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T-1288-88
Sa Majesté la Reine (demanderesse)
c.
Helen E. McLaren (défenderesse)
RÉPERTORIÉ: CANADA C. MCLAREN (I r« INST.)
Section de première instance, juge MacKay— Ottawa, 19 septembre 1990.
Impôt sur le revenu Calcul du revenu Déductions Frais de garde d'enfants La déduction a été refusée dans une nouvelle cotisation L'époux n'a eu aucun revenu L'art. 63(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu permet la déduction des frais de garde d'enfants lorsque le revenu du contribuable dépasse celui de la personne assumant les frais d'entretien des enfants dans certains cas, dont aucun ne s'ap- plique en l'espèce L'art. 63(2) ne s'applique pas lorsque le revenu de la personne assumant les frais d'entretien des enfants est égal à zéro Le mot «revenu» dans son sens ordinaire et grammatical et dans le contexte de la Loi présup- pose l'existence d'un montant positif.
Il s'agissait d'un appel d'une décision par laquelle la Cour canadienne de l'impôt a accueilli l'appel que la contribuable a interjeté à l'égard d'une nouvelle cotisation. En 1983, la contri- buable a déduit une somme de 535 $ au titre de frais de garde d'enfants. Son époux n'a eu aucun revenu en 1983. Le paragra- phe 63(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu permet une déduction lorsque le revenu du contribuable dépasse celui de la personne assumant les frais d'entretien des enfants dans cer- tains cas précis, dont aucun ne s'applique en l'espèce. La Cour canadienne de l'impôt a décidé que le paragraphe 63(2) ne s'applique pas lorsque la «personne assumant les frais d'entre- tien des enfants» n'a aucun revenu. La question en litige est celle de savoir si le paragraphe 63(2) interdit au contribuable de réclamer la déduction des frais de garde d'enfants lorsque la personne assumant les frais d'entretien des enfants n'a aucun revenu.
Jugement: l'action devrait être rejetée.
Le mot «revenu» du paragraphe 63(2), lorsqu'il est lu tant dans son sens grammatical et ordinaire que dans le contexte de la Loi, présuppose l'existence d'un montant positif. Lorsque la personne assumant les frais d'entretien des enfants n'a pas de revenu, le paragraphe 63(2) ne s'applique pas; il faut alors s'en remettre à l'alinéa 63(1)6) et le contribuable a droit à la déduction. Cette interprétation est compatible avec le concept juridique employé dans la Loi de l'impôt sur le revenu. Le paragraphe 5(1), qui définit le revenu tiré d'une charge ou d'un emploi, le paragraphe 9(1), qui permet de calculer le revenu tiré d'une entreprise ou d'un bien, et le paragraphe 39(1), qui définit le gain en capital, présupposent tous la réception d'un montant positif ou d'un montant net. L'utilisation des mots «revenu pour une année d'imposition» et «revenu pour cette année» ainsi que de l'expression «(en présumant que les deux revenus sont calculés ...)» présuppose que chacune des parties a reçu un revenu au sens de la Loi. En outre, l'ensemble de l'article 3, qui est la disposition se rapprochant le plus d'une définition du mot «revenu» selon la Loi, décrit la démarche qui
consiste à déduire un montant d'un autre jusqu'à l'obtention d'un montant final qui représente le revenu du contribuable pour l'année. L'utilisation explicite des mots «si reste il y dans la dernière phrase de l'article présuppose clairement l'exis- tence d'un montant positif avant que l'on puisse dire que le contribuable a eu un revenu aux fins de la Loi. Une des conditions fondamentales sous-jacentes de la Loi de l'impôt sur le revenu est le fait que le mot «revenu» signifie «l'accroissement net du pouvoir économique». Ce concept ne s'applique pas lorsqu'il n'y a pas de revenu. Aucun élément du paragraphe 63(2) n'indique que le mot «revenu» devrait avoir un sens différent de celui qu'il a tout au long de la Loi. Si une disposition n'est pas rédigée de façon à donner suite à l'inten- tion du législateur, les tribunaux devraient pouvoir permettre au contribuable de se prévaloir des avantages de la disposition telle qu'elle est libellée.
L'article 63 a été modifié de façon à s'appliquer également tant aux hommes qu'aux femmes, à la suite de la décision par laquelle le Tribunal des droits de la personne a jugé que la disposition était discriminatoire, parce qu'elle ne permettait pas aux hommes de bénéficier de la déduction, sauf s'ils n'étaient pas mariés, s'ils étaient séparés ou que leur épouse était incapa ble de s'occuper des enfants. La distinction faite entre les personnes qui gagnent un revenu supérieur et inférieur dans la disposition actuelle présuppose que le contribuable et la per- sonne assumant les frais d'entretien ont tous deux un revenu pour l'année d'imposition au sens de l'article 3. Ce revenu, le «reste, si reste il y a», après les calculs faits selon l'article 3, doit correspondre à un «accroissement net du pouvoir économique»; il ne peut s'agir d'un revenu inexistant.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, chap. 63, art. 2(2) (mod. par S.C. 1984, chap. 1, art. 1), 3, (mod. par S.C. 1977-78, chap. 1, art. 1; chap. 42, art. 1; 1984, chap. 1, art. 2), 4(1), 5(1), 9(1), 39(1) (mod. par S.C. 1974-75-76, chap. 26, art. 15; 1976-77, chap. 4, art. 9; chap. 42, art. 3; 1979, chap. 5, art. 11; 1980-81- 82-83, chap. 48, art. 16; chap. 140, art. 18; 1984, chap. 1, art. 13), 56(1)s) (mod. par S.C. 1980-81-82-83, chap. 48, art. 25; chap. 140, art. 26), u) (ajouté par S.C. 1980-81-82-83, chap. 140, art. 26), 63 (mod. par S.C. 1984, chap. 1, art. 25; chap. 45, art. 22), 122.2 (mod. par S.C. 1984, chap. 1, art. 65), 178(2) (mod. par S.C. 1980-81-82-83, chap. 158, art. 58; 1985, chap. 45, art. 75).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Fiset (N.) c. M.R.N., [1988] 1 C.T.C. 2335; (1988), 88 DTC 1223 (C.C.I.); Canterra Energy Ltd. c. La Reine, [1987] 1 C.T.C. 89; (1986), 87 DTC 5019; 71 N.R. 394 (C.A.F.).
DÉCISIONS EXAMINÉES:
Tahsis Company Ltd. c. R., [1980] 2 C.F. 269; [1979] CTC 410; (1979), 79 DTC 5328 (1'» inst.); Johns -Man- ville Canada Inc. c. La Reine, [1985] 2 R.C.S. 46;
(1985), 21 D.L.R. (4th) 210; [1985] 2 CTC 111; 85 DTC 5373; 60 N.R. 244; Bailey et al. v. M.N.R. (1980), 1 C.H.R.R. 193 (T.D.P.).
DOCTRINE
Concise Oxford Dictionary of Current English, 7th ed.,
Oxford: Clarendon Press, 1982, «remainder» («reste»). Driedger, Elmer A. Construction of Statutes, 2nd ed.,
Toronto: Butterworths, 1983.
Rapport de la Commission royale d'enquête sur la fisca- lité, tome 1, Ottawa: Imprimeur de la Reine, 1966 (prés.: K. M. Carter).
Shorter Oxford English Dictionary, vol. I, 3rd ed., Oxford: Clarendon Press, 1986, «income» («revenu»). Webster's Third New International Dictionary of thé English Language, (Unabridged), Springfield, Massa- chusetts: Merriam—Webster Inc., 1986, «income» («revenu»).
AVOCATS:
Max J. Weder pour la demanderesse. Werner H. G. Heinrich pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour la demanderesse.
Freeman & Company, Vancouver, pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE MACKAY: Il s'agit d'un appel interjeté par la demanderesse Sa Majesté la Reine à l'égard de la décision en date du 22 février 1988 [[1988] 1 C.T.C. 2371] par laquelle la Cour canadienne de l'impôt a accueilli l'appel de la défenderesse relati- vement à un avis de nouvelle cotisation établi par le ministre du Revenu national en 1985 pour l'an- née d'imposition 1983.
Les avocats des parties ont déposé un exposé conjoint des faits qui peut se résumer comme suit:
1. La défenderesse demeure dans la municipalité de North Vancouver, en Colombie-Britannique.
2. Le revenu de la défenderesse pour 1983 s'éle- vait à 43 851 $.
3. En 1983, l'époux de la défenderesse était Martin McLaren.
4. En 1983, l'époux de la défenderesse n'a eu aucun revenu.
5. En 1983, les enfants de la défenderesse étaient âgés de moins de quatorze ans.
6. En 1983, les enfants étaient habituellement sous la garde de la défenderesse.
7. L'époux de la défenderesse était une personne assumant les frais d'entretien des enfants au sens du paragraphe 63(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu.
8. L'époux de la défenderesse n'était pas une per- sonne au sens des sous-alinéas 63(2)b)(iii), (iv), (v) ou (vi) de la Loi de l'impôt sur le revenu.
9. La défenderesse a payé une somme de 535 $ au titre de frais de garde d'enfants engagés à l'égard des enfants.
10. Dans le calcul de son revenu pour son année d'imposition 1983, la défenderesse a déduit les frais de garde des enfants qu'elle avait engagés.
11. Dans un avis de nouvelle cotisation en date du 18 mars 1985, le ministre du Revenu national a refusé la déduction que la défenderesse avait récla- mée au titre de frais de garde d'enfants pour son année d'imposition 1983, soit la somme de 535 $.
12. Pour établir cette nouvelle cotisation à l'égard de la défenderesse, le ministre du Revenu national s'est fondé sur le fait que le revenu de celle-ci pour l'année 1983, soit 43 851 $, dépassait le revenu en 1983 d'une personne assumant les frais d'entretien des enfants admissibles pour lesquels les frais de garde d'enfants ont été réclamés.
La disposition qui permet de déduire les frais de garde d'enfants est l'article 63 de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, chap. 63, et ses modifications [S.C. 1984, chap. 1, art. 25; chap. 45, art. 22]. Voici les extraits pertinents de cette disposition:
63. (1) Sous réserve du paragraphe (2), il peut être déduit dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une année d'imposition le total des montants dont chacun représente un montant payé dans l'année à titre ou au titre de frais de garde d'enfants pour un enfant admissible du contribuable pour l'année
a) par le contribuable, lorsqu'il est un contribuable visé au paragraphe (2) et que la personne assumant les frais d'entre- tien de l'enfant pour l'année est une personne visée au sous-alinéa (2)b)(vi), ou
b) par le contribuable ou la personne assumant les frais d'entretien de l'enfant pour l'année, dans tout autre cas,
dans la mesure le montant
c) n'est pas inclus par un autre particulier dans le calcul du montant déductible en vertu du présent paragraphe,
d) n'est pas un montant (sauf un montant qui est inclus dans le calcul du revenu d'un particulier et qui n'est pas déductible dans le calcul de son revenu imposable) à l'égard duquel un particulier a droit, ou avait droit, à un remboursement ou à une autre forme d'aide,
et dont le paiement est établi en produisant auprès du Ministre un ou plusieurs reçus délivrés par le bénéficiaire du paiement et portant, lorsque celui-ci est un particulier, le numéro d'assu- rance sociale de ce particulier; le total ne doit pas être supérieur à l'excédent éventuel
e) du moins élevé des montants suivants:
(i) $8,000,
(ii) le produit de $2,000 par le nombre d'enfants admissi- bles du contribuable pour l'année pour lesquels les frais de garde d'enfants ont été supportés, ou
(iii) 2 / 3 du revenu gagné par le contribuable pour l'année sur
J) le total des montants dont chacun représente un montant déduit, à l'égard des enfants admissibles du contribuable visés au sous-alinéa e)(ii), en vertu du présent paragraphe pour l'année par un particulier (autre que le contribuable) à qui le paragraphe (2) s'applique pour l'année.
(2) Lorsque le revenu, pour une année d'imposition, d'un contribuable qui a un enfant admissible pour l'année est supé- rieur au revenu, pour cette année, d'une personne assumant les frais d'entretien de cet enfant (en présumant que les deux revenus sont calculés sans tenir compte du présent article et des alinéas 56(1)s) et u)) le montant que le contribuable peut déduire en vertu du paragraphe (1) pour l'année à titre ou au titre de frais de garde d'enfants ne doit pas être supérieur au moins élevé des montants suivants:
a) le montant qu'il pourrait, sans le présent paragraphe, déduire pour l'année en vertu du paragraphe (1); ou
b) le produit du moins élevé des montants suivants:
(i) $240, ou
(ii) $60 multiplié par le nombre d'enfants admissibles du contribuable pour l'année pour lesquels les frais de garde d'enfants ont été engagés
par le nombre de semaines de l'année au cours desquelles les frais de garde d'enfants ont été engagés et tout au long desquelles la personne assumant les frais d'entretien était visée dans un ou plusieurs des sous-alinéas suivants:
(iii) une personne qui fréquente à plein temps un établisse- ment d'enseignement désigné (au sens de l'alinéa 110(9)a)),
(iv) une personne déclarée par un médecin qualifié comme une personne qui,
(A) en raison d'une infirmité mentale ou physique et de l'obligation, pendant au moins 2 semaines de l'année, de garder le lit, de demeurer dans un fauteuil roulant ou d'effectuer un séjour dans un hôpital, un asile ou tout autre établissement semblable, a été dans l'incapacité de s'occuper de ses enfants, ou
(B) en raison d'une infirmité mentale ou physique, a été dans l'année et sera vraisemblablement, pendant une longue période indéfinie, dans l'incapacité de s'occuper de ses enfants,
(y) une personne qui a effectué dans l'année un séjour d'au moins 2 semaines dans une prison ou une autre institution semblable, ou
(vi) une personne vivant séparée du contribuable, pendant une période d'au moins 90 jours commençant dans l'année, à la suite d'une rupture de leur mariage ou de leur vie commune.
(2.1) Pour l'application du présent article, lorsque, dans une année d'imposition quelconque, le revenu d'un contribuable qui a un enfant admissible pour l'année et le revenu de la personne assumant les frais d'entretien de l'enfant sont égaux (en présu- mant que les deux revenus sont calculés sans tenir compte du présent article et des alinéas 56(1)s) et u)) aucune déduction n'est permise en vertu du présent article au contribuable ni à la personne assumant les frais d'entretien de l'enfant, sauf s'ils choisissent conjointement de traiter le revenu de l'un d'eux comme étant plus élevé que celui de l'autre pour l'année.
Les expressions «frais de garde d'enfants», «enfant admissible» et «personne assumant les frais d'entretien» sont toutes définies au paragraphe 63(3) de la Loi. Il est admis que le montant de 535 $ réclamé est un montant qui répond à la définition des frais de garde d'enfants, que, en 1983, les enfants pour lesquels les frais ont été engagés étaient des enfants admissibles et que, Martin McLaren, l'époux de la défenderesse, était une personne assumant les frais d'entretien confor- mément à la Loi.
Le débat devant notre Cour soulève donc une question d'interprétation législative: le paragraphe 63(2) refuse-t-il au contribuable le droit de récla- mer la déduction pour frais de garde d'enfants lorsque la personne assumant les frais d'entretien n'avait aucun revenu au cours de l'année d'imposi- tion pertinente? Le juge Taylor, de la Cour cana- dienne de l'impôt, a répondu à cette question par la négative. Accueillant l'appel interjeté par la contribuable à l'égard de la nouvelle cotisation, il a donné l'explication suivante, à la page 2372:
Selon moi, la question en litige a été tranchée par cette Cour dans un jugement récent du juge en chef Couture, Normand Fiset c. M.R.N., [1988] 1 C.T.C. 2335; [88 D.T.C. 1223], ce dernier en arrive à la conclusion que lorsque la «personne assumant les frais d'entretien,, n'a pas de revenu, le paragraphe 63(2) de la Loi ne s'applique pas.
La demanderesse a soutenu, depuis l'établisse- ment de la nouvelle cotisation, que la disposition du paragraphe 63(2) est essentiellement compara tive de par sa nature. En termes simples, cela
signifie que, lorsque le revenu du contribuable est supérieur à celui de la personne assumant les frais d'entretien et qu'aucune des circonstances restric- tives indiquées aux sous-alinéas (iii) à (vi) ne s'applique, le contribuable ne peut réclamer aucune déduction. La demanderesse allègue que l'examen de la question de savoir si le «revenu» aux fins de l'article 63 constitue un montant positif ne fait qu'embrouiller la question. Selon la demande- resse, en l'espèce, le revenu de la défenderesse est supérieur à zéro et la déduction doit donc être refusée. Cette conclusion est logique, d'après la demanderesse, puisque, lorsque la personne assu- mant les frais d'entretien n'est pas visée par l'une ou l'autre des situations décrites aux sous-alinéas 63(2)b)(iii) à (vi), le produit obtenu à l'alinéa 63(2)b) est égal à zéro et l'ensemble du paragra- phe exclut toute déduction qui dépasse le moindre des montants calculés aux alinéas 63(2)a) et b).
À l'appui de cette prétention, la demanderesse cite l'article 3 [mod. par S.C. 1977-78, chap. 1, art. 1; chap. 42, art. 1; 1984, chap. 1, art. 2] de la Loi, qui prescrit la méthode à suivre pour calculer le revenu du contribuable:
3. Le revenu d'un contribuable pour une année d'imposition, aux fins de la présente Partie, est son revenu pour l'année, déterminé selon les règles suivantes:
a) en calculant le total des sommes qui constituent chacune le revenu du contribuable pour l'année (autre qu'un gain en capital imposable résultant de la disposition d'un bien), dont la source se situe à l'intérieur ou à l'extérieur du Canada, y compris, sans restreindre la portée générale de ce qui pré- cède, le revenu tiré de chaque charge, emploi, entreprise et bien;
b) en calculant la fraction, si fraction il y a,
(i) du total
(A) du total de ses gains en capital imposables pour l'année tirés de la disposition de biens, autres que des biens personnels désignés,
(B) de son gain net imposable pour l'année tiré de la disposition de biens personnels désignés, et
(C) de l'excédent éventuel
(I) du total de ses gains en capital imposables pour l'année tirés de régimes de placements en titres indexés
sur
(II) le total de ses pertes en capital déductibles pour l'année résultant de régimes de placements en titres indexés,
qui est en sus
(ii) de la fraction, si fraction il y a, de ses pertes en capital déductibles pour l'année, résultant de la disposition de
biens autres que des biens personnels désignés, qui est en sus des pertes déductibles au titre d'un placement d'entre- prise pour l'année, subies par le contribuable;
c) en calculant la fraction, si fraction il y a, du total établi selon l'alinéa a) plus le montant établi selon l'alinéa b), qui est en sus du total des déductions permises par la sous-section e lors du calcul du revenu du contribuable pour l'année, (sauf les déductions ou la partie de ces déductions, si déductions il y a eu, dont il a été tenu compte lors du calcul du total visé à l'alinéa a));
d) en calculant l'excédent éventuel du reste établi selon l'alinéa c) sur le total
(i) du total des montants dont chacun représente sa perte pour l'année résultant d'une charge, d'un emploi, d'une entreprise ou d'un bien, ou sa perte déductible au titre d'un placement d'entreprise pour l'année, et
(ii) de l'excédent éventuel du montant établi selon la sous-disposition b)(i)(C)(II) sur le montant établi selon la sous-disposition b)(i)(C)(I); et
e) en calculant la fraction, si fraction il y a, du reste établi selon l'alinéa d), qui est en sus du moins élevé des deux montants suivants:
(i) la fraction, si fraction il y a, du montant établi selon le sous-alinéa b)(ii), qui est en sus du total établi selon le sous-alinéa b)(i), ou
(ii) $2,000 ou, si le contribuable est une corporation, un montant égal à zéro;
et le reste, si reste il y a, ainsi obtenu selon l'alinéa e) constitue le revenu du contribuable pour l'année aux fins de la présente Partie.
La demanderesse souligne que le montant obtenu à la fin de la démarche décrite à l'article 3 est le revenu du contribuable. C'est ce montant qui doit être calculé aux fins de l'article 63 et ce montant peut comprendre le nombre zéro. Toujours selon la demanderesse, la Cour canadienne de l'impôt a commis une erreur, tant dans la présente cause que dans l'arrêt Fiset, précité [Fiset (N.) c. M.R.N., [1988] 1 C.T.C. 2335], en se demandant plutôt s'il y avait un revenu tiré d'une source, comme un revenu d'emploi, et c'est cette conception erronée qui a incité la Cour à conclure que le «revenu» doit être un montant positif. La demanderesse fait également valoir que la Cour canadienne de l'im- pôt a eu tort de conclure que le mot «reste» à la fin de l'article 3 sous-entend un montant positif. Selon la demanderesse, si on accepte la définition du dictionnaire proposée par la défenderesse, selon laquelle le «reste» est le nombre obtenu après une soustraction ou une division, alors, lorsqu'on divise 63 par 9, on obtient comme résultat le nombre 7 et un reste égal à zéro. Ainsi, zéro est un nombre comme tous les autres, sauf qu'il tient une place très importante dans le système numérique.
Qui plus est, lorsqu'on examine la définition du revenu imposable qui apparaît au paragraphe 2(2) [mod. par S.C. 1984, chap. 1, art. 1] de la Loi, selon lequel «Le revenu imposable d'un contribua- ble pour une année d'imposition est son revenu pour l'année plus l'addition et moins les déductions permises par la section C», le contribuable n'ayant aucun revenu peut et devrait appartenir à cette définition. Il n'est que logique, selon la demande- resse, qu'un contribuable puisse commencer avec un revenu égal à zéro et ce n'est que lorsque son revenu imposable est égal à zéro qu'il ne paie aucun impôt. Pour en arriver à une interprétation qui soit logiquement compatible avec le but géné- ral de l'ensemble de la Loi, il faut inclure dans le revenu le nombre zéro. En effet, il serait absurde, selon la demanderesse, de suivre le raisonnement de la Cour canadienne de l'impôt et de dire que, conformément à l'article 63, le contribuable ayant le revenu le plus élevé peut réclamer la déduction pour frais de garde d'enfants lorsque la personne assumant les frais d'entretien n'a aucun revenu alors que, lorsque cette personne a un revenu positif (par exemple, 1 $), seule ladite personne réclame la déduction. De l'avis de la demande- resse, ce résultat n'est ni rationnel ni compatible avec le but de la Loi.
La demanderesse cite également d'autres dispo sitions de la Loi. Selon les alinéas 56(1)s) [mod. par S.C. 1980-81-82-83, chap. 48, art. 25; chap. 140, art. 26] et u) [ajouté par S.C. 1980-81-82-83, chap. 140, art. 26], c'est une comparaison des revenus qui permet de répartir entre le contribua- ble et son conjoint certains montants versés à titre de prestations d'aide sociale et de subventions pour l'isolation domiciliaire ou la conversion de l'éner- gie. Dans ces cas-là, lorsque le contribuable est marié ou qu'il demeure avec son conjoint au moment le paiement est reçu, le montant en question ne pourra être attribué au revenu du contribuable que si le revenu de celui-ci pour l'année est inférieur à celui de son conjoint pour l'année; si tel n'est pas le cas, il sera attribué au conjoint dont le revenu pour l'année est inférieur à celui du contribuable. Le but évident de ces dispo sitions serait d'imposer à la personne dont le revenu est le moins élevé l'obligation d'inclure les montants désignés comme revenus, dans le cas d'un couple marié. La demanderesse est d'avis que l'on irait à l'encontre de l'intention du législateur si
l'on appliquait à ces dispositions l'interprétation du revenu que la Cour canadienne de l'impôt a faite en l'espèce. Je ne suis pas convaincu que l'attribu- tion, à titre de revenu, des paiements conformé- ment aux alinéas 56(1)s) et 56(1)u) peut se com- parer au droit de réclamer les déductions selon les paragraphes 63(1) et (2) ou que l'interprétation du revenu que la Cour canadienne a faite en l'espèce serait contraire à l'intention du Parlement dans les deux autres paragraphes mentionnés. Selon moi, les paiements dont il est question dans ces disposi tions seraient attribués au contribuable à titre de revenu lorsque le conjoint n'a pas de revenu et les paiements seraient imposables, ce qui semble com patible avec l'intention générale du Parlement.
La demanderesse cite également le paragraphe 122.2 (mod. par S.C. 1984, chap. 1, art. 65), qui porte sur le crédit d'impôt pour enfants calculé, d'après cette disposition, selon une formule incluant le «total de tous les montants dont chacun représente le revenu pour l'année du particulier ou de la personne qui était la personne assumant les frais d'entretien d'un enfant admissible». Encore là, je ne suis pas convaincu que la définition du revenu que la Cour canadienne a faite relative- ment au paragraphe 63(2) irait à l'encontre de l'intention du Parlement qui est manifeste à l'arti- cle 122.2.
Enfin, la demanderesse invoque également l'évo- lution de la disposition. À l'origine, l'article 63 devait bénéficier principalement aux femmes. Les hommes ne pouvaient réclamer la déduction que s'ils n'étaient pas mariés, s'ils étaient séparés de leurs épouses ou si celles-ci étaient physiquement ou mentalement incapables de s'occuper des enfants ou qu'elles étaient en prison. Le Parlement accordait donc fondamentalement une forme d'aide aux femmes pour leur permettre de travail- ler en dehors du foyer. Comme l'on craignait qu'elle ne soit discriminatoire, cette disposition a été modifiée et la disposition actuellement en vigueur vise simplement la personne ayant le revenu le plus bas. La demanderesse fait donc valoir que l'article 63 est et a toujours été unique- ment une disposition comparative. Le Parlement n'a jamais voulu accorder au gagne-pain habituel, soit le parent qui gagne le revenu dans une famille, une déduction pour frais de garde d'enfants. En effet, dit la demanderesse, les divers paragraphes
et sous-alinéas de la disposition restreignent gran- dement non seulement les situations à l'égard des- quelles la déduction peut être réclamée, mais aussi le montant de la déduction elle-même.
Pour sa part, la défenderesse soutient que le but général de la disposition en question est de permet- tre tant au contribuable qu'à la personne assumant les frais d'entretien de gagner un revenu. À l'appui de sa thèse, l'avocat de la défenderesse invoque le paragraphe 63(1), que l'on ne peut ignorer com- plètement, selon lui, dans l'analyse du sens du paragraphe 63(2). Bien qu'il soit assujetti au para- graphe 63(2), le paragraphe (1) indique néan- moins la première étape relative au droit de déduire les frais de garde d'enfants et représente donc une indication importante de l'intention du Parlement à cet égard. De l'avis de la défende- resse, les alinéas 63(1)a) et b) indiquent claire- ment qu'une personne, que ce soit le contribuable ou la personne assumant les frais d'entretien, a le droit, du moins au départ, de réclamer la déduc- tion. La défenderesse estime que le paragraphe 63(2) a simplement pour effet de transférer ce droit à la personne qui assume les frais d'entretien et dont le revenu est inférieur à celui du contribua- ble, et il faut se reporter à l'alinéa 63(1)b) pour calculer le montant réel de la déduction. Ainsi, le paragraphe 63(2) est, tout au plus, une disposition restrictive et non une disposition qui a pour effet de refuser un droit.
Soutenant que le législateur n'avait pas l'inten- tion d'annuler le droit à la déduction des frais de garde d'enfants, l'avocat de la défenderesse invo- que aussi le paragraphe 63(2.1), qui porte sur la situation le contribuable et la personne assu- mant les frais d'entretien ont un revenu égal. Dans ce cas-là, le contribuable et la personne assumant les frais d'entretien doivent décider conjointement de traiter le revenu de l'un d'eux comme étant plus élevé que celui de l'autre afin de réclamer la déduction. En conséquence, la défenderesse sou- tient que l'intention du Parlement en l'espèce est claire. Les frais de garde d'enfants, par définition, sont les frais qui sont engagés pour gagner un revenu et le but de l'article 63 est d'accorder un crédit pour ce type de frais au contribuable ou à la personne qui assume les frais d'entretien.
L'avocat de la défenderesse cite lui aussi l'article 3 de la Loi, mais il le fait à l'appui de sa
thèse selon laquelle le revenu ne peut inclure le nombre zéro. La défenderesse souligne que, con- trairement à l'opinion de la demanderesse, la démarche prévue à l'article 3 ne débute que lors- qu'il y a un montant sous forme de revenu tiré pour l'année d'une charge, d'un emploi, d'une entreprise ou d'un bien. L'existence d'un revenu tiré d'une source est une condition essentielle. En l'espèce, la défenderesse souligne que la personne assumant les frais d'entretien n'avait aucun revenu de cette nature, mais cet argument est contesté et il n'y a effectivement aucune preuve à ce sujet, si ce n'est l'admission selon laquelle la personne assu- mant les frais d'entretien en l'espèce n'avait aucun revenu à la suite de l'application complète de l'article 3 et non à l'égard d'une source précise. La défenderesse ajoute qu'une fois que les étapes de l'article 3 sont franchies, les mots «si reste il y à la fin de l'article présupposent que, s'il n'y a pas de reste, il n'y aura pas de revenu aux fins de la Loi. La défenderesse cite The Concise Oxford Dictio nary of Current English l'on définit le mot «reste» («remainder») comme étant [TRADUCTION] «un élément restant, personnes ou choses qui res- tent; nombre obtenu après une soustraction ou une division». Selon la défenderesse, les mots «si reste il y signifient qu'un montant positif doit rester.
La défenderesse se fonde sur la décision qu'a rendue notre Cour dans Tahsis Company Ltd. c.
R., [1980] 2 C.F. 269, la page 273, pour dire que, si le législateur avait souhaité que l'interpré- tation proposée par la demanderesse soit adoptée, il aurait été facile pour lui de l'indiquer claire- ment. Dans cette affaire-là, la Cour d'appel fédé- rale devait interpréter une disposition de la Loi de l'impôt sur le revenu portant sur les fluctuations des taux de change. La Cour a décidé que, étant donné que la disposition indiquait clairement qu'il fallait tenir compte des fluctuations survenues après 1971, on ne pouvait déduire, à la lecture du paragraphe en question, une intention de tenir compte des fluctuations antérieures, parce qu'il aurait été facile d'indiquer clairement cet objectif. Selon la défenderesse, cette prémisse s'applique de la même façon en l'espèce, notamment lorsqu'on tient compte du fait que le Parlement a indiqué ailleurs dans la Loi son intention que l'on tienne compte de l'absence de revenu, le cas échéant. Le paragraphe 4(1) de la Loi porte sur le revenu ou la perte tiré d'une ou de plusieurs sources à un
endroit déterminé et renvoie explicitement au «revenu ou [à] la perte, selon le cas, du contribua- ble, calculée conformément à la présente loi, en supposant que ce contribuable n'a eu, durant l'an- née d'imposition, aucun revenu ni perte, sauf ce qui provenait de cette source, ni aucun revenu ou perte, sauf ce qui provenait de ces sources, selon le cas» Ainsi, selon la défenderesse, il est question de deux concepts dans la Loi. L'un porte sur le revenu et lorsque, comme c'est le cas au paragraphe 63(2), une comparaison entre deux revenus est faite, cela présuppose l'existence de deux mon- tants. Le second porte sur l'absence de revenu, ce qui, comme le Parlement l'a indiqué à l'article 4, est un concept tout à fait différent.
Enfin, l'avocat de la défenderesse invoque un argument subsidiaire. Il soutient que, lorsque le texte de la disposition est ambigu, il est clair, d'après la jurisprudence, que le litige doit être tranché en faveur du contribuable. Sur ce point, il cite les remarques qu'a formulées la Cour suprême du Canada dans Johns -Manville Canada Inc. c. La Reine, [1985] 2 R.C.S. 46, la page 72:
Une telle décision est de plus conforme à un autre concept fondamental de droit fiscal portant que, si la loi fiscale n'est pas explicite, l'incertitude raisonnable ou l'ambiguïté des faits découlant du manque de clarté de la loi doit jouer en faveur du contribuable.
Les deux parties admettent que le principe applicable aux fins de l'interprétation de la Loi de l'impôt sur le revenu est celui qu'a énoncé E. A. Driedger dans Construction of Statutes, 2e éd. (1983), la page 87:
[TRADUCTION] De nos jours, un seul principe ou méthode prévaut pour l'interprétation d'une loi: les mots doivent être interprétés selon le contexte, dans leur acception logique cou- rante en conformité avec l'esprit et l'objet de la loi et l'intention du législateur.
À mon avis, le mot «revenu», tant selon son sens courant que son sens dans le contexte de la Loi, présuppose l'existence d'un montant positif. Selon les définitions du dictionnaire, le «revenu> est un gain annuel et régulier tiré du travail ou du capi tal. Ainsi, dans le Webster's Third New Interna tional Dictionary of the English Language, non abrégé, (1986), le mot «revenu» est défini comme étant [TRADUCTION] «un gain ou avantage régu- lier qui se mesure habituellement en argent et se rapporte à une période donnée, qui découle du capital, du travail ou d'une combinaison des deux,
et comprend les gains tirés d'opérations relatives à des immobilisations, mais exclut les accroissements en valeur non réalisés». Dans le Shorter Oxford English Dictionary (3e éd., 1986), le «revenu» est défini, quant au sens qui nous intéresse en l'espèce, comme étant [TRADUCTION] «Un montant tiré du produit périodique du travail, des activités, des biens-fonds ou des investissements d'une personne (lequel montant est habituellement exprimé en termes monétaires); montants qui reviennent annuellement ou périodiquement à une personne ou une entreprise; produits».
Ces définitions du «revenu» sont généralement compatibles avec le concept juridique que l'on trouve dans la Loi de l'impôt sur le revenu et que le juge en chef Couture, de la Cour canadienne de l'impôt, a analysé dans la décision qu'il a rendue dans l'arrêt Fiset, précité. Au risque de répéter les commentaires qu'il a formulés au sujet des disposi tions de la Loi, je soulignerai simplement que le paragraphe 5(1), qui définit le revenu tiré d'une charge ou d'un emploi, le paragraphe 9(1), qui définit le revenu tiré d'un bien ou d'une entreprise, et le paragraphe 39(1) [mod. par S.C. 1974-75-76, chap. 26, art. 15; 1976-77, chap. 4, art. 9; chap. 42, art. 3; 1979, chap. 5, art. 11; 1980-81-82-83, chap. 48, art. 16; chap. 140, art. 18; 1984, chap. 1, art. 13], qui définit un gain en capital, exigent tous la réception d'un montant positif ou d'un montant net tiré d'une source au cours de l'année d'imposi- tion. À l'instar du juge en chef, je suis d'avis que le paragraphe 63(2) lui-même, l'on utilise les mots «revenu, pour une année d'imposition» et «revenu, pour cette année» ainsi que l'expression «(en présu- mant que les deux revenus sont calculés ...)» présuppose clairement que chacune des parties a reçu un revenu au sens de la Loi au cours de l'année d'imposition. En outre, l'ensemble de l'arti- cle 3, qui est la disposition se rapprochant le plus d'une définition du mot «revenu» selon la Loi, décrit la démarche qui consiste à déduire un mon- tant d'un autre jusqu'à l'obtention d'un montant final qui représente le revenu du contribuable pour l'année. L'utilisation explicite des mots «si reste il y dans la dernière phrase de l'article présuppose clairement l'existence d'un montant positif avant que l'on puisse dire que le contribuable a eu un revenu aux fins de la Loi. Il m'apparaît évident que l'une des conditions fondamentales sous-jacen-
tes de la Loi de l'impôt sur le revenu est le fait que le mot «revenu» signifie [TRADUCTION] «l'accrois- sement net du pouvoir économique», comme l'a suggéré la Commission Carter dans le Rapport de la Commission royale d'enquête sur la fiscalité, (1966), tome 1, aux pages 9 et 10. Ce concept ne s'applique pas lorsqu'il n'y a pas de revenu ou que le revenu est égal à zéro.
En ce qui a trait à la disposition dont il est question en l'espèce, aucun élément n'indique clai- rement que le mot «revenu» du paragraphe 63(2) devait avoir un sens différent de celui qu'il a tout au long de la Loi. À mon avis, ce fait en soi est important. Comme la défenderesse l'a souligné, si le Parlement avait voulu que le mot «revenu» de l'article 63 inclue le montant zéro, il aurait été facile pour lui de le dire clairement. Beaucoup d'autres situations possibles sont envisagées dans la disposition et la rédaction de l'article a été soigneusement pensée. La disposition s'applique à diverses situations, notamment le cas les per- sonnes assumant les frais d'entretien de l'enfant ne sont pas les parents de celui-ci au sens juridique strict, ou le cas des familles séparées. Bien souvent, l'application appropriée de la disposition à une situation particulière nécessitera une analyse de l'interaction de plusieurs alinéas de la disposition. Même pour déterminer qui peut effectivement réclamer la déduction pour frais de garde d'en- fants, il faut lire le texte des alinéas 63(1)a) et b) de concert avec celui du paragraphe 63(2). Le paragraphe 63(1) indique que la déduction peut être réclamée par le contribuable ou une autre personne assumant les frais d'entretien de l'enfant. En général, bien qu'une seule personne puisse déduire les frais de garde d'enfants, le contribuable ou la personne assumant les frais d'entretien peut réclamer la déduction. Cependant, le paragraphe 63(2) limite la déduction par le contribuable à une partie des frais engagés au cours de l'année selon le nombre de semaines au cours desquelles la personne assumant les frais d'entretien a eu un revenu inférieur à celui du contribuable et a res pecté les conditions énoncées aux sous-alinéas 63(2)(iii) à (vi). Dans la mesure ces dernières conditions ne sont pas respectées pour l'année complète, la déduction des frais est transférée à la personne assumant les frais d'entretien dont le revenu est inférieur à celui du contribuable.
En conséquence, on ne peut faire autrement que se demander comment le législateur aurait pu omettre d'envisager le scénario présenté en l'espèce devant notre Cour. Même s'il y a eu omission d'indiquer de façon appropriée que le revenu se rapportant aux frais de garde d'enfants comprend le montant zéro, je dois souscrire au raisonnement que la Cour d'appel a adopté dans Canterra Energy Ltd. c. La Reine, [1987] 1 C.T.C. 89, la page 95, et selon lequel, si une disposition n'est pas rédigée de façon à donner suite à l'intention du législateur, les tribunaux devraient pouvoir per- mettre au contribuable de se prévaloir des avanta- ges de la disposition telle qu'elle est libellée.
En ce qui a trait au; but général de l'article 63, chacune des, parties a fait valoir des opinions diffé- rentes à cet égard au soutien de sa thèse. Dans Bailey et al. v. M.N.R. (1980), 1 C.H.R.R. 193, le tribunal canadien des droits de la personne a exa- miné longuement le fondement législatif de l'arti- cle 63 précédemment en vigueur. Le tribunal a jugé que l'article était discriminatoire, parce qu'il ne permettait pas aux hommes de bénéficier de la déduction, sauf s'ils n'étaient pas mariés, s'ils étaient séparés ou que leur épouse était incapable de s'occuper des enfants parce qu'elle souffrait d'une infirmité physique ou mentale ou était incar- cérée. C'est à la suite de cette décision que l'article 63 a été modifié de façon à s'appliquer également tant aux hommes qu'aux femmes. A mon sens, la distinction faite entre, les personnes qui gagnent un revenu supérieur et inférieur dans la disposition actuelle présuppose manifestement que le contri- buable et la personne assumant les frais d'entretien ont tous deux un revenu pour l'année d'imposition au sens de l'article 3. Dans chaque cas, ce revenu, le «reste, si reste il y a», après les calculs faits selon l'article 3, doit correspondre à [TRADUCTION] «un accroissement net du, pouvoir économique»; il ne peut s'agir d'un revenu inexistant ou d'un montant égal à zéro.
J'en viens à la conclusion que le mot «revenu» du paragraphe 63(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu, lorsqu'on le lit tant dans son sens gramma tical et ordinaire que dans le contexte de la Loi, présuppose l'existence d'une somme positive. Lors- que la personne assumant les frais d'entretien n'a pas de revenu, le paragraphe 63(2) ne s'applique pas; il faut alors se reporter à l'alinéa 63(1)b) et le
contribuable peut réclamer la déduction. À mon avis, cette conclusion ne donne lieu à aucune répu- gnance ou incompatibilité avec l'objet et l'esprit de la Loi ou avec l'intention du Parlement.
Pour les motifs exposés ci-dessus, l'action est rejetée et le cas est déféré au ministre du Revenu national pour que celui-ci établisse une nouvelle cotisation d'une façon compatible avec les présents motifs. Il s'agit d'un appel auquel s'applique le paragraphe 178(2) [mod. par S.C. 1980-81-82-83, chap. 158, art. 58; 1984, chap. 45, art. 75] de la Loi de l'impôt sur le revenu et la défenderesse a le droit de recouvrer les dépens de la présente action.
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