Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[1970] R.C.E. M.R.N. v. BRAITHWAITE 35 [TRADUCTION] Ministre du Revenu national (Appelant) v. Braithwaite (Intimé) Present: Le Président JackettToronto, les 10 et 11 décembre 1969 impôt sur le revenuContributions du gouvernement de l'Ontario au plan de pension pour les membres de l'Assemblée législativeCalcul du revenu d'un membre de l'Assemblée législativeMontant de la déduction pour contribution au plan d'épargne-retraite--La Reine est-elle une =personne»?—Loi de l'impôt sur le revenu, art. 79B(5)a) et b). En 1965, B, qui était membre de l'Assemblée législative de la province d'Ontario, a versé une contribution de $561 à un plan enregistré de pension de retraite (tel que défini à l'article 139(1) ahh) de la Loi de l'impôt sur le revenu) constitué par une loi de l'Ontario pour les membres de l'Assemblée législative de cette province; et conformément à cette loi, le Trésorier provincial de l'Ontario a versé une contribution d'un même montant pour le compte de B. B a également versé en 1965, $4,300 à deux plans enregistrés d'épargne-retraite (tels que définis à l'article 79B) et a demandé à déduire $2,500 (le maximum admissible) du calcul de son revenu pour 1965, en vertu de l'alinéa (b) de l'article 79B(5), à l'égard de sa contribution à ces plans d'épargne-retraite, mais' le ministre a soutenu que l'alinéa a) de l'article 79B(5) limitait cette déduction à $939. En vertu de l'article 79B(5)a), la déduction de B serait limitée à $939, si la contribution du gouvernement de l'Ontario au plan de pension pour cette année était déductible en vertu de l'article 11(1)g) (qui autorise l'employeur à déduire ses contributions au plan de pension d'un employé) «dans le calcul du revenu de toute autre personne ... (ou serait déductible si cette dernière était une personne imposable en vertu du paragraphe 1 de l'article 2) ». Jugé (infirmant le jugement de la Commission d'appel de l'impôt) : La déduction de B en vertu de l'article 79B(5)a) était limitée à $939, parce que la contribution du gouvernement de l'Ontario au plan de pension, pour 1965, serait déductible dans le calcul du revenu de la Reine du chef de l'Ontario (qui était l'employeur de B d'après la définition de l'article 139(1)/b)) si la Reine était imposable. La mention, faite à l'article 79B(5)a), d'une «autre personne» est assez large pour comprendre la Reine du chef de l'Ontario. Renvoi à: Madras Electric Supply Corp. v. Boarland, [1955] A.C. 667. APPEL d'un jugement de la Commission d'appel de l'impôt. G. W. Ainslie, c.r. pour l'appelant. A. K. Crossley, pour l'intimé. LE PRÉSIDENT JACKETT: Il s'agit de l'appel interjeté par le ministre du Revenu national d'un jugement de la Commission d'appel de l'impôt, en date du 2 août 1968, faisant droit à l'appel de l'intimé de sa nouvelle cotisation pour l'année d'imposition 1965, en vertu de la Partie I de la Loi de l'impôt sur le revenu, et la déférant à l'appelant pour modification, considérant que l'intimé était en droit de réclamer pour l'année en question la déduction maximale de $2,500 prévue à l'alinéa b) de l'article 7913(5) de la Loi. On a plaidé en appel les faits allégués aux paragraphes 1 à 10 inclus de l'avis d'appel, amendé par l'ordonnance du 3 octobre 1969, et admis par le paragraphe 1 de la réponse à l'avis d'appel, en date du 18 août 92621-31
[1970] R.C.É. M.R.N. v. BRAITHWAITE 37 1969. (Les amendements à l'avis d'appel n'en ont pas modifié les para-graphes 1 à 10.) Voici le texte de ces paragraphes: 1. Pendant son année d'imposition 1965, l'intimé était membre de l'As-semblée législative de la province d'Ontario. 2. A titre d'indemnité de session et d'allocation, l'intimé a reçu en vertu de l'article 60 du Legislative Assembly Act, R.S.O. 1960, chapitre 208, modifié par le chapitre 56 des Statutes of Ontario de 1965, la somme de $9,350; de ce montant fut déduite, au titre de sa contribution en tant que député, conformément au paragraphe (1) de l'article 4 du Legislative Assembly Retirement Allowances Act,. R.S.O. 1960, chapitre 209, la somme de $561, versée au Fonds du revenu consolidé de l'Ontario, au compte des allocations de retraite de l'Assemblée législative. 3. Le trésorier provincial de l'Ontario, conformément au paragraphe (2) de l'article 16 du Legislative Assembly Retirement Allowances Act, a versé au compte des allocations de retraite de l'Assemblée législative une somme tirée du Fonds du revenu consolidé de l'Ontario, égale aux contributions effectuées par les membres de l'Assemblée législative et les ministres; en ce qui concerne plus spé-cialement la contribution faite par l'intimé en qualité de député, le trésorier provincial de l'Ontario a versé une somme supplémentaire de $561 au compte des allocations de retraite de l'Assemblée législative. 4. L'appelant a accepté d'enregistrer le Legislative Assembly Retirement Allowances Act conformément à l'alinéa ahh) du paragraphe (1) de l'article 139 de la Loi de l'impôt sur le revenu, aux fins de ladite loi, en ce qui concerne sa constitution et ses opérations pour l'année d'imposition 1965 de l'intimé. 5. Pendant l'année d'imposition 1965, l'intimé a versé, (a) $2,500 pour une rente sur l'État canadien, enregistrée comme plan d'épargne-retraite conformément à l'article 79B de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, chapitre 148; (b) $1,800 en vertu d'un plan de retraite géré par la North American Life and Casualty Company et enregistré conformément à l'article 79B de la Loi de l'impôt sur le revenu. 6. Dans le calcul de son revenu, l'intimé a déduit de son revenu total les sommes suivantes: Contribution de député au compte des allocations de re- traite de l'Assemblée législative $ 561.00 Primes du plan enregistré d'épargne-retraite 939.00 $1,500.00 et il a évalué son impôt fédéral pour 1965 à $7;197.59 et son impôt provincial à $1,961.13. 7. Le 29 juin 1966, l'appelant a fixé l'impôt fédéral à $7,197.57 et l'impôt provincial à $1,961.15. 8. Le 21 septembre 1966, l'intimé a déposé un avis d'opposition à la cotisation, par lequel il réclamait le droit de déduire de son revenu, en vertu de l'alinéa b) du paragraphe (5) de l'article 79B, la somme de $2,500. 9. Sur réception de l'avis d'opposition, l'appelant a reconsidéré la cotisation et l'a confirmée au motif qu'en vertu de l'alinéa a) du paragraphe (5) de l'article 79B, l'intimé, n'avait droit qu'à une déduction de $939, et non aux déductions prévues à l'alinéa b) du paragraphe (5) de l'article 79B de la Loi de l'impôt sur le revenu. 10. Sur réception de la confirmation, le contribuable a fait appel de la cotisa-tion devant la Commission d'appel de l'impôt, et par décision du 2 août 1968, M. Weldon a fait droit à l'appel.
[1970] R.C.E. ; M.R.N. v. BRAITHWAITE 39 Pour apprécier le problème soulevé par cet appel, il faut envisager sous trois aspects différents l'application de la Loi de l'impôt sur le revenu à un membre de l'Assemblée législative qui fait les investissements qu'a effectués l'intimé pendant l'année en question. En premier lieu, un député est imposable à l'égard du traitement (indemnité) qu'il reçoit en cette qualité. L'article 3 de la Loi de l'impôt sur le revenu prévoit que le revenu d'un contribuable comprend les revenus provenant «de charges et d'emplois» le terme «charge», selon sa définition, comprend la charge d'un membre d'une Assemblée législative (article 139(1)ab)). En second lieu, puisque l'appelant a accepté d'enregistrer le Legislative Assembly Retirement Allowances Act, conformément à l'alinéa ahh) de l'article 139 (1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, pour l'année en question, l'intimé était habilité à opérer une déduction au titre de sa contribution à ce plan, en vertu de l'article 11(1) i) de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui précise que: 11. (1) Par dérogation aux alinéas a), b) et h) du paragraphe (1) de l'article 12, les montants suivants peuvent être déduits dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une année d'imposition: * * * i) les montants que le contribuable a versés à un fonds ou plan enregistré de pension ou relativement à un fonds ou plan enregistré de pension, .. . D'autre part, bien que la Province d'Ontario (Sa Majesté du chef de l'Ontario) entre dans la définition du terme «employeur», par rapport à un député, au sens que donne à «employeur» la Loi de l'impôt sur le revenu (article 139(1)/b), il n'existe aucune possibilité de déduction à l'égard des contributions faites par ce gouvernement en faveur de l'intimé en vertu du Legislative Assembly Retirement Allowances Act, d'après le texte de l'article 11(1)g) de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui précise notamment que: 11. (1) Par dérogation aux alinéas a), b) et h) du paragraphe (1) de l'article 12, les montants suivants peuvent être déduits dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une année d'imposition: * * * g) un montant versé par le contribuable, pendant l'année ou dans les 120 jours à compter de la fin de l'année, à un fonds ou plan enregistré de pension, ou en vertu d'un fonds ou plan enregistré de pension, à l'égard de services rendus par les employés du contribuable dans l'année, . . . La raison pour laquelle cette déduction est impossible, en ce qui concerne la contribution de lemployeur», est que le gouvernement de l'Ontario n'est évidemment pas assujetti à l'impôt en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. En troisième lieu, ayant versé des primes dans le cadre de plans d'épargne-retraite enregistrés conformément à l'article 79B (3) de la Loi de l'impôt sur le revenu, l'intimé était habilité à déduire ces primes, selon les modalités de l'article 79B(5), qui prévoit que: (5) Dans le calcul du revenu, pour une année d'imposition, d'un contribuable qui est rentier en vertu d'un plan enregistré d'épargne-retraite, ou qui devient dans les soixante jours qui suivent l'expiration de l'année d'imposition, un rentier sous
[1970] R.C.E. M.R.N. v. BRAITHWAITE 41 le régime dudit plan, il est permis de déduire le montant de toute prime payée par le contribuable en vertu dudit plan pendant l'année d'imposition ou pendant les soixante jours qui suivent la fin de l'année d'imposition (dans la mesure le montant n'était pas déductible dans le calcul de son revenu à l'égard d'une année antérieure d'imposition); toutefois, le montant ne doit pas dépasser, a) dans le cas d'un contribuable à l'égard duquel un montant est déductible, en vertu de l'alinéa g) ou h) du paragraphe (1) de l'article 11, dans le calcul du revenu de toute autre personne à l'égard de cette année d'imposition (ou serait ainsi déductible si cette dernière était une personne imposable en vertu du paragraphe (1) de l'article 2), ou dans le cas d'un contribuable qui est un employé d'une corporation d'assurance-vie et qui est un bénéficiaire, de façon éventuelle ou autre, aux termes d'un plan enregistré de pension institué ou établi par la corporation, un montant qui, ajouté au montant déductible, en vertu du sous-alinéa (i) de l'alinéa i) du paragraph (1) de l'article 11, dans le calcul du revenu du contribuable à l'égard de cette année d'imposition, ne dépasse pas le moindre de $1,500 ou 20 p. 100 de son revenu gagné à l'égard de cette année d'imposition; et, b) dans le cas de tout autre contribuable, le moindre de $2,500 ou 20 p. 100 de son revenu gagné à l'égard de cette année d'imposition. Il est admis de part et d'autre, en l'espèce, que si l'alinéa a) de l'article 79B(5) s'applique à l'intimé, l'alinéa b) ne peut lui être appliqué et il doit être fait droit à l'appel: si au contraire, l'alinéa a) ne s'applique pas, l'alinéa b) s'applique, et il faut rejeter l'appel. Les termes de l'alinéa a) 1 qui, d'après l'appelant, s'appliquent à l'intimé sont les suivants: a) dans le cas d'un contribuable à l'égard duquel un montant est déductible, en vertu de l'alinéa g) ... du paragraphe (1) de l'article 11 dans le calcul du revenu de toute autre personne à, l'égard de cette année d'imposition (ou serait ainsi déductible si cette dernière était une personne imposable en vertu du paragraphe (1) de l'article 2), .. . Il est clair que les mots précédant immédiatement les parenthèses ne s'appli-quent pas au cas de l'intimé. L'alinéa g) de l'article 11(1) permet au contribuable de déduire les contributions qu'il a versées à l'égard de services rendus par ses employés. En l'espèce, le gouvernement de l'Ontario, qui , a payé la rémunération du député, est considéré comme son employeur aux fins de la Loi de l'impôt sur le revenu et a effectivement pourvu aux contributions à son égard, en vertu d'un plan ou fonds de pension enregistré, mais n'est pas tenu de payer l'impôt sur le revenu conformément à ladite loi; c'est pourquoi il ne lui est pas possible de faire les déductions prévues à l'article 11(1)g) . L'appelant prétend cependant que les mots de l'article 75E(5)a) placés entre parenthèses, si on les met en corrélation avec ce qui précède, s'appliquent dans le cas de l'intimé, puisque l'on aurait pu opposer à l'intimé, dans le calcul du revenu de la Province d'Ontario pour les fins de la Loi de l'impôt sur le revenu, une déduction faite en vertu de l'alinéa g) de l'article 11(1), si la Province d'Ontario était «une personne imposable en vertu du paragraphe (1) de l'article 2». 1de l'article 7913(5), cité plus haut.
[1970] R.C.É. M.R.N. BRAITHWAITE 43 La Commission d'appel de l'impôt a tranché la question de la façon suivante: L'avocat du ministre a ensuite cité l'article 2(1) de la loi, qui précise quUn impôt sur le revenu doit être payé, ainsi qu'il est prévu ci-après, sur le revenu imposable, pour chaque année d'imposition, de toute personne résidant au Canada à quelque époque de l'année», et a soutenu que, sans tenir compte du fait que la province d'Ontario (qui est en fait une émanation de la Couronne) n'est pas, ainsi qu'on l'a reconnu, un employeur ordinaire, dans la mesure elle n'est pas imposable au sens de l'article 2(1), on doit cependant la considérer comme un employeur aux fins des articles 11(1) g) et 79B(5)a), considérés en corrélation. En d'autres termes, bien qu'on puisse effectivement conclure d'après la plaidoirie de Me Olsson que la Province d'Ontario n'est pas une «personne» aux fins de l'article 2(1), il a continué d'affirmer qu'on doit la considérer comme un contribuable aux fins de l'article 11(1)g) à cause des mots placés entre parenthèses dans l'alinéa a) de l'article 79B(5), qui stipulent que: «(ou serait ainsi déductible si cette dernière était une personne imposable en vertu du paragraphe (1) de l'article 2) ». Il faut préciser que le terme de «personne» est défini comme suit à l'article 139(1)ac) de la loi: «139. (1) Dans la présente loi, ac) «personne» ou tout mot ou toute expression décrivant une personne, comprend tout corps constitué et politique, et les héritiers, exécuteurs testamentaires, administrateurs ou autres représentants légaux de ladite personne, selon la loi de la partie du Canada visée par le contexte D'après cette définition, le terme «personne» semble comprendre tout particulier ou toute compagnie incorporée, mais il est clair qu'il n'inclut pas, à mon avis, la province d'Ontario, qui puise directement ses compétences et son pouvoir législatif dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867, 30 Victoria, c. 3. Par ailleurs, les termes de «corps constitué et politique» que l'on trouve dans cette définition du terme «personne» sont utilisés à l'article 5 de la Loi sur les corporations canadiennes, S.R.C. 1952, c. 53: «5. (1) Le secrétaire d'État peut, par lettres patentes sous son sceau d'office, accorder une charte à tout groupe d'au moins trois personnes qui en font la demande ... Cette charte fait, des requérants, ... un corps constitué et politique ...» A mon avis, l'argument de M.' Olsson n'est pas soutenable, car il n'avait pas d'autre issue que de fonder ses arguments en qualifiant la province d'Ontario, d'une part de «contribuable» en vertu de l'article 11(1) g), et d'autre part, de «personne» aux fins des termes entre parenthèses, cités plus haut, et contenus à l'alinéa a) de l'article 79B(5). On n'a pas cherché à me préciser quelles situations entend recouvrir l'expression «(ou serait ainsi déductible si cette dernière était une personne imposable en vertu du paragraphe (1) de l'article 2)», mais on peut concevoir qu'elle soit par exemple applicable à une corporation à but charitable que l'on qualifierait de «personne» selon la définition qu'en donne l'article 139(1)ac) de la loi, cité ci-dessus, et qui cependant ne serait pas imposable en vertu de l'article 62(1) e) de la loi, qui prévoit une exemption pour toute organisation de charité, constituée ou non en corporation. Les corporations à but charitable ont, bien sûr, des employés, et il ne fait aucun doute que, dans d'assez nombreux cas, elles contribuent, au profit de ces employés, à des plans enregistrés d'épargne-retraite. Ceci dit, l'expression entre parenthèses citée plus haut ne permet absolu-ment pas, à mon avis, de qualifier la province d'Ontario de «contribuable» au sens de l'article 11(1)g) de la loi. D'après la définition des termes «charge» et «employé» donnée respectivement aux alinéas ab) et la) de l'article 139 (1) de la loi, qui ont été analysés par l'appelant au cours de sa plaidoirie, il découle qu'aux fins de la présente loi, l'appelant est manifestement un employé de la province d'Ontario. Cependant, cette conclusion ne semble pas venir à l'appui des arguments
[1970] R.C.É. M.R.N. v. BRAITHWAITE 45 du, ministre, car la définition de l'employeur» donnée à l'article 139(1)lb) de la loi utilise le terme «personne= qui, comme nous l'avons déjà mentionné, ne peut pas s'appliquer à la province d'Ontario. On définit ainsi lemployeur»: « 139. (1) Dans la présente loi, lb) «employeur» à l'égard d'un fonctionnaire, désigne la personne de qui le fonctionnaire reçoit sa rémunération». (J'ai ajouté les italiques). * * * La décision de la Commission ne paraît pas faire mention de l'article 139(1) av) de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui précise que dans cette loi, le terme «contribuable» inclut «toute personne, qu'elle soit tenue ou non de payer l'impôt». A mon avis, il ne fait aucun doute que Sa Majesté soit une «personne», et que, dans cet appel, toute mention de la Province d'Ontario désigne en fait Sa Majesté. Voir à ce sujet l'arrêt Perepelytz v. Department of High-ways2. La jurisprudence portant sur le point de savoir si le Souverain est une «personne» au sens d'une disposition particulière d'une loi concerne, dans presque tous les cas, sinon toujours, une situation le problème se posait de la façon suivante: compte tenu des règles habituelles d'interprétation que renferment à cet égard la common law et la législation, la loi en question crée-t-elle pour Sa Majesté des obligations, ou a-t-elle un effet restrictif sur Ses droits? A mon avis, pour dissiper toute confusion, il faut ramener le problème à l'interprétation de la portée de la loi à la lumière des règles d'interprétation applicables en la matière, plutôt que de se demander si le Souverain est une personne, question sur laquelle il ne peut y avoir, à mon avis, aucun doute possible. Voir Madras Electric Supply Corporation v. Boarland 3 et The Queen v. Murray'. L'expression «toute autre personne» employée à l'article 79B(5)a) est assez large, si on lui donne son sens ordinaire, pour comprendre Sa Majesté du chef de l'Ontario. De plus, elle entre, dans ce cas précis, dans la description d'une situation de fait conditionnant l'octroi d'un privilège fiscal à une personne quelconque, de sorte qu'il est impossible de dire que cette disposition de la loi impose une obligation quelconque à la Couronne, ou qu'elle affecte de quelque manière les prérogatives ou les biens de la Couronne. A mon avis, il n'y a pas lieu d'appliquer ici la règle d'interpréta-tion selon laquelle Sa Majesté est exempte de l'application d'une disposition légale, sinon en vertu d'une mention expresse ou par implication nécessaire. Voir l'arrêt Madras Electric Supply Corp., précité et Forbes v. Manitoba5. L'avocat de l'intimé soutient que la mention, faite dans la partie de l'article 79B (5) a) qui est placée entre parenthèses, d'un montant qui serait «déductible» par toute autre personne en vertu de l'article 11(1) g) «si cette dernière était une personne imposable en vertu du paragraphe (1) de l'article 2, ne doit être considérée comme applicable qu'au cas cette autre personne serait imposable en vertu de l'article 2(1) si elle n'en était exemptée par la loi, notamment par l'article 62. Cet argument, si on l'acceptait, aurait l'avantage d'exclure toute application de l'article 79B (5) a ) au gouvernement de l'Ontario, mais aucun des termes de cet alinéa ne me 8 [19581 R.S.C. 161. 8 [1964] All E.R. 52 (CA.) [1955] A.C. 667. [1965] 2 R.C. de l'É. 663, [1967] R.C.S. 262. 5 [1937] A.C. 260.
[1970] R.C.É. M.R.N. v. BRAITHWAITE 47 paraît justifier cette distinction. Sa Majesté, du moins à notre époque, peut très bien être une «personne imposable», comme toute autre personne, si la loi le prévoit, comme le démontre l'existence de diverses lois fédérales assujettissant effectivement Sa Majesté, d'un manière ou d'une autre à des impôts directs et indirects. On a également soutenu que le but de la distinction entre les alinéas a) et b) de l'article 7913(5) est d'accorder à l'employé soit une déduction globale maximum de $1,500, lorsque l'employeur déduit de son revenu ses contributions, de manière à réduire les recouvrements d'impôts sur son revenu, soit une déduction maximum de $2,500, lorsque l'employeur ne verse pas de contributions et ne peut donc effectuer cette réduction de ses impôts. Selon cette thèse, il n'y aurait donc aucune raison de priver l'intimé de la déduction de $2,500. A mon avis, l'explication la plus plausible de l'existence de deux plafonds différents de déduction globale au titre des contributions d'employé à un plan de pension et à un plan d'épargne retraite est que, lorsqu'une personne bénéficie d'un plan de pension en vertu duquel son employeur effectue des contributions, la loi lui accorde une déduction maximale de $1,500, alors que lorsqu'une personne ne bénéficie pas d'un plan de pension auquel l'employeur contribue à son profit, la loi lui accorde une déduction maxi-male de $2,500. Ceci paraît être, dans l'ensemble, l'effet des termes utilisés et représente en quelque sorte une tentative de compensation au profit de l'individu qui se trouve dans la situation la moins favorable. L'avocat de l'intimé s'est aussi appuyé dans une large mesure sur le fait que l'article 139(1)m) fait expressément mention de la Couronne. Cet alinéa précise que: 139. (1) Dans la présente loi, * * * m) «emploi* signifie le poste d'un particulier au service de quelque autre per-sonne (y compris Sa Majesté ou un État ou souverain étranger) et l'expression «préposé» ou «employé» signifie une personne occupant un tel poste; On a tiré de cette définition l'argument suivant: puisque la loi précise, dans ce cas, que le terme «personne» inclut sa Majesté il faut donc supposer que Sa Majesté est exclue dans les autres cas l'on utilise le terme «personne». L'argument est séduisant mais il me paraît inacceptable. L'uniformité de vocabulaire et de rédaction dans une loi ne se présume pas, ou du moins ne peut être invoquée qu'avec modération, dans le cas des lois fiscales. Que l'on ait fait, par excès de prudence, mention de la Couronne à l'article 139(1)m) ne nous permet pas, à mon avis, de conclure que les autres mentions de personnes que renferme la loi n'incluent pas Sa Majesté. Un argument assez semblable a été rejeté dans l'affaire Province of Bombay v. Municipal Corp. of Bombay°. J'estime donc que l'on doit faire droit à l'appel, avec dépens, et rétablir la cotisation qui en faisait l'objet. ° [1947] A.C. 58, à la page 65.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.