Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

A-82-86
Victor Fernando Correia Nunes (requérant)
c.
Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (intimé)
et
Anne Marie Micillo (mise-en-cause)
RÉPERTORIE: NUNES C. CANADA (MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE L'IMMIGRATION)
Cour d'appel, juges Pratte, Marceau et Lacom- be—Montréal, 17 juin; Ottawa, 24 juin 1986.
Immigration Expulsion Un arbitre a déclaré que le requérant n'était pas un véritable visiteur Prétention selon laquelle les éléments de preuve présentés devant l'arbitre avaient été obtenus illégalement Lettres trouvées dans les bagages du requérant au cours d'un interrogatoire mené par un agent d'immigration à l'aéroport de Mirabel L'agent d'im- migration aurait obligé le requérant à ouvrir sa valise et à lui remettre des lettres La saisie des lettres était valide suivant l'art. 111(2)b) de la Loi sur l'immigration de 1976 Aucune atteinte aux droits et libertés protégés par la Charte Les fouilles et les saisies de documents faites, en vertu de la Loi sur l'immigration de 1976, l'occasion de l'examen des per- sonnes qui sollicitent leur admission au pays n'ont pas à être autorisées au préalable La décision rendue dans l'affaire Mahtab c. Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada, (1986] 3 C.F. 101 (1'° inst.) a été infirmée Aucune disposition de la Loi n'autorisait expressément l'agent d'immi- gration à examiner les bagages pour déterminer s'ils conte- naient quelque chose qui confirmait ou contredisait l'affirma- tion du requérant qu'il venait au Canada pour une simple visite Même si les lettres avaient été saisies illégalement, elles pouvaient être admises en preuve car leur utilisation n'était pas susceptible de déconsidérer l'administration de la justice Rejet de la demande d'examen et d'annulation de l'ordonnance d'expulsion Loi sur l'immigration de 1976, S.C. 1976-77, chap. 52, art. 111(2)b) (mod. par S.C. 1980-81- 82-83, chap. 47, art. 23) Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2' Supp.), chap. 10, art. 28.
Droit constitutionnel Charte des droits Procédures criminelles et pénales Fouille, perquisition ou saisie Un agent d'immigration a saisi des lettres trouvées dans les baga- ges du requérant durant un interrogatoire à l'aéroport Saisie n'allant pas à l'encontre de la Charte Les fouilles et les saisies de documents faites, en vertu de la Loi sur l'immi- gration de 1976, l'occasion de l'examen des personnes qui sollicitent leur admission au pays n'ont pas à être autorisées au préalable La décision rendue dans l'affaire Mahtab c. Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada, (19861 3 C.F. 101 (1'B inst.) est erronée Lettres admissibles en preuve Leur usage ne déconsidère pas l'administration de la justice Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.).
JURISPRUDENCE
DÉCISION INFIRMÉE:
Mahtab c. Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada, [1986] 3 C.F. 101 (1" inst.).
AVOCATS:
Pierre Duquette pour le requérant. Suzanne Marcoux-Paquette pour l'intimé.
PROCUREURS:
Borenstein, Duquette, Brott & Tsimberis, Montréal, pour le requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé.
Voici les motifs du jugement de la Cour rendus en français par
LES JUGES PRATTE, MARCEAU et LACOMBE: Le requérant demande l'annulation en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale [S.R.C. 1970 (2 e Supp.), chap. 10] d'une ordonnance d'ex- clusion qui a été prononcée contre lui par un arbitre en vertu de la Loi sur l'immigration de 1976 [S.C. 1976-77, chap. 52] au motif qu'il n'était pas admissible au Canada n'étant pas, de l'avis de l'arbitre, un véritable visiteur.
L'avocat du requérant a soutenu que cette ordonnance d'exclusion était, d'une part, illégale et, d'autre part, fondée sur des constatations de fait erronées.
Quant à ce second point, lors de l'audience, nous avons indiqué à l'avocat du requérant que nous n'y voyions aucun mérite. Il n'est donc pas nécessaire d'y revenir.
Quant à l'affirmation que la décision attaquée est illégale, elle repose sur la prétention que cette décision est basée sur une preuve documentaire obtenue en contravention de la Charte canadienne des droits et libertés [qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.)] et qui, à cause de cela, n'aurait pas être admise par l'arbitre.
La preuve dont il s'agit consiste en deux lettres qui se trouvaient dans les bagages du requérant lorsqu'il fut interrogé par un officier d'immigra-
tion à son arrivée à l'aéroport de Mirabel. Cet officier aurait alors obligé le requérant à ouvrir sa valise et, y découvrant les deux lettres, il aurait exigé que le requérant les ouvre et les lui remette. Il y eut là, dit l'avocat du requérant, fouille et saisie abusives parce qu'elles n'étaient pas permi- ses par la Loi sur l'immigration de 1976 et, aussi, parce que l'officier d'immigration qui les a prati- quées n'avait pas préalablement obtenu l'autorisa- tion d'une autorité offrant des garanties d'impar- tialité. Il s'ensuit, suivant le requérant, que ces deux lettres étaient des «éléments de preuve .. . obtenus dans des conditions qui port[aient] atteinte aux droits ou libertés garantis par la .. . Charte» et que, en conséquence, elles étaient inad- missibles en preuve puisque «leur utilisation [était] susceptible de déconsidérer l'administration de la justice».
Cet argument doit, à notre avis, être rejeté.
En premier lieu, il nous paraît clair que les fouilles et saisies de documents qui peuvent être faites, en vertu de la Loi sur l'immigration de 1976, l'occasion de l'examen des personnes qui sollicitent l'admission au pays, étant donné les circonstances elles ont lieu, n'ont pas à être préalablement autorisées par une autre personne. La décision en sens contraire rendue par la Divi sion de première instance dans l'affaire Mahtab' nous semble mauvaise. En second lieu, nous pen- sons que l'alinéa 111(2)b) de la Loi sur l'immi- gration de 1976 [mod. par S.C. 1980-81-82-83, chap. 47, art. 23] autorisait clairement la saisie des deux lettres dont il s'agit.
Reste à savoir, cependant, si la Loi autorisait l'officier d'immigration à examiner les bagages du requérant pour déterminer s'ils contenaient quel- que chose qui confirmait ou contredisait son affir mation qu'il venait au Canada pour une simple visite. Aucun texte n'accorde expressément pareil pouvoir aux officiers d'immigration. Madame Paquette, l'avocate de l'intimé, a cependant plaidé que ce pouvoir leur était accordé implicitement puisque les officiers d'immigration neTourraient remplir convenablement leur tâche s'ils ne le pos- sédaient pas. Il n'est pas nécessaire de nous pro- noncer sur cette question. Car même si les deux lettres en question avaient été saisies au cours
' Mahtab c. Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada, [1986] 3 C.F. 101 (1fe inst.).
d'une fouille non autorisée, nous sommes d'opinion qu'elles pouvaient malgré cela être admises en preuve car nous ne considérons pas que leur utili sation dans ces circonstances ait été susceptible de déconsidérer l'administration de la justice.
La demande sera rejetée.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.