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A-492-81
La Reine (appelante) c.
Imperial General Properties Limited (autrefois appelée Speedway Realty Corporation Limited) (intimée)
Cour d'appel, juges Heald et Le Dain, juge sup pléant Kelly—Toronto, 29 septembre; Ottawa, 24 décembre 1982.
Impôt sur le revenu Calcul du revenu Compagnies associées Appel du jugement de la Division de première instance annulant la décision de la Commission qui confirmait les nouvelles cotisations La société S est-elle «contrôlée» par la société V Ltd. et sont-elles par conséquent «associées»? V détient 50 % des actions votantes de S ainsi que 90 actions ordinaires; les époux détiennent 50 % des actions votantes dont 10 actions ordinaires et 80 actions privilégiées Le terme «contrôle» signifie un contrôle de droit et consiste en une majorité des actions votantes selon les arrêts Buckerfield's et Dworkin Furs Le principe plus large qui a été retenu dans l'arrêt Oakfield n'est qu'une exception Appel rejeté Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, chap. 148, art. 39(4)a) (mod. par S.C. 1960, chap. 43, art. 11(1)).
Speedway a émis 180 actions votantes au total. De ce nombre, 100 étaient des actions ordinaires et 80 des actions privilégiées. Validor Limited possédait 90 actions ordinaires. Les 10 autres actions de cette catégorie étaient détenues par Meyer Gasner, qui détenait également 40 actions privilégiées; sa femme, Goldie Gasner, avait les 40 autres actions privilé- giées. Ainsi, Validor Limited et les époux Gasner possédaient chacun 50 % des actions votantes de Speedway.
Les actions privilégiées donnaient droit à un dividende cumu- latif prioritaire déterminé au taux annuel de 10 % sur le montant versé en règlement du prix des actions privilégiées. En cas de liquidation ou de dissolution de Speedway, elles don- naient droit au remboursement prioritaire mais sans droit de participation aux bénéfices ou à l'actif. L'abandon de la charte de la société pouvait être autorisé par la majorité des votes exprimés à une assemblée générale ou par au moins 50 % des votes exprimés par les actionnaires ayant le droit de voter à cette assemblée.
Le Ministre a établi des nouvelles cotisations en tenant pour acquis que Speedway était «associée» à Validor Limited au sens du paragraphe 39(4) de la Loi. Plus précisément, le Ministre est parti du principe que Validor «contrôlait» Speedway, comme le prévoit l'alinéa a) de ce paragraphe.
La Commission de révision de l'impôt a rejeté l'appel inter- jeté contre cette nouvelle cotisation. Saisie de l'affaire, la Division de première instance a accueilli l'appel formé contre la décision de la Commission. Le Ministre interjette appel de cette décision.
Arrêt: l'appel devrait être rejeté.
Une des définitions du terme «contrôle» est celle proposée par la Cour de l'Échiquier dans l'affaire Buckerfield's et que la Cour suprême du Canada a adoptée dans l'affaire Dworkin
Furs. Selon ces arrêts, le mot «contrôle» à l'alinéa 39(4)a) signifie un contrôle de droit et non pas un contrôle de fait. La disposition vise en particulier «le droit de contrôle qui découle de la propriété d'un nombre d'actions suffisant pour donner la majorité des voix à l'élection d'un conseil d'administration».
La Cour suprême a adopté un point de vue différent dans l'affaire Oakfield elle a jugé que la société en cause était dirigée par un «groupe de dirigeants» même si ce groupe et deux particuliers détenaient chacun 50 % des voix. Il est toutefois difficile de comprendre le principe qui a fondé cette conclusion. Il semble y avoir au moins deux points de vue quant à ce qu'il signifie pour les cas deux personnes (ou groupes de person- nes) détiennent chacune 50 % des actions votantes d'une société: d'une part, on peut déduire que le principe adopté par l'arrêt Dworkin Furs, selon lequel le contrôle de jure envisagé à l'article 39 est associé exclusivement aux droits de vote, se limite aux cas il n'y a qu'une catégorie d'actions (ou aux cas toutes les actions ont les mêmes droits de jure) et que lorsqu'il y a deux catégories d'actions comportant droit de vote mais ayant des droits de jure différents, aux fins de l'article 39, le contrôle est réputé appartenir à la personne ou au groupe de personnes détenant le plus grand nombre d'actions comportant le plus de droits de jure; d'autre part, il est possible de conclure que le concept de contrôle de jure selon l'affaire Oakfield, qui va au-delà du droit de vote, est une exception ou une restriction apportée au concept traditionnel approuvé et appliqué dans Dworkin Furs qui doit se limiter aux cas où, comme dans l'arrêt Oakfield, toutes les actions ordinaires (ou les actions comportant le plus de droits de jure) sont détenues par une des personnes ou des groupes de personnes détenant 50 % des voix.
Compte tenu de cette incertitude, ainsi que de l'exception apportée par l'arrêt Oakfield au concept de contrôle de jure approuvé et appliqué dans Dworkin Furs, et de l'importance accordée par la Cour au fait que toutes les actions comportant le plus grand nombre de droits de jure étaient détenues par le groupe des dirigeants, la deuxième façon de voir doit prévaloir.
En l'espèce, Validor Limited ne détenait pas toutes les actions ordinaires de Speedway (ou les actions comportant le plus grand nombre de droits de jure). On ne doit donc pas appliquer le raisonnement de l'arrêt Oakfield, mais le critère adopté dans l'affaire Dworkin Furs. Selon ce critère, Validor Limited ne contrôlait pas Speedway et les deux sociétés n'étaient pas «associées» au sens du paragraphe 39(4).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS SUIVIES:
Buckerfield's Limited, et al. v. The Minister of National Revenue, [1965] 1 R.C.E. 299; The Minister of National Revenue v. Dworkin Furs (Pembroke) Limited, et al., [1967] R.C.S. 223.
DISTINCTION FAITE AVEC:
Oakfield Developments (Toronto) Limited c. Le Ministre du Revenu National, [1971] R.C.S. 1032.
AVOCATS:
H. Erlichman pour l'appelante. J. E. Swystun pour l'intimée.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour
l'appelante.
Goodman & Carr, Toronto, pour l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE LE DAIN: Appel est interjeté d'un jugement [[1981] CTC 331; 81 DTC 5191] par lequel la Division de première instance faisait droit à un appel d'une décision de la Commission de révision de l'impôt au sujet d'une nouvelle cotisa- tion portant sur les années d'imposition 1962, 1963, 1966 et 1967.
Il échet de déterminer si la société intimée, ci-après appelée «Speedway», était «associée à» Validor Limited («Validor») au sens de l'alinéa 39(4)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, chap. 148, modifiée par S.C. 1960, chap. 43, paragraphe 11(1), laquelle disposition est ainsi rédigée:
39. ...
(4) Aux fins du présent article, une corporation est associée à une autre dans une année d'imposition si, à quelque moment pendant l'année,
a) une des corporations contrôlait l'autre,
Speedway fut constituée le 29 août 1955. Qua- tre-vingt-six des cent actions ordinaires émises par la société étaient détenues par Morris et Louis Wingold et leurs épouses. Dix actions ordinaires étaient détenues par Meyer Gasner, ami personnel et associé de Morris Wingold sans lien de parenté avec les Wingold ou leurs épouses. Les quatre autres actions étaient détenues par l'avocat qui s'est occupé de la constitution de la société. Des lettres patentes supplémentaires en date du 16 décembre 1960 autorisaient l'émission de 9 900 autres actions ordinaires sans valeur nominale et de 10 000 actions privilégiées non participantes à dividendes cumulatifs et comportant droit de vote, et dont la valeur nominale était d'un dollar cha- cune. Ces dernières actions comportent également le droit à un dividende cumulatif prioritaire déter- miné au taux annuel de dix pour cent (10 %) sur le montant versé en règlement du prix des actions privilégiées, et le droit, en cas de liquidation ou de dissolution de la société, au remboursement priori- taire, mais sans droit de participation aux bénéfi-
ces ou à l'actif. Les lettres patentes supplémentai- res prévoyaient également que l'abandon de la charte de Speedway pouvait être autorisé par la majorité des voix exprimées à une assemblée géné- rale ou par au moins 50 % des voix exprimées par les actionnaires ayant le droit de voter à cette assemblée. Le 27 décembre 1960, quarante actions privilégiées de Speedway ont été émises au nom de Meyer Gasner et quarante autres au nom de sa femme Goldie Gasner. Le 21 décembre 1960, les quatre actions ordinaires de l'avocat qui s'était occupé de la constitution de la société ont été transférées aux Wingold, une à Morris Wingold, une autre à sa femme et deux à Louis Wingold. Le 28 décembre 1960, les Wingold ont transféré leurs quatre-vingt-dix actions ordinaires de Speedway à Validor dont les Wingold détenaient la totalité des actions ordinaires. Les Gasner n'étaient pas actionnaires de Validor. Ainsi, à la fin décembre 1960, les actions ordinaires et privilégiées de Speedway comportant droit de vote étaient répar- ties comme suit: Validor détenait quatre-vingt-dix des cent actions ordinaires émises; les dix autres actions ordinaires émises étaient détenues par Meyer Gasner qui détenait, avec sa femme les quatre-vingts actions privilégiées émises. En d'au- tres termes, Validor et les Gasner détenaient chacun cinquante pour cent des actions compor- tant droit de vote. Les Gasner ont conservé leurs actions de Speedway jusqu'au 31 octobre 1968, date à laquelle ils les ont transférées à Validor.
Le présent appel a pour objet de déterminer si, compte tenu de la répartition des actions ordinai- res et privilégiées de Speedway, Validor «contrô- lait» Speedway au sens de l'alinéa 39(4)a) de la Loi.
Le 31 octobre 1968, il y eut fusion de Speedway et de certaines autres sociétés dont Validor déte- nait la totalité des actions ordinaires pour former la société intimée, Imperial General Properties Limited.
Par avis de nouvelle cotisation en date du 7 janvier 1972, le ministre du Revenu national a établi une nouvelle cotisation pour Speedway en tant que division de Imperial General Properties Limited en tenant pour acquis qu'elle était «asso- ciée à» Validor au cours de ces années d'imposition 1962, 1963, 1966 et 1967 au sens du paragraphe 39(4) de la Loi. La Commission de révision de
l'impôt a rejeté l'appel interjeté contre cette nou- velle cotisation. La Division de première instance de la Cour fédérale a accueilli l'appel formé contre la décision de la Commission. Dans ses motifs de jugement, le tribunal dit la page 332 CTC et aux pages 5191 et 5192 DTC]:
La défenderesse soutient que Validor contrôle Speedway au sens du paragraphe 39(4) de la Loi, même si Validor et les Gasner détiennent chacun 50 % des droits de vote ou du nombre de voix qui peuvent s'exprimer lors d'un vote tenu au cours d'une assemblée des actionnaires. La défenderesse sou- tient cet argument en invoquant que les actions privilégiées détenues par les Gasner ne comportent pas les mêmes droits que les actions ordinaires, et elle cite, à l'appui, l'arrêt Oakfield Developments (Toronto) Limited c. Le Ministre du Revenu National, [1971] R.C.S. 1032; [1971] CTC 283; 71 DTC 5175.
Le principe établi par l'arrêt Oakfield est selon moi inappli cable en l'espèce. Il faut plutôt appliquer le principe illustré dans les arrêts Buckerfield's Limited, et al. v. M.N.R., [1965] 1 R.C.É. 299; [1964] CTC 504; 64 DTC 5301; M.N.R. v. Dworkin Furs (Pembroke) Limited, et al., [1966] R.C.É. 228; [1965] CTC 465; 65 DTC 5277; [1967] R.C.S. 223; 67 DTC 5035; et Himley Estates Ltd and Humble Investments, Ltd v The Commissioners of Inland Revenue (1932), 17 TC 367 la page 379.
Au cours des plaidoiries devant la Cour, les parties sont convenues que la question, comme l'a posée le juge de première instance dans ses motifs, est de savoir quelle définition de «contrôle» il faut appliquer en espèce: celle adoptée dans Bucker- field's Limited, et al. v. The Minister of National Revenue, [1965] 1 R.C.É. 299 et The Minister of National Revenue v. Dworkin Furs (Pembroke) Limited, et al., [1967] R.C.S. 223, ou celle adop- tée dans l'arrêt Oakfield Developments (Toronto) Limited c. Le Ministre du Revenu National, [1971] R.C.S. 1032.
Dans l'affaire Buckerfield's il s'agissait de déterminer si certaines sociétés étaient «associées» au sens de l'article 39 de la Loi de l'impôt sur le revenu aux motifs qu'elles étaient «contrôlées» par un «groupe de personnes» composé, dans deux des appels, de deux sociétés détenant chacune 50 % des actions émises des deux sociétés qui étaient consi- dérées comme associées, et composé, dans les deux autres appels, de trois sociétés dont chacune déte- nait un tiers des actions émises des deux sociétés considérées comme associées. Dans chaque cas, il n'y avait qu'une seule catégorie d'actions. Le Ministre avait établi la cotisation des sociétés en question en présumant qu'elles étaient «associées» au sens de l'article 39, et la Cour de l'Échiquier a
rejeté les appels interjetés contre ses cotisations. Le président Jackett [tel était alors son titre] a examiné diverses significations possibles du terme «contrôle», y compris la page 303] [TRADUC- TION] «un contrôle de fait par un actionnaire ou plus détenant ou non une majorité des actions», et a conclu à la page 303 que le mot «contrôlées» employé à l'article 39 visait [TRADUCTION] «le droit de contrôle qui découle de la propriété d'un nombre d'actions suffisant pour donner la majorité des voix à l'élection du conseil d'administration». Il a jugé que les deux groupes de sociétés actionnai- res, dont il a également conclu qu'elles étaient des «groupes de personnes» au sens de l'article 39, contrôlaient manifestement les sociétés dont elles détenaient des actions.
Dans l'arrêt Dworkin Furs, il y avait cinq socié- tés dont le Ministre avait établi la cotisation en les considérant comme sociétés «associées» au sens de l'article 39. Dans chaque cas, il n'y avait qu'une seule catégorie d'actions. Pour déterminer si les sociétés étaient «contrôlées» au sens de l'article 39 et par conséquent, associées, la Cour suprême du Canada a approuvé et appliqué la définition de «contrôle» qui avait été adoptée dans l'affaire Buckerfield's. Le juge Hall, rendant le jugement au nom de la Cour, dit aux pages 227 et 228:
[TRADUCTION] Le mot contrôlées, tel qu'il est employé dans ce paragraphe, signifie, selon le président Jackett, contrôle de jure et non contrôle de facto, je partage son avis. Voici ce qu'il dit dans Buckerfield's Limited et al v. Minister of National Revenue:
Il est concevable qu'il puisse exister plusieurs façons de comprendre le mot «contrôle» dans un texte législatif tel que la Loi de l'impôt sur le revenu, quand on applique ce mot à une corporation. Il peut par exemple se rapporter au contrôle par les «membres de la direction», lorsque la direction et le conseil d'administration sont distincts, ou il peut se rapporter au contrôle par le conseil d'administration. Le genre de contrôle qu'exercent les membres de la direction ou le conseil d'administration n'est évidemment pas, toutefois, celui que vise l'article 39 en parlant du contrôle d'une corporation par une autre de même que du contrôle d'une corporation par des particuliers (voir le paragraphe (6) de l'article 39). On conçoit très bien que le mot «contrôle» puisse se rapporter à un contrôle de fait par un actionnaire ou plus détenant ou non une majorité des actions. Je crois cependant qu'à l'article 39 de la Loi de l'impôt sur le revenu, le mot «contrôlées» vise le droit de contrôle qui découle de la propriété d'un nombre d'actions suffisant pour donner la majorité des voix à l'élec- tion du conseil d'administration. Voir British American Tobacco Co. v. I.R.C. (1943) 1 A.E.R. 13, le lord Chancelier, le vicomte Simon, a déclaré, à la p. 15:
«Les détenteurs de la majorité des voix dans une compa- gnie sont ceux qui ont le contrôle réel de ses affaires et de ses destinées.»
Voir aussi Minister of National Revenue v. Wrights' Canadian Ropes Ld. (1947) A.C. 109, lord Greene, Maître des rôles, à la page 118, il a été décidé que le simple fait qu'une compagnie détient moins de 50 pour cent des actions d'une autre compagnie établit «péremptoirement» que l'une des compagnies n'est pas «contrôlée» par l'autre, au sens de l'article 6 de la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu.
Cette définition du mot contrôlées s'applique aux cinq appels. [Notes en bas de page omises.]
Dans le cas de quatre des cinq sociétés en cause dans l'arrêt Dworkin Furs, aucune personne ni groupe de personnes ne détenait plus de 50 % des actions émises. On a jugé que le fait qu'un action- naire qui détenait 50 % des actions ait eu, à titre de président de la société, un vote prépondérant aux assemblées des actionnaires et des administra- teurs ne lui conférait pas le contrôle. Dans le cas d'une des quatre sociétés, il y avait une entente prévoyant qu'un des actionnaires détenant 50 % des actions s'occuperait de la gestion quotidienne de la compagnie. Le juge Hall a jugé que bien qu'on puisse considérer que cette entente donnait à l'actionnaire le contrôle de fait, elle ne lui donnait pas le contrôle de droit, [TRADUCTION] «qui est le vrai critère» la page 229]. Dans le cas de la cinquième société, un groupe détenait les deux tiers des actions, mais,,il y avait une disposition dans les statuts de la société qui prévoyait que les propositions aux assemblées des actionnaires ou des administrateurs devaient être adoptées à l'una- nimité. Le Ministre soutenait que cette entente était illégale mais la Cour a rejeté cette prétention.
Dans l'affaire Oakfield, les actions ordinaires de la société («Polestar»), considérée par le Ministre comme une société «associée» au sens du paragra- phe 39(4), étaient détenues par un «groupe de dirigeants». Un nombre égal d'actions privilégiées comportant droit de vote ont été émises à deux particuliers ne faisant pas partie du groupe des dirigeants. Ce groupe et les deux particuliers déte- naient donc ainsi chacun 50 % des voix. Les actions privilégiées donnaient droit à un dividende privilégié, cumulatif, fixe, de 10 % par année, et au remboursement du capital avant le remboursement des actions ordinaires à la liquidation de la société, mais ne donnait aucun droit à quelque autre parti cipation aux bénéfices ou à l'actif. Un membre du groupe des dirigeants s'était personnellement porté
garant, auprès des actionnaires privilégiés, du rem- boursement, sur un avis de trente jours, des sommes investies par eux pour l'achat des actions, et du paiement du dividende de 10 %. Le président des assemblées des administrateurs ou des action- naires n'avait pas de voix prépondérante. L'aban- don des lettres patentes de la compagnie pouvait être autorisé par 50 % des voix des actionnaires votants. La Cour suprême du Canada a jugé que la société était contrôlée par le groupe des dirigeants et qu'elle était donc associée aux autres sociétés contrôlées par ce groupe. Le juge Judson, pronon- çant le jugement unanime de la Cour, dit à la page 1037:
Le groupe des dirigeants détenait 50 pour cent des voix, étant propriétaire des actions ordinaires. Il avait droit à tous les superbénéfices lors d'une distribution de dividendes, après le paiement du dividende cumulatif fixe aux actionnaires privilé- giés. Advenant la mise en liquidation de Polestar, il avait droit à tout le surplus après le remboursement de capital et le paiement d'une prime de 10 pour cent aux actionnaires privilé- giés. Le nombre de voix dont il jouissait était suffisant pour autoriser l'abandon des lettres patentes de la compagnie. A mon avis, ces circonstances suffisent à donner le contrôle au groupe lorsque les propriétaires d'actions privilégiées non parti- cipantes détiennent l'autre moitié des voix.
La présente affaire peut se distinguer de la décision de cette Cour dans Ministre du Revenu national c. Dworkin Furs (Pembroke) Ltd. et autres. Dans l'affaire Dworkin Furs, les voix étaient, aussi, également partagées entre les deux grou- pes, mais il n'y avait qu'une seule catégorie d'actions. Chaque groupe avait les mêmes droits de jure et chaque actionnaire avait le droit, lors de l'attribution de dividende ou de la liquidation, à sa part proportionnelle des bénéfices et de l'actif de la compagnie. De plus, aucun des deux groupes ne pouvait, seul, mettre la compagnie en liquidation. [Note en bas de page omise.]
J'ai de la difficulté à comprendre le fondement précis de la conclusion dans Oakfield ainsi que le principe ou le critère qu'il renferme. Il semble y avoir au moins deux façons possibles de voir ce qu'il signifie pour les cas 50 % des actions votantes d'une société sont détenues par une per- sonne ou un groupe de personnes et 50 % par une autre personne ou par un autre groupe de person- nes: a) que la définition du contrôle de droit approuvée et appliquée dans Dworkin Furs se limite aux cas il n'y a qu'une catégorie d'actions (ou au moins aux cas toutes les actions ont les mêmes droits de jure) et que lorsqu'il y a deux catégories d'actions comportant droit de vote mais ayant des droits de jure différents, aux fins de l'article 39, le contrôle est réputé appartenir à la personne ou au groupe de personnes détenant le
plus grand nombre d'actions comportant le plus de droits de jure; ou b) que le concept de contrôle de droit dans l'affaire Oakfield, qui va au-delà du droit de vote, est une exception ou une restriction apportée au concept traditionnel approuvé et appli- qué dans Dworkin Furs qui doit se limiter aux cas où, comme dans l'arrêt Oakfield, toutes les actions ordinaires (ou les actions comportant le plus de droits de jure) sont détenues par une des personnes ou des groupes de personnes détenant 50 % des voix. (Le fait que l'un ou l'autre des personnes ou groupes de personnes détenant 50 % des voix puis- sent autoriser la liquidation de la société me semble, quant à moi, un facteur neutre.) Compte tenu de cette incertitude, de la nature de l'éloigne- ment, dans l'arrêt Oakfield, du concept du con- trôle de jure approuvé et appliqué dans Dworkin Furs, et de l'insistance dans les motifs du juge Judson sur le fait que toutes les actions compor- tant le plus grand nombre de droits de jure étaient détenues par le groupe des dirigeants, je suis d'avis que la deuxième façon de voir est la meilleure. Par conséquent, puisque toutes les actions ordinaires (ou les actions comportant le plus grand nombre de droits de jure) n'étaient pas détenues par Vali- dor, je suis d'avis, appliquant la définition de «contrôle» approuvée dans Dworkin Furs, que Speedway n'était pas contrôlée par Validor. Speed way n'était donc pas une société «associée» au sens de l'alinéa 39(4)a) de la Loi.
Par ces motifs, je rejetterais l'appel avec dépens. LE JUGE HEALD: Je souscris à ces motifs.
LE JUGE SUPPLÉANT KELLY: Je souscris à ces motifs.
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