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A-984-88
IBM Canada Limited (appelante) c.
Sous - ministre du Revenu national — Douanes et Accise (intimé)
et
Mitel Corporation (intervenante)
RÉPERTORIÉ' IBM CANADA LTD. C. SOUS-MINISTRE M.R.N., DOUANES ET ACCISE (C.A.)
Cour d'appel, juges Heald, Décary et Linden, J.C.A.—Ottawa, 26 septembre et 4 novembre 1991.
Douanes et accise Tarif des douanes Appel d'une déci- sion de la Commission du tarif classant des centraux télépho- niques secondaires informatisés en tant qu'«appareils élec- triques de téléphone» La décision a été rendue par deux membres seulement Le troisième membre a exprimé sa dissi dence une semaine plus tard Quorum ou absence de quorum Explication du sens et des exigences du quorum en vertu de la Loi sur la Commission du tarif L'explication du membre dissident n'est pas une preuve admissible La non-participa tion de ce membre à la décision n'a pas été établie Les pro- duits ont été classés à tort comme des «appareils électriques» Le Tarif, la jurisprudence et les dictionnaires font une dis tinction entre les produits «électroniques» et «électriques».
Interprétation des lois Des centraux téléphoniques secon- daires informatisés ont été classés sous le numéro tarifaire 44508-1 en tant qu'«appareils électriques de téléphone» La Commission a introduit des éléments étrangers dans le sens habituel des mots «appareils de téléphone» Les mots «appa- reils» et «systèmes» ont tous deux un sens distinct La Com mission n'a pas tenu compte de la jurisprudence et des défini- tions que donnent les dictionnaires du mot «téléphone» Le Tarif la jurisprudence et les dictionnaires font une distinction entre les produits «électroniques» et les produits «électriques» Les produits en question ne tombent pas sous le coup de la clause d'exclusion du numéro tarifaire 41417-1 La Cour n'est pas liée par l'opinion d'un tribunal spécialisé.
Contrôle judiciaire Appel d'un classement de produits par la Commission du tarif La décision de la Commission, portant la signature de deux membres, a été rendue Le troi- sième membre a par la suite exprimé sa dissidence La ques tion est de savoir si la Commission a compétence pour rendre une décision lorsqu'un membre du jury n'y participe pas Définition du quorum L'autorité décisionnelle est tenue de se conformer strictement aux exigences en matière de quorum Tous ceux qui participent à une décision doivent agir de concert jusqu'au tout dernier moment, quand la décision est rendue Cette exigence est une question de principe, d'intérêt public et de saine administration de la justice Cette «action
de concert» n'a pas à être définie Il est nécessaire qu'il y ait une intention commune «Absence de signature» et «absence de participation» ne sont pas synonymes Historique législa- tif des exigences de la Commission du tarif en matière de quo rum Sens de la «participation» Absence de preuve admis sible que le membre dissident n'a pas participé à la décision.
Ceci était un appel d'une décision de la Commission du tarif, qui avait classé les centraux téléphoniques secondaires informatisés (ci-après appelés «CBX») de l'appelante, en vertu du Tarif des douanes, en tant qu'«appareils électriques de télé- phone» plutôt que comme «machines électroniques de traite- ment de l'information et leurs appareils». La majorité de la Commission a rendu sa décision le 14 septembre 1988 et, une semaine plus tard, le troisième membre du jury a exprimé sa dissidence, à savoir que les CBX étaient à la fois des appareils électroniques de traitement de l'information et du matériel périphérique qui leur est destiné, classés sous le numéro tari- faire 41417-1. Les questions en litige dans cet appel étaient: 1) celle de savoir si la majorité de la Commission n'avait pas compétence pour rendre sa décision en l'absence de quorum, ainsi que l'exigeait l'article 6 de l'ancienne Loi sur la Commis sion du tarif, et 2) celle de savoir si les produits en question avaient été classés à juste titre en tant qu'«appareils électriques de téléphone».
Arrêt: l'appel devrait être accueilli.
1) La Cour d'appel fédérale a défini ce qu'est le quorum d'un organisme composé de plusieurs membres: il s'agit du «nombre minimum de membres qui doivent être présents pour pouvoir exercer valablement le pouvoir de cet organisme». Les tribunaux insistent invariablement sur l'obligation qu'une autorité décisionnelle se conforme strictement et en tout temps aux exigences en matière de quorum. Le fait de disposer du quorum prévu chaque fois qu'il le faut, du début jusqu'à la toute fin des procédures, est une question de principe, d'intérêt public et d'administration saine et équitable de la justice. La nature, le degré et la forme de cette «action de concert» ne peuvent être définis et n'ont pas à l'être. Les tribunaux ont leurs propres méthodes et leurs propres règles. Il faut toutefois, à un certain point, qu'ils en arrivent à une décision collective- ment et que chaque membre «participe» individuellement à cette décision collective, soit en y souscrivant soit en étant en dissidence. Il faut qu'il y ait une intention commune, chaque membre devant être informé, dans les grandes lignes à tout le moins, du point de vue de chacun de ses collègues. La question cruciale, en l'espèce, était donc la suivante: le membre dissi dent avait-il «participé» à la décision rendue par la Commis sion le 14 septembre 1988? L'explication que ce dernier avait donnée dans une décision subséquente de la Commission n'était pas étayée par affidavit et il était donc impossible d'en vérifier la véracité. La Cour ne pouvait tenir pour acquises des affirmations que la Commission n'était pas en mesure de con- tester de la manière habituelle, c'est-à-dire en contre-interro- geant l'auteur de l'allégation. Cette prétendue explication ne constituait donc pas une preuve admissible. Et sans cette preuve, l'appelante n'était pas en mesure d'établir que le mem- bre dissident n'avait pas participé à la décision. Un simple retard dans la présentation des motifs de dissidence ne devrait
pas avoir d'effet sur la compétence de la Commission ou mener nécessairement à la conclusion que le membre dissident n'avait pas participé à la décision.
2) La majorité de la Commission a commis une erreur de droit en introduisant des éléments étrangers dans le sens habi- tuel des mots «appareils de téléphone» qui figurent dans le Tarif et en concluant qu'un «système» est un «appareil». Il res- sort clairement de la version française du document que les mots «appareil» («apparatus») et «système» («system») ne sont pas interchangeables et désignent deux réalités distinctes. La majorité de la Commission a confondu l'usage des produits en question avec ces derniers et les a classés comme s'ils étaient un réseau téléphonique, ce qu'ils ne sont manifestement pas. Elle n'a tenu compte ni de la jurisprudence ni des défini- tions que donnent les dictionnaires techniques et généraux du mot «téléphone», qui, dans tous les cas, lient ce dernier à la transmission de sons ou de la voix uniquement. En concluant que l'intimé a classé correctement les produits sous le numéro tarifaire 44508-1 en tant qu'«appareils électriques de télé- phone», la majorité de la Commission a commis une erreur de droit en interprétant mal les mots «électrique» et «électro- nique». En employant ces mots sous des numéros tarifaires dif- férents, le législateur voulait qu'ils désignent des produits dif- férents. Le Tarif, la jurisprudence et les définitions qui figurent dans les dictionnaires techniques et généraux font une distinc tion claire entre les mots «électronique» et «électrique». Les produits en question ne tombent pas sous le coup de la clause d'exclusion que comporte l'intitulé du numéro tarifaire 41417-1 ou du numéro tarifaire 44508-1, et le membre dissi dent a déterminé à juste titre que lesdits produits constituent à la fois des machines électroniques de traitement de l'informa- tion et le matériel périphérique qui leur est destiné. La Cour n'est nullement liée par l'avis d'un tribunal spécialisé. La loi, son historique législatif et les décisions antérieures de la Com mission n'étayent pas l'interprétation de la majorité.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi canadienne sur la protection de l'environnement, L.R.C. 1985 (4e suppl.), chap. 16, art. 95.
Loi corrective de 1977, S.C. 1976-77, chap. 28, art. 43. Loi sur la Commission du tarif, L.R.C. (1985), chap. T-1, art. 6.
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, art. 45(3).
Loi sur la Cour suprême, L.R.C. (1985), chap. S-26, art. 29.
Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985) (4e suppl.), chap. 47, art. 9(3).
Loi sur le Tribunal de la concurrence, L.R.C. (1985) (2e suppl.), chap. 19, art. 12(3).
Loi sur les douanes, S.R.C. 1970, chap. C-40, art. 48(1). Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), chap. I-2, art. 63(2). Loi sur l'Office national de l'énergie, L.R.C. (1985), chap. N-7, art. 16(2).
Tarif des douanes, S.R.C. 1970, chap. C-41, no. tarifaire 41417-1 [mod. par S.C. 1980-81-82-83, chap. 67,
art. 7], no. tarifaire 44508-1 [mod. par S.C. 1984, chap. 47, art. 13].
JURISPRUDENCE
DECISIONS APPLIQUÉES:
Le procureur général du Canada c. Allard, [1982] 2 C.F. 706; (1982), 49 N.R. 301 (C.A.); Inter-City Freightlines Ltd. and Highway Traffic & Motor Transport Board of Manitoba v. Swan River-The Pas Transfer Ltd. et al., [1972] 2 W.W.R. 317 (C.A. Man); Lord v. Lord (1855), 5 El. & BI. 404; 119 E.R. 531 (K.B.); In re Beck and Jackson (1857), 1 C.B. (N.S.) 695; 140 E.R. 286 (C.P.); Cresswell v. The Etobicoke-Mimico Conservation Autho rity, [1951] O.R. 197; [1951] 2 D.L.R. 364 (C.A.); Cana- dian Pacific Transport Co. Ltd. et al. and Loomis Courier Services Ltd. (1976), 72 D.L.R. (3d) 434 (C.S.C.-B.); Re B.C. Government Employees Union et al. and Public Ser vice Commission et al. (1979), 96 D.L.R. (3d) 86; 10 B.C.L.R. 87 (S.C.); P.P.G. Industries Canada Ltd. c. P.G. du Canada, [1976] 2 R.C.S. 739; (1975), 65 D.L.R. (3d) 354; 7 N.R. 209; In re La Loi sur la Commission du tarif, [1977] 2 C.F. 228 (C.A.); Société des Acadiens du Nou- veau-Brunswick Inc. et autre c. Association of Parents for Fairness in Education et autres, [1986] 1 R.C.S. 549; (1986), 69 N.B.R. (2d) 271; 27 D.L.R. (4th) 406; 177 A.P.R. 271; 66 N.R. 173; General Datacomm Ltd. c. Sous -ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (1984), 9 RCT 78.
DÉCISIONS CITÉES:
Grillas c. Ministre de la Main-d'Oeuvre et de l'Immigra- tion, [1972] R.C.S. 577; (1971), 23 D.L.R. (3d) 1; Jagen- berg of Canada Ltd. and Deputy M.N.R. (Customs and Excise) and Repap Enterprises Corp. Inc., Intervenant (1988), 17 C.E.R. 296 (Tar. Bd.); Assoc. canadienne de télévision par câble c. American College Sports Collec tive of Canada, Inc., [1991] 3 C.F. 626; (1991), 81 D.L.R. (4th) 376; 36 C.P.R. (3d) 455 (C.A.); SITBA c. Consolida- ted-Bathurst Packaging Ltd., [1990] 1 R.C.S. 282; (1990), 73 O.R. (2d) 676; 68 D.L.R. (4th) 524; 42 Admin. L.R. 1; 90 CLLC 14,007; 38 O.A.C. 321; Doyle c. Commission sur les pratiques restrictives du commerce, [1985] 1 C.F. 362; (1985), 21 D.L.R. (4th) 366; 7 C.P.R. (3d) 235; 60 N.R. 218 (C.A.); Kane c. Conseil d'administration (Uni- versité de la Colombie-Britannique), [1980] 1 R.C.S. 1105; (1980), 110 D.L.R. (3d) 311; [1980] 3 W.W.R. 125; 18 B.C.L.R. 124; 31 N.R. 214; Deere (John) c. Ministre du Revenu national (Douanes et Accise) (1990), 107 N.R. 137; [1989] 1 T.S.T. 2241 (C.A.F.); Digital Equipment of Canada Ltd. et Sous -ministre du Revenu national (Douanes et Accise) (1988), 13 C.E.R. 343 (C.A.F.); Fox- boro Canada Inc. and Deputy M.N.R. (Customs and Excise) et al. (1987), 12 C.E.R. 118 (Tar. Bd.); Ingersoll- Rand Door Hardware Canada Inc. et Sous -ministre du Revenu national (Douanes et Accise) (1987), 15 C.E.R. 47; 80 N.R. 397 (C.A.F.); Cardinal c. R., [1980] 1 C.F. 149; (1979), 97 D.L.R. (3d) 402; [1979] 1 C.N.L.R. 32 Ore inst.); R. v. Brislan; Ex parte Williams (1935), 54
C.L.R. 262 (H.C. Aust.); Rex v. Gignac, [1934] O.R. 195; [1934] 2 D.L.R. 113; (1934), 61 C.C.C. 371 (H.C.); The Attorney General v. Edison Telephone Company of Lon- don (1880), 6 Q.B. 244 (Ex.D.); Wang Laboratories (Canada) Limited c. Sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (1971), 5 RCT 119; Ren- voi/appel 1907 (1983), 8 RCT 587; Waltham Watch Com pany of Canada Ltd. c. Sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (1984), 9 RCT 388; Nevco Scoreboard Co. Ltd et Sous-ministre du Revenu national (Douanes et Accise) et Rotomatic Display Products Ltd. (1986), 12 C.E.R. 88; 11 RCT 342.
DOCTRINE
Beaupré, Rémi Michael. Interprétation de la législation bilingue, Montréal: Wilson & Lafleur, 1986.
Dussault, René et Borgeat, Louis. Traité de droit adminis- tratif; t. 3, 2e éd., Québec: Presses de l'Université Laval, 1989.
Grand Larousse de la langue française, tome 1, Paris: Librairie Larousse, 1971. «appareil».
Grand Larousse de la langue française, tome 7, Paris: Librairie Larousse, 1978. «système».
Lanham, David. «The Quorum in Public Law» [1984] P.L. 461.
Robert, Paul. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (Le Grand Robert), tome I, 2e éd., Paris: Société du nouveau Littré, 1986. «appareil».
Robert, Paul. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (Le Grand Robert), tome 5, Paris: Société du nouveau Littré, 1972. «prononcé».
Robert, Paul. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (Le Grand Robert), tome IX, 2e éd., Paris: Société du nouveau Littré, 1986. «système».
AVOCATS:
Richard G. Dearden pour l'appelante. Michael F. Ciavaglia pour l'intimé.
PROCUREURS:
Gowling, Strathy & Henderson, Ottawa, pour l'appelante.
Le sous-procureur général du Canada, pour l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE DÉCARY, J.C.A.: Il est question en l'espèce d'un appel d'une décision rendue par la Commission du tarif (ci-après appelée la «Commission») au sujet du classement tarifaire de centraux téléphoniques secondaires informatisés (modèles CBX II 9000, CBX II 8000 et VSCBX, appelés ci-après «CBX»)
des systèmes commerciaux de communications télé- phoniques et numériques (ou informatiques) de marque Rolm que la Rolm Canada Inc. avait importés des États-Unis d'Amérique en 1985 et 1986 1 . Selon
ladite décision, que deux membres de la Commission
ont rendue le 14 septembre 1988, les appareils CBX devaient être classés sous le numéro du Tarif des douanes [S.R.C. 1970, chap. C-41] (les «Tarifs») (ou numéro tarifaire) 44508-1 [mod par S.C. 1984, chap. 47, art. 13(2)] en tant qu'«appareils électriques de téléphone», plutôt que sous le numéro tarifaire 41417-1 [mod. par S.C. 1980-81-82-83, chap. 67, art. 7(1)] en tant que «Machines électroniques de traite- ment de l'information et leurs appareils». Le troi- sième membre, qui fit connaître son opinion dissi- dente le 21 septembre 1988, jugea que les appareils CBX constituaient à la fois des «appareils électro- niques de traitement de l'information» et du «maté- riel périphérique qui leur est destiné», à classer sous le numéro tarifaire 41417-1.
LA QUESTION DE LA COMPETENCE DE LA COMMISSION
Le premier point qu'a soulevé l'appelante est celui de savoir si la Commission a compétence pour rendre une décision lorsque seulement deux des trois membres qui ont siégé y participent. Une revue des faits pertinents s'impose à ce stade-ci.
Les faits
Aux mois de février et de mars 1987, la Commis
sion, composée du président d'audience Gorman et de deux membres, MM. Bertrand et Beauchamp, entendit deux appels découlant de décisions de l'in- timé. Le 14 septembre 1988, la Commission rendit la
décision suivante 2 :
I Rolm Canada Inc. était l'appelante initiale. À la suite d'une ordonnance de la Cour datée du 28 décembre 1988, on modifia l'intitulé de la cause: la IBM Canada Limited fut subs- tituée à la Rolm Canada Inc. à titre d'appelante.
2 D.A., à la p. 52.
The Tariff Board
La Commission du Tarif
CANADA
NOTICE DA 1599 September 14, 1988
PANEL: GORMAN, Presiding Member BERTRAND, Member BEAUCHAMP, Member
Appeals Nos. 2600 and 2625
ROLM CANADA INC.
Appellant
and
THE DEPUTY MINISTER OF NATIONAL REVENUE FOR CUSTOMS AND EXCISE
Respondent
and
MITEL CORPORATION
Intervenant
DECISION OF THE BOARD
The appeals are dismissed and it is declared that the models VSCBX, CBX II 8000 and CBX II 9000 of the Rolm voice and data business communications systems imported by the appellant from the United States of America in 1985 and 1986 on dates and under Toronto entry numbers set out in schedules to the letters of decision of the respondent have been classi fied correctly by the respondent in tariff item 44508-1 as electric telephone apparatus.
"G.J. Gorman" Presiding Member
"J.P. Bertrand" Member
The above decision has been made by the Tariff Board under the Customs Act, R.S.C. 1970, c. C-40.
"René Noel" Secretary of the Board
La Commission du Tarif
The Tariff Board
CANADA
AVIS DA 1599
le 14 septembre 1988
JURY: GORMAN, président d'audience
BERTRAND, membre BEAUCHAMP, membre
Appels nos. 2600 et 2625
ROLM CANADA INC.
Appelante
et
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
Intimé
et
MITEL CORPORATION
Intervenante
DÉCISION DE LA COMMISSION
La Commission rejette les appels et déclare que les modèles VSCBX, CBX II 8000 et CBX II 9000 des systèmes commerciaux de communications téléphoniques et informatiques Rolm, qui ont été importés des États-Unis d'Amérique, en 1985 et 1986, et déclarés aux dates et sous les numéros indiqués dans les annexes aux lettres de décision de l'intimé, ont été classés correctement par l'intimé sous le numéro tarifaire 44508-1 en tant qu'appareils électriques de téléphone.
«G.J. Gorman» Président d'audience
«J.P. Bertrand» Membre
La décision ci-dessus a été rendue par la Commission du tarif en vertu de la Loi sur les douanes,
S.R.C. 1970, chap. C-40.
«René Noel»
Secrétaire de la Commission
Le 14 septembre 1988, le secrétaire de la Commis sion envoya aux avocats des parties, par l'entremise d'un service de messageries, une «copie certifiée conforme de la décision de la Commission». La lettre adressée à l'avocat de l'appelante était conçue comme suit 3 :
[TRADucTtoN] Vous trouverez ci-jointe une copie certifiée con- forme de la décision qu'a rendue la Commission relativement aux appels susmentionnés.
Comme vous pouvez le voir, les appels nos 2600 et 2625 sont rejetés.
L'opinion de M. Beauchamp n'est pas disponible en ce moment.
Il vous est loisible de demander l'autorisation d'interjeter appel de cette décision devant la Cour fédérale dans les 60 jours qui suivent la date de ladite décision, conformément aux conditions énoncées à l'article 48 de la Loi sur les douanes.
La décision proprement dite était précédée du som- maire officiel de la Commission et suivie des «motifs de la décision», qu'avait signés le président d'audience et auxquels souscrivait M. Bertrand 5 . Il n'est fait nulle part mention du troisième membre dans le sommaire ou dans les motifs.
Le 21 septembre 1988, le secrétaire de la Commis sion fit parvenir la lettre suivante aux avocats des parties 6 :
[TRADucrnoN] La présente fait suite à ma lettre datée du 14 sep- tembre 1988.
Vous trouverez ci-joint copie de l'opinion dissidente de M. Beauchamp, membre du jury.
Cette opinion dissidente était précédée d'un nouveau sommaire officiel établi par la Commission. Cette fois-ci, le sommaire faisait référence à la «minorité» et ajoutait que la «date de la décision» était le «14 septembre 1988» et la «date de la dissidence» le «21 septembre 1988».
L'avocat de l'appelante a fait valoir que [TRADUC- TION] «la majorité de la Commission du tarif: a) a rendu sa décision en date du 14 septembre 1988 sans avoir compétence pour le faire, en ce sens que: i) la décision a été rendue en l'absence du quorum que requiert l'article 6 de l'ancienne Loi sur la Commis-
3 D.A., à la p. 50.
4 D.A., à la p. 51.
5 D.A., aux p. 54 à 63.
6 D.A., à la p. 79.
7 D.A., aux p. 81 et 82.
sion du tarif [L.R.C. (1985), chap. T-1 (Loi abrogée par L.R.C. (1985) (4e suppl.), chap. 47, art. 50)], et ii) les trois membres de la Commission n'ont pas parti- cipé aux décisions qui ont été rendues séparément, le 14 septembre 1988 et le 21 septembre 1988».
Pour bien comprendre la thèse de l'appelante, il convient d'analyser ce que signifie le terme «quo- mm» et de déterminer les exigences particulières de la Loi sur la Commission du tarif (ci-après appelée la «Loi») 8 relativement au quorum.
Le quorum en général
La présente Cour a défini ce qu'est le quorum d'un organisme composé de plusieurs membres; il s'agit du «nombre minimum de membres qui doivent être présents pour pouvoir exercer valablement le pouvoir de cet organisme» 9 . Ainsi que l'a souligné le juge Dickson, juge de la Cour d'appel (tel était alors son titre), [TRADUCTION] «Aucune affaire ne peut être trai- tée en l'absence de quorum» 1 °.
Bien qu'il semble n'exister aucun précédent qui se rapporte directement au point en litige, un survol de la jurisprudence il a été question de quorum révèle que, sur ce plan, les tribunaux ont insisté invariable- ment sur l'obligation qu'une autorité décisionnelle avait de se conformer strictement et en tout temps aux exigences applicables. Il découle d'une longue
8 Le texte de l'art. 6 de la Loi sur la Commission du tarif, L.R.C. (1985), chap. T-1, est le suivant:
6. (1) En ce qui concerne un appel à la Commission sous le régime de toute autre loi, trois membres ou plus détien- nent et peuvent exercer les pouvoirs et les fonctions de la Commission.
(2) Par dérogation au paragraphe (1), lorsque, après avoir entendu un appel interjeté en vertu de toute autre loi, un membre de la Commission quitte son poste pour quelque raison, se révèle incapable ou refuse de participer au pro- noncé d'une ordonnance, de conclusions ou d'une déclara- tion relative à cet appel, les autres membres peuvent y pro- céder et sont, à cet effet, présumés avoir exercé tous les pouvoirs et fonctions de la Commission.
9 Le procureur général du Canada c. Allard, [1982] 2 C.F. 706 (C.A.), à la p. 707, le juge Pratte.
19 Inter-City Freightlines Ltd. and Highway Trafic & Motor Transport Board of Manitoba v. Swan River-The Pas Transfer Ltd. et al., [1972] 2 W.W.R. 317 (C.A. Man.), à la p. 318.
série de décisions' I un principe que je me hasarderai à formuler comme suit: en fixant un quorum et en exigeant qu'un nombre minimum de personnes parti-
t 1 Voir Lord v. Lord (1855), 5 El. & Bl. 404, la p. 406; 119 E.R. 531 (K.B.), à la p. 532, le juge Coleridge:
[TRADucT1oN] Il est aujourd'hui une règle établie que tout acte judiciaire que doit exécuter un groupe de deux per- sonnes ou plus doit l'être en présence de ce groupe tout entier; ceux que cet acte touchera ont droit, jusqu'au tout dernier moment, à ce que le jugement soit rendu de concert. Dans Stalworth v. Inns (2 D. & L. 428), affaire il était demandé d'annuler une décision au motif que les deux arbitres l'avaient exécutée à des dates et à des endroits diffé- rents, la Cour de l'Échiquier refusa d'accéder à la demande parce que, dans un tel cas, sa décision n'aurait pu être sus ceptible d'appel; la Cour indiqua toutefois qu'elle n'accor- derait pas de saisie-arrêt ou ne rendrait pas d'ordonnance de paiement de la somme adjugée. Elle laissa la partie intenter son action, en exprimant l'espoir que les arbitres, après avoir pris connaissance de l'opinion non équivoque de la Cour, veilleraient dorénavant à ce que leur jugement exécutoire soit conjoint. [Mes soulignements.]
In re Beck and Jackson (1857), 1 C.B. (N.S.) 695, à la p. 700; 140 E.R. 286 (C.P.), à la p. 288, le juge Cresswell:
[TRADUCTION] La règle applicable est donc énoncée dans Russell on Arbitration, p. 209, au sujet de l'obligation des arbitres conjoints: «Étant donné qu'ils doivent tous agir, tous doivent agir de concert. Tous doivent être présents à chaque réunion, et les témoins et les parties doivent être interrogés en la présence de tous; les parties ont en effet droit à ce que les collègues de chaque arbitre aient recours aux arguments, à l'expérience et au jugement de ce dernier, à toutes les étapes des procédures, de manière à ce que, en conférant les uns avec les autres, ils s'aident mutuellement à en arriver ensemble à une décision qui soit juste .. » [Mes soulignements.]
Cresswell v. The Etobicoke-Mimico Conservation Authority, [1951] O.R. 197 (C.A.), à la p. 203, le juge Roach, J.C.A.:
[TRADUCTION] Nul ne suggérerait ... que dans le cas une commission constituée de trois arbitres est tenue de se prononcer sur une question, soit en vertu d'une loi soit à la suite d'une plaidoirie, deux d'entre eux pourraient ne pas tenir compte du troisième et agir en son absence. Il ne fait aucun doute que la décision serait mauvaise ... [Mes souli- gnements.]
Canadian Pacific Transport Co. Ltd. et al. and Loomis Cou rier Services Ltd. (1976), 72 D.L.R. (3d) 434 (C.S.C.-B.), à la p. 441, le juge McKenzie:
[TRADUCTION] Les auteurs de cette loi se sont fondés sur la sagesse collective plutôt que sur la sagesse individuelle. [Mes soulignements.]
Re B.C. Government Employees Union et al. and Public Ser vice Commission et al. (1979), 96 D.L.R. (3d) 86 (C.S.), aux p. 90 et 91, le juge Bouck:
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cipent à une décision, le législateur se fonde sur la sagesse collective, le fait pour l'avantage du public aussi bien que pour l'avantage des personnes que la décision en question pourrait toucher, et il s'attend à ce que les personnes qui participent à la décision, comme membres de la majorité ou comme membres dissidents, agissent de concert jusqu'au tout dernier moment, c'est-à-dire jusqu'à la prise d'une décision commune, qu'elle soit unanime ou pas 12 . Le fait de disposer du quorum prévu chaque fois qu'il le faut, du début jusqu'à la toute fin des procédures, est une question de principe, d'intérêt public et d'administra- tion saine et équitable de la justice.
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[TRADUCTION] Il semble donc en découler que toute mesure prise sous l'autorité de la Commission, lorsque celle-ci n'est composée que de deux personnes, soit invalide.
De la même manière, le jugement que la Commission a prononcé après l'audience du 16 août 1978 n'a aucun effet juridique car elle n'était composée que de deux membres quand elle a entendu l'appel et quand elle a exposé ses motifs.
Comme la loi exige explicitement qu'au moins trois membres tiennent une telle audience, la Commission ne sau- rait devenir compétente par suite d'une renonciation, que deux membres, ou un seulement, aient siégé pour entendre l'appel. Le législateur a déterminé qu'il fallait au moins trois commissaires. Cette condition a été ajoutée pour l'avantage du public en général et de tous ceux que la décision de la Commission pourrait toucher. Il ne s'agissait pas simple- ment d'une mesure protectrice qui n'intéressait que les par ties elles-mêmes. [Mes soulignements.]
Dussault et Borgeat, Traité de droit administratif tome 3, 2e éd., (Les Presses de l'Université Laval, 1989), aux p. 223 et 224:
Ce qui importe, c'est qu'un tribunal ou organisme ait quo rum dès le début du processus décisionnel et le maintienne composé des mêmes personnes, jusqu'au moment il rend sa décision. Faute de respecter ces exigences, l'organisme ou le tribunal agit sans quorum et ses actes ou décisions sont nuls de plein droit.
Voir aussi «The Quorum in Public Law», David Lanham, [1984] P.L. 461, aux p. 468 et s.
12 Ces remarques se rapportent à la prise de la décision elle- même. Je ne veux pas dire que les motifs doivent accompagner la décision dans tous les cas—en fait, de nombreux tribunaux, dont la Cour suprême du Canada, permettent que l'on publie les motifs à une date ultérieure—ni qu'au moment la déci- sion est rendue, chaque membre du groupe doit avoir informé en détail ses collègues des motifs qu'il prévoit publier.
La nature, le degré et la forme de cette «action de concert» ne peuvent être définis et n'ont pas à l'être. Les tribunaux ont leurs propres méthodes et leurs propres règles. Les personnes qui siègent en groupe ont leur propre personnalité et leurs propres habi- tudes, et on ne peut s'attendre à ce qu'elles se tien- nent par la main depuis le moment elles commen- cent à entendre une affaire jusqu'à celui elles la tranchent. Il faut toutefois, à un certain point, qu'elles en arrivent à une décision collectivement et que chaque membre «participe» individuellement à cette décision collective en y souscrivant ou en exprimant sa dissidence. Il faut qu'il y ait une intention com mune, chaque membre devant être informé, dans les grandes lignes à tout le moins, du point de vue de chacun de ses collègues. C'est, selon moi, ce que l'on entend par «prendre la décision». L'avocat de l'appe- lante, s'appuyant sur ce qu'a déclaré le juge en chef Laskin dans l'arrêt P.P.G. Industries Canada Ltd. c. P.G. du Canada 13 , a fait remarquer avec juste raison que signature n'entraîne pas nécessairement partici pation. J'ajouterai cependant que l'inverse est égale- ment vrai: absence de signature n'entraîne pas néces- sairement absence de participation. Il n'existe à cet égard aucune règle absolue, car les dispositions légis- latives, les règles de pratique et les pratiques propre- ment dites peuvent différer d'un tribunal à un autre.
Le quorum de la Commission du tarif
La présente Cour a examiné les exigences particu- lières de la loi eu égard au quorum de la Commission dans l'affaire In re la Loi sur la Commission du tarif 14 , l'on demandait à la Cour si, suite au décès de l'un des trois membres du tribunal, ses deux col- lègues avaient compétence pour rendre la décision. Le paragraphe 3(8) de la Loi qui était en vigueur à cette époque [S.R.C. 1970, chap. T-1] ressemblait au paragraphe 6(1) de la Loi en vigueur au moment des présentes procédures, et le juge en chef Jackett a interprété cette disposition comme suit [aux pages 230 à 232]:
Bien que la Loi ne le dise pas expressément, il s'agit de dis positions établissant un «quorum», c'est-à-dire, fixant un nom- bre minimal de membres de la Commission devant participer à
13 [1976] 2 R.C.S. 739, à la p. 747.
14 [1977] 2 C.F. 228 (C.A.).
l'exécution des deux catégories de fonctions qui lui sont con- fiées.
... si l'on considère l'article 3(8) isolément, il appert qu'il faut la participation d'au moins trois de ses membres pour que la Commission exerce son pouvoir de «faire une déclaration valide» accueillant ou rejetant l'appel ...
L'avocat du procureur général du Canada prétend que la lec ture conjuguée de l'article 21(1) de la Loi d'interprétation et de l'article 3(8) de la Loi sur la Commission du tarif suffit à nous convaincre de l'obligation de répondre par l'affirmative à la question posée par la Commission à la Cour. Selon lui, si nous comprenons bien, l'article 3(8) donne à trois membres au moins le pouvoir de juger l'appel, alors que l'article 21(1) autorise «une majorité d'entre [eux]» à le faire. À notre avis, on ne saurait se servir de l'article 21(1) pour modifier une dis position prévoyant un «quorum» requis dans un cas particulier. Bien que nous reconnaissions qu'une interprétation littérale du paragraphe n'interdise pas de lui donner le sens que veut lui donner l'avocat, les termes employés ayant une portée suffi- samment large, il nous semble que l'article 21(1) ne vise que les cas d'exercice du pouvoir légal par un quorum légal; il a pour effet de faire de la décision de la «majorité» la décision du groupe. [Mes soulignements.]
En 1977 15 , par suite de cette interprétation et dans le but d'éviter les conséquences dévastatrices qu'aurait la violation des règles applicables au quo rum dans des circonstances spéciales la Commis sion se trouverait dans l'impossibilité concrète de fonctionner, le législateur adopta le paragraphe 3(8.1), qui est analogue au paragraphe 6(2) actuelle- ment en vigueur. Cette disposition n'est pas loin de définir ce que devrait être l'acte final de la «partici- pation», lorsqu'elle dit, dans la version anglaise de la Loi: «unable or unwilling to take part in the making of any order». La version française de ce passage est plus explicite: «se révèle incapable ou refuse de parti- ciper au prononcé d'une ordonnance» [soulignements ajoutés], le mot «prononcé» signifiant «prendre ou faire connaître une décision; selon les formes requi- ses, en vertu des pouvoirs dont on dispose» 16 . Il me semble que le paragraphe 6(2) traite de la question du quorum au moment de l'exercice de ce qui constitue
15 Loi corrective de 1977, S.C. 1976-77, chap. 28, art. 43.
16 P. Robert, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, t. 5 (Paris: Société du nouveau Littré, Le Grand Robert, 1972), à la p. 503.
en général le pouvoir ultime d'une commission à l'égard d'une question interlocutoire ou définitive qui lui est soumise, savoir la décision sur la question et, d'après la version française de la disposition, le pro- noncé de la décision 17 .
Il est donc clair que trois membres au moins doi- vent prendre part à l'exercice, par la Commission, du pouvoir que lui confère le paragraphe 47(3) de la Loi sur les douanes 18 de «rendre l'ordonnance» contes- tée. La question se résume donc en réalité à définir ce que l'on entend par la «participation»: M. Beau- champ a-t-il «participé» à la décision rendue par la Commission le 14 septembre 1988? Dans la négative, la «participation» tardive de M. Beauchamp, le 21 septembre 1988, ne pourrait valider la décision de la Commission datée du 14 septembre 1988, car la Commission, en rendant cette décision, si viciée qu'elle soit, aurait épuisé sa compétence et n'aurait pu la recouvrer, ou valider sa décision antérieure, en faisant participer par la suite le troisième membre du tribunal 19 .
17 Chose curieuse, les dispositions qu'emploie le législateur sont fort peu uniformes dans les lois il est permis qu'un nombre de personnes inférieur au minimum requis prennent des décisions. Le motif de non-participation varie: empêche- ment, décès ou refus (Loi sur le Tribunal canadien du com merce extérieur, L.R.C. (1985) (4e suppl.), chap. 47, art. 9(3)), décès ou incapacité («unable») (Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), chap. I-2, art. 63(2); Loi sur le Tribunal de la concur rence, L.R.C. (1985) (2e suppl.), chap. 19, art. 12(3); Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, art. 45(3)), incapacité ou décès («incapacitated») (Loi sur l'Office national de l'éner- gie, L.R.C. (1985), chap. N-7, art. 16(2)) et absence ou empê- chement (Loi canadienne sur la protection de l'environnement, L.R.C. (1985) (4e suppl.), chap. 16, art. 95). Les lois exigent qu'il y ait quorum pour le prononcé de la décision (Loi sur l'Office national de l'énergie, précitée, art. 16(2)) pour rendre jugement (Loi sur la Cour fédérale, précitée, art. 45(3); Loi sur le Tribunal de la concurrence, précitée, art. 12(3)) ou pour connaître d'une affaire (Loi sur le Tribunal canadien du com merce extérieur, précitée, art. 9(3)). Dans certains cas, le nom- bre requis peut être réduit, mais uniquement avec l'autorisation du président de la Commission (Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, précitée, art. 9(3)) ou avec le consente- ment des parties au moment de l'audience (Loi sur la Cour suprême, L.R.C. (1985), chap. S-26, art. 29).
18 S.R.C. 1970, chap. C-40.
19 Voir Grillas c. Ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immi- gration, [1972] R.C.S. 577, aux p. 593 et 594, le juge Pigeon. L'avocat de l'intimé n'a pas dit que la décision de la Commis sion a pu être prise le 21 septembre 1988 plutôt que le 14 sep- tembre 1988.
L' «explication»
Pour expliquer ce qui semble s'être produit, l'avo- cat de l'appelante nous a demandé d'examiner l'ex- plication qu'a donnée M. Beauchamp dans une déci- sion subséquente de la Commission 20 . L'avocat a reconnu qu'une telle explication, sans affidavit à l'ap- pui, ne constituerait normalement pas une preuve suf- fisante, mais il a fait valoir qu'il y avait en l'espèce des circonstances inhabituelles:
Premièrement, l'avocat de l'intimé n'a pas sou- tenu qu'il s'agissait d'une preuve inadmissible et a reconnu verbalement devant la Cour que, à l'époque, la Commission était aux prises avec de sérieux pro- blèmes internes;
deuxièmement, la preuve se trouve dans un docu ment officiel qui émane de la même commission dont on conteste les mesures, commission qui aurait pu contredire cette preuve si telle avait été son intention;
troisièmement, il est si peu courant que ce genre de preuve émane d'organismes décisionnels qu'il y aurait lieu de ne pas appliquer de façon trop stricte les règles de preuve habituelles.
Je suis bien conscient que lorsque l'on a affaire à l'intégrité du processus décisionnel, les tribunaux qui examinent ce processus dans une affaire donnée ser- viraient bien mal leurs intérêts s'ils tentaient d'éviter de faire face au problème en invoquant des motifs techniques. Par contre, précisément parce que l'on a affaire à un processus qui va au coeur de nos institu tions démocratiques et qui est particulièrement vulné- rable à des allégations injustes et fallacieuses, les tri- bunaux se tromperaient tout aussi gravement s' ils se satisfaisaient d'insinuations dont les fondements ne peuvent être vérifiés convenablement. La règle vou- lant que les éléments de preuve soient fournis par affidavit n'est pas une simple question d'ordre tech nique: elle permet de s'assurer que nul n'est blessé par des allégations qu'il n'a pas la chance de pouvoir contester.
Dans l'affaire qui nous occupe ici, l'explication se trouve dans les motifs dissidents qui ont été exposés dans une décision subséquente, à un moment l'af-
20 Jagenberg of Canada Ltd. and Deputy M.N.R. (Customs and Excise) and Repap Enterprises Corp. Inc., Intervenant (1988), 17 C.E.R. 296 (Tar. Bd.).
faire était classée et la majorité des membres du tribunal n'étaient plus en mesure de répondre et de donner leurs versions des faits. Aucun affidavit n'étaye l'explication, et la véracité de cette dernière ne peut donc être vérifiée. La Cour ne peut tout sim- plement pas tenir pour acquises des affirmations que la Commission ne peut contester de la manière habi- tuelle, c'est-à-dire en contre-interrogeant l'auteur de l'allégation. L'appelante voudrait que la Cour ren- verse le fardeau de la preuve et oblige l'intimé à répondre à une attaque qui ne s'appuie sur rien. Aucun précédent ne nous a été cité, et je n'en ai trouvé aucun, qui permette d'assouplir les règles régissant les affidavits de la façon que propose l'ap- pelante. Au contraire, des affidavits ont été produits dans des causes l'on contestait d'une manière assez semblable la compétence d'une commission ou d'un tribunal 21 . J'appliquerais à la majorité du tribu nal les propos suivants du juge en chef Dickson au sujet des juges, dans l'affaire Société des Acadiens 22 :
En l'absence d'une preuve manifeste à l'appui des allégations d'incompétence formulées par les appelantes, je ne crois pas que nous puissions statuer en leur faveur. A mon avis, il nous faut, dans des cas comme celui-ci, présumer que les juges ont agi de bonne foi.
Je conclus donc que la prétendue explication qu'a donnée M. Beauchamp ne constitue pas une preuve admissible.
Sans cette preuve, l'appelante n'est pas en mesure d'établir que le membre dissident n'a pas participé à la décision. Son nom figure à la première page de la décision. Le secrétaire de la Commission a avisé les parties que le membre donnerait sous peu son opinion et, effectivement, sa très longue opinion, il ne fit pas allusion aux difficultés qu'il allait mentionner dans une opinion ultérieure, fut transmise une semaine plus tard. Il s'agit peut-être d'une façon inhabituelle de rendre une décision, mais nous
21 Voir Assoc. canadienne de télévision par câble c. Ameri- can College Sports Collective of Canada, Inc., [1991] 3 C.F. 626 (C.A.); SITBA c. Consolidated -Bathurst Packaging Ltd., [1990] 1 R.C.S. 282, à la p. 318; Doyle c. Commission sur les pratiques restrictives du commerce, [1985] 1 C.F. 362 (C.A.), à la p. 373; Société des Acadiens du Nouveau-Brunswick Inc. et autre c. Association of Parents for Fairness in Education et autres, [1986] 1 R.C.S. 549, aux p. 569 et 581; Kane c. Conseil d'administration (Université de la Colombie-Britannique), [1980] 1 R.C.S. 1105, aux p. 1111 et 1112.
22 Précitée, note 21, aux p. 569 et 570.
n'avons aucune preuve de la manière dont la Com mission procède habituellement. Au vu des faits de l'espèce, je suis d'accord avec l'avocat de l'intimé [TRADUCTION] qu' «un simple retard dans la présenta- tion des motifs de dissidence ne devrait pas avoir d'effet sur la compétence de la Commission ou mener nécessairement à la conclusion que le membre dissi dent, M. Beauchamp, n'avait pas participé à la déci- sion» 23 .
LA QUESTION DU CLASSEMENT TARIFAIRE
Le second point qu'a soulevé l'appelante est celui de l'existence d'une erreur susceptible de révision dans la décision de la Commission.
L'appel dont la présente Cour est saisie est inter- jeté en vertu des dispositions de l'ancienne Loi sur les douanes 24 et, d'après les termes du paragraphe 48(1) de cette dernière, il se limite à une question de droit. L'avocat de l'intimé s'est fondé sur les déci- sions qu'a rendues la Cour dans les affaires Deere (John) c. Ministre du Revenu national (Douanes et Accise) 25 ; Digital Equipment of Canada Ltd. et Sous- ministre du Revenu national (Douanes et Accise) 26 et Foxboro Canada Inc. and Deputy M.N.R. (Customs and Excise) et a1. 27 , pour nous demander de ne pas nous interposer dans ce qui constitue, à son avis, des conclusions de fait qui ressortissent manifestement à la Commission d'après la preuve et de nous en remet- tre à l'opinion d'un tribunal spécialisé.
Les numéros tarifaires applicables sont les sui- vants:
Machines électroniques de traitement de l'information et leurs appareils; le matériel périphérique qui leur est des- tiné, y compris les machines et les appareils d'intro- duction, de préparation et de manipulation des don- nées; les accessoires qui leur sont destinés; leurs pièces; rien de ce qui précède doit y inclure les appareils de téléphone et de télégraphe et leurs pièces:
23 Exposé des points de fait et de droit de l'intimé, à la p. 9.
24 S.R.C. 1970, chap. C-40, dans sa forme modifiée.
25 (1990), 107 N.R. 137 (C.A.F.)
26 (1988), 13 C.E.R. 343 (C.A.F.).
27 (1987), 12 C.E.R. 118 (Tar. Bd.).
41417-1 Autres que ce qui suit
Appareils électriques de téléphone et leurs pièces achevées:
44508-1 Autres que ce qui suit
44508-2 Combinés de téléphone, vidéophones et systèmes télé-
phoniques d'intercommunication
44508-3 Pièces achevées de tout ce qui précède
71100-1 Tous les produits non dénommés dans la présente liste comme étant soumis à quelque autre droit, ni autrement déclarés admissibles en franchise, et dont
l'importation n'est pas prohibée par la loi
Je suis d'avis, avec tout le respect qui lui est dû, que la majorité du tribunal a commis une erreur de droit en introduisant des éléments étrangers dans le sens habituel ou courant des mots «appareils de télé- phone» qui figurent dans le Tarif 28 . Dans les passages suivants de sa décision,
Les marchandises importées sont annoncées et vendues comme étant des réseaux de téléphone commerciaux informatisés et des réseaux commerciaux de communications téléphoniques, et informatiques. La transmission de la voix et d'autres données s'effectue au moyen des lignes téléphoniques qui ont d'abord été destinées uniquement à la transmission de la parole et le nombre des lignes téléphoniques reliées aux autocommutateurs privés informatisés est nettement plus élevé que celui des con- nexions servant à la transmission des autres types de données. Il ne peut faire aucun doute que le réseau entier correspond à un appareil de téléphone et que les marchandises en cause représentent une composante du réseau téléphonique. D'après la traduction de la définition que donne l'ouvrage The Concise Oxford Dictionary, le terme «composante» décrit un «élément qui contribue à la composition d'un ensemble». Les importa tions en cause contribuent à la composition d'un réseau télé- phonique, dans lequel elles réalisent les opérations de con- nexion nécessaires à la transmission de ce que j'ai appelé la donnée message.
Toutefois, aux fins du classement tarifaire, il ne faut pas consi- dérer comme appareils électroniques de traitement de l'infor- mation toutes les marchandises fonctionnant selon un mode électronique. De plus en plus, étant donné l'évolution de la technologie, les éléments d'ensembles pouvant être considérés comme des appareils électroniques de traitement de l'informa- tion entrent dans la composition d'une variété de systèmes et de dispositifs qui n'étaient pas conçus principalement aux fins de traitement de données. Il faut donc tenir compte du but pre mier des systèmes ou des dispositifs dans lesquels ces éléments
28 Ingersoll-Rand Door Hardware Canada Inc. et Sous- ministre du Revenu national (Douanes et Accise) (1987), 15 C.E.R. 47 (C.A.F.), à la p. 51, le juge Stone J.C.A.
sont incorporés pour arriver à décrire véritablement ces mar- chandises aux fins du classement.
Les marchandises en cause sont incorporées dans l'ensemble du réseau téléphonique et elles représentent une composante de ce réseau; il va sans dire qu'elles sont essentielles à leur but premier, qui consiste à transmettre la donnée message qui tra verse le réseau sans subir de traitement. Je considère la produc tion de rapports de gestion, qui suppose l'organisation de l'in- formation en mémoire, comme une fonction auxiliaire de ces marchandises; cette fonction ne détermine pas le classement tarifaire. Dans le présent cas, il est question d'appareils de télé- phone et, à ce titre, les marchandises sont visées par la clause d'exclusion du numéro tarifaire 41417-1 concernant les appa- reils électroniques de traitement de l'information.
Quant à déterminer si ces marchandises sont également des systèmes téléphoniques d'interconununication citées (sic) au numéro 44508-2 ou des pièces achevées de ces systèmes men- tionnées au numéro 44508-3, la preuve établit que les «sys- tèmes d'intercommunication» ne désignent strictement que des interphones. Comme aucune preuve ni aucune définition de dictionnaires généraux ou spécialisés n'a été présentée soute- nant le contraire, la question est réglée aux fins des appels et le classement ne peut se faire sous ce numéro. (D.A., aux p. 61 et 62.)
la majorité a considéré que les mots «appareils de téléphone» signifiaient «réseau téléphonique» et a même été jusqu'à interpréter le mot «composante» qui ne figure nulle part sous les numéros tarifaires examinés. En concluant que «il ne peut faire aucun doute que le réseau entier correspond à un appareil de téléphone et que les marchandises en cause représen- tent une composante du réseau téléphonique», la majorité conclut en fait qu'un «réseau» est un «appa- reil», ce qui est une prétention indéfendable lorsque l'on considère, par exemple, le libellé du numéro tari- faire 44508-2, qui fait référence aux «systèmes télé- phoniques d'intercommunication» (mon souligne- ment).
J'aimerais ajouter qu'il ressort clairement de la version française du document que les mots «appa- reil» («apparatus») et «système» («system») ne sont pas interchangeables et désignent bel et bien deux réalités distinctes 29 . Nous avons affaire ici, d'après moi, à un cas le «recours à la version française
29 Voir: Grand Larousse de la langue française, t. 1 (Paris, Librairie Larousse, 1971), à la p. 202; Grand Larousse de la langue française, t. 7 (Paris, Librairie Larousse, 1978), aux p. 5909 et 5974; P. Robert, Dictionnaire alphabétique et analo- gique de la langue française (Le Grand Robert), 2e éd., t. I (Paris: Société du nouveau Littré, 1986), aux p. 453 et 454 et 2e éd., t. IX, aux p. 115 et 116 et aux p. 204 et 205.
règle de façon absolue toute question d'ambiguïté dans le libellé du texte de loi» 30 . Ainsi que l'a fait remarquer Beaupré, dans son ouvrage intitulé Inter- prétation de la législation bilingue 31 :
... fondée sur la règle d'égale autorité entre les versions fran- çaise et anglaise, une version précise de la loi dissipera norma- lement tout doute entachant une version ambiguë et que le con- texte d'une disposition résoudra normalement toute différence entre les deux versions.
Lorsque l'on a affaire à la définition de certains termes d'un tarif qui a pour objet de faire la distinc tion entre des centaines d'articles techniques, il fau- drait utiliser de préférence la version qui est claire et non ambigiie.
S'appuyant sur la décision que la présente Cour a rendue dans l'affaire John Deere Limited 32 , l'avocat de l'intimé a fait valoir que la majorité de la Com mission ne s'est pas trompée en examinant l'usage auquel les produits (ou marchandises) en question sont destinés afin de déterminer le classement qui convient. Le problème est que la majorité a fait beau- coup plus qu'examiner l'usage des produits en ques tion; elle a confondu cet usage avec les produits eux- mêmes et les a classés comme s'ils étaient un réseau téléphonique, ce qu'ils ne sont manifestement pas. De plus, en concluant que les «composantes» du «réseau téléphonique» sont des «appareils de télé- phone», même quand ces composantes transmettent des données en plus de la voix, la majorité de la Commission n'a pas tenu compte de la jurispru dence 33 et de la définition que donnent les diction- naires techniques et généraux du mot «téléphone» qui, dans tous les cas, lie ce dernier à la transmission de sons ou de la voix uniquement.
En outre, en concluant, très brièvement, que
Un réseau téléphonique, comportant les marchandises en cause, est à la fois électrique et électronique, mais surtout élec- trique; les importations ont été classées correctement par l'in- timé sous le numéro tarifaire 44508-1 en tant qu'appareils élec- triques de téléphone. (D.A., à la p. 63.)
30 Cardinal c. R., [1980] 1 C.F. 149 (1CC inst.), à la p. 153, le juge Mahoney.
31 Wilson & Lafleur Ltée, Montréal, 1986, à la p. 189.
32 Précitée, note 25.
33 Voir R. v. Brislan; Ex parte Williams (1935), 54 C.L.R. 262 (H.C. Aust.), à la p. 270, le juge en chef Latham; Rex v. Gignac, [1934] O.R. 195 (H.C.), à la p. 204, le juge Armour; The Attorney General v. Edison Telephone Company of Lon- don (1880), 6 Q.B. 244 (Ex. D.), à la p. 245, le juge Stephen.
la majorité de la Commission, en plus de faire réfé- rence de nouveau au «réseau téléphonique», a com- mis une erreur de droit en ne tenant pas compte de l'intention du législateur, de la jurisprudence et des définitions de dictionnaires techniques et généraux dans son interprétation des mots «électrique» et «électronique».
L'emploi que fait le législateur des mots «électro- nique» et «électrique» sous différents numéros tari- faires des douanes dénote qu'il voulait que les deux mots désignent des produits différents. Le Tarif a tou- jours fait une distinction claire entre les produits «électroniques» et les produits «électriques». Le numéro tarifaire 44508-1 a été adopté pour la pre- mière fois en 1886 et modifié pas plus tard qu'en 1984; on y a toujours employé le mot «électrique». Si le législateur avait envisagé, vu les progrès de la technique moderne, d'étendre le sens du mot «élec- trique» pour qu'il englobe également les produits «électroniques», il a eu amplement l'occasion de le faire; pourtant il ne l'a pas fait, encore qu'il ait décidé, en 1980, d'ajouter l'adjectif qualificatif «électronique» à l'expression «machines de traite- ment de l'information et leurs appareils» au moment d'adopter le numéro tarifaire 41417-1.
La jurisprudence reconnaît aussi qu'il existe une distinction claire entre les produits «électroniques» et les produits «électriques». Dans l'affaire General Datacomm Ltd. c. Sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise 34 , la Commission a rejeté l'argument même qu'a accepté la majorité de la Commission en l'espèce et conclu que les modems sont des dispositifs électroniques utilisés de pair avec des systèmes informatiques et a classé les modems, les ensembles de données, les coupleurs et les multi- plexeurs comme du matériel périphérique destiné aux «machines électroniques de traitement de l'informa- tion» (41417-1) plutôt que comme des «appareils électriques de téléphone» (44508-1) 35 .
34 (1984), 9 RCT 78.
35 Voir aussi Wang Laboratories (Canada) Limited c. Sous- ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (1971), 5 RCT 119; Renvoiappel 1907 (1983), 8 RCT 587; Waltham Watch Company of Canada Ltd. c. Sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (1984), 9 RCT 388, confirmé par A-208-85, C.A.F., le 18 novembre 1987 [inédit]; Nevco Scoreboard Co. Ltd. et Sous-ministre du
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Les définitions que l'on peut trouver dans les dic- tionnaires techniques et généraux font aussi une dis tinction claire entre les mots «électrique» et «électro- nique».
L'intimé a admis pendant toute la durée des procé- dures que les CBX sont clairement des appareils élec- troniques. La majorité de la Commission a aussi tiré la même conclusion de fait. Elle ne pouvait donc con- clure que les appareils CBX électroniques étaient des produits «électriques» selon l'emploi qui est fait de ce mot dans le Tarif.
En conséquence, les produits en question ne tom- bent pas sous le coup de la clause d'exclusion que comporte l'intitulé du numéro tarifaire 41417-1 («rien de ce qui précède doit y inclure les appareils de téléphone et de télégraphe et leurs pièces») ou du numéro tarifaire 44508-1 («Appareils électriques de téléphone»); le membre dissident a déterminé avec juste raison que lesdits produits constituent à la fois des machines électroniques de traitement de l'infor- mation et le matériel périphérique qui leur est destiné, lesquels sont à classer sous le numéro tarifaire 41417-1.
La Cour se doit de respecter l'avis d'un tribunal spécialisé, mais elle n'est nullement liée par cet avis. Dans la présente affaire, la loi, son origine législative et la propre jurisprudence de la Commission n'étayent pas l'interprétation qu'a faite la majorité. Nous avons affaire ici à une erreur de droit que la présente Cour, siégeant en appel de la décision de la Commission, se doit de rectifier.
DÉCISION
Je suis d'avis de faire droit à l'appel, d'infirmer la décision frappée d'appel et de juger que les modèles VSCBX, CBX II 8000 et CBX II 9000 des systèmes commerciaux de communications téléphoniques et numériques de la société Rolm, qui ont été importés des États-Unis d'Amérique en 1985 et 1986 aux dates et sous les numéros de déclaration Toronto) indiqués dans les annexes accompagnant les lettres de décision de l'intimé, auraient être classés par cette
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Revenu national (Douanes et Accise) et Rotomatic Display Products Ltd. (1986), 12 C.E.R. 88 (C.T.).
dernière sous le numéro tarifaire 41417-1 comme «machines électroniques de traitement de l'informa- tion et matériel périphérique qui leur est destiné».
LE JUGE HEALD, J.C.A.: J'y souscris.
LE JUGE LINDEN, J.C.A.: Je suis d'accord.
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