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T-3699-81
Sharp Kabushiki Kaisha, faisant des affaires sous la dénomination Sharp Corporation (Appelante)
c.
Le registraire des marques de commerce et Dahl- berg Electronics Inc. (Intimés)
Division de première instance, le juge Mahoney— Ottawa, 3 et 10 décembre 1981.
Marques de commerce Appel de certaines décisions du registraire déclarant présumée abandonnée une instance en opposition et faisant droit à la demande d'enregistrement de la marque de commerce de l'intimée Dahlberg Requête de l'appelante en prorogation du délai de dépôt de pièces reçues dans les délais mais égarées et non considérées par le regis- traire Présomption d'abandon de l'opposition conformé- ment à l'art. 44 du Règlement sur les marques de commerce prononcée par le registraire qui a fait droit à la demande de Dahlberg sans fournir à l'appelante la possibilité de se faire entendre Occasion d'administrer des preuves et de se faire entendre fournie à un opposant par l'art. 37(7) de la Loi Autorisation du registraire selon l'art. 37(8) de prendre une décision «après avoir entendu les parties, si demande lui en est faite» Décisions du registraire bien ou mal fondées L'appel est accueilli Article 44 du Règlement invalide Loi sur les marques de commerce, S.R.C. 1970, c. T-10, art. 37(6),(7),(8), 38(1) Règlement sur les marques de com merce, C.R.C. 1978, Vol. XVIII, c. 1559, art. 44.
APPEL. AVOCATS:
David J. French pour l'appelante.
Donald Kubesh pour l'intimé le registraire des
marques de commerce.
Personne n'a comparu au nom de l'intimée
Dahlberg Electronics Inc.
PROCUREURS:
David J. French, Ottawa, pour l'appelante. Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé le registraire des marques de com merce.
Barrigar & Oyen, Ottawa, pour l'intimée Dahlberg Electronics Inc.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY: Cette espèce est l'appel qui a été formé de certaines décisions du regis- traire des marques de commerce déclarant présu- mée abandonnée l'instance en opposition, faisant
droit à la demande d'enregistrement de la marque de commerce de l'intimée Dahlberg et refusant de réformer cette décision. L'appel découle d'une requête de l'appelante en prorogation du délai de dépôt de pièces effectivement reçues par le regis- traire dans les délais mais égarées et non prises en compte par ce dernier. Dahlberg n'a pas comparu dans l'appel.
Après avoir obtenu plusieurs prorogations de délai, l'appelante a déposé sa déclaration d'opposi- tion le 25 juin 1980. La contre-déclaration de Dahlberg a été déposée le 22 septembre après que lui ont été allouées plusieurs prorogations. L'appe- lante obtint alors elle aussi une série de proroga- tions pour déposer les pièces justificatives de son opposition. La dernière arrivait à terme le 22 avril 1981.
Le 8 avril, l'appelante avait demandé par lettre, sur le fondement de l'article 46(1) de la Loi sur les marques de commerce', une dernière prorogation, jusqu'au 22 juillet. La lettre fut dûment reçue par le registraire le 8 avril mais elle fut égarée et ne fut retrouvée que le 23 juin. Entre-temps, le regis- traire avait instruit la demande le 2 juin. L'article 44 du Règlement sur les marques de commercez dispose:
44. Si l'opposant omet de produire et de signifier la preuve ou la déclaration que prévoit l'article 43, il est réputé avoir aban- donné son opposition; mais ...
Le reste est sans importance. Le 3 juin, le regis- traire, présumant abandon de l'opposition, fit droit à la demande de Dahlberg sans fournir à l'appe- lante la possibilité de se faire entendre. On ne trouve dans la Loi aucune autorisation de prendre un règlement disposant de présumer abandonnée une opposition.
On découvrira l'économie de la Loi, une fois produite et remise au requérant une déclaration d'opposition, aux paragraphes (6), (7) et (8) de l'article 37 et au paragraphe 38(1).
37....
(6) Le requérant peut, dans le délai prescrit après qu'une déclaration d'opposition lui a été envoyée, produire une contre- déclaration au bureau du registraire et en signifier une copie à l'opposant de la manière prescrite. S'il ne produit ni signifie aucune contre-déclaration dans le délai prescrit, il est censé avoir abandonné sa demande.
' S.R.C. 1970, c. T-10.
2 C.R.C. 1978, Vol. XVIII, c. 1559.
(7) II doit être fourni de la manière prescrite, à l'opposant et au requérant, l'occasion de soumettre la preuve sur laquelle ils s'appuient et de se faire entendre par le registraire, s'ils le désirent.
(8) Après avoir entendu les parties, si demande lui en est faite, et examiné la preuve, le registraire doit repousser la demande ou rejeter l'opposition et notifier aux parties sa déci- sion ainsi que les motifs sur lesquels il s'appuie.
38. (1) Lorsqu'une demande n'a pas été l'objet d'une opposi tion et que le délai prévu pour la production d'une déclaration d'opposition est expiré, ou lorsqu'une demande a fait l'objet d'une opposition et que celle-ci a été définitivement décidée en faveur du requérant, le registraire doit aussitôt l'admettre.
Le paragraphe 37(7) fournit à un opposant, s'il le désire, l'occasion d'administrer des preuves et de se faire entendre. La possibilité de se faire entendre ne dépend pas de l'administration par lui de preu- ves. Le paragraphe 37(8) autorise le registraire soit à repousser la demande, soit à rejeter l'opposi- tion, seulement «après avoir entendu les parties, si demande lui en est faite».
La disposition de l'article 44 du Règlement qui présume une opposition abandonnée constitue un excès de pouvoir dans la mesure elle prive un opposant du droit de se faire entendre que lui accorde la Loi. La décision faisant droit à la demande est donc nulle dans la mesure l'appe- lante s'est vu refuser le droit de se faire entendre que lui attribue la Loi.
JUGEMENT
IL EST ORDONNÉ ET DÉCLARÉ QUE:
1. Les décisions du registraire des marques de commerce des 2 et 3 juin 1981 présumant aban- donnée l'opposition et faisant droit à la demande sont nulles.
2. La requête de l'appelante en prorogation addi- tionnelle de délai est renvoyée au registraire pour qu'il l'instruise, de même que toute autre demande qui pourrait être fondée sur le délai couru depuis ces décisions.
3. L'instance en opposition reprendra étant entendu que l'appelante a le droit d'administrer ses preuves dans le délai que lui accordera éventuelle- ment le registraire lorsqu'il statuera sur les requê- tes mentionnées au paragraphe 2 ci-dessus.
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