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T-50-89
Bing Hui Wu, Jim Ween Lu, Kee Few Ng, Chi Kin Cham, Wen Pon San, Won Tim Chang, Sam Choi Chaq, Man Wai Leung, Suk Ling Chen et Jane Jin He (requérants)
c.
Ministre de l'Immigration (intimé)
RÉPERTORIÉ: WU c. CANADA (MINISTRE DE L'IMMIGRATION)
Section de première instance, juge Reed—Confé- rence téléphonique, 20 janvier; Ottawa, 24 janvier 1989.
Immigration Pratique Les requérants sont arrivés au Canada le P 1 janvier 1989 Ils ont déclaré être des réfugiés au sens de la Convention, en provenance de la Chine Ils ont subi un interrogatoire à leur point d'entrée au pays On a pris des notes de cet interrogatoire Une audience prélimi- naire devant un jury de deux personnes a été prévue Il s'agit de savoir si la communication des notes prises au cours de l'interrogatoire est essentielle pour que les requérants soient traités de façon équitable Ceux-ci étaient sous un certain stress lorsqu'ils ont été interrogés L'interrogatoire s'est fait en l'absence de tout conseiller Il y avait un risque d'inter- prétations erronées entre l'interrogateur et l'interrogé vu qu'ils devaient communiquer par l'intermédiaire d'un interprète L'avocat cherche à éviter les surprises durant l'audience Le ministre allègue qu'il n'existe pas de règle d'équité qui oblige l'une des parties à divulguer des éléments de preuve avant une audience, car la procédure prévue par les modifications appor- tées à la Loi sur l'immigration est une procédure sommaire et elle ne le sera plus si la demande des requérants est accueillie Ceux-ci ont reçu un document contenant certains «faits saillants» de l'interrogatoire II s'agit de savoir si les requérants ont une cause défendable au moment de l'autorisa- tion d'introduire une instance Aucune loi n'est directement concernée La procédure en vue de garantir une audience équitable dépend des circonstances, dont celles qui découleront de l'audience Il ne serait pas difficile sur le plan adminis- tratif de fournir une photocopie des notes prises au cours de l'interrogatoire Il y a une question importante à trancher L'autorisation d'introduire une requête fondée sur l'art. 18 est accordée.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, art.18, 28.
Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. (1985), chap. P-21.
Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), chap. 1-2, art. 2(1) (mod. par S.C. 1988, chap. 35, art. 1), 12, 48(2) (mod., idem, art. 14), 48.02 (mod., idem), 83.1 (mod., idem, art. 19).
Loi sur l'immigration de 1976, S.C. 1976-77, chap. 52, art. 104(6),(7).
Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration, DORS/89-26.
JURISPRUDENCE
DISTINCTION FAITE AVEC:
Piperno c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (1985), 64 N.R. 313 (C.A.F.).
DÉCISION EXAMINÉE:
Bauer c. La Reine (Commission de l'immigration du Canada), [1984] 2 C.F. 455 (1" inst.).
DÉCISIONS CITÉES:
Bhattia c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immi- gration), 89-A-1000, juges d'appel Pratte et Marceau, 13-1-89, encore inédit; Nicholson c. Haldimand-Norfolk Regional Board of Commissioners of Police, [ 1979] 1 R.C.S. 311; McCarthy v. Bd. of Trustees of Calgary Roman Catholic Separate S. Dist. No. I, [1979] 4 W.W.R. 725 (1' inst. Alb.); Campeau Corpn. v. Calgary City Council (1980), 12 Alta. L.R. (2d) 379 (C.A.); Martineau c. Comité de discipline de l'Institution de Matsqui, [1980] 1 R.C.S. 602; Harvie v. Calgary Regio nal Planning Commn. (1978), 8 Alta. L.R. (2d) 166 (C.A.); Singh et autres c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1985] 1 R.C.S. 177; (1985), 58 N.R. 1; Muliadi c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immi- gration), [1986] 2 C.F. 205 (C.A.).
DOCTRINE
Evans, J.M., et autres, Administrative Law Cases, Text, and Materials Toronto: Emond-Montgomery Limited, 1980.
Jones, David Phillip and Anne S. de Villars, Principles of Administrative Law Toronto: Carswell Company Limi ted, 1985.
Halsbury's Laws of England, vol. 1, 4 e éd., London: Butterworths, 1979.
Sgayias, David et al., Federal Court Practice -1988 Toronto: Carswell Company Limited, 1987.
AVOCATS:
William J. Major, c.r. pour les requérants. D. Bruce Logan pour l'intimé.
PROCUREURS:
Major, Caron & Company, Calgary, pour les requérants.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
LE JUGE REED: Il s'agit d'une requête présentée conformément à l'article 83.1 de la Loi sur l'im- migration, L.R.C. (1985), chap. I-2, modifié par
S.C. 1988, chap. 35 [art. 19]. L'article 83.1 a été ajouté à la Loi sur l'immigration [de 1976, S.C. 1976-77, chap. 52] afin de prévoir une nouvelle procédure dans le cas des requêtes en matière d'immigration présentées conformément aux arti cles 18 et 28 de la Loi sur la Cour fédérale [L.R.C. (1985), chap. F-7]. Elle résulte, en partie du moins, du grand nombre d'appels concernant des revendications du statut de réfugié selon la Convention dont la Cour a été saisie.
La nouvelle procédure prévoit un processus en deux étapes. Les requêtes présentées en matière d'immigration, conformément aux articles 18 et 28 de la Loi sur la Cour fédérale, ne peuvent mainte- nant être introduites qu'avec l'autorisation de la Cour. Le processus requis est étudié dans une décision rendue par le juge Marceau dans l'affaire Bhattia c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (no du greffe 89-A-1000, juges d'appel Pratte et Marceau, jugement en date du 13 janvier 1989, C.A.F., encore inédit).
En plus de la procédure en deux étapes requise pour la poursuite de l'instance devant notre Cour, la nouvelle loi prévoit également une procédure en deux étapes afin de déterminer la validité des revendications du statut de réfugié, décisions qui sont rendues par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (ci-après appelée «la Com mission»). La personne qui revendique le statut de réfugié doit maintenant comparaître d'abord devant un jury de deux personnes pour ce que j'appellerai une audience préliminaire. Ces deux personnes sont un arbitre et un membre de la section du statut de réfugié de la Commission (ci-après appelée la «section du statut»). À cette audience préliminaire, il appartient au demandeur de statut de prouver que la revendication du statut de réfugié est recevable et qu'elle a un minimum de fondement (voir le paragraphe 48(2) de la Loi sur l'immigration modifié par S.C. 1988, chap. 35 [art. 14]). Si l'un ou l'autre des deux membres du jury détermine que la personne a non seulement présenté une demande recevable mais a, aussi prouvé que cette demande a un minimum de fon- dement, la section du statut de réfugié de la Com mission entendra alors la revendication du statut de réfugié (voir l'article 48.02 de la Loi sur l'im- migration modifié par S.C. 1988, chap. 35 [art. 14] ).
Les nouvelles procédures, tant celle qui exige l'autorisation de notre Cour avant l'introduction d'une instance devant elle que celle qui exige qu'un jury de deux personnes présélectionne les revendi- cations du statut de réfugié avant que la section du statut en soit saisie, étaient en vigueur le 1 »r janvier 1989.
Les présents requérants sont arrivés au Canada le 1e" janvier 1989. Ils prétendent être des réfugiés au sens de la Convention' provenant de la Républi- que populaire chinoise. Le 2 janvier 1989, les requérants ont subi un interrogatoire à leur point d'entrée au pays ainsi que le requiert l'article 12 de la Loi sur l'immigration 2 . On a pris des notes de cet interrogatoire. Les requérants en ont reçu un résumé.
' Le paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration modifié par S.C. 1988, chap. 35 [art. 1], définit ainsi le «réfugié au sens de la Convention»: une personne
a) qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques:
(i) soit se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,
(ii) soit n'ayant pas de nationalité et se trouvant hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ou, en raison de cette crainte, ne veut y retourner; ...
2 L.R.C. (1985), chap. 1-2.
12. (1) Quiconque cherche à entrer au Canada est tenu de se présenter devant un agent d'immigration à un point d'entrée ou à tout autre lieu désigné par l'agent principal en vue de l'interrogatoire visant à déterminer s'il est autorisé à entrer au Canada ou s'il peut y être admis.
(2) Pour l'application du présent article, quiconque cherche à rentrer au Canada, qu'il ait été ou non autorisé à se rendre dans un pays étranger, est réputé chercher à entrer au Canada.
(3) L'agent d'immigration qui procède à l'interrogatoire peut, lorsqu'il le juge à propos:
a) confier la fin de l'interrogatoire à un autre agent d'immigration;
b) retenir la personne interrogée ou prendre une mesure à cet effet contre elle.
(4) L'intéressé doit répondre franchement aux questions de l'agent d'immigration et produire toutes les pièces que ce dernier exige pour établir s'il est autorisé à entrer au Canada ou s'il peut y être admis.
L'audience préliminaire prévue par l'article 48 de la Loi a été fixée pour le 26 janvier 1989. Pour se préparer à cette audience, l'avocat des requé- rants a tenté d'obtenir des agents d'immigration une copie des notes prises au cours de l'interroga- toire le 2 janvier 1989. Il soutient que la communi cation de ces notes avant l'audience prévue par l'article 48 est essentielle pour que les requérants y soient traités de façon équitable. Il est allégué que la communication de ces documents est nécessaire pour que les requérants prennent connaissance de la preuve qui va être présentée contre eux à l'au- dience préliminaire.
L'un des requérants, Chi Kin Cham, a signé un affidavit à l'appui de la présente requête, dans lequel il déclare entre autres:
[TRADUCTION] 3. ... le lendemain de mon arrivée, j'ai été interrogé par des agents de l'Immigration canadienne sur les raisons de ma venue au Canada. Cet interrogatoire s'est déroulé en l'absence de tout conseiller juridique.
4. Les agents de l'Immigration canadienne ont indiqué que, si je ne répondais pas franchement à leurs questions, on me renver- rait en République populaire chinoise.
5. ... je ne sais pas lesquelles de mes déclarations ont été consignées ni ne me rappelle de la nature précise des questions posées.
7. Je crois vraiment que ces déclarations seront utilisées contre moi au cours de l'audience sur mon statut de réfugié. Je crois également que, pour être en mesure de répondre aux points soulevés dans les déclarations, je devrais pouvoir examiner ce que je suis censé avoir dit au moment de l'interrogatoire initial.
Cet affidavit a été signé par le requérant après qu'on le lui eut interprété et expliqué (voir l'affida- vit de Peter Wong en date du 16 janvier 1989).
Procédure suivie
La présente requête a d'abord été présentée devant moi à une session ordinaire d'audition des requêtes à Calgary, le 17 janvier 1989. Bien que l'avis de requête introductive d'instance ne fasse pas expressément référence à l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale, le redressement demandé est, au fond, de cette nature. La requête n'avait pas encore été signifiée en bonne et due forme à l'intimé le 17 janvier. Je ne pouvais manifestement pas statuer sur la requête à ce moment-là. Les Règles de la Cour fédérale en matière d'immigra- tion, DORS/89-26 (décret du C.P. 1988-2794) ont été enregistrées auprès du greffier du Conseil privé le 27 décembre 1988 et sont entrées en vigueur à
cette date. Elles n'avaient pas encore été publiées dans la Gazette du Canada le 17 janvier 1989. Étant donné qu'il faut statuer rapidement sur la demande d'autorisation d'introduire une instance fondée sur l'article 18 dans la présente affaire, l'avocat de l'intimé et l'avocat des requérants ont convenu que le moyen le plus expéditif de procéder serait de plaider cette requête le 20 janvier 1989 en recourant au procédé de la conférence télépho- nique. C'est la procédure qui, du consentement des parties, a été suivie.
Allégations respectives
Ainsi que je l'ai déjà mentionné, l'avocat des requérants soutient que la communication des notes de l'interrogatoire est nécessaire pour que ceux-ci puissent être traités de façon équitable à l'audience. Il allègue que la communication de ces documents en l'espèce est prérequise à la tenue d'une audience équitable parce que les requérants étaient sous une certaine contrainte (un certain stress du moins) lorsqu'ils ont été interrogés; qu'ils n'ont pas bénéficié des services d'un avocat durant l'interrogatoire; qu'il y avait un risque élevé d'in- terprétations erronées entre l'interrogeur et l'inter- rogé vu qu'ils devaient communiquer par l'inter- médiaire d'un interprète. L'avocat des requérants cherche à obtenir copie des notes afin de les revoir avec les requérants avant la tenue de l'audience prévue par l'article 48. L'avocat avance que les requérants devraient avoir le droit de revoir les notes afin de s'assurer de leur exactitude et égale- ment de vérifier s'ils ont compris les questions qui leur ont été demandées. L'avocat prétend que ce qu'il tente d'obtenir est analogue aux droits que la Loi sur la protection des renseignements person- nels, L.R.C. (1985), chap. P-21, confère aux parti- culiers. Sous le régime de cette Loi, les particuliers ont le droit d'examiner les renseignements que le gouvernement détient à leur sujet et de les corriger au besoin. Je résumerais les allégations de l'avocat en disant qu'il cherche à éviter les surprises durant l'audience préliminaire.
Voici les allégations de l'avocat de l'intimé: il n'existe pas de règle d'équité qui oblige l'une ou l'autre partie à divulguer avant une audience tous les éléments de preuve auxquels elle a l'intention de recourir durant cette audience; la procédure prévue par les modifications apportées à la Loi sur l'immigration est une procédure sommaire et elle
ne le sera plus si la demande des requérants est accueillie; si les requérants ont droit de prendre connaissance des notes, l'initimé devrait également avoir le droit de prendre connaissance de tous les documents en possession des requérants. L'avocat de l'intimé fait remarquer que l'arbitre et le membre de la section du statut qui tiendront l'au- dience préliminaire n'auront pas reçu avant l'au- dience copie des notes qui leur seront alors présen- tées; si les notes sont utilisées, ce sera dans le but de contester les éléments de preuve présentés à l'audience par les requérants pour le motif que ces éléments de preuve ne concordent pas avec les déclarations faites au moment de l'interrogatoire tenu au point ils sont entrés au Canada. L'avo- cat fait aussi valoir que la procédure visant à déterminer la validité d'une revendication du statut de réfugié est de nature «civile» et qu'il appartient aux requérants de prouver qu'ils répon- dent aux conditions requises pour être considérés comme des réfugiés au sens de la Convention. En dernier lieu, comme je l'ai indiqué précédemment, les requérants out reçu un résumé qui, m'a-t-on fait comprendre, contient certains «faits saillants» de l'interrogatoire.
Conclusions
La Cour n'a pas à déterminer, au moment de la présentation d'une demande d'autorisation d'intro- duire une instance, quelles allégations seront rete- nues à la suite d'une audience. Elle doit établir si les requérants ont une cause défendable, une ques tion importante à faire trancher. Dans l'affirma- tive, on doit accorder l'autorisation et permettre aux requérants de se faire entendre.
En l'espèce, il n'y a aucune loi qui soit directe- ment concernée. Ni l'un ni l'autre des avocats n'ont pu trouver quelque décision judiciaire trai- tant directement de la question de savoir si, dans certains cas, une partie de la preuve devrait être communiquée à la partie adverse avant la tenue de l'audience afin de lui permettre d'être traitée de façon équitable à cette audience. L'avocat des requérants a cité les principes généraux d'équité, tout particulièrement dans la mesure ils se rapportent à la nécessité pour une personne de savoir ce qu'on lui reproche: Jones & Villars, Principles of Administrative Law (1985, Carswell)
aux pages 176 et 177'; Evans, Janisch, Mullan, Risk, Administrative Law Cases, Text, and Mate
rials (1980) aux pages 156 159. À cet égard, il est très évident que la procédure qui est nécessaire dans n'importe quel cas donné afin de garantir une audience équitable dépendra énormément des cir- constances 4 . L'une de ces circonstances est les conséquences qui découleront des décisions ren- dues à l'audience. En l'espèce, les conséquences sont importantes. Le défaut de prouver que la revendication du statut de réfugié, même si la décision du jury de sélection peut faire l'objet d'un appel, établit le fondement de tout ce qui suit.
Dans sa plaidoirie, l'avocat de l'intimé a fait référence à l'arrêt Bauer c. La Reine (Commission de l'immigration du Canada), [1984] 2 C.F. 455 (i re inst.), et au texte de Sgayias, Kinnear, Rennie et Saunders intitulé Federal Court Practice -1988 (Carswell), à la page 100, ainsi qu'à l'arrêt Piperno c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigra- tion (1985), 64 N.R. 313 (C.A.F.). Le passage du texte Fede... 1 Court Practice -1988 cité traite de cas il n'est pas à propos de rendre des ordon- nances de prohibition et de l'incapacité des tribu- naux de prononcer des injonctions contre la Cou- ronne. Ce n'est pas une question importante. Bien que par leur requête les requérants demandent expressément une ordonnance de prohibition et une injonction, si notre Cour a le droit d'accorder l'autorisation d'introduire une instance fondée sur l'article 18, elle a également le droit de surseoir à la tenue de l'audience préliminaire jusqu'à ce qu'il soit statué sur la requête fondée sur l'article 18. C'est un pouvoir accessoire (voir la décision rendue par le juge Marceau dans l'affaire Bhattia). Quant
3 L'avocat a fait précisément référence aux affaires mention- nées dans cette partie du texte: Nicholson c. Haldimand-Nor- folk Regional Board of Commissioners of Police, [1979] 1 R.C.S. 311; McCarthy v. Bd. of Trustees of Calgary Roman Catholic Separate S. Dist. No. 1, [1979] 4 W.W.R. 725 (lte inst. Alb.); Campeau Corpn. v. Calgary City Council (1980), 12 Alta. L.R. (2d) 379 (C.A.); Martineau c. Comité de discipline de l'Institution de Matsqui, [1980] 1 R.C.S. 602; Harvie v. Calgary Regional Planning Commn. (1978), 8 Alta. L.R. (2d) 166 (C.A.).
4 Martineau c. Comité de discipline de l'Institution de Mats- qui, [1980] 1 R.C.S. 602; Singh et autres c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1985] 1 R.C.S. 177, la p. 212 et suivantes; (1985), 58 N.R. 1, à la p. 62 et suivantes; Muliadi c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1986] 2 C.F. 205 (C.A.), à la p. 215 et suivantes.
à l'affaire Bauer, on a décidé que ce n'était pas un déni de justice naturelle (équité) que de refuser à un demandeur le droit de faire transcrire les exa- mens périodiques des motifs en vertu desquels il était détenu dans un établissement à sécurité maxi mum, conformément aux paragraphes 104(6) et (7) [maintenant les paragraphes 103(6) et (7)] de la Loi sur l'immigration. La Cour a également statué que les examens des motifs de la détention ne faisaient pas partie du processus d'enquête et que par conséquent la loi n'oblige pas à garantir la présence d'un sténographe. La Cour a aussi traité de l'applicabilité des ordonnances de prohibition et a cité Halsbury's Laws of England, volume 1, 4 e éd., par. 130, page 138, pour indiquer qu'il n'y a pas lieu à prohibition [TRADUCTION] «lorsqu'il s'agit de corriger la pratique ou la procédure d'un tribunal d'instance inférieure». Le premier point traité dans l'affaire Bauer ne concerne pas vrai- ment la présente instance. Le requérant ne cherche pas à faire transcrire une procédure ou un interro- gatoire mais plutôt à avoir accès à une «transcrip- tion» qui a déjà été faite. On rejoint sur deux points les observations formulées au sujet de l'op- portunité de la prohibition: premièrement, ainsi qu'il a déjà été mentionné, si l'autorisation est accordée, notre Cour a sûrement le pouvoir acces- soire de surseoir à l'instance; deuxièmement, immédiatement avant le passage susmentionné extrait de Halsbury figure un texte qui indique que la prohibition est accordée lorsqu'il y a un manquement aux règles de la justice naturelle. C'est un manquement aux règles de l'équité que les requérants font valoir en l'espèce.
L'affaire Piperno est plus pertinente. Il a été jugé que, selon l'ancienne procédure, le ministre de l'Emploi et de l'Immigration n'était pas tenu de communiquer à l'avance tous les éléments de preuve qu'il avait l'intention de présenter à la Commission d'appel de l'immigration, pour qu'un demandeur du statut de réfugié soit traité de façon équitable devant la Commission. Je ne suis pas en désaccord avec cette déclaration, mais ce que je crois que l'avocat veut dire, c'est que, dans le cadre particulier d'une audience préliminaire, il est nécessaire non pas que toute la preuve de l'intimé soit communiquée à l'avance mais qu'une certaine partie de celle-ci soit communiquée d'avance, à savoir les notes prises durant l'interrogatoire tenu au point d'entrée.
On peut disposer facilement de certaines des allégations présentées par l'avocat de l'intimé. Elles ne sont pas très convaincantes. L'obligation de communiquer les notes ne sapera pas le carac- tère sommaire de cette procédure. Les notes exis tent; il ne serait pas difficile sur le plan adminis- tratif de fournir aux requérants une photocopie de celles-ci. Les requérants ne demandent pas que l'intimé leur communique tous ses éléments de preuve; la communication des notes ne mènerait pas à conclure à l'obligation de fournir tous les documents dont les deux parties sont en possession. J'accepte en même temps l'allégation de l'avocat de l'intimé selon laquelle, si on invoque les notes au cours du contre-interrogatoire à l'audience pré- liminaire, il ne fait aucun doute qu'elles seront transmises aux requérants à ce moment-là. Il reste à savoir si les notes doivent être communiquées avant l'audience, pour que les requérants y soient traités de façon équitable.
Je suis convaincue que les requérants présentent une cause défendable. Ils ont prouvé qu'il existait une question importante à trancher. Par consé- quent, l'autorisation d'introduire une requête fondée sur l'article 18 doit être accordée. J'en suis venue à cette conclusion pour les raisons suivantes: (1) aucune loi n'est directement concernée; (2) bien qu'il existe un principe selon lequel il n'est généralement pas nécessaire de communiquer tous les éléments de preuve à une personne avant la tenue d'une audience, on peut être justifié en l'espèce de réclamer la communication des notes particulières de l'interrogatoire en question; (3) il ressort de la jurisprudence que ce qui sera réclamé, en équité, dépendra des circonstances de chaque affaire et de l'importance des répercussions à l'égard du requérant; (4) en l'espèce, le fait que l'audience préliminaire se veut une procédure som- maire et que les répercussions peuvent êtres graves pour le requérant, ainsi que les circonstances dans lesquelles les déclarations ont été consignées mili- tent en faveur de la demande des requérants. À mon avis, ceux-ci ont prouvé qu'il y avait une question importante à débattre. L'autorisation sera accordée.
Dans leur requête, les requérants demandent également de proroger le délai prévu pour l'audi- tion de la requête fondée sur l'article 18. Les Règles de la Cour fédérale en matière d'immigra-
tion prévoient que l'audition d'une requête de ce genre doit se faire dans les 15 jours suivant la date l'autorisation d'introduire une instance a été accordée. Je ne rendrai pas d'ordonnance quant à la prorogation de délai. Cela n'empêche pas un autre juge de notre Cour de statuer sur la question à l'occasion d'une autre requête qui pourrait être présentée par l'une ou l'autre des parties si elles le désirent.
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