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A-40-80
Canadian Clyde Tube Forgings Limited (Appe- lante)
c.
La Reine (Intimée)
Cour d'appel, les juges Urie et Le Dain et le juge suppléant Kelly—Toronto, ler et 3 décembre 1981.
Impôt sur le revenu Calcul du revenu Déduction d'impôt pour fabrication ou transformation Appel du juge- ment par lequel la Division de première instance a rejeté un appel formé contre une nouvelle cotisation d'impôt sur le revenu établie pour l'année d'imposition 1973 L'appelante a inclus dans le calcul de la déduction prévue à l'art. 125.1 à titre de coût en main-d'oeuvre, les paiements effectués à un entrepreneur Des articles semi-ouvrés ont été confiés à l'entrepreneur pour usinage L'entrepreneur fournissait les machines et la main-d'oeuvre La totalité des opérations de l'entrepreneur s'effectuait dans l'usine de l'appelante, aucune barrière artificielle n'existant entre les zones de l'usine occu- pées par celle-ci et celles occupées par l'entrepreneur Le juge de première instance a décidé que la fonction exécutée par l'entrepreneur n'était pas une fonction normalement exécutée par les employés de l'appelante au sens de la définition de «coût en main-d'oeuvre» Il s'agit de déterminer si les paiements effectués à l'entrepreneur relèvent de la définition que donne du «coût en main-d'œuvre» l'art. 5202 des Règle- ments de l'impôt sur le revenu L'appel est rejeté Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, modifiée par S.C. 1970-71-72, c. 63 et par S.C. 1973-74, c. 29, art. 125.1 Règlements de l'impôt sur le revenu, DORS/73-495, art. 5200, 5202.
APPEL. AVOCATS:
Philip F. Vineberg, c.r., pour l'appelante. Wilfred Lefebvre et Ian S. MacGregor pour l'intimée.
PROCUREURS:
Phillips & Vineberg, Montréal, pour l'appe- lante.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE URIE: Appel a été interjeté du juge- ment de la Division de première instance [ [ 1980] 2 C.F. 15] qui avait rejeté le recours de l'appelante contre sa nouvelle cotisation, fixée par le ministre du Revenu national pour l'année d'imposition
1973. Le même recours avait été rejeté par la Commission de révision de l'impôt.
Les deux parties conviennent que le litige porte uniquement sur la question de savoir quelle est la méthode de calcul correcte de la déduction d'impôt pour fabrication et transformation, que l'appelante pourrait revendiquer en vertu de l'article 125.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, modifié par S.C. 1970-71-72, c. 63, article 1 («la Loi») et S.C. 1973-74, c. 29. L'appelante a établi le montant de sa déduction à $34,940. Dans la nouvelle cotisation, ce montant a été réduit à $5,497. Pour savoir lequel de ces deux chiffres est correct, il échet d'examiner si les paiements effec- tués par l'appelante à un entrepreneur, Weram Limited, constituent un «coût en main-d'oeuvre» au sens de la définition de l'article 5202 des Règle- ments de l'impôt sur le revenu, DORS/73-495 («les Règlements»).
Le juge de première instance a fidèlement décrit l'entreprise de l'appelante comme suit la page 16]:
La demanderesse fabrique et transforme de la tuyauterie et des pièces spéciales utilisées dans l'industrie du raffinage. L'en- semble des opérations s'effectue dans l'usine de la demande- resse elle reçoit des raccords et des brides semi-ouvrés qu'elle confie à un entrepreneur pour usinage. Celui-ci les retourne ensuite à la demanderesse pour le finissage (p. ex. la peinture). Ces articles sont ensuite stockés sur place d'où ils seront expédiés aux clients. L'entrepreneur fournit les machines et l'outillage nécessaires, emploie les opérateurs et touche un salaire aux pièces selon le taux convenu. L'outillage est entière- ment situé dans l'usine de la demanderesse et les ouvriers de l'entrepreneur y accomplissent tous leurs travaux. A tout obser- vateur, le processus dans son ensemble, de la réception à l'expédition, apparaîtrait comme unique et intégré. Il n'y a pas de barrière physique artificielle entre les zones de l'usine occu- pées par la demanderesse et celles occupées par l'entrepreneur, ni de ségrégation superflue entre les employés de l'un ou de l'autre. Ce modus operandi a été adopté lorsque l'usine a été établie en 1960 et se poursuit à ce jour.
Le passage applicable de l'article 125.1(1) de la Loi prévoit ce qui suit:
125.1 (1) Une corporation peut déduire de l'impôt payable par ailleurs pour une année d'imposition, en vertu de la pré- sente Partie, un montant égal au total obtenu en additionnant
a) 9% du moins élevé des montants qui représentent
(i) la fraction, si fraction il y a, des bénéfices de fabrica tion et de transformation au Canada réalisés par la corpo ration pour l'année qui est en sus du moins élevé des montants déterminés en vertu des alinéas 125(1)a) à d), à l'égard de la corporation, pour l'année, ..
L'article 5200 et les définitions applicables de l'article 5202 des Règlements portent:
Formule de base
5200. Sous réserve de l'article 5201, il est prescrit par les présentes que, aux fins de l'alinéa 125.1(3)a) de la Loi, les «bénéfices de fabrication et de transformation au Canada» qu'une corporation réalise pour une année d'imposition sont la fraction du revenu rajusté tiré d'une entreprise par la corpora tion pour l'année, que représente
a) le total, pour l'année de son coût en immobilisations de fabrication et de transformation et de son coût en main- d'oeuvre de fabrication et de transformation par rapport
b) au total, pour l'année, de son coût en immobilisations et de son coût en main-d'oeuvre.
Définitions
5202. Dans la présente partie, sauf indication contraire à l'article 5203 ou 5204,
«coût en main-d'oeuvre» d'une corporation pour une année d'imposition signifie un montant égal au total
a) des traitements et salaires payés ou payables pendant l'année à tous les employés de la corporation pour des services rendus pendant l'année, et
b) de toutes les autres sommes dont chacune constitue une somme payée ou payable pendant l'année pour l'exécution pendant l'année, par toute personne autre qu'un employé de la corporation, de fonctions relatives
(i) à la gestion ou à l'administration de la corporation;
(ii) à la recherche scientifique suivant la définition qu'en donne l'article 2900, ou
(iii) à un service ou à une fonction que rendrait ou
accomplirait normalement un employé de la corporation, mais aux fins de la présente définition, les traitements et salaires visés à l'alinéa a) et les autres sommes visées à l'alinéa b) ne comprennent pas la fraction de ces sommes qui
c) était comprise dans le coût brut, pour la corporation, d'un bien (autre qu'un bien fabriqué par la corporation et loué à bail par elle, pendant l'année, à une autre personne) qui est entré dans le calcul du coût en immobilisations de la corpora tion pour l'année, ou
d) était reliée à une entreprise que la corporation exploitait activement hors du Canada;
«coût en main-d'oeuvre de fabrication et de transformation» d'une corporation pour une année d'imposition signifie 100/75 de la fraction du coût en main-d'oeuvre de la corpora tion pour cette année qui correspond à la mesure dans laquelle
a) les salaires et traitements inclus dans le calcul de ce coût ont été payés ou étaient payables à des personnes pour la partie de leur temps elles se livraient directement à des activités admissibles de la corporation pendant l'année, et
b) les autres sommes comprises dans le calcul de ce coût ont été payées ou étaient payables à des personnes pour l'exécu-
tion de fonctions qui seraient directement reliées aux activi- tés admissibles de la corporation pendant l'année, si ces personnes étaient des employés de la corporation,
mais le montant ainsi calculé ne doit pas dépasser le coût en main-d'oeuvre de la corporation pour l'année;
On voit que l'article 125.1 de la Loi permet au contribuable de déduire de son impôt qui eût été exigible, un montant qui n'aurait pas été déduc- tible à d'autres égards. C'est l'article 5200 des Règlements qui établit la formule de calcul des «bénéfices de fabrication et de transformation au Canada». Les parties conviennent que cette for- mule est la suivante:
BF = IF + MF x revenu rajusté de l'entreprise I+M
dans laquelle:
BF: représente les bénéfices de fabrication et de transforma tion au Canada
MF: le coût en main-d'oeuvre de fabrication et de transformation
M: le coût en main-d'oeuvre
I: le coût en immobilisations.
Les parties s'entendent sur la valeur des élé- ments entrant dans la formule applicable, sauf le «coût en main-d'oeuvre» et le «coût en main-d'oeu- vre de fabrication et de transformation». Pour calculer la déduction prévue à l'article 125.1, dans sa déclaration d'impôt de 1973, l'appelante a tenu compte du prix de la main-d'oeuvre payé à Weram Limited au numérateur comme au dénominateur de la formule, alors que le Ministre l'en a écarté, par ce motif que l'usinage n'était pas «normale- ment» effectué (c'est-à-dire [TRADUCTION] «régu- lièrement»), par les employés de l'appelante. Il s'agit donc uniquement de déterminer, en appli- quant les définitions pertinentes aux faits de la cause, laquelle des deux méthodes de calcul est la bonne.
Le juge de première instance s'est prononcé succinctement sur cette question la page 17], comme suit:
Il est normal pour une corporation de mener elle-même à terme toutes ses opérations, de sorte que le service ou la fonction exécutée par l'entrepreneur pour le compte de la demanderesse est un service ou une fonction qui serait normalement exécutée par les employés de cette dernière. Toutefois, il ne s'agit en l'espèce ni d'un service ni d'une fonction normalement exécutée par les employés de la demanderesse. Cette dernière engage normalement l'entrepreneur, plutôt que ses propres employés, pour rendre ce service ou accomplir cette fonction. En fait, ses propres employés n'ont jamais, avant, pendant ou depuis son
année d'imposition 1973, rendu ce service ou accompli cette fonction.
Rien dans les dispositions connexes de la Loi ou des Règle- ments ne m'amène à conclure que les mots pertinents de la définition de l'expression «coût en main-d'oeuvre» puissent être interprétés autrement que dans leur sens courant. L'adverbe «normalement» paraît clairement se rapporter au modus ope- randi du fabricant et transformateur qui réclame l'inclusion d'une dépense spécifique dans son coût en main-d'oeuvre. [C'est moi qui souligne.]
Malgré l'argumentation fort persuasive de l'avo- cat de l'appelante, je souscris à cette conclusion du juge de première instance et aux motifs sur les- quels il s'est fondé. Le sous-alinéa b)(iii) de la définition de «coût en main-d'oeuvre» ne vise pas un service ou une fonction que rendrait ou accom- plirait normalement un employé d'une corporation (c'est-à-dire de toute corporation). C'est l'article défini «la» qui y est employé devant le mot «corpo- ration»; il s'agit donc spécifiquement de la corpora tion réclamant la déduction de l'impôt qui eût été exigible, savoir l'appelante, en l'espèce. Comme elle confie normalement à Weram Limited ses travaux d'usinage, au lieu de les faire faire par ses propres employés, elle ne remplit pas les conditions prévues par le sous-alinéa. Elle ne peut donc tenir compte, à titre de coût en main-d'oeuvre dans le dénominateur de la fraction servant au calcul de son revenu rajusté d'entreprise, du montant qu'elle verse à Weram Limited pour ses services.
Il s'ensuit que, «coût en main-d'oeuvre de fabri cation et de transformation» au sens de l'article 5202 des Règlements signifiant «la fraction du coût en main-d'oeuvre de la corporation> au sens du même Règlement, l'appelante ne saurait tenir compte du paiement fait à Weram Limited à titre de coût en main-d'oeuvre de fabrication et de transformation, dans le numérateur de la formule servant au calcul de la déduction visée à l'article 5200.
Par ces motifs, l'appel est rejeté avec dépens.
* * *
LE JUGE LE DAIN: Je souscris aux motifs
ci-dessus.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT KELLY: Je souscris aux motifs ci-dessus.
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