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A-532-80
La Reine (Appelante) (Défenderesse)
c.
Jean-Paul Gagnon (Intimé) (Demandeur)
Cour d'appel, les juges Pratte et Le Dain et le juge suppléant Lalande—Montréal, 2 octobre 1981.
Impôt sur le revenu Calcul du revenu Déductions
Appel de la décision du premier juge voulant que l'intimé puisse déduire les paiements mensuels versés à son ancienne
épouse Disposition du jugement irrévocable selon laquelle les versements représentaient le paiement de deux hypothè- ques, capital et intérêts, et des taxes grevant un immeuble Il échet d'examiner si ces versements étaient en paiement d'une pension alimentaire aux termes de l'al. 60b) de la Loi de l'impôt sur le revenu Appel accueilli L'ancienne épouse n'avait droit à ces versements que si elle payait les sommes
dues en vertu des actes d'hypothèque Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, c. 63, art. 60b).
Arrêt approuvé: R. c. Pascoe [1976] 1 C.F. 372.
APPEL.
AVOCATS:
Wilfrid Lefebvre et Jacques Côté pour l'appe- lante (défenderesse).
Claude A. Blanchard pour l'intimé (deman- deur).
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour l'appelante (défenderesse).
Sirois, Blanchard, Beaudet, Watters & Lamontagne, Québec, pour l'intimé (deman-
deur).
Voici les motifs du jugement prononcés en fran- çais à l'audience par
LE JUGE PRATTE: Cet appel est dirigé contre un jugement de la Division de première instance qui a décidé que l'intimé pouvait, en calculant son revenu imposable pour les années d'imposition 1974, 1975 et 1976, déduire des montants de $360 par mois qu'il avait versés à son ancienne épouse comme l'y obligeait un jugement irrévocable de
divorce.
' [1981] 1 C.F. 249.
Ce jugement de divorce a été prononcé le 29 mars 1972. Confirmant une entente intervenue entre les parties, il prévoyait que l'épouse accep- tait, en paiement de sa part de communauté,
un immeuble portant le no. civique 2620 de la rue La Picar- dière, ville de Laval, district de Montréal, et qui constitue sa résidence actuelle.
Ce jugement ordonnait de plus aux parties de se conformer à l'entente intervenue entre elles qui comprenait les clauses suivantes que reproduit le jugement:
A titre de pension alimentaire, tant pour elle-même que pour les enfants communs, le requérant consent à payer, et l'intimée accepte de recevoir:
1°. Un montant mensuel, payable d'avance le 1" jour de chaque mois, à la résidence de l'intimée, fixé à $300.00 Can.
2°. A l'acquit de l'intimée, le requérant paiera les mensualités échues, ou à échoir, relativement à l'immeuble qui devient la propriété de l'intimée, l'obligation, relative auxdites mensuali- tés étant plus amplement décrite au contrat; le montant desdi- tes mensualités est actuellement de $360.00, et peut varier tel que prévu audit contrat, mais représente le remboursement, en capital et intérêts, des deux hypothèques y décrites, ainsi que le remboursement, par mensualités, des charges municipales et scolaires affectées audit immeuble, payables le premier de chaque mois, directement à l'intimée et ce à partir du Zef juin 1971;
Les montants de $360 dont le jugement attaqué a autorisé la déduction ont été payés par l'intimé aux termes du paragraphe du passage précité du jugement de divorce.
Suivant l'alinéa 60b) de la Loi 2 , l'intimé pouvait déduire ces sommes dans le calcul de son revenu s'il les avait payées à son épouse «à titre de pension alimentaire ou autre allocation périodique».
Il me semble clair que les montants en cause n'ont pas été payés à titre de «pension alimentaire» au sens cette expression est utilisée dans l'alinéa 60b). En effet, dans cette disposition, cette expres sion a le sens restreint du terme anglais «alimony» qui désigne seulement la pension qu'un conjoint doit verser à son conjoint pendant la durée du mariage. La seule question à résoudre est donc celle de savoir si le paiement des sommes de $360 constituait le versement d'une allocation.
2 Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, modifiée par S.C. 1970-71-72, c. 63, art. 1.
Dans l'arrêt La Reine c. Pascoe,' la Cour a donné la définition suivante du terme «allocation» la page 374]:
Selon nous, une allocation est une somme d'argent limitée et déterminée à l'avance, versée afin de permettre à celui qui la reçoit de faire face à certains types de dépenses; sa quotité est établie à l'avance et celui qui la touche en a la libre disposition, sans comptes à rendre à personne. Un versement effectué pour satisfaire à une obligation d'indemniser ou de rembourser quel- qu'un ou de le défrayer de dépenses réellement engagées n'est pas une allocation; il ne s'agit pas en effet d'une somme susceptible d'être affectée par celui qui la touche, à sa discré- tion, certains types de dépenses.
En l'espèce, le premier juge a jugé que le verse- ment des sommes dont il s'agit constituait le paie- ment d'une allocation au sens de l'arrêt Pascoe, parce qu'il a considéré que l'ancienne épouse de l'intimé en avait la libre disposition sans aucune obligation de rendre compte. Je ne puis partager cet avis. A mon sens, l'ancienne épouse de l'intimé n'avait droit à ces versements de $360 que si elle payait les sommes dues en vertu des actes d'obliga- tions hypothécaires enregistrés contre sa propriété. Il ne s'agissait pas, à cause de cela, d'une alloca tion au sens de l'arrêt Pascoe.
Pour ces motifs, je ferais droit à l'appel, je casserais le jugement de la Division de première instance et je rejetterais l'action de l'intimé. Sui- vant la suggestion faite par le procureur de l'appe- lante, je n'accorderais aucuns frais ni en première instance, ni en appel.
* * *
LE JUGE LE DAIN y a souscrit.
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LE JUGE SUPPLÉANT LALANDE y a souscrit.
3 [1976] I C.F. 372.
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