération conditionnelle de jour ou de toute autre question y relative.
Il semble clair, d'après le silence même de la déposition sous serment sur le sujet, que l'appelant n'a pas été informé de son droit à un avocat et qu'on ne lui a pas offert d'ajourner, afin de lui permettre d'en mandater un, avant de l'inviter à commenter un fait faisant l'objet d'une accusation criminelle alors retenue contre lui.
Dans sa déposition sous serment, ce commissaire ajoute qu'à la clôture de l'audience, après délibéra- tion, il fut décidé de révoquer la libération condi- tionnelle de l'appelant, et qu'on l'en informa, lui disant que c'était pour les motifs suivants:
[TRADUCTION] —Qu'il avait enfreint les conditions de sa libération conditionnelle de jour en quittant le Centre correc- tionnel communautaire Osborne sans l'autorisation de son surveillant de libération conditionnelle.
—Que les circonstances de l'arrestation de DONALD JAMES MORGAN par la police de la ville de Winnipeg, le 22 mars 1981, étaient hautement indicatrices d'un comportement cri- minel, celui-ci ayant été découvert au petit matin absent sans autorisation du Centre correctionnel communautaire Osborne en compagnie d'un autre libéré conditionnel de jour lui aussi absent du Centre, dans une automobile louée que le surveillant de libération conditionnelle de DONALD JAMES MORGAN n'avait pas autorisé à avoir en sa possession ni à occuper.
Ultérieurement, on informa aussi l'appelant, conformément à l'article 21 du Règlement, par lettre datée du 13 mai 1981:
[TRADUCTION] Le 5 mai 1981, la Commission nationale des libérations conditionnelles vous a interrogé en réponse à votre demande d'une audience postérieure à une suspension de libéra- tion conditionnelle. La présente confirme que la Commission a décidé de révoquer votre libération conditionnelle de jour sans réattribuer aucune réduction de peine.
La Commission a révoqué votre libération conditionnelle de jour pour les motifs suivants:
1) Départ du Centre correctionnel communautaire sans auto- risation le 21 mars 1981 et arrestation subséquente par la police.
2) Circonstances d'arrestation hautement indicatrices d'un comportement criminel.
On a fait aussi connaître à l'appelant son droit à une révision de la décision par un comité différent de la Commission conformément au paragraphe 22(2) du Règlement, mais «que la décision de ne pas vous réattribuer de réduction de peine est sans appel».
Selon le paragraphe 20(2) de la Loi, la révoca- tion d'une libération conditionnelle emporte auto- matiquement la perte des réductions de peine méritées à moins que la Commission, sous réserve du Règlement, n'exerce le pouvoir que lui confère le paragraphe 20(3) et ne reporte à son crédit, une partie de ces réductions.
En rejetant la demande de certiorari de l'appe- lant, le docte premier juge a déclaré [aux pages 74 à 76]:
L'argument qui veut que les requérants n'ont pas été préve- nus des questions auxquelles s'intéresserait la Commission au cours de l'instruction ne m'a pas impressionné. Les requérants ont été parfaitement informés au cours de l'instruction des raisons de la révision de leur cas par la Commission (voir les paragraphes 4, 5 et 9 des dépositions de Chisholm). L'audience, par sa nature même, est informelle et il n'est pas nécessaire que tout ce dont il sera question soit précisé avant qu'elle ne commence. Je ne doute pas que l'audience a été conduite et les cheminements suivis conformément aux dispositions de la Loi sur la libération conditionnelle de détenus, S.R.C. 1970, c. P-2. Dans le cas Morgan, comme on le notera, les motifs de révocation de la libération conditionnelle de jour ont été dou bles, comme le disent le paragraphe 11 de la déposition de Chisholm et la lettre du 13 mai 1981, précitée, adressée par la Commission à Morgan; dans le cas Sango, il y a eu quatre motifs, ramenés à trois dans la lettre du 14 mai 1981, déjà mentionnée, que lui envoya la Commission.
Quant à l'équité, pour l'un comme pour l'autre requérant, elle a été parfaitement respectée.
L'avocat des requérants soutient aussi qu'en raison de l'adop- tion du nouvel article 20.1 du Règlement, le 9 avril 1981, alors que l'instruction a eu lieu le 5 mai de la même année, les requérants auraient être notifiés de ses nouvelles dispositions et un ajournement accordé, sur demande, pour obtenir l'aide dont parle l'article.
Rien dans l'article 20.1 n'impose ni ne suggère de fournir quelque renseignement que ce soit à un détenu lors d'une instruction relative à une libération conditionnelle; il me semble que s'il avait été voulu que le détenu soit ainsi informé, l'article en aurait disposé. J'estime qu'il est significatif que le paragra- phe 20.1(2) dispose comme suit:
20.1 ...
(2) Il incombe au détenu de voir à ce que la personne visée
au paragraphe (1) soit présente à l'audition.
Vu ce qui précède, je ne suis pas prêt à statuer que c'est à tort que la Commission n'a pas appelé l'attention des requé- rants sur les dispositions de l'article 20.1 ni qu'elle a manqué à son devoir. Comme je l'ai dit auparavant, je ne pense pas qu'il en soit résulté pour les requérants une iniquité quelconque.
En toute déférence, je ne souscris pas à la conclusion du docte premier juge selon laquelle l'équité aurait entièrement été respectée. L'alinéa 20(2)b) du Règlement prescrit qu'un détenu dans sa situation a droit à un préavis d'audience d'au moins quatorze jours. Semblable disposition ne peut avoir pour objet que de donner au détenu une possibilité suffisante de se préparer à ce qui sera débattu à l'audience. Ce qui sera débattu, à mon avis, c'est nécessairement la ou les prétendues violations des conditions de la libération condition- nelle dont la Commission a été saisie et qu'elle doit instruire et prendre en compte lorsqu'elle décide d'annuler la suspension ou de rescinder ou révo- quer la libération conditionnelle. Je ne vois pas comment l'obligation d'agir équitablement peut être exécutée lorsque la seule violation dont l'appe- lant a été informé avant l'audience était d'avoir «Quitté Centre Osborne sans autorisation» alors qu'il a eu à répondre à l'audience de faits autres dont non seulement on ne l'avait nullement informé auparavant, mais encore qu'il n'avait pu étudier ni auxquels il avait pu se préparer à répon- dre. Le cas est, comme je le conçois, aggravé aussi par le fait qu'il ne s'agissait pas seulement d'une simple violation supplémentaire mais bien d'un comportement faisant l'objet d'une accusation cri- minelle toujours retenue contre lui alors que toute réponse qu'il aurait pu fournir, ou toute carence à répondre, pouvait mettre en péril ses droits de s'en défendre. Le fait que les droits de la défense puissent être mis en péril, selon moi, n'est pas en soi un motif d'interdire à la Commission de se saisir du cas ou d'en discuter à l'audience, mais, si cela devait en l'espèce être fait, c'était là, de toute évidence, une occasion, pour que la procédure demeure équitable, d'en donner un préavis. En l'absence de tout préavis, la Commission n'aurait pas attendre que l'appelant fasse opposition; elle aurait lui offrir d'elle-même d'ajourner pour lui permettre d'examiner sa position à cet égard. A mon avis, il était manifestement inéqui- table d'instruire cette question sans préavis ni offre
à l'appelant d'ajourner pour réexamen de sa situa tion. En outre, bien que, d'accord avec le docte premier juge qu'il n'y avait aucune obligation légale pour la Commission, selon l'article 20.1 du Règlement, de faire connaître à l'appelant son droit d'avoir recours à un avocat, je suis néanmoins d'avis que la Commission, sachant la modification récente apportée au Règlement afin de conférer ce droit, a encore aggravé l'iniquité de la situation en n'en informant pas l'appelant.
A mon avis, la demande de certiorari de l'appe- lant aurait être accueillie.
On a, au nom de la Commission, invité la Cour à refuser, dans l'exercice de son pouvoir discrétion- naire, de faire droit au recours vu celui, subsi- diaire, qui était ouvert à l'appelant en vertu de l'article 22 du Règlement, qui prévoit la révision de la décision par d'autres membres de la Commis sion. Une telle révision, toutefois, ne saurait être substituée au certiorari qui casse une décision prononcée en excès de pouvoir; ce n'est pas une procédure fondée sur les mêmes principes. D'ail- leurs, la lettre de la Commission du 13 mai 1981 ajoute que la décision concluant à la perte des réductions de peine est sans appel.
J'accueillerais l'appel, réformerais le jugement de la Division de première instance et, en son lieu et place, ordonnerais de lancer un certiorari et d'évoquer devant cette Cour la décision de la Commission révoquant la libération conditionnelle de l'appelant, ladite décision et toutes ordonnances ou mandats en découlant étant cassés. L'appelant a droit à ses dépens tant dans l'appel qu'en pre- mière instance.
LE JUGE HEALD: Je souscris à cet avis.
LE JUGE RYAN: Je partage aussi cette opinion.
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