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A-583-76
André Desjardins (demandeur) (appelant) c.
Claude Bouchard, Jean-Paul Gilbert, Commission nationale des libérations conditionnelles, et procu- reur général du Canada (intimés)
Cour d'appel, juges Pratte et Le Dain, juge sup pléant Lalande—Montréal, 19 janvier; Ottawa, 30 avril 1982.
Libération conditionnelle Révocation du pardon La Commission nationale des libérations conditionnelles était-elle impartiale lorsqu'elle a recommandé au gouverneur en conseil de révoquer le pardon? Ce dernier a révoqué le pardon sans donner à l'appelant l'occasion de se faire entendre Le gouverneur en conseil a l'obligation de donner à l'appelant l'occasion de se faire entendre et de lui notifier les principaux faits reprochés avant de révoquer le pardon en vertu de l'art. 7 de la Loi sur le casier judiciaire Appel accueilli Loi sur le casier judiciaire, S.R.C. 1970 (1e' Supp.), chap. 12, art. 4, 5, 7, 9 Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, chap. N-17, art. 64(1).
Contrôle judiciaire Recours en equity Jugements déclaratoires Appel d'un jugement de la Division de pre- mière instance qui a refusé de déclarer que la Commission nationale des libérations conditionnelles n'avait pas compé- tence pour recommander au solliciteur général la révocation du pardon Justice naturelle et obligation d'agir équitable- ment Le gouverneur en conseil ne peut révoquer un pardon en vertu de l'art. 7 de la Loi sur le casier judiciaire sans notifier l'intéressé des principaux faits reprochés et sans lui donner l'occasion de se faire entendre Loi sur le casier judiciaire, S.R.C. 1970 (1 e ' Supp.), chap. 12, art. 4, 5, 7, 9 Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, chap. N-17, art. 64(1).
À la suite d'une enquête au cours de laquelle la Commission a refusé de divulguer à l'appelant les griefs ou la preuve retenus contre lui, ce dernier, à son tour, refusant de faire des représen- tations, la Commission nationale des libérations conditionnelles a statué qu'il n'était plus de bonne conduite et a recommandé au solliciteur général la révocation de son pardon. Sur avis conforme du solliciteur général et conformément à l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire, le gouverneur en conseil a révoqué le pardon de l'appelant.
Le juge de première instance saisi de l'action intentée par l'appelant en vue d'attaquer ladite révocation a refusé de déclarer nuls les actes, décisions et recommandations de la Commission puisqu'ils étaient dénués de tout effet juridique. Il a de plus refusé de déclarer nul le décret révoquant le pardon parce que, selon lui, le gouverneur en conseil avait respecté les exigences de la justice naturelle. Le premier juge a pris pour acquis que le pardon avait été révoqué en raison des allégations contenues dans le rapport Cliche, que l'appelant connaissait ces allégations lors de sa comparution devant la Commission et qu'il avait eu, à cette occasion, l'occasion de les réfuter.
Arrêt: l'appel est accueilli.
Le juge Pratte: Le premier juge a eu raison de refuser de prononcer les déclarations que l'appelant sollicitait relativement à la Commission et à deux de ses membres puisqu'ils n'ont aucun rôle à jouer dans la révocation d'un pardon. Quant au décret, il n'est pas vicié par les actes de la Commission ou de ses membres puisqu'il n'y a aucune raison de mettre en doute leur impartialité. Le premier juge n'aurait pas prendre pour acquis que l'appelant connaissait les allégations retenues contre lui. Le pouvoir de révoquer un pardon n'est pas entièrement discrétionnaire puisqu'il ne peut être exercé que dans les cir- constances que décrit l'article 7. En outre, la personne concer- née se voit privée de droits. Le gouverneur en conseil a donc l'obligation de donner à l'intéressé l'occasion de se faire enten- dre avant de révoquer son pardon. Le pardon de l'appelant a été révoqué sans qu'on lui ait donné l'occasion de se faire entendre. Cela ne signifie pas toutefois que le gouverneur en conseil soit tenu d'entendre lui-même l'intéressé ni que la personne concer- née ait le droit de connaître plus que les faits qui ont été portés à la connaissance du gouverneur en conseil ou de ses conseillers et qui justifieraient la révocation du pardon.
Le juge Le Dain: Le dossier ne permet pas de conclure que l'appelant connaissait les faits précis qui, d'après la Commis sion et le solliciteur général, démontraient qu'il avait «cessé de se bien conduire». Le pouvoir de révoquer un pardon a sa source dans la loi et n'est nullement fondé sur la prérogative royale. Malgré sa manière de fonctionner et la règle du secret qui entoure ses délibérations, le Cabinet doit néanmoins, selon la loi, respecter l'exigence de l'équité dans la procédure lorsqu'il révoque un pardon. Il vaut mieux qu'il y ait quelque chose qui ressemble un tant soit peu à l'équité dans la procédure plutôt que l'absence totale de cette équité. Le gouverneur en conseil jouit, de toute évidence, du pouvoir inhérent ou tacite de déléguer sa fonction d'audition.
Le juge suppléant Lalande: Le pouvoir quasi judiciaire que la Loi accorde au gouverneur en conseil doit être exercé confor- mément aux exigences de la justice naturelle. Lorsque les membres de la Commission ont refusé de divulguer à l'appelant en quoi il leur paraissait qu'il avait cessé de se bien conduire, ce refus violait alors une règle élémentaire de justice et viciait le décret.
JURISPRUDENCE
DISTINCTION FAITE AVEC:
Le procureur général du Canada c. Inuit Tapirisat of Canada et autre, [1980] 2 R.C.S. 735.
DÉCISIONS CITÉES:
L'Alliance des professeurs catholiques de Montreal v. The Labour Relations Board of Quebec, [1953] 2 R.C.S. 140; Nicholson c. Haldimand-Norfolk Regional Board of Commissioners of Police, [ 1979] 1 R.C.S. 311.
AVOCATS:
M. Proulx pour le demandeur (appelant). G. Côté pour les intimés.
PROCUREURS:
Proulx, Barot & Masson, Montréal, pour le demandeur (appelant).
Le sous-procureur général du Canada pour les intimés.
Voici les motifs du jugement rendus en français par
LE JUGE PRATTE: L'appelant attaque le juge- ment de la Division de première instance' qui a rejeté avec dépens l'action qu'il a intentée dans le but de faire constater la nullité d'un décret du gouverneur en conseil. Par ce décret, pris le 9 octobre 1975 en vertu de l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire (S.R.C. 1970 (l er Supp.), chap. 12), le gouverneur en conseil révoquait le pardon qu'il avait octroyé à l'appelant le 8 mai 1973.
Pour comprendre cette affaire, il faut avoir pré- sentes à l'esprit les dispositions principales de la Loi sur le casier judiciaire. Suivant cette Loi, une personne qui a été trouvée coupable d'une infrac tion en vertu d'une loi du Parlement du Canada peut, après que s'est écoulé un certain temps depuis qu'elle a purgé sa peine, demander qu'on lui accorde un pardon. Cette demande doit être adres- sée au solliciteur général du Canada qui la trans- met à la Commission nationale des libérations conditionnelles pour qu'elle enquête sur la con- duite du requérant depuis sa condamnation. Son enquête terminée, la Commission doit faire part de ses résultats au solliciteur général et lui communi- quer sa recommandation sur l'opportunité d'oc- troyer le pardon. La Commission, cependant, ne peut transmettre au Ministre une recommandation défavorable à l'octroi du pardon sans avoir préala- blement prévenu le requérant et sans lui avoir fourni l'occasion de présenter à la Commission les observations qu'il juge pertinentes. Si la Commis sion recommande que le pardon soit accordé, sa recommandation doit être transmise au gouverneur en conseil qui peut, à sa discrétion, accorder ou refuser le pardon. Si le pardon est accordé il a, aussi longtemps qu'il n'est pas révoqué conformé- ment à l'article 7, les effets que précise l'article 5. Voici le texte de ces deux articles:
1 [1976] 2 C.F. 539 [lre inst.].
5. L'octroi d'un pardon
a) est la preuve du fait que la Commission, après avoir effectué une enquête suffisante, est convaincue que le requé- rant a eu une bonne conduite et que la condamnation à l'égard de laquelle le pardon est accordé ne devrait plus nuire à sa réputation; et
b) à moins que le pardon ne soit révoqué par la suite, annule la condamnation pour laquelle il est accordé et, sans restrein- dre la portée générale de ce qui précède, élimine toute déchéance que cette condamnation entraîne, pour la personne ainsi déclarée coupable, en vertu de toute loi du Parlement du Canada ou d'un règlement établi sous son régime.
7. Un pardon peut être révoqué par le gouverneur en conseil
a) si la personne à laquelle il est accordé est par la suite déclarée coupable d'une nouvelle infraction en vertu d'une loi du Parlement du Canada ou d'un règlement qui en découle; ou
b) sur preuve établissant, à la satisfaction du gouverneur en conseil,
(i) que la personne à laquelle il a été accordé a cessé de se bien conduire, ou
(ii) que cette personne a sciemment fait une déclaration inexacte ou trompeuse relativement à sa demande de pardon, ou a sciemment dissimulé un détail important relativement à cette demande.
J'en viens aux faits qui ont donné naissance au litige. Ils ne sont pas contestés et ressortent de l'«Exposé conjoint des faits» que les avocats des parties ont déposé au dossier de la Division de première instance et de la preuve documentaire qu'ils ont produite.
Le texte de cet «Exposé conjoint des faits» est le suivant:
Les parties à la présente instance, par l'intermédiaire de leurs procureurs soussignés, sont d'accord pour que la présente cause soit décidée sur la base des faits suivants lesquels sont admis de part et d'autre ainsi que des pièces littérales à être versées au dossier:
1. En date du 8 mai 1973, le demandeur s'est vu octroyer par le Gouverneur en conseil un pardon, conformément aux disposi tions de la Loi sur le casier judiciaire, S.R.C. 1970, le' supplé- ment, chapitre 12.
2. Par suite de renseignements parvenus à sa connaissance et conformément au désir exprimé par le Solliciteur Général du Canada, la Commission Nationale des libérations conditionnel- les, au cours de l'automne 1974, a entrepris une enquête concernant la conduite du demandeur, et ce, en vue de détermi- ner s'il serait approprié pour elle de recommander que ledit pardon soit révoqué.
3. Par lettre en date du 8 mai 1975, le Ministre de la Justice de la Province de Québec a demandé au Solliciteur Général du Canada que le pardon accordé au demandeur soit révoqué par le Gouverneur en conseil, conformément aux dispositions de l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire.
4. Dans ladite lettre du Ministre de la Justice de la Province de Québec, il est fait état du rapport de la Commission d'enquête
sur l'exercice de la liberté syndicale dans l'industrie de la construction. Il est admis par les parties qu'il s'agit d'une commission d'enquête créée par le Gouvernement de la Pro vince de Québec et dont le président était le juge Robert Cliche, laquelle commission a remis son rapport au Gouvernement du Québec en date du 2 mai 1975, de même qu'il est admis que l'une des recommandations de ladite commission était à l'effet que la loi soit modifiée de façon à exclure des fonctions syndicales toute personne coupable de certains crimes.
5. Par lettre en date du 21 mai 1975, portant la signature de monsieur Pierre L. Dupuis de la division de la clémence et du casier judiciaire, le demandeur était invité à comparaître devant deux membres de la Commission à savoir messieurs Claude Bouchard et Jean-Paul Gilbert, dans le but de lui donner l'occasion de faire les représentations qu'il jugerait opportunes à l'encontre de la recommandation que la Commis sion se proposait de faire au Solliciteur Général du Canada, à savoir la révocation de son pardon.
6. Le demandeur a comparu le 2 juin 1975 devant les commis- saires Bouchard et Gilbert.
7. Dès le début de l'audition, le procureur du demandeur, en rapport avec l'avis de convocation, souleva l'absence de juridic- tion des commissaires ou de la Commission Nationale des Libérations Conditionnelles quant à la révocation du pardon octroyé au demandeur le 8 mai 1973 en vertu de la Loi sur le casier judiciaire, en ce que:-
a) la loi sur le casier judiciaire ne confère aucune juridiction à la Commission ou aux commissaires quant à la révocation d'un pardon;
b) la commission ou les commissaires n'ont aucune juridic- tion pour convoquer le demandeur, tenir une enquête et faire une recommandation au Solliciteur Général du Canada.
8. En réponse à cette objection, les commissaires ont statué que la Loi sur le casier judiciaire leur conférait quant à la révoca- tion d'un pardon, une juridiction analogue à celle que la loi leur attribue quant à l'octroi d'un pardon.
9. Au cours de l'audition, les commissaires de la Commission n'ont pas établi ou mentionné qu'ils étaient autorisés à tenir une telle enquête par le Gouverneur Général en conseil ou par toute autre personne.
10. Sous réserve de son objection quant à la juridiction, le procureur du demandeur plaida que la procédure suivie par les commissaires faisait naître une appréhension réelle de partia- lité, puisque la commission aurait déjà décidé de recommander au Solliciteur Général du Canada, la révocation du pardon avant même d'avoir convoqué et entendu le demandeur.
11. Les commissaires ont rejeté cette objection et ont invité le demandeur à faire ses représentations conformément à l'avis de convocation.
12. Avant de faire ses représentations, le procureur du deman- deur demanda aux commissaires de lui indiquer la nature des griefs ou la preuve de mauvaise conduite retenus contre le demandeur de façon à pouvoir faire des représentations perti- nentes et de nature à refuter les griefs ou la preuve de mauvaise conduite.
13. Les commissaires ont refusé catégoriquement de divulguer au demandeur les griefs ou la preuve retenus contre lui, se contentant d'affirmer que leur recommandation s'appuyait sur le sous-paragraphe (1) [sic] du paragraphe (b) de l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire.
14. De plus, les commissaires firent valoir qu'il incombait au requérant de démontrer pourquoi le pardon ne lui serait pas révoqué.
15. Devant l'attitude des commissaires, le demandeur refusa toute invitation à se justifier en ajoutant qu'il ignorait les motifs de révocation de son pardon et les motifs de la recom- mandation des commissaires ou de la Commission.
16. L'audition fut ajournée pour permettre au demandeur de soumettre des notes écrites sur les objections en droit et sur la procédure, lesquelles furent produites.
17. Le demandeur fut convoqué de nouveau le 15 août 1975; le procureur du demandeur réitéra sa demande quant aux griefs ou à la preuve retenus contre le demandeur.
18. Les commissaires exprimèrent le même refus et le deman- deur refusa de faire des représentations pour les mêmes motifs.
19. Les Commissaires ont alors indiqué au demandeur qu'ils transmettraient d'ici quatre à six semaines leur recommanda- tion au Solliciteur Général du Canada.
20. A la suite des faits ci-haut mentionnés, la Commission des Libérations Conditionnelles a soumis au Solliciteur Général du Canada un rapport recommandant que le pardon octroyé au demandeur soit révoqué.
21. Ainsi qu'il appert de la pièce D-1, le Solliciteur Général du Canada a, par la suite, recommandé au Gouverneur en conseil que le pardon octroyé au demandeur soit effectivement révoqué conformément à l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire.
22. Par arrêté ministériel en date du 9 octobre 1975, le Gouverneur en conseil a effectivement révoqué le pardon octroyé au demandeur, au motif que ce dernier avait cessé de bien se conduire, le tout conformément aux dispositions de l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire.
À ce récit des faits, il suffit d'ajouter que l'avo- cat de l'appelant a été informé de la décision du gouverneur en conseil de révoquer le pardon de son client par une lettre du greffier de la Commission nationale des libérations conditionnelles dont l'es- sentiel se lit comme suit:
Vous êtes prié d'informer votre client que, suite à une récente étude de son dossier, la Commission est demeurée moralement convaincue que M. Desjardins fraye avec des gens associés de très près à la pègre et que ses relations avec ces personnes sont de nature telle qu'elles incitent à croire qu'il s'agit de rencon- tres plus qu'accidentelles. La Commission ayant donc raison de croire de façon très sérieuse que M. Desjardins n'est plus de bonne conduite a recommandé au Gouverneur Général en Conseil que le pardon qui avait été accordé à M. Desjardins le 3 avril 1973, soit révoqué.
Le 9 octobre 1975, sur avis conforme du Solliciteur Général et en vertu de l'article 7 de la loi sur le casier judiciaire, son Excellence le Gouverneur Général en Conseil révoquait le pardon antérieurement accordé à M. Desjardins.
Quelques semaines plus tard, l'appelant intentait l'action qu'a rejetée le - premier juge. Dans sa déclaration, il s'en prenait d'abord aux intimés Bouchard et Gilbert et à la Commission nationale
des libérations conditionnelles et alléguait qu'ils n'avaient aucune compétence en l'espèce, qu'ils avaient agi d'une façon qui permettait de mettre en doute leur impartialité, qu'ils avaient omis, enfin, de respecter les exigences de la justice natu- relle et, en particulier, la règle «audi alteram partem»; l'appelant s'en prenait aussi au gouver- neur en conseil alléguant qu'il avait agi sous la dictée d'un tiers, sans exercer de jugement indé- pendant, et qu'il avait, lui aussi, manqué aux exigences de la justice naturelle et de l'équité. L'appelant concluait en demandant à la Cour, en premier lieu, de déclarer que la Commission natio- nale des libérations conditionnelles ainsi que les intimés Bouchard et Gilbert n'avaient aucune compétence en l'espèce et que leurs agissements, décisions et recommandations étaient nuls, et, en second lieu, de déclarer nul le décret du 9 octobre 1975 révoquant le pardon de l'appelant.
Il me semble clair que le premier juge a eu raison de refuser de prononcer les déclarations que l'appelant_ sollicitait relativement à la Commission nationale des libérations conditionnelles et aux intimés Bouchard et Gilbert. Il est évident que, suivant la Loi, la Commission et ses membres n'ont aucun rôle à jouer dans la révocation d'un pardon et que, en conséquence, la recommandation qu'ils ont faite et les décisions qu'ils ont pu prendre en cette affaire étaient dénuées de tout effet juridi- que. Cependant, l'appelant n'a aucun intérêt à ce que la Cour prononce une déclaration à cet effet. Son seul intérêt est de faire statuer sur la validité de la révocation du pardon. Cette révocation ayant été prononcée par le décret du gouverneur en conseil du 9 octobre 1975, le seul véritable problè- me que soulève cette affaire est celui de la validité de ce décret.
Le procureur de l'appelant a soutenu que le décret du 9 octobre 1975 était nul pour deux motifs: d'abord, parce qu'il avait été pris sur la recommandation de personnes dont on pouvait mettre en doute l'impartialité et, ensuite, parce qu'il avait été pris sans que soient respectées les exigences de la justice naturelle et de l'équité.
L'avocat de l'appelant n'a pas prétendu que le gouverneur en conseil ne pouvait agir, en l'espèce, sur la recommandation de tierces personnes. Ce qu'il a affirmé, c'est que ces tierces personnes, en l'occurrence les intimés Bouchard et Gilbert et la
Commission nationale des libérations conditionnel- les, avaient agi d'une façon qui laissait planer des doutes sur leur impartialité et que cette façon d'agir avait pour effet de vicier la décision du gouverneur en conseil. À mon avis, le premier juge a eu raison de rejeter cette prétention. Même si je prends pour acquis que la décision attaquée ait pu être viciée du seul fait qu'elle avait été prise sur la recommandation de personnes non impartiales, je suis d'opinion, comme le premier juge, qu'il n'y a aucune raison de mettre en doute l'impartialité de la Commission et des intimés Bouchard et Gilbert. La lettre qu'ils ont adressée à l'appelant le 21 mai 1975 aurait peut-être pu être rédigée différem- ment, mais, contrairement à ce qu'a soutenu l'avo- cat de l'appelant, je ne vois rien dans les termes de cette lettre qui autorise à douter de l'impartialité de la Commission ou de ses membres.
Le second et principal argument du procureur de l'appelant est que le gouverneur en conseil ne pouvait valablement révoquer le pardon qu'il avait accordé à l'appelant sans lui avoir préalablement donné une chance de se faire entendre. En d'autres mots, l'avocat de l'appelant a soutenu que le pou- voir de révocation accordé au gouverneur en con- seil par l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire ne pouvait être exercé valablement s'il n'était exercé conformément aux exigences de la justice naturelle et de l'équité, ce qui, suivant lui, n'avait pas eu lieu en l'espèce. Si le premier juge a rejeté ce second argument de l'appelant, ce n'est pas parce qu'il a jugé que le gouverneur en conseil n'était pas tenu, en exerçant son pouvoir de révo- quer un pardon, de se conformer aux exigences de la justice naturelle et de l'équité; c'est plutôt parce qu'il a conclu que, en l'espèce, ces exigences avaient été respectées. Pour en arriver à cette conclusion, le juge a pris pour acquis que le pardon dont avait bénéficié l'appelant avait été révoqué en raison des allégations contenues dans le rapport Cliche, que l'appelant connaissait ces allégations lorsqu'il avait comparu devant les intimés Bou- chard et Gilbert et qu'il avait eu, à cette occasion, l'occasion de les rejeter. Je ne puis partager cette opinion. Tout ce que le dossier révèle de la décision du gouverneur en conseil c'est qu'elle a été prise «sur avis conforme du solliciteur général» qui, dans la recommandation écrite qu'il avait soumise au Cabinet affirmait que «certains renseignements confidentiels» avaient permis à la Commission
d'établir que l'appelant n'était plus de bonne con- duite parce qu'il frayait avec des gens associés de très près à la pègre. Le rapport Cliche n'est pas au dossier et nous n'en connaissons pas le contenu. Dans ces circonstances, je ne peux présumer, comme l'a fait le premier juge, que le pardon qui avait été octroyé à l'appelant a été révoqué en raison des allégations contenues dans ce rapport; je ne peux conclure, non plus, que l'appelant ait eu réellement l'occasion de se faire entendre avant la révocation de son pardon. Si l'appelant avait le droit d'être entendu, il avait également le droit d'être préalablement informé des faits sur lesquels on songeait à s'appuyer pour exercer le pouvoir de révocation puisque, sans cette information, il ne pouvait se faire entendre de façon utile. En l'es- pèce, l'appelant n'a jamais été informé des motifs pour lesquels on songeait à révoquer son pardon. Pour cette raison, il me semble que, en l'espèce, le pardon a été révoqué sans que l'appelant ait eu l'occasion de se faire entendre.
Il faut donc savoir, pour décider ce litige, si le gouverneur en conseil était tenu, avant de révoquer le pardon qu'il avait accordé à l'appelant, de se conformer à la règle «audi alteram partem» ou, de façon plus générale, aux exigences de la justice naturelle ou de l'équité. Dans l'affirmative, l'appel devra réussir; autrement, il devra être rejeté.
Lorsque le législateur confère à une autorité le pouvoir de prononcer des décisions affectant les droits des citoyens sans préciser la façon dont ce pouvoir doit être exercé, c'est par voie d'interpréta- tion qu'il faut déterminer si l'autorité concernée est tenue, dans l'exercice de ce pouvoir, de respec- ter les exigences de la justice naturelle ou de l'équité. Ainsi, c'est par voie d'interprétation du texte législatif applicable, en ayant égard à la nature du pouvoir qu'il conférait, à la nature de l'organisme à qui ce pouvoir était attribué, et, aussi, aux conséquences de l'exercice de ce pou- voir, que la Cour suprême du Canada a décidé que le pouvoir que le paragraphe 64(1) de la Loi nationale sur les transports [S.R.C. 1970, chap. N-17] confère au gouverneur en conseil est un pouvoir de nature législative dont l'exercice n'est pas soumis aux exigences de la justice naturelle ou de l'équité 2 .
2 Le procureur général du Canada c. Inuit Tapirisat of Canada et autre, [1980] 2 R.C.S. 735.
Le pouvoir que confère au gouverneur en conseil l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire ne ressemble pas au pouvoir que lui attribue le para- graphe 64(1) de la Loi nationale sur les trans ports. C'est un pouvoir dont l'exercice affecte un individu, plutôt que la collectivité, en le privant des droits qui lui résulteraient du pardon. C'est un pouvoir qui n'est pas entièrement discrétionnaire puisqu'il ne peut être exercé que dans les circons- tances que décrit l'article 7. Ce n'est pas, non plus, un pouvoir de nature législative qui doive être exercé principalement à la lumière de considéra- tions sociales et politiques. En revanche, c'est un pouvoir qui, comme celui qu'avait à considérer la Cour suprême dans l'affaire Inuit Tapirisat, est attribué au gouverneur en conseil sans que la loi précise la façon dont il doit être exercé.
La Loi sur le casier judiciaire n'indique pas comment le pouvoir de révocation accordé par l'article 7 doit être exercé. Cependant, elle régle- mente de façon minutieuse, à l'article 4, la procé- dure à suivre pour l'octroi d'un pardon: la demande de pardon est soumise à la Commission nationale des libérations conditionnelles pour qu'elle fasse enquête et formule sa recommanda- tion; la Commission ne peut faire de recommanda- tion défavorable à l'octroi du pardon sans avoir donné à l'intéressé l'occasion de se faire entendre; si la recommandation de la Commission est favo rable, elle est transmise au gouverneur en conseil qui peut, alors, accorder ou refuser le pardon.
L'avocat des intimés a prétendu que la Loi sur le casier judiciaire précisait, à l'article 4, qu'un pardon ne pouvait être refusé sans que l'intéressé ne soit entendu. Comme l'article 7 est silencieux sur ce point, il a soutenu, en invoquant la maxime «expressio unius est exclusio alterius» que l'on n'avait pas entendu donner à l'intéressé le droit de se faire entendre avant qu'un pardon ne soit révo- qué. Cet argument est fondé sur une fausse pré- misse. L'article 4 ne dit pas qu'une demande de pardon ne puisse être rejetée sans que l'intéressé ait été entendu; il prescrit seulement que la Com mission ne recommande pas le rejet d'une demande de pardon sans avoir entendu l'intéressé. Si la Commission recommande l'octroi du pardon,
l'intéressé n'a pas le droit d'être entendu et il me semble clair que, en ce cas, le gouverneur en conseil peut néanmoins refuser de suivre la recom- mandation et rejeter la demande de pardon sans avoir à entendre la personne concernée.
Le gouverneur en conseil peut donc refuser d'ac- corder un pardon sans entendre l'intéressé. Doit-il en être de même dans le cas de révocation? Je ne le crois pas. D'une part, la révocation d'un pardon me semble plus lourde de conséquences pour la personne concernée que le simple refus d'accéder à une demande de pardon. Dans le premier cas, cette personne se voit priver de droits tandis que dans le second elle se voit refuser un privilège. D'autre part, alors que le pouvoir d'accorder un pardon est purement discrétionnaire, il n'en est pas ainsi du pouvoir de révocation qui ne peut être exercé que dans les circonstances que précise l'article 7. Il me semblerait juste qu'on ne révoque pas un pardon sans avoir préalablement permis à l'intéressé de contester l'existence des faits sur lesquels on veut se fonder pour exercer le pouvoir de révocation.
Je crois donc que le gouverneur en conseil ne peut révoquer un pardon en vertu de l'article 7 sans donner à l'intéressé l'occasion de se faire entendre. Est-ce à dire que le gouverneur en con- seil soit tenu, lorsqu'il veut révoquer un pardon, d'agir à la manière d'un juge ou qu'il soit assujetti à toutes les exigences que, dans d'autres contextes, on a pu rattacher à la justice naturelle? Non pas. C'est au gouverneur en conseil et non à une autre autorité que la Loi confère le pouvoir de révoquer les pardons. Le gouverneur en conseil est un orga- nisme exécutif qui a ses façons d'agir et qui est assujetti à des règles particulières comme celles qui concernent le secret de ses délibérations et le caractère confidentiel de ses sources d'information. Le législateur connaît cette façon d'agir et ces règles et lorsqu'il confère un pouvoir au gouver- neur en conseil il faut présumer, en l'absence d'indication au contraire, que ce pouvoir doit être exercé conformément à ces règles et ces façons d'agir. À cause de cela, le gouverneur en conseil n'est pas tenu, avant de révoquer un pardon, d'en- tendre lui-même l'intéressé. Pour la même raison, l'intéressé n'a pas le droit, avant de se faire enten- dre, de connaître les preuves dont on dispose contre lui: il a seulement le droit de connaître les faits qui ont été portés à la connaissance du gou-
verneur en conseil ou de ses conseillers et qui justifieraient la révocation du pardon.
Pour ces motifs, je ferais droit à l'appel, je casserais le jugement de la Division de première instance et, faisant droit à l'action de l'appelant, je déclarerais nul le décret du 9 octobre 1975 révo- quant le pardon qui avait été octroyé à l'appelant. L'appelant devrait avoir droit aux dépens tant en première instance qu'en appel.
* * *
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendu par
LE JUGE LE DAIN: J'ai pris connaissance des motifs prononcés par mes collègues, les juges Pratte et Lalande. Bien que cette affaire s'avère fort difficile, je conviens avec eux qu'il y a lieu d'accueillir l'appel et d'annuler le décret qui révo- que le pardon octroyé à l'appelant, par ce motif qu'il n'a pas eu la possibilité raisonnable de réfuter les faits qu'on lui reproche.
Le dossier ne permet pas de conclure que l'appe- lant connaissait les faits précis qui, d'après la Commission nationale des libérations conditionnel- les et le solliciteur général, démontraient qu'il avait «cessé de se bien conduire», au sens de l'arti- cle 7 de la Loi sur le casier judiciaire, S.R.C. 1970 (ler Supp.), chap. 12. Je conviens avec mon collè- gue, le juge Pratte, que l'hypothèse retenue par le juge de première instance au sujet de cette ques tion était sans fondement, en particulier à la lumière de la mention, dans le mémoire du sollici- teur général au Cabinet, de renseignements «confidentiels».
De plus, il ne fait pas de doute que, vu les motifs sur lesquels elle peut se fonder et vu ses effets sur les droits et intérêts de l'intéressé, la décision de révoquer un pardon, en application de l'article 7, est normalement soumise à l'obligation de respec- ter les règles de justice naturelle ou, à tout le moins, à celle, d'un degré inférieur, d'observer l'équité dans la procédure. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de citer un magistère à l'appui de ce principe, lequel est vrai même si, avant l'adoption de la Loi sur le casier judiciaire, les pardons relevaient de la prérogative royale de clémence et même si cette prérogative se maintient jusqu'à nos
jours par l'article 9 de la Loi. Le pouvoir de révoquer un pardon qui a été octroyé en vertu de cette Loi a sa source dans la même Loi et n'est nullement fondé sur la prérogative royale. Sa nature tient exclusivement aux dispositions de l'article 7.
D'après moi, la difficulté tient à la question de savoir si, compte tenu de la manière dont le Cabi net fonctionne et de la règle du secret qui entoure ses délibérations, il est raisonnable de prêter au législateur l'intention d'assujettir le gouverneur en conseil à l'exigence de l'équité dans la procédure en matière de notification, de divulgation et d'au- dition lorsqu'il révoque un pardon conformément à l'article 7 de la Loi. Selon la jurisprudence, on ne peut tenir une audition impartiale sans notifier à l'intéressé suffisamment à l'avance les faits qu'on lui reproche, sans lui divulguer convenablement la preuve ou les autres éléments d'information, tels les rapports, sur lesquels se fondent les allégations, et, enfin, sans lui donner la possibilité raisonnable de réfuter les faits qu'on lui reproche en produi- sant, si nécessaire, des preuves et en faisant valoir ses arguments. Comment faut-il, en pratique, appliquer ces impératifs au processus décisionnel du Cabinet que je qualifierais, sauf le respect que je lui dois, de dénué de formalisme, d'inaccessible et d'impénétrable? On ne peut circonscrire à l'avance tous les motifs possibles de décision à prendre en considération à la réunion du Cabinet ou d'un comité du Cabinet qui instruit effective- ment l'affaire. On ne peut interdire aux membres du Cabinet d'apporter leur contribution à la défini- tion des motifs possibles de décision ou, même, de présenter de nouveaux éléments à l'appui de ces motifs. Pour garantir pleinement l'équité dans la procédure, la notification devrait porter sur les faits ou les motifs que le Cabinet considère comme pertinents aux fins de sa décision. La même diffi culté existe à l'égard de l'obligation de divulgation. Compte tenu de la règle du secret des délibérations du Cabinet, comment peut-on divulguer convena- blement à l'intéressé le fondement des allégations portées contre lui, telles qu'elles sont soumises au Cabinet, afin de lui permettre de réfuter les faits qu'on lui reproche? Enfin, si on lui accorde la possibilité raisonnable d'être entendu, les témoi- gnages produits et les arguments avancés pour son compte doivent être raisonnablement portés à l'at- tention du Cabinet.
Vu ces difficultés, je me demande s'il est vrai- ment possible, par interprétation de la loi, d'impo- ser une norme effective et vérifiable d'équité dans la procédure au gouverneur en conseil lorsqu'il révoque un pardon. Je ne puis me convaincre toutefois que le législateur ait voulu qu'un pardon puisse être révoqué par ce motif qu'une personne a cessé de se bien conduire, sans que l'intéressé se voit donner la possibilité de réfuter les faits qu'on lui reproche, au moment l'affaire est soumise au Cabinet par voie de recommandation. Il vaut mieux en ce cas qu'il y ait quelque chose qui ressemble tant soit peu à l'équité dans la procédure plutôt que l'absence totale de cette équité.
L'article 4 de la Loi sur le casier judiciaire, qui prévoit la tenue d'une enquête par la Commission nationale des libérations conditionnelles en cas de demande de pardon, et le fait que le solliciteur général a jugé bon de demander à la Commission de procéder à une enquête en l'espèce, font ressor- tir la possibilité d'une certaine enquête et d'une certaine audition avant que ne soit faite la recom- mandation de révocation du pardon. Le gouver- neur en conseil jouit, de toute évidence, du pouvoir inhérent ou tacite de déléguer sa fonction d'audi- tion. Quant à la maxime «expressio unius est exclusio alterius» invoquée par l'avocat des inti- més qui souligne que l'article 4 prévoit expressé- ment une telle enquête et que ce n'est pas du tout le cas de l'article 7, la Cour suprême du Canada a conclu en effet que cette règle d'interprétation ne doit pas servir à priver quelqu'un de son droit à une audition impartiale. Voir L'Alliance des pro- fesseurs catholiques de Montreal v. The Labour Relations Board of Quebec, [1953]_2 R.C.S. 140, aux pages 153 et 154; Nicholson c. Haldimand- Norfolk Regional Board of Commissioners of Police, [1979] 1 R.C.S. 311, aux pages 321 et 322.
Pour parvenir à la conclusion ci-dessus, j'ai dû, avec déférence, présumer que l'arrêt Le procureur général du Canada c. Inuit Tapirisat of Canada et autre, de la Cour suprême du Canada, [1980] 2 R.C.S. 735, n'a aucune portée générale qui influe sur le litige dont je suis saisi. Cette décision portait uniquement sur la nature du pouvoir de contrôle que le gouverneur en conseil tient du paragraphe 64(1) de la Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, chap. N-17, en tant qu'elle s'appli-
quait spécifiquement à la décision relative aux tarifs de Bell Canada, et non pas sur les particula- rités institutionnelles du processus décisionnel du gouverneur en conseil ou du Cabinet. En rendant le jugement de la Cour, le juge Estey s'est pro- noncé en ces termes à la page 753: «Il faut, dans l'évaluation de la technique de révision adoptée par le gouverneur en conseil, tenir compte de la nature même de ce corps constitué», mais cette conclusion a été tirée à propos de l'argument selon lequel tout le dossier aurait être soumis au Cabinet. À mon avis, cette remarque particulière ne signifie pas qu'une décision du gouverneur en conseil, quelle que soit sa nature, n'est jamais soumise à l'obliga- tion tacite d'équité dans la procédure.
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Voici les, motifs du jugement rendus en français par
LE JUGE SUPPLÉANT LALANDE: Le pouvoir qu'accorde au gouverneur général en conseil la Loi sur le casier judiciaire est un pouvoir de nature quasi judiciaire, puisque l'article 7 prescrit, pour le cas qui nous occupe, que la révocation d'un pardon peut être décrétée «sur preuve établissant» une cessation de bonne conduite. Un tel pouvoir doit être exercé conformément aux exigences de la justice naturelle.
Les intimés Bouchard et Gilbert, faisant enquête pour le solliciteur général à titre de membres de la Commission nationale des libérations conditionnel- les, ont refusé de divulguer à l'appelant qu'ils avaient convoqué pour qu'il puisse leur faire ses représentations, en quoi il leur paraissait qu'il avait cessé de se bien conduire.
Ce refus violait une règle élémentaire de justice naturelle et a vicié l'arrêté ministériel passé sur la recommandation du solliciteur général.
Je disposerais de l'appel comme le propose le juge Pratte.
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