Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[1970] R.C.A. D'AUTEUIL LUMBER CO. v. M.R.N. 427 [TRADUCTION] Heath Steel Mines Ltd (Appelante) v. LErwin Schroder» (Intimé) Les juges Thurlow, Noël et Cattanach. Ottawa, les 17, 18 et 19 février et le 26 mars, 1970. Navigation marchandeCargaison dangereuseLiquéfaction d'un concentré de minerai pendant une tempête Mise en danger du navire Règles de La Haye (Articles 4(6) et 6 du «Carriage of Goods by Sea Act' des États-Unis) Précautions spéciales de la charte-partieRenonciation d l'immunité du voiturierObligation de navigabilité d la charge du voiturier. L'Erwin Schroder, navire à cargaison sèche de 3,500 tonnes, quitta Newcastle (N.-B.), le 27 novembre 1962, pour Rotterdam, avec une cargaison de 3,300 tonnes de produit concentré de cuivre humide. Le 29 novembre, sous l'effet du gros temps en mer, le concentré se liquéfia et se déplaça à babord; des bardis placés dans les cales du navire cédèrent, et le navire donna fortement de la gîte à babord. Il fut donc dérouté sur Halifax, on déchargea la cargaison, et on refusa de continuer à la transporter. Le navire avait été affrété au voyage en vertu d'une charte-partie, conclue à New York, qui incluait la clause paramount américaine, c'est-à-dire que .ce connaissement' devait être régi par le Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis, etc. La charte-partie prévoyait également que si le taux d'humidité de la car-gaison dépassait un certain pourcentage (ce qui s'est produit en fait), il faudrait, conformément aux règlements du ministère des Transports, installer des bardis sous la direction du capitaine et selon les instructions du gardien de port, que l'affréteur devrait fournir la main-d'oeuvre et les matériaux, et que le capitaine et l'armateur seraient responsables de leur installation correcte ainsi que de l'arrimage convenable, de la livraison en bon état de la cargaison et de la sécurité du navire. On installa des bardis, qui reçurent l'approbation du gardien de port, mais qui ne répondaient pas aux normes minimales de solidité et de rigidité prescrites dans les règlements édictés par le ministère des Transports à l'intention des gardiens de port. Le juge de district d'Amirauté Pottier rejeta l'action en dommages et intérêts de l'affréteur, et fit droit à la demande reconventionnelle du défendeur. Il constata qu'avant de modifier son itinéraire vers Halifax, le navire risquait sérieusement de chavirer, que la cause véritable du danger qui est survenu était, non pas que les bardis n'aient pas été installés strictement comme le prescrivaient les règlements du ministère des Transports, mais la nature dangereuse de la cargaison, dont la
[1970] R.C.E. HEATH STEEL MINES LTD v. L'<«ERWIN SCHRODER» 429 caractéristique particulière était de se liquéfier et de se déplacer sous l'effet de la mer, et que le capitaine et le propriétaire du navire ne connaissaient pas et ne pouvaient connaître le danger qu'impliquait le transport de cette cargaison, étant donné l'état des connaissances des experts à cette époque. lugé: L'appel de l'affréteur doit être rejeté. Per curiam: Les preuves justifiaient les conclusions du juge de première instance. Le juge Thurlow: L'article 4(6) du Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis permettait au voiturier de décharger la cargaison et de refuser de continuer à la transporter. Les dispositions spéciales de la charte-partie sur les produits con-centrés ne constituaient pas une renonciation en vertu de l'article 6 à l'immunité conférée au voiturier par l'article 4(6). En outre, on doit considérer que l'inclusion de la clause paramount américaine excluait l'application de l'article 6, car les dispositions de cet article n'étaient pas conciliables avec la charte-partie. La question de l'obligation du voiturier quant au bon état de navigabilité du na-vire n'a pas été soulevée. Le juge Noël: Le mauvais état de navigabilité du navire n'était qu'à la nature particulière de la cargaison, et non au manque de diligence du voiturier. L'affréteur, dont l'agent connaissait le danger, s'est cependant montré négligent en n'en informant pas le capitaine. Le juge Cattanach: Le contrat de transport n'était pas une convention spé-ciale, mais une expédition commerciale ordinaire, conclue dans le cadre habituel du commerce; par conséquent, l'article 6 du statut américain est inapplicable. Le capitaine avait l'obligation d'installer des bardis conformément aux instructions du gardien de port, et il l'a fait. Renvoi: Adamastos Shipping Co. v. Anglo-Saxon Petroleum Co. [1959] A.C. 133; Maxime Footwear Co. v. Can. Gov't. Merchant Marine Ltd [1959] A.C. 589; Micada Compassia Naniera S.A. v. Texim [1968] 2. Ll.L.R. 57; Brass v. Maitland, 119 E.R. 940; Burley v. Stepney Borough Council (1947) 80 L1.L.R. 289; Atlantic Oil Carriers Ltd v. British Petroleum Co., [1957] 2 L1.L.R. 55. Appel d'un jugement du Juge Pottier, juge de district en Amirauté pour le district d'Amirauté de la province de la Nouvelle-Écosse, rejetant avec frais une action intentée par l'appelante (tantôt désignée ci-après comme affrèteur ou expéditeur) pour dommages à la suite d'une rupture d'un contrat de charte-partie conclu à New-York avec le navire intimé (tantôt ci-après désigné comme voiturier) pour le transport de concentrés de cuivre et/ou de zinc de Newcastle, N.B., à Rotterdam, Pays-Bas, ou Anvers, Belgique, et faisant droit à une demande reconventionnelle de la part de l'intimé pour dommages. L'appelante réclame pour environ $60,000 à titre de dommages pour coût de fret payé d'avance, le coût de mise en pile, entreposage et assèchement de la cargaison à Halifax et le coût additionnel de la rendre à sa destination un an plus tard. L'intimé par sa demande reconventionnelle réclame $110,000, étant le solde de fret, le coût de déchargement, le coût de remise en état du navire, coût d'entreposage à Halifax jusqu'au moment l'appelante assuma la responsabilité quant à la cargaison, et la perte de l'usage du navire pour 42 jours. La question des dommages réclamés par l'intimé fut remise jus-qu'après la décision sur cet appel.
11970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 431 J. H. Dickey, c.r., et J. E. Gould pour l'appelante. D. A. Kerr, c.r., pour l'intimé. LE JUGE THURLowIl s'agit d'un appel de la décision rendue par le juge Pottier, juge pour le district d'amirauté de Nouvelle-Écosse, rejetant l'action intentée par l'appelante et rendant un jugement favorable à la demande reconventionnelle du défendeur, dans une action en rupture d'une charte-partie conclue à New-York le 9 novembre 1962 ou aux environs de cette date, pour le transport d'une cargaison de quelques 3,300 tonnes lourdes de produits concentrés de cuivre, de Newcastle (Nouveau-Brunswick), à Rotter-dam (Pays-Bas). Le navire défendeur quitta Newcastle le 27 novembre 1962 avec la cargaison à bord, mais après avoir rencontré du gros temps en mer, dans la partie orientale de l'Atlantique, le 29 novembre, il se mit à donner forte-ment de la gîte à babord, aussi modifia-t-il son itinéraire et se dirigea-t-il vers Halifax (Nouvelle-Écosse) on déchargea par la suite la cargaison dont on refusa de poursuivre le transport. Avant d'être chargé à Newcastle, le navire avait été inspecté par M. Peter au nom de la demanderesse et par le gardien de port; on n'avait sou-levé aucune objection estimant qu'il répondait aux conditions de la clause 35 de la charte-partie et pouvait entreprendre cette traversée. La demanderesse avait donné au gardien de port deux certificats, l'un indiquant le taux limite d'humidité pour fins de transport du concentré de cuivre à charger, soit 11.25 p. 100 et l'autre, le taux d'humidité contenu soit 14 p. 100; on avait entrepris, sous la surveillance du gardien de port, le montage de bardis dans les trois cales. Le gardien de port avait approuvé les bardis ainsi montés (désignés également par l'expression cloisons axiales) maix ceux-ci ne répondaient pas aux conditions minimales de résistance et de rigidité prévues par une série de règles prescrites par le ministère des Transports du Canada pour guider le gardien de port, connues sous le nom de Code canadien des concentrés. En effet, les étamperches d'acier n'étaient pas de la longueur minimale prévue par le Code et ce qui est plus important encore c'est qu'elles étaient placées tous les deux panneaux d'écoutille alors que chaque panneau aurait avoir la sienne; les exigences du code n'étaient pas non plus respectées dans la mesure la plupart des espaces séparant les étemperches et remplis de bordées de bois dépassaient les huit pieds maximum autorisés pour ces espaces entre les étamperches par le code. Après avoir installé les bardis, on chargea la cargaison de concentrés. Elle avait été nivelée dans les cales 2 et 3 au moyen d'un petit bulldozer, puis le navire avait pris la mer. Le concentré de cuivre en question était une substance très lourde: si lourde en fait que les 3,300 tonnes de ce produit avaient environ 5 pieds de profondeur dans les cales. Ce concentré est un minerai très fin com-prenant du métal et de la roche de valeur et a, comme l'a démontré la preuve, la caractéristique inattendue de devenir fluide lorsque les vides entre les particules de la masse sont entièrement comblés par l'eau et qu'une énergie tendant à rendre cette masse compacte s'exerce. Lorsque ce point
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 433 est atteint, les frictions internes, les forces de cohersion et la résistance d'em-bardée de la masse du concentré tombe très vite, la masse devient alors un liquide quelque peu visqueux. Les témoignages indiquent qu'un incident semblable s'est produit dans la cargaison de l'Erwin Schroder. Lorsque le taux d'humidité pour le poids est de 14 p. 100, sa cargaison doit comprendre près de 460 tonnes lourdes d'eau, ce qui fait environ 35.2 p. 100 du volume total de la cargaison. Au cours du troisième jour de traversée au départ de Newcastle, le navire a rencontré un orage et en raison d'une série de chocs auxquels s'ajoutait la vibration des moteurs du navire, la cargaison semble être devenue compacte au point de se transformer en masse liquide dans les cales 2 et 3. Avec le roulis du navire et les forces transmises par les vagues, cette masse s'est déplacée à babord dans chaque partie des cales 2 et 3 obligeant ainsi le bateau à donner de la bande. Pendant ce temps, quelques-uns des bordages des bardis dans les cales 2 et 3 se sont brisés et il n'est pas improbable qu'une quantité considérable de minerai se soit déplacée de tribord à babord dans ces deux cales du navire. A ce point, le navire a modifié son itinéraire vers l'est et s'est dirigé vers Halifax, le vent et les vagues en poupe. Il ne fait aucun doute que le navire menaçait de chavirer juste après avoir changé d'itinéraire mais il ressort également des preuves qu'il a con-tinué à être en danger grave pendant tout l'orage. Le savant juge de première instance a conclu que le capitaine avait raison de ne pas poursuivre la traversée et de se diriger vers Halifax pour sauver le navire. Il a ensuite cité certains témoignages quant à la nature du produit concentré et après avoir mentionné le témoignage du Dr Milton, qu'il a accepté, il a déclaré: Pour moi il ne fait aucun doute que le navire qui a une cargaison de con-centrés de cuivre avec un taux d'humidité assez important comme celui du navire défendeur, courait le risque de voir sa cargaison se déplacer à babord ou à tri-bord, sans retourner au premier emplacement à chaque roulis du navire, s'amon-celer dans l'intervalle et finalement débouler. Les bardis installés d'avant en arrière même correctement placés, empêchent en fait seulement la cargaison de se déplacer d'un côté à l'autre du navire; ils n'empêchent pas la cargaison de mettre en danger le navire par des déplacements de chaque côté des cales contre les bardis et contre le flanc du navire et donc de s'amasser contre un des flancs du navire au point de le faire chavirer. En fait, les bardis de l'axe longitudinal ne font que diviser les cales de cargaison en deux. Il ne fait aucun doute pour moi qu'une cargaison de cette nature et compor-tant ces caractéristiques est une cargaison dangereuse pour le navire qui l'a à son bord. Je conclus que la cargaison du navire défendeur, chargée à Newcastle com-me nous l'avons indiqué, était une cargaison dangereuse pour ce navire. Les événe-ments qui se sont produits à bord du navire ont, à mon avis, confirmé ce fait. Le savant juge a conclu par la suite que la cargaison s'était déplacée à babord, qu'aucune des conditions requises par le Code canadien des con-centrés n'aurait empêché ces déplacements et que, bien que les dispositions du Code n'aient pas été suivies à la lettre, leur désobéissance n'a pas causé de danger réel à bord du navire défendeur. Il a ensuite mentionné l'arrêt Brass v. Maitlandl et a conclu que l'incer-titude était telle, relativement à ces produits concentrés et au problème des 3 (1856) 6 E. & II. 471.
[1970] R.C.E. HEATH STEEL MINES LTD v. L'AERWIN SCHRODER» 435 cargaisons mouvantes en 1962, que le problème de la manipulation de cette cargaison n'avait pas été solutionné avec certitude, même par une équipe d'experts et que, dans ce cas, on ne pouvait en poursuivre le commerce. Enfin, le savant juge a déclaré que le point important en l'espèce était de savoir si le transporteur et (ou) le capitaine auraient connaître ces dangers et quelles précautions ils auraient prendre; or, après avoir en-tendu les experts, il était clair pour lui que certains d'entre eux, au moins, ne connaissaient pas les concentrés de minerais et ne savaient pas ce qui pourrait arriver à ce genre de cargaison et qu'il ne fallait pas considérer la charte-partie comme interdisant la poursuite de cette entreprise commerciale maritime. Même si le savant juge n'a pas expressément déclaré ceci, il me semble implicite dans sa déclaration et dans ses conclusions qu'il pensait que le voiturier et (ou) le capitaine n'avaient pas en fait connaissance du danger ou des précautions nécessaires qu'impliquait le transport d'une telle car-gaison et que, vu l'état actuel des connaissances courantes ou de celles des experts sur le sujet, on ne pouvait pas s'attendre à ce que le voiturier ou le capitaine connaissent ce danger et sachent ce qu'il fallait faire. Les témoignages confirment très bien, à mon avis, ces conclusions, et il me semble qu'il faudrait les reprendre. Il devient donc nécessaire de con-sidérer quelles en sont les conséquences. D'après l'argumentation, je comprends que l'appelante s'appuie sur la clause 49 de la charte-partie et sur les dispositions des articles 3 et 6 de la Carriage of Goods by Sea Act 1936 des États-Unis, applicable en vertu de la clause 51 de la charte-partie. Pour sa part, l'intimé s'appuie sur les dispositions des articles 2 et 4 (6) de cette loi. Voici les clauses 49 et 51 de la charte-partie: 49. Les règlements du ministère des Transports du Canada requièrent des affréteurs, la présentation au gardien du port de Newcastle d'un certificat de labo-ratoire, indiquant le taux d'humidité maximum pour fins de transport sous arrimage normal de produits concentrés du type à transporter, et un certificat du taux d'hu-midité, avant le chargement, de la cargaison à embarquer. Si l'humidité de la cargaison à embarquer dépasse le taux d'humidité maximum pour fins de transport, il faut, selon les règlements du ministère des Transports, placer des bardis (cloisons axiales) conformément aux instructions du gardien de port. L'affréteur essaiera de réduire le taux d'humidité de la cargaison en deçà du taux d'humidité maximum pour fins de transport; il est possible d'y parvenir, mais il ne peut le garantir. Par conséquent, si l'installation de bardis s'avère nécessaire, l'affréteur fournit au capitaine la main-d'oeuvre et les matériaux nécessaires à cette installation. L'installation s'effectue sous la surveillance et le contrôle du capitaine, et l'armateur est responsable de la bonne disposition, ainsi que de l'arrimage con-venable et de la livraison en bon état de la cargaison, et de la sécurité du navire. Sur demande, le capitaine prend les dispositions nécessaires pour que l'équipage puisse aider le personnel employé par l'affréteur. Le temps d'installation ne compte pas comme temps de chargement, et l'affréteur déclare par la présente son intention de fournir au capitaine la main-d'oeuvre et les matériaux qui lui permet-tront d'effectuer cette installation le plus rapidement possible eu égard aux cir-constances qui prévaudront à l'époque. La cloison axiale et les étamperches doivent, si elles sont installées, être dé-molies par l'affréteur ou les arrimeurs du consignataire avant et (ou) pendant le déchargement. Après la démolition, le bois et les étamperches sont à la disposition de l'affré-teur et (ou) des arrimeurs du consignataire s'ils le désirent. Si l'affréteur et (ou)
[1970] R.C.A. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 437 les arrimeurs du consignataire préfèrent laisser tout ou partie du bois et des étain-perches à bord, ils peuvent le faire sous réserve du consentement du capitaine. Le temps de démantellement et le temps utilisé pour disposer des matériaux (sauf le cas ils sont laissés à bord avec le consentement du capitaine) comptent com-me temps de déchargement. 51. Les clauses New Jason, U.S.A. Paramount, New Both-to-Blame Collision, Chamber of Shipping War Risk 1 & 2, et P. & I. Bunker, figurant en annexe, sont comprises de plein droit dans cette charte-partie. Voici le texte de la clause Paramount américaine mentionnée: Ce connaissement prend effet sous réserve des dispositions de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis, sanctionnée le 16 avril 1936; cette loi est cen-sée faire partie de la présente; et aucune disposition n'est censée comporter pour le transporteur une renonciation à l'un quelconque des droits ou exonérations ou un accroissement de l'une quelconque des responsabilités découlant de cette loi. Dans la mesure une disposition du présent connaissement est incompatible avec ladite loi, elle est nulle, mais strictement dans cette mesure. Les dispositions de la loi mentionnée sont les suivantes: 2. Sous réserve des dispositions de l'article 6, et en vertu de tout con-trat de transport de marchandises par mer, le voiturier encourt des respon-sabilités et des obligations et est en droit de recevoir les droits et immunités ci-après énoncés en ce qui concerne le chargement, la manipulation, l'arrimage, le transport, la garde, la surveillance et le déchargement de ces marchandises. 3. (1) Avant le voyage et au commencement du voyage, le voiturier est tenu d'exercer une diligence raisonnable a) pour que le bâtiment soit en état de navigabilité; b) pour convenablement armer, équiper et approvisionner le navire; c) pour mettre les cales, les chambres de réfrigération et de refroidissement et toutes les autres parties du navire sont transportées les marchandises, en état de recevoir, voiturer et conserver ces marchandises, avec sécurité. (2) Le voiturier est tenu de charger, manier, arrimer, transporter, garder, surveiller et décharger convenablement et soigneusement les machandises voiturées. * * * 4. (6) Les marchandises de nature inflammable, explosive ou dangereuse au chargement desquelles le voiturier, le capitaine ou l'agent du voiturier n'a pas consenti, en connaissance de leur nature ou de leurs caractères, peuvent, à toute époque antérieure au déchargement, être débarquées à n'importe quel endroit, ou détruites ou débarrassées de tout élément nuisible, par le voiturier, sans compensation, et l'expéditeur de ces marchandises sera responsable de tout dommage et frais provenant ou résultant directement ou indirectement de ce chargement. Si de telles marchandises chargées en cette connaissance et avec ce consentement de-viennent dangereuses pour le navire ou la cargaison, elles peuvent être débarquées de la même manière dans quelque endroit que ce soit, ou détruites ou débarrassées de tout élément nuisible par le voiturier sans responsabilité de la part du voitu-rier, sauf à l'égard d'une avarie générale, le cas échéant. 6. En dépit des dispositions des articles précédents, un voiturier, capitaine ou agent du voiturier, et un chargeur peuvent, pour toute marchandise, conclure toute sorte d'accord quant à la responsabilité et aux obligations du voiturier pour ces marchandises et quant aux droits et immunités du voiturier sur ces marchan-dises ou son obligation de bon état de navigabilité (dans la mesure les dispositions concernant la bonne navigabilité n'est pas contraire à l'ordre public), ou la surveillance et la diligence de ses agents ou employés quant au chargement, à la manipulation, à l'arrimage, au transport, à la garde, à la surveillance et au dé-chargement de ces marchandises transportées par mer, d la condition que, dans ce cas, aucun connaissement n'ait été ou ne le soit à l'avenir et que les conditions convenues soient inscrites dans un reçu qui sera un document non-négociable et sera indiqué comme tel. 92623-4
[1970] R.C.A. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 439 Tout accord de ce genre aura un effet juridique total: d condition que cet article ne s'applique pas aux embarquements commerciaux ordinaires faits dans le cadre du commerce habituel mais seulement aux autres embarquements dont le caractère ou la nature des biens à transporter ou les circonstances, termes et conditions en vertu desquels le transport est entrepris, justifient raisonnablement un accord spécial. D'après ce que je comprends de l'affaire, et supposant pour le moment que les dispositions de l'article 4 (6) de la Carriage of Goods by Sea Act sont applicables, la conduite du défendeur qui a déchargé la cargaison à Halifax et refusé de poursuivre le transport, était justifiée par les termes exprès de la charte-partie et ne constituait pas en fait une rupture de contrat. A mon avis, tout ce qui est essentiel au cas du défendeur en vertu de l'article 4(6), c'est que la cargaison était en fait de nature dangereuse et que le voiturier n'avait pas consenti à son embarquement, en connaissance de sa nature et de son caractère. Si on avait découvert la nature ou le caractère dangereux de la cargaison à un moment après le départ du navire de Newcastle, c'est-à-dire, même avant tout déplacement de la cargaison ou avant que le navire ait donné de la gîte ou avant que les bardis se soient tordus ou cassés, le capitaine aurait été en droit, à mon avis, de se diriger vers le port le plus proche et d'y décharger la cargaison comme cela a été fait en fin de compte à Halifax. Le fait qu'on ait pu savoir que le navire et la cargaison étaient réellement en danger, bien qu'important pour dé-terminer le montant des dommages et intérêts recouvrables, n'est pas néces-saire, d'après moi, pour justifier le déchargement de la cargaison et le refus de poursuivre son transport, dans un cas de la première espèce décrite à l'article 4(6). On a prétendu que cette cargaison n'était pas de nature dangereuse au sens envisagé par la loi mais il me semble qu'on ne peut maintenir cet argument. En admettant que les concentrés de minerai ne sont pas dangereux en eux-mêmes comme le sont les explosifs sensibles, cette cargaison était d'après moi d'une nature extrêmement dangereuse dans la mesure elle pouvait de façon inconnue et inattendue se liquifier sous l'effet de forces cohersives auxquelles il était probable qu'elle serait soumise pendant une traversée ordinaire en mer. 2 En outre, d'après les circonstances, rien ne touche le point de savoir, à mon avis, si le navire était en bon état de navigabilité car la perte récla-mée s'élève au sujet de l'embarquement par la demanderesse d'une cargai-son de nature dangereuse dont le voiturier n'avait pas connaissance au moment de son chargement et de l'exercice par le voiturier, après avoir découvert cette nature dangereuse, des droits qui lui sont accordés par le contrat, dans ce cas. Il me semble donc d'après les témoignages que quel qu'ait pu être l'état de mauvaise navigabilité, cette perte découle entière-ment de la nature dangereuse et inconnue de la cargaison. Si la cargaison n'avait pas eu la capacité inattendue de se liquifier, il n'y aurait pas eu, d'après moi, de mauvais état de navigabilité et pas de danger. Comparer Micada Compania Naviera SA. v. Texim [1968] 2 U. L.R. 57 et The Atlantic Duchess [1957] 2 U. L.R. 55 à 95 et 121. 92623-41
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 441 Au cours de l'argumentation, on a mentionné Maxime Footwear Co. v. Canadian Government Merchant Marine Ltd Lord Somervell of Harrow faisait remarquer la nature prépondérante de l'obligation du voiturier d'exer-cer une diligence raisonnable pour rendre son navire navigable et on a prétendu qu'il s'en suivait que la question du bon état de navigabilité vient en premier lieu et que les immunités de l'article 4 ne peuvent être soule-vées quand une perte est due au mauvais état de navigabilité qui aurait peut-être été évité grâce à une diligence raisonnable. Je doute que les dispositions de l'article 4(6) appartiennent aux dispositions d'immunité mentionnées dans ce cas. Il me semble plutôt que l'article 4(6) concerne précisément les droits du voiturier d'obtenir une action en réparation chaque fois que dans l'un des deux cas décrits, des marchandises de nature ou de caractère dangereux sont transportées sur son navire. Il semble que cette opinion reçoive en outre l'appui des auteurs de la 17e édition de Scrutton sur les chartes-parties, qui déclare à la page 428: Il est probable que l'armateur puisse exercer ses droits en vertu de cette règle même s'il n'a pas exercé ses obligations en matière de bon état de naviga-bilité .' Je ne pense pas cependant qu'il soit nécessaire de conclure sur ce point parce qu'il me semble que l'obligation d'exercer une diligence raisonnable pour rendre le navire navigable ne peut être étendue au point d'exiger du voiturier qu'il prenne des mesures pour éviter un danger qu'il ne connait pas et dont on ne pouvait raisonnablement pas s'attendre à ce qu'il le connaisse. Il s'ensuit, à mon avis, qu'à la suite de l'affirmation faite précé-demment, il faut faire droit à l'action du défendeur. Il reste maintenant à trancher la question de savoir si les termes de la charte-partie excluent les dispositions de l'article 4(6) de la Carriage of Goods by Sea Act. D'après ce que j'ai compris, l'appelant a adopté deux attitudes dans sa plaidorie à ce sujet. Il a d'abord prétendu que le texte de la clause 49 envisage le transport d'une cargaison de produits concentrés dont le taux d'humidité peut dépasser le taux d'humidité pour fins de transport pour un arrimage normal, comme le prévoit le Code canadien des concentrés (d' il découle que même si le capitaine du bateau défendeur avait été informé de la nature dangereuse de la cargaison, il n'aurait pas été en droit de refuser de la transporter) et que la clause poursuit en précisant que le capitaine et les armateurs: sont responsables de la bonne disposition, ainsi que de l'arrimage convenable de la livraison en bon état de la cargaison, et de la sécurité du navire, et qu'en utilisant ces termes, le voiturier confirmait sa responsabilité unique et absolue d'arrimer la cargaison correctement et de la livrer en bon état, à destination. Le second point de la plaidoirie était que ce texte prenait effet, selon sa teneur, en raison de l'article 6 de la Carriage of Goods by Sea Act et ne laissait donc ainsi aucune place à l'application de l'article 4 (6) vu les circonstances de l'affaire. 8 [1959] A.C. 589. ' Comparez le jugement du juge Kerr, dans la Falconbridge Nickel Mines Ltd v. Chimo Shipping Ltd sur un point semblable découlant de l'article 4(5) de la Loi sur le transport des marchandises par eau [1969] 2 R.C. de l'$. 261 aux pages 284-285.
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 443 Je dois ajouter qu'on n'a pas prétendu que les dispositions de la Carriage of Goods by Sea Act, dans son ensemble, n'étaient pas applicables. Au con-traire, on a estimé que l'incorporation des dispositions de la loi par la clause «Paramount» américaine avait pour effet de réduire l'obligation de bon état de navigabilité du voiturier à une obligation d'exercer une diligence rai-sonnable pour rendre le navire navigable et avait également pour effet d'in-troduire la condition de l'article 3 (2), dont l'obligation devait être «entière-ment en accord et conforme avec» l'obligation du voiturier en vertu de la clause 49 de la charte-partie, mais que celle-ci était une obligation de charger, manipuler, arrimer, etc. correctement et soigneusement, une car-gaison de concentrés de cuivre humide et que le voiturier n'avait aucune excuse en raison de l'humidité de la cargaison au fait qu'il n'ait pu arrimer, transporter et livrer correctement cette dernière. On a déclaré que la conclusion d'un contrat à cette fin entrait dans le cadre envisagé par l'article 6 de la loi et était donc exécutoire en soi, même si l'humidité de la cargaison la rendait finalement dangereuse. Ceci soulève ce qui me semble être la question la plus difficile de cette affaire, cependant je ne pense pas que cet argument puisse l'emporter. Sur le plan de l'interprétation, je pense que le but du texte sur lequel on s'appuie est affecté par le contexte de la clause 49 il est inséré, ainsi que par le contenu d'autres clauses spéciales et en particulier la clause 32 [post, p. 453] qui prévoit le chargement, l'arrimage et le déchargement, de la cargaison par les arrimeurs de la demanderesse, sans risque ni frais pour le navire. Le premier alinéa de la clause 49 décrit une situation qui peut se produire et qui est susceptible d'entraîner un retard et des dépenses dans le chargement de la cargaison à Newcastle; il me semble que le but du second alinéa de la clause était de déterminer comment la situation devait être tranchée entre les parties à la charte-partie, savoir qui fournirait les matériaux et la main-d'oeuvre pour l'installation de bardis, si nécessaire, qui serait responsable de l'arrimage de la cargaison selon les méthodes en-visagées et de la possession des bardis eux-mêmes à la fin de la traversée. Si on avait voulu, en fait, que le texte de cette clause indique un contrat absolu d'arrimage correct et de livraison en bon état d'une cargaison de concentrés de cuivre humide, il me semble que le contexte dans lequel on l'a inséré est bien étrange; c'est pourquoi je considère que le texte n'a pas le sens que voulait lui attribuer l'avocat. Comme je l'ai indiqué, je l'inter-préterai plutôt de la façon suivante: entre les parties, le voiturier est con-sidéré comme responsable de l'installation des bardis et de l'arrimage de la cargaison de la façon envisagée, même si la main-d'oeuvre nécessaire à l'arrimage de la cargaison, la main-d'œuvre et les matériaux nécessaires à la construction des bardis devaient être fournis par la demanderesse et même si les matériaux doivent lui revenir à la fin de la traversée si elle les veut; je pense également que la demanderesse ne doit encourir aucune responsabilité quant à l'installation correcte des bardis, l'arrimage conve-nable de la cargaison ou sa livraison en bon état ou quant à la sécurité du navire. En résumé, après l'avoir lu, le texte sur lequel on s'appuie, impose une responsabilité aux parties mais ne constitue pas un contrat destiné à produire un résultat particulier.
[1970] R.C.E. HEATH STEEL MINES LTD v. L'aERWIN SCHRODER» 445 Une responsabilité minimale, quant à l'arrimage et à la livraison de la cargaison, est d'autre part prévue par l'article 3 (2) de la Carriage of Goods by Sea Act qui prescrit que le voiturier devra «convenablement et soigneusement» 5 charger, manipuler, arrimer, transporter et décharger la cargaison et je n'interpréterai pas le texte de la clause 49 comme imposant une responsabilité plus importante que celle requise par ce paragraphe. Par ailleurs, la clause 49 démontre à mon avis que l'installation de bardis et la conformité aux conditions décrites par le Code canadien des con-centrés représentait tout ce que les parties concernées auraient été requises de faire relativement à l'arrimage correct de la cargaison. En fait, ces conditions n'ont pas été parfaitement respectées mais le savant juge de pre-mière instance a conclu que leur stricte observation, n'aurait pas écarté le danger. Par conséquent, à mon avis, rien ne porte sur de telles insuffisances comme c'était le cas pour les bardis ou pour l'arrimage. On a également conclu que le danger implicite que représentait la liquéfaction de la cargaison n'était ni apparent ni connu du voiturier au moment pertinent et qu'étant donné l'état des connaissances sur ce sujet à l'époque, on ne pouvait raison-nablement pas s'attendre à ce que le voiturier ait connaissance de la nature dangereuse d'une telle cargaison. Dans ces circonstances, il n'y a, d'après moi, aucune raison d'appliquer l'article 4 (6). A mon avis, il existe cependant une autre raison pour ne pas accepter les arguments de l'appelante. Bien que la plaidoirie ait souligné uniquement le texte particulier de la clause 49 de la charte-partie, il me semble que si l'argument selon lequel cette charte-partie tombait dans le cadre de l'article 6 était bon, et si on allait jusqu'au bout de ses conclusions logiques, on pourrait l'appliquer aussi bien à l'ensemble de la charte-partie, y compris sa clause 2, et à la garantie absolue de bon état de navigabilité qu'elle con-tient; il rendrait alors l'assimilation, par la clause 51 de la charte-partie, de la clause «Paramount» américaine sans valeur et inefficace pour réduire même cette garantie à l'obligation d'exercer en vertu de l'article 3 une diligence raisonnable pour rendre le navire navigable ou pour attribuer au voiturier les droits et immunités définis à l'article 4. A mon avis, il est peu probable que les parties aient pu souhaiter un tel résultat car, pour moi, le but de l'incorporation de cette clause «Paramount» dans une charte-partie est d'assurer au voiturier que, quel que soit l'effet juridique du texte parti-culier de ce document, ses responsabilités ne seront pas plus importantes que celles prévues à l'article 3 de la loi et qu'il aura droit aux droits et immunités prévus à l'article 4. La clause «Paramount» ne prévoit pas seule-ment l'incorporation de la loi à la charte-partie. Si cela était tout son con-tenu, les documents actuels pourraient être plus forts. Mais, la clause pour-suit en déclarant qu'aucun des éléments contenus à la charte-partie ne sera considéré comme une renonciation par le voiturier à l'un de ses droits ou immunités ou comme une augmentation de ses responsabilités en vertu de la loi. L'article 6 n'accorde aucun droit ou immunité au voiturier ni ne définit ses obligations. Tout ce qu'il prévoit, c'est une situation inattendue les autres dispositions de la loi ne s'appliquent pas et les parties sont 6 Voir S. M. Renton & Co. v. Palmyra Trading Corp. of Panama [1957] A.C. 149, juge-ment rendu par Lord Morton of Henryton, à la page 169 et par Lord Somervell of Harrow à la page 174.
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 447 alors libres de conclure un contrat sans aucune restriction légale. C'est pour-quoi il me semble que les droits et immunités, responsabilités et obligations que mentionne la clause «Paramount» peuvent seuls être ceux définis aux articles 3 et 4. Sur ce fondement, je concluerais que l'article 6 de la loi n'est pas en accord avec la charte-partie et ne doit pas être considéré dans l'interprétation de la charte-partie tout comme le préambule de la loi; de même, il faut ignorer les dispositions de l'article 5, d'après lesquelles la loi ne s'applique pas aux chartes-parties et toute autre limitation contenue dans les dispositions de la loi6. En concluant ainsi, je sais que l'article 6 est énoncé de telle manière qu'il va au-delà des articles précédents. Je n'oublie pas non plus le fait que l'article 2, qui permet d'appliquer les dispositions de l'article 3 et 4 lorsque la loi s'applique d'elle-même, le fait expressément «sous réserve des dispositions de l'article 6» et qu'on peut donc l'interpréter comme n'accordant aucun droit ou immunité et ne définissant aucune obligation sauf dans les situations l'article 6 ne s'applique pas. Il semble clair cependant que l'effet que peut avoir l'incorporation d'une clause «Paramount» dans une charte-partie dépend dans une grande mesure de cette charte-partie et de l'intention, dans le cas particulier, qu'implique l'incorporation d'une telle clause. En l'espèce, il ne devait y avoir qu'une seule traversée et qu'un seul article à transporter. La traversée devait se faire d'un port canadien à un port européen. La charte-partie a été conclue à New-York aucune loi ne s'appliquait à la conclusion d'un contrat entre les parties pour le transport de la cargaison entre ces ports. Il n'y avait donc aucune restriction à la liberté de contracter des parties. En particulier, on n'avait pas besoin de l'article 6 de la Carriage of Goods by Sea Act pour leur permettre de contracter dans n'importe quel terme acceptable par les deux parties et si elles passaient un contrat pour quelque chose tombant dans le cadre de l'article 6, leur action ne devait relever d'aucun droit réservé par cet article mais de leur droit illimité de contracter. Dans ces circonstances, que les parties aient incorporé dans leur contrat une clause «Paramount» qui n'a pas de sens, lue sous réserve de l'article 6, mais qui dans le cas contraire, rend exécutoire les conditions largement acceptées des Règles de La Haye, semble indiquer clairement que cette dernière interprétation de la clause est la bonne. Je pense que le raisonnement de Viscount Simonds dans Adamastos Shipping Co. v. Anglo-Saxon Petroleum Co? confirme cette conclusion, en particulier à la page 154: Je ne doute pas que les parties lorsqu'elles ont convenu en vertu de la clause 52 de la charte-partie d'inclure la clause «Paramount», figurant en annexe, dans «Voir le commentaire de Lord Reid dans Adamastos Shipping Co. v. Anglo-Saxon Petroleum Co. [1959] A.C. 133, à la page 170: .11 y a aussi des articles de la loi qui permettent aux parties, dans certains cas, d'accepter de modifier leurs droits et responsabilités légales et permettent au gouvernment des États-Unis de modifier les termes de la loi dans certaines circonstances. Incorporées à la charte-partie, ces possibilités sont également sans valeur et je n'en tiens pas compte.. 7 [1959] A.C. 133.
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 449 leur accord, et attachée matériellement à cette clause que j'ai indiquée, avaient un but et une volonté commune qui m'obligea à considérer les premiers mots «ce connaissement», comme un exemple évident de la maxime «falsa demonstratio non nocet cum de corpore constat». Il ne peut y avoir aucun doute sur le document. Il s'agit de la charte-partie à laquelle la clause est jointe. Dans cette même perspective, je ne peux pas non plus rejeter la clause dans son entier parce que la loi, dont les dispositions devraient bientôt être considérées comme incluses, pré-voit elle même que ces dispositions ne s'appliqueront pas à la charte-partie. Je ne peux attribuer à aucune des parties l'intention d'inclure une disposition qui annu-lerait l'ensemble de l'incorporation. Milord, j'aurais aimé conclure sans aucune aide extérieure. Mais le fait no-toire mentionné par le savant juge et les rédacteurs de la 16« édition de Scrutton sur les chartes-parties, que les parties à une charte-partie souhaitent souvent in-clure les règlements de La Haye dans leur accord, vient confirmer ma conclusion: et par je ne veux pas dire, et ils ne veulent pas dire non plus, qu'elles sou-haitent inclure les termes même de ces règles. Elles souhaitent apporter à la relation contractuelle entre armateurs et affréteurs le même type d'obligation, de responsabilité, de droit et immunité que celui qui existe en vertu de ces règles entre voiturier et chargeur: en d'autres termes, elles conviennent d'imposer aux armateurs par exemple en ce qui concerne le bon état de navigabilité du navire affrété, l'obligation de diligence raisonnable au lieu de l'obligation absolue qui leur aurait autrement été imposée. et à la page 158: Je pense que les parties voulaient, comme je l'ai déjà indiqué, introduire pour régir leur rapport d'armateurs à affrêteurs, la responsabilité limitée prescrite par la loie américaine. Ceci me paraît si simple qu'on me considérerait comme peu astucieux si je ne l'envisageais pas. Si on commence à raisonner ainsi, il ne me paraît pas difficile de comprendre l'aspect commercial de l'accord, bien que je partage l'opinion de Lord Justice Parker qui le décrit comme un «enchevêtrement de dispositions». C'est pourquoi, en dehors de son texte même, je concluerai que l'article 6 de la loi ne s'applique pas pour permettre à la clause 49 de la charte-partie d'abroger en l'espèce le droit du voiturier prévu par l'article 4 (6) de décharger la cargaison (qu'il avait entrepris d'arrimer, de transporter et de livrer, etc., mais qui est devenue de façon inattendue dangereuse) dans l'un des cas prévus dans ce paragraphe. Je dois dire cependant que même si j'avais conclu que l'article 6 de la loi devait être inclus à la charte-partie, j'aurais eu des difficultés à conclure que l'expression «marchandise parti-culières pouvait mentionner l'objet d'un contrat de transport d'une quantité de concentrés de cuivre (ou) de zinc non déterminée ou que le chargement ainsi fait n'était qu'un chargement commercial ordinaire fait dans le cadre du commerce. Cependant, étant donné ma conclusion sur l'applicabilité de l'article 6, il ne me semble pas nécessaire de trancher ces questions. Il n'est pas non plus, à mon avis, nécessaire d'étudier quelle serait la situation des parties en common law si les dispositions de l'article 4 (6) n'étaient pas applicables puisque d'après moi, ces dispositions s'appliquent et régissent leurs droits. J'estime donc que l'appel ne peut aboutir et qu'il faut le rejeter. 8 Le texte français du projet de convention de 1923 utilise l'expression «les marchandises déterminées.. Voir Scrutton, à la page 502.
1970] R.C.E. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 451 LE JUGE NOËL (après avoir relaté les faits) :—D'après les preuves ap-portées dans cette affaire, il me semble que le capitaine du navire ait fait la seule chose sensée, en retournant comme il l'a fait au port et en refusant de poursuivre la traversée, même après qu'on ait pompé une partie de l'eau en surface. [Le Juge, après avoir passé les témoignages en revue, reprit en ces termes:] Ceci indique clairement, me semble-t-il, que la liquéfaction de cette cargaison constituait manifestement un danger, et pouvait provoquer la perte de ce navire s'il poursuivait sa traversée avec cette cargaison à bord; il ne fait aucun doute pour moi que, comme l'a estimé le juge de première instance, cette cargaison, telle qu'elle était chargée sur le navire, représentait un danger pour la navigation. Non pas qu'il se soit agi physiquement d'une cargaison dangereuse, au sens des explosifs ou des produits chimiques exhalant des gaz toxiques peuvent l'être pour une autre cargaison à bord ou pour la vie de l'équipage; mais on a indiscutablement prouvé qu'elle était dangereuse pour le salut du navire. La difficulté réside ici dans le fait que cette cargaison, bien que manifestement dangereuse en raison de sa transformation en substance visqueuse quelques jours après le départ, était régie par plusieurs règlements gouvernementaux relatifs à son chargement, précisément en fonction de son taux d'humidité et se trouvait, en vertu de la charte-partie, placée sous la surveillance et le contrôle du capitaine, vraisemblablement en raison des connaissances de ce dernier en matière de navigation, en ce qui concerne «la bonne disposition, ainsi que l'arrimage convenable et la livraison en bon état de la cargaison, et la sécurité du navire Ceci soulève bien sûr des problèmes qui, me semble-t-il, peuvent être résolus en répondant aux questions suivantes. Quelles sont, dans les circons-tances décrites précédemment, les obligations de l'armateur qui entreprend d'arrimer, de transporter et de livrer en bon état une cargaison, qui, en raison de son taux d'humidité, est transportée et arrimée dans des cales séparées par des bardis dressés selon les instructions du gardien de port, et, de l'avis de ce dernier, de manière essentiellement conforme à un code promulgué pair le ministère des Transports du Canada, mais cargaison qui, en raison de sa propriété particulière, ignorée du transporteur, de se liquéfier par grosse mer, devient dangereuse pour le salut du navire et de son équi-page? Une fois clarifiée, la situation du voiturier on peut se poser la question de savoir comment il a rempli toutes les obligations mises à sa charge par le contrat de transport. On ne peut donner une solution à ces problèmes qu'après avoir soigneuse-ment examiné la charte-partie, le connaissement, les lois relatives à la navigation susceptibles de s'appliquer au transport de ce type de cargaison, et l'incidence de tous ces textes sur la situation exposée au cours du procès. La charte-partie fut conclue entre Richard Schroder, en qualité d'armateur du navire appelant, et Heath Steel Mines Limited, en qualité d'affréteur. Elle porte la date du 9 novembre 1962, est faite sur l'imprimé-type Mediter-ranean Iron Ore, avec additifs. C'est M. A. J. Shields, directeur du transport, qui l'a signé pour l'affréteur. Sur l'imprimé-type de la charte-partie, la clause finale indique: Les clauses 28 à 51, annexées à la présente, sont comprises de plein droit dans cette charte-partie.
[1970]'R.C.$. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 453 La clause 51 stipule: 51. Les clauses New Jason, U.S.A. Paramount, New Both-to-Blame Collision, Chamber of Shipping War Risk 1 et 2, et P&L Bunker, figurant en annexe, sont comprises de plein droit dans cette charte-partie. Au cours du procès, l'avocat de l'appelante a reconnu que les clauses de protection étaient annexées à la charte-partie, et en faisaient partie, en déclarant, à la page 19 de son exposé: M/1, la charte-partie originaire, contient en annexe des clauses de protection, et j'ai mandat de déclarer que la demanderesse n'affirmera, n'alléguera ni n'invo-quera en aucune façon la thèse selon laquelle la clause U.S.A. Paramount ou les autres clauses de protection ne seraient pas ... comprises dans la charte-partie. En d'autres termes, qu'elle est tout à fait disposée à reconnaître qu'en vertu du texte de la clause 51, ces dispositions sont comprises dans le contrat conclu entre les parties. Je ne ferai ici mention que des clauses pouvant servir à préciser les droits des parties dans cette instance, soit les clauses 32e, 35 10, 4911, Paramount américaine12 et New Jasonl3. e La cargaison doit être chargée, arrimée et déchargée par les acconiers de l'affréteur, sans risques ni frais pour le navire. Les acconiers travaillent sous la surveillance du capitaine. La surveillance du chargement et (ou) du déchargement par le capitaine ne comprend pas le contrôle de la vitesse du chargement et (ou) du déchargement, ni des heures de travail, sous réserve de son droit de prescrire des heures de travail supplémentaires aux frais de l'armateur. Le capitaine doit permettre d'effectuer le chargement et (ou) le déchargement pendant une période exclue ou avant que commence la période de travail. Toute réclamation pour avarie d'arrimage doit être réglée directement entre les armateurs et les acconiers. 10 Au(x) port(s) de chargement, l'armateur doit remettre le navire avec les cales bien balayées, propres et séchées, et prêtes à tous égards à recevoir la cargaison. Avant de remettre le navire pour chargement, on doit enlever les vaigres, installer les planches de bouchains et les paracloses, les placer convenablement et les serrer pour empêcher la fuite de la cargaison et protéger les trépines de toute infiltration. La main-d'oeuvre éventuellement nécessaire pour décharger la cargaison des espaces ainsi protégés ou de derrière les vaigres, si ces dernières ne sont pas enlevées, est mise à la charge de l'armateur; ce déchargement s'effectue aux risques et sur le temps de l'armateur. Le navire doit être remis prêt à charger, entièrement lesté, c'est-à-dire notamment avec tous ses réservoirs pleins. u Les règlements du ministère des Transports du Canada exigent que l'affréteur pré-sente au gardien du port de Newcastle un certificat de laboratoire, indiquant le taux d'humidité maximum pour fins de transport sous arrimage normal de produits concentrés du type à transporter, et un certificat du taux d'humidité, avant le chargement, de la cargaison à embarquer. Si l'humidité de la cargaison à embarquer dépasse le taux d'humidité maximum pour fins de transport, il faut, selon les règlements du ministère des Transports, placer des bardis (cloisons axiales) conformément aux instructions du gardien de port. L'affréteur essaiera de réduire le taux d'humidité de la cargaison en deçà du taux d'humidité maximum pour fins de transport; il y a de bonnes chances qu'il y parvienne, mais il ne peut le garantir. Par conséquent, si l'installation de bardis s'avère nécessaire, l'affréteur fournit au capitaine la main-d'oeuvre et les matériaux nécessaires à cette installation. L'installation s'effectue sous la surveillance et le contrôle du capitaine, et l'armateur est responsable de la bonne disposition, ainsi que de l'arrimage convenable et de la livraison en bon état de la cargaison, et de la sécurité du navire., Sur demande, le capitaine prend les dispositions néces-saires pour que l'équipage puisse aider le personnel employé par l'affréteur. Le temps d'installation ne compte pas comme temps de chargement, et l'affréteur déclare par les présentes son intention de fournir au capitaine la main-d'oeuvre et les matériaux qui lui permettront d'effec-tuer cette installation le plus rapidement possible eu égard aux circonstances qui prévaudront à l'époque. La cloison axiale et les étamperches doivent, si elles sont installées, être démolies par l'affréteur ou les acconiers du destinataire avant et (ou) pendant le déchargement. Après la démolition, le bois et les étamperches sont à la disposition de l'affréteur et (ou) des acconiers du destinataire s'ils le désirent. Si l'affréteur et (ou) les acconiers du destinataire préfèrent laisser tout ou partie du bois des étamperches à bord, ils peuvent le. faire sous 92623-5
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCEIRODER» 455 La U.S. Carriage of Goods by Sea (Cogsa) a été mis en preuve par un avocat de New-York, M. McGowan, qui a produit une copie. En l'espèce, on a établi un connaissement, mais il semble que les parties aient convenu qu'il ne s'agissait que d'un reçu pour la cargaison, et qu'il fallait chercher le contrat de transport dans la charte-partie. Le fait que le connaissement ne constituait qu'un reçu n'empêche cependant pas le régime américain de Cogsa de s'appliquer au présent appel, conformément au prin-cipe établi par lord Reid dans l'affaire Adamastos Shipping Co. v. Anglo-Saxon Petroleum Co.14, dans les termes suivants (page 168): Pour donner à la clause paramount une signification ou un effet quelconques, il faut considérer l'expression «Ce connaissement* comme une énonciation erron-née pour «Cette charte-partie*. Je ne pense pas qu'on puisse douter que c'était l'intention des parties; et le fait que la clause paramount doive être «incluse* dans la charte-partie me paraît un signe manifeste qu'il faille interpréter dans ce sens les termes introductifs. Ceci dit, la Clause paramount stipule: `Cette charte-partie prend effet sous réserve des dispositions du Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis, sanctionné le 16 avril 1936; cette loi est censée faire partie de la pré-sente; et aucune disposition de la présente n'est censée comporter pour le trans-porteur une renonciation à l'un quelconque des droits ou exonérations ou un accroissement de l'une quelconque des responsabilités découlant de cette loi. Dans la mesure l'une des dispositions de la présente charte-partie est incompatible avec ladite loi, elle est nulle, mais strictement dans cette mesure.* Il s'agit donc d'une stipulation directe et expresse visant à incorporer à la charte-partie les «dispositions* de la loi américaine, de sorte que si l'une quelconque des autres dispositions de la charte-partie est incompatible «avec ladite loi*, elle est nulle, mais strictement dans cette mesure. Je remarque que l'on parle d'incompatibilté avec la loi américaineet non avec l'un ou l'autre de ses articles. Par ailleurs, il n'y a pas lieu de conclure à l'inapplicabilité de cette clause, du seul fait que la loi américaine précise qu'elle ne régit que les voyages en provenance ou à destination de ports américains, alors qu'en l'espèce, ni le point de départ, ni la destination, ni le point d'arrivée réel ne se trouvaient réserve du consentement du capitaine. Le temps de démantèlement et le temps utilisé pour disposer des matériaux (sauf le cas ois ils sont laissés à bord avec le consentement du capitaine) compte comme temps de déchargement. U CLAUSE PARAMOUNT AMÉRICAINE Ce connaissement prend effet sous réserve des dispositions du Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis, sanctionné le 16 avril 1936; cette loi est censée faire partie de la présente; et aucune disposition n'est censée comporter pour le transporteur une renonciation à l'un quelconque des droits ou exonérations ou un accroissement de l'une quelconque des responsa-bilités découlant de cette loi. Dans la mesure une disposition du présent connaissement est incompatible avec ladite loi, elle est nulle, mais strictement dans cette mesure. 13 CLAUSE NEW JASON En cas d'accident, de danger, de dommage ou de désastre survenant avant ou après le début du voyage, quelle qu'en soit la cause, qu'il survienne par négligence ou non, lorsque le voiturier n'est pas, en vertu de la loi ou d'un contrat ou autrement, responsable de cet événement ou de ses conséquences, les marchandises, l'expéditeur, le destinataire ou le proprié-taire des marchandises contribuent avec le voiturier, pour l'avarie commune, au dédommage-ment de toute vente à perte, perte, ou dépense de la nature d'une avarie commune qui peut être effectuée ou encourue, et paient tous les frais de sauvetage et frais spéciaux engagés pour les marchandises. Si le voiturier possède ou exploite un bateau de sauvetage, les frais de sauvetage sont remboursés aussi complètement que si ce bateau appartenait à un tiers. Sur demande, les marchandises, l'expéditeur, le destinataire ou le propriétaire des marchandises déposent entre les mains du voiturier, avant la livraison, la somme que celui-ci, ou son agent, estime suffi sante pour couvrir le dédommagement éventuel des marchandises et les frais de sauvetage ou frais spéciaux engagés pour elles. 14 [1959] A.C. 133. 92623-5I
[1970] R.C.A. HEATH, STEEL MINES LTD v. LERWIN,"SCHRODER» . " 457 aux États-Unis. Le vicomte Simonds a traité cette 'question à .fond, toujours dans l'arrêt qu'on vient de citer, à la page 155: Pourquoi ne s'appliquerait-elle pas à d'autres traversées qu'à celles à destination ou en provenance de certains points des États-Unis?. Je ne pense pas qu'on puisse trouver une réponse plus claire que celle qu'a donné le savant juge... Au-cune raison n'a' été invoquée (et aucune ne pourrait-l'être, autant que je sache), qui permette d'apporter une telle restriction au contrat. Au contraire, agir ainsi serait une absurdité du point de vue commercial. Tout comme le savant juge, c'est donc sans hésitation que j'interprète ce contrat en donnant aux 'obligations qu'il stipule la même portée : géographique que l'entreprise en question. J'accepterais également la thèsè de lord Somervell en ce qui concerne l'article 5 de la loi américaine, qui stipule que celle-ci ne s'applique pas aux chartes-parties. Il déclarait, à la page 184 de l'arrêt précité: Je suis également d'accord avec le savant juge sur le second point, fondé sur l'article 5 de la loi, selon lequel la ; loi n'est pas applicable aux chartes-parties.. II déclarait: «Puisque la clause paramount stipule que cette charte-partie sera régie par la loi, il est absurde de mettre au contrat, par la clause paramount, une condition portant que la loi n'est pas applicable aux chartes-parties Les dispositions de la loi devront donc être incluses comme conditions dans le contrat dans la me-sure elles sont applicables. On appliquera ainsi les principes posés dans l'affaire Golodetz v. Kersten, Hunik & Co. (24 LI. L.R. 374). Je pense également que la clause 51 de l'additif à la charte-partie, qui considère simplement la clause paramount américaine comme comprise de plein droit dans le contrat, suffit à mon avis à rendre applicables les dispositions pertinentes du Cogsa, dans la mesure elles se rapportent aux devoirs, obligations, exonérations et exemptions respectifs des patties. Après avoir ainsi établi que les clauses pertinentes du Cogsa s'appliquent à ce transport, il faudrait maintenant citer les dispositions de l'article 4 (6) du Cogsa (apparemment identiques au paragraphe 6 de l'Article IV de la Loi sur le transport des marchandises par eau du Canada, relatives aux cargaisons dangereuses. Voici l'article 4 (6) [ante, p. 437] Il peut être utile de dire ici que l'article 2 (21) de la Loi sur la marine marchande du Canada décrit «les marchandises dangereuses» ou «marchan-dises de nature dangereuse comme les «marchandises qui, par leur nature, leur quantité ou leur mode d'arrimage, sont, isolément ou dans leur ensemble, susceptibles de compromettre la vie des passagers ou la sécurité du navire, et comprend toutes les substances définies comme marchandises dangereuses par le gouverneur en conseil, dans les règlements établis par lui». Il semble donc qu'en vertu d'une définition canadienne, les marchandises susceptibles de compromettre la sécurité d'un navire peuvent être jugées dangereuses; cela ' ne' vise pas uniquement les marchandises qui sont dan-gereuses en elles-mêmes, telles que les explosifs ou les produits chimiques; et il semble que sur ce point le droit américain ne soit pas différent. Il peut être intéressant de noter ici que l'article 4(6) du Cogsa traite, au premier paragraphe, des marchandises dangereuses inconnues des voituriers, capitaines ou agents, et au second des cas le voiturier, le capitaine ou l'agent connaît la nature des marchandises qui deviennent dangereuses. Il apparaît également que dans le premier cas, l'expéditeur sera responsable de tous dommages et frais, tandis que ' dans le second cas, le recours du voiturier est limité «à l'égard d'une avarie générale, le cas échéant».;
e `
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 459 A l'article 3(1), le Cogsa précise que «Avant le voyage et ou commencement du voyage, le voiturier est tenu d'exercer une diligence raisonnable a) pour que le bâtiment soit en bon état de navigabilité; b) pour conve-nablement garnir d'hommes, équiper et approvisionner le navire; c) pour mettre les cales... et toutes les autres parties du navire sont transportées des marchandises, en état de recevoir, voiturer et conserver ces marchan-dises, avec sécurité16 L'article 3(2) oblige le voiturier à «convenablement et soigneusement charger, manier, arrimer, transporter, garder, surveiller et décharger les marchandises voiturées Ces deux exigences sont semblables à celles de la Loi sur le transport des marchandises par eau, S.R.C. 1952 ch. 291, sauf que la loi canadienne déclare, au paragraphe (2) de l'Article III, de l'annexe que l'oblgation du voiturier de charger, transporter et décharger convenablement, est régie par les dispositions de l'article IV, qui fait de la diligence raisonnable une obligation primordiale, ainsi qu'on l'a rappelé dans l'affaire Maxime Footwear Co. v. Canadian Gov't Merchant Marine Ltd16 tandis que la loi américaine n'emploie pas ces termes. Je ne pense pas qu'aux fins du présent appel l'absence de ces termes dans la loi améri-caine soit de quelque conséquence; nous pouvons affirmer qu'en l'espèce, le voiturier, pour dégager sa responsabilité, doit établir, une fois qu'on a démontré que le navire n'était pas en bon état de navigabilité au moment pertinent et que cela a causé l'accident, le dommage ou la perte ou que ces derniers ont été la conséquence ou le résultat du mauvais état de navigabilité, qu'il a exercé une diligence raisonnable pour mettre le navire en bon état de navigabilité au moment pertinent. Tel est en effet l'état du droit applicable dans un cas régi par la loi canadienne; et après lecture de la loi américaine (dont les parties semblent avoir accepté le contenu par le simple dépôt d'une copie imprimée de la loi au dossier de l'affairer', aussi bien que d'après les preuves apportées en l'espèce, il semble qu'il n'y ait aucune raison de croire que le droit américain en diffère sur quelque point. Dans la thèse que l'appelante a défendue en appel, on peut, me semble-t-il, distinguer deux aspects: (1) l'intimité s'est engagé à transporter et à livrer en bon état la cargaison et n'a pas rempli ses obligations contractuelles, puisqu'il a refusé de les exécuter; il a donc violé les termes de son contrat; 1' Bien que je me demande si l'obligation première du voiturier de faire preuve d'une diligence raisonnable est une condition sine qua non de l'exercice par le voiturier de tous les droits que peut lui conférer l'article 4 (6) du Cogsa, ou encore l'article IV (6) de la loi canadienne, étant donné que ces droits ne me paraissent pas être des exemptions qui dépendent de l'exécution de cette obligation, je suis cependant disposé à considérer, pour juger cet appel, que le voiturier en cause était astreint à cette obligation; il me semble en effet que si, en vertu du premier alinéa de l'article 4 (6) du Cogsa, le voiturier a un recours en dommages-intérêts contre le chargeur qui lui remet une cargaison dangereuse, alors qu'il n'a pas connais-sance du danger, il ne doit cependant pas, selon moi, avoir causé ces dommages en remettant par négligence un navire qui n'était pas en bon état de navigabilité ou en n'arrimant pas de façon convenable la cargaison, sous peine de perdre ce droit. J'ajouterais également que j'ai cependant quelques doutes sur l'applicabilité de l'article 4 (6) du Cogsa à une situation comme celle-ci, une cargaison est dangereuse parce qu'elle n'a pas été arrimée ou trans-portée de façon convenable. Il se pourrait bien en fait que l'article ci-dessus ne vise qu'une cargaison intrinsèquement dangereuse. S'il en est ainsi, il me semble cependant que le voiturier aurait toujours un recours en vertu de la common law, si l'expéditeur avait remis des marchandises ou une cargaison dont la nature dangereuse était inconnue du voiturier. 10 [1959] A.C. 589, à la page 602; [1957] S.C.R. 801, à la page 809 (juge Cartwright). 17 Quand il n'y a pas de preuve précise de l'état du droit américain sur un point donné, je pense que la cour doit présumer que le droit étranger est identique au droit canadien.
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 461 (2) l'exécution de son contrat a été rendue impossible par le mauvais état de navigabilité de son navire, et l'intimé n'a pu établir qu'il avait exercé une diligence raisonnable pour mettre son navire en bon état de navigabilité. Je dois dire qu'étant donné les obligations créées par la charte-partie, ainsi que par la Loi sur le transport des marchandises par eau, ces deux allégations, si elles- étaient fondées, pourraient rendre l'intimé responsable de l'accident. Selon l'appelante, l'intimé a rompu son contrat de transport et on doit retenir sa responsabilité à l'égard de son exécution, puisqu'il était expressément prévu dans le contrat, et conforme à la réglementation du ministère des Transports relative au transport de ce genre de cargaison, que l'affréteur puisse remettre une cargaison d'un taux d'humidité supérieur au taux maximum d'humidité pour fins de transport sous arrimage normal. Cette cargaison pouvait être transportée avec une installation de bardis (cloisons axiales), que le taux d'humidité ait été ou non supérieur à 14 p. 100. La charte-partie (à la clause 49) prévoyait également qu'il fallait installer des bardis sous la surveillance et le contrôle du capitaine «et l'armateur est responsable de la bonne disposition, ainsi que de l'arrimage convenable et de la livraison en bon état de la cargaison, et de la sécurité du navire.»'$ Les difficultés rencontrées par le voiturier et l'accident qui s'est produit sont précisément du type que les stipulations de la charte-partie visaient à empêcher, et, selon l'appelante, le voiturier ne peut plus, après avoir négligé de se conformer aux dispositions expresses de son contrat, prétendre qu'il n'a pas exécuté ce contrat parce que la cargaison était tout à fait différente de celle qu'on lui avait décrite au moment de l'expédition. L'appelante affirme que l'intimé a rompu son contrat en a) montant mal les bardis, b) n'arrimant pas convenablement la cargaison et c) ne la livrant pas en bon état. Ces stipulations du contrat s'appliqueraient non seulement au moment du chargement, mais également à Halifax, lorsque l'affréteur demanda au voiturier de réarrimer et de poursuivre sa traversée. L'appelante affirme que les bardis des cloisons axiales étaient insuffi-sants, dans la mesure ils n'étaient pas assez rigides pour empêcher, en mer, le passage de la cargaison d'un côté du navire à l'autre; et s'ils ont effectivement cédé, c'est qu'ils étaient notablement moins solides que la norme "Je n'ai pas l'intention de considérer en détail l'argument présenté par l'intimé, selon lequel la clause 49 de la charte-partie, qui, en plus de mettre ces obligations à la charge du voiturier, traite des bardis et des exigences du Code canadien, est nulle parce qu'incompatible avec le Cogsa dans la mesure elle accroît la responsabilité du voiturier par rapport à ce que prévoit la loi: j'estime en effet que, même en l'absence d'une telle clause dans la charte-partie, le voiturier aurait été tenu, à mon avis, de se conformer aux directives du gardien de port, pour être en mesure d'établir qu'il avait pris tous moyens raisonnables d'arrimer con-venablement cette cargaison. En ce qui concerne la livraison en bon état de la cargaison et la sécurité du navire, j'estime qu'il subsiste toujours une obligation implicite, à la charge du voiturier, d'assurer la sécurité de son navire lorsqu'il s'engage à transporter et livrer une cargaison. A mon sens, cette clause, et notamment le passage qui met à la charge du voiturier la «livraison en bon état de la cargaison. et la «sécurité du navire., ne dépasse pas la portée des obligations que je viens de décrire, et l'on nie peut en élargir le sens, comme l'a -suggéré l'avocat de l'appelante, jusqu'à dire qu'elle empêche le voiturier d'invoquer ses droits éven-tuels contre l'affréteur qui lui remet une cargaison dangereuse à moins, évidemment, que le voiturier n'accepte, en connaissance de cause, d'arrimer et de transporter cette cargaison, ou ne se rende coupable de négligence, soit dans l'arrimage et le transport de la cargaison, soit même simplement en acceptant d'effectuer ce transport. Ce sont , en fait, les seules questions que nous ayons à trancher en l'espèce.
[1970] R.C.E. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 463 minimale du Code canadien. La rupture d'un certain nombre de planches dans les cales 2 et 3 indiquerait clairement, selon l'avocat de l'appelante, qu'elles n'étaient pas assez solides pour jouer leur rôle. Ces bardis n'étaient pas conformes à ce qu'exige le Code (article 8, à la page 43, du Code). [Le Juge commenta les témoignages et continua en ces termes:] En vertu de l'article 5.5 du Code, il faut monter les bardis d'un navire à la satisfaction du gardien de port; ce dernier a délivré un certificat à cet effet. Ceci était également conforme à tout ce que la charte-partie, par la clause 49, exigeait de l'intimé, c'est-à-dire «Installer des bardis ... conformément aux instructions du gardien de port». D'autre part, l'affré-teur, en vertu de la clause 49 de cette charte-partie, devait fournir la main-d'oeuvre et les matériaux pour installer les bardis, et participait donc égale-ment à cette installation. Il avait en outre mandaté quelqu'un pour assister à cette installation, un certain M. Peters, qui a déclaré avoir assisté aux discussions entre le capitaine et le gardien de port sur le montage des bardis et l'utilisation des installations dont disposait le navire pour le transport du grain au lieu des bardis prescrits par le Code canadien. M. Peters, en qualité de représentant de l'appelante, savait quel type de bardis était utilisé, et ne fit aucune objection. Dans ces circonstances, il est difficile de voir comment le chargeur peut maintenant se plaindre de ce que le voiturier n'a pas respecté strictement les exigences du Code. Dans Upper Egypt Exporters v. Santamana,la un chargeur se plaignait d'un mauvais arrimage alors qu'il en avait eu connaissance, on a jugé qu'il pouvait lui être valable-ment opposé que le chargeur connaissait la méthode d'arrimage et n'y avait fait aucune objection. Voir également N. M. Patterson & Sons Ltd v. Mannix Ltd.20 On peut cependant réfuter encore plus nettement la réclamation de l'appelante, quant à la suffisance des bardis de l'intimé, puisque la preuve donne très nettement lieu de penser que même si une cloison axiale en acier très solide et hermétique avait été placée sur le navire, et a fortiori construite en respectant strictement les stipulations du Code canadien, l'accident se serait tout de même produit, en raison de la propension du produit concentré, lorsqu'il est liquéfié, à s'entasser, en exer-çant une pression de plus en plus grande, contre la cloison, sous l'effet du roulis, faisant ainsi donner peu à peu de la gîte au navire, jusqu'à menacer de le faire chavirer. Les experts présentés par l'intimé ont été unanimes à l'affirmer, bien que le capitaine Clowser, gardien du port d'Halifax, l'ait démenti. La preuve prépondérante indique en outre que cette substance, avec la pression accrue qu'elle exerce lorsqu'elle est liquéfiée, aurait également traversé une cloison installée conformément au Code. Si tel était le cas, et il semble bien qu'il en fut ainsi, le fait que l'intimé n'ait pas respecté certaines des exigences du Code quant aux dimensions est sans rapport avec l'accident ou les dommages encourus. En fait, je ferai remarquer ici que les bardis installés, bien que non conformes à tous égards aux normes du Code cana-dien, étaient cependant assez proches de ce qu'exige le Code pour ne pas être considérés comme inférieurs à la norme ou de mauvaise qualité. 'B [1923] L1.L.R. 159. 2 D (1966) 55 D.L.R. (2d) 119.
[1470] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» . 465 L'accident a été en fait causé par la seule transformation du produit et sa pression accrue sur une cloison prévue pour résister à des forces 8 fois plus faibles que celle qui s'exerçait sur elle lorsque le capitaine a décidé d'interrompre la traversée et de chercher refuge à Halifax. J'examinerai maintenant les prétentions de l'appelante à l'égard de la navigabilité du navire. Selon elle, l'intimé n'a pas fourni un navire en bon état de navigabilité, car a) le navire remis à Newcastle n'était pas prêt à recevoir la cargaison conformément aux stipulations de la charte-partie, puisque (1) les bouchains étaient encrassés et on ne pouvait les pomper; (2) les substances trouvés dans les bouchains et sur le dessus du réservoir comprenaient des résidus d'une cargaison précédente ainsi que des produits concentrés provenant de la cargaison de l'appelante; et cette fuite de produits, à la fois de la cargaison actuelle et de la précédente (accumulée sur le dessus du réservoir) dans les fonds de cale, expliquait pourquoi le navire ne pouvait plus pomper ces fonds de cale au cours de la traversée; (3) les crépines devaient être convenablement protégées contre les fuites de la car-gaison, et le navire n'était pas équipé de telles crépines. Il aurait fallu prendre des mesures pour permettre à l'eau des fonds de cales de parvenir aux prises d'eau sans encrasser ces prises avec la cargaison; (4) le capitaine n'était pas compétent pour cette traversée, puisqu'il n'était pas au courant des méthodes d'arrimage ou de transport qui convenait à cette cargaison; bien qu'on lui ait dit à Newcastle qu'au cours de la traversée, de l'eau pourrait apparaître à la surface de la cargaison, il n'avait prévu aucun moyen pour permettre à cette eau de s'écouler dans les fonds de cale. En outre, à cause de l'incompétence du capitaine, on n'a pas installé de bardis conformément aux stipulations minimales du Code. A mon avis, l'allégation de l'appelante, selon laquelle on n'aurait pas remis le navire en état de recevoir la cargaison conformément aux stipulations de la charte-partie, est dénuée de fondement. M. Peters, représentant de l'appelante, a affirmé que le navire était à tous égards en état, en décla-rant, aux pages 99 et 100 de la transcription: Q. En d'autres termes donc, vous vous êtes assuré, autant que possible, que le navire avait été remis conformément aux termes de la charte-partie? R. Dans la mesure oh j'ai pu vérifier, c'est exact. Q. Pensez-vous qu'à certains égards, il ne répondait pas aux stipulations? R. A mon avis, le navire était en parfait état. En ce qui concerne les bouchains, la preuve démontre qu'on ne pouvait guère faire plus que ce que fit le voiturier, c'est-à-dire couvrir les planches de grosse toile et de bandes de bois. Rendre les bouchains hermétiques avait pour seul but d'y laisser pénétrer l'eau et maintenir à l'extérieur les parti-cules de produits concentrés. Cependant, lorsque la cargaison se liquéfia, quelques grains sont passés dans les bouchains et les ont encrassés, bien qu'il y ait eu également, mais en faible quantité, des résidus de bauxite d'une cargaison précédente, probablement passés dans les fonds de cale à partir des dessus de réservoir ou d'ailleurs. A mon avis, la cause essentielle de l'encrassement fut la fuite de particules de concentré dans les bouchains, à la suite de la liquéfaction de cette cargaison qui, selon les témoignages, a rejailli en éclaboussures dans les cales pendant un certain temps avant l'arrivée du navire à Halifax. Tant que la cargaison était restée à l'état solide,
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 467 la toile avait suffi, mais dès que le produit se fut liquéfié, elle ne pouvait plus empêcher certaines fuites. La transformation de la cargaison était donc la seule cause de l'incapacité du navire à pomper ses fonds de cale au cours de la traversée. Il est vrai qu'il n'y avait aucune crépine, mais de toute façon, elles auraient été recouvertes par la toile, puisqu'elles se seraient trouvées aux bouches de prise d'eau, et dans ce cas encore, il n'y aurait eu aucune difficulté si la cargaison était restée solide. A mon sens, la preuve révèle clairement que les bouchains avaient été nettoyés correctement et fermés avant la traversée, et on ne peut donc prétendre sérieusement que les dispositions prises à cet égard étaient insuffisantes. Il est vrai que le capitaine n'était pas habitué au transport de produits concentrés de cuivre, mais il avait une très grande expérience en qualité de capitaine au long cours, et avait déjà transporté et arrimé diverses cargaisons en vrac. Il n'avait certainement jamais eu l'expérience d'une cargaison de cette nature (et, d'après la preuve, on n'avait jusqu'alors effectué que très rarement le transport de ce produit concentré) et ne connaissait pas non plus les singulières propriétés de cette substance, une fois soumise à une énergie cinétique ou au roulis. En fait, très peu de gens, dans sa profession, les connaissaient. On lui avait dit que de l'eau pourrait apparaître à la surface de la cargaison au cours de la traversée, et il aurait pu éventuellement prévoir quelque mode de drainage. La preuve révèle cependant qu'avant le départ, une petite quantité d'eau était apparue en surface, après que l'on ait réparti au moyen d'un bulldozer la cargaison dans les cales 2 et 3, et qu'il n'en apparut pas au cours de la traversée. Ce n'est qu'après l'arrivée du navire à Halifax, une fois à quai, que le produit s'est affaissé et que l'eau est apparue. Au cours de la traversée, elle n'était pas apparue, et n'avait pas non plus créé de problèmes. Il n'installa pas les bardis comme le prescrivait le Code mais, comme nous l'avons vu, même s'il l'avait fait, l'accident se serait produit, puisque la seule cause en fut la transformation soudaine et inattendue de la cargaison. Il s'ensuit, me semble-t-il, que, bien que le navire de l'intimé n'ait pas été en bon état de navigabilité au moment de quitter Newcastle, cette innavi-gabilité était entièrement attribuable à la nature particulière de la cargaison, et non au manque de diligence du voiturier à tout autre égard. Le problème qu'il reste à résoudre est de savoir si le capitaine ou l'arma-teur connaissaient, ou auraient connaître le danger qu'implique le transport d'une telle cargaison. J'ajouterai que la question de savoir si l'expéditeur avait connaissance des propriétés singulières de cette cargaison, et du danger que pouvait éven-tuellement présenter ces particularités pour la navigation, peut avoir aussi son importance, bien que, selon une certaine jurisprudence, l'expéditeur soit généralement tenu de garantir la sécurité de ses marchandises, même s'il ne connaît pas le danger qu'implique leur transport. D'après la preuve, les propriétés singulières de la cargaison qui nous concernent, n'étaient connues, en 1962, que d'un petit nombre de savants, et, à certains égards, de A. J. Shields, qui avait conclu la charte-partie au nom de l'appelante. Trois témoins experts des problèmes de transport maritime, appelés à témoigner par l'appelante, ne les connaissaient pas, et jurèrent
[1970] R.C.A. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 469 qu'un tel passage de l'état solide à l'état visqueux n'était pas possible. La preuve démontre clairement que le capitaine du navire et son armateur ne soupçonnaient pas que la cargaison qu'ils s'étaient engagés à transporter pouvait passer de l'état solide à l'état fluide. Renseignements pris, tous deux furent induits à penser par les représentants du chargeur que tout ce qu'il fallait prévoir était la présence éventuelle d'un peu d'eau à la surface de la cargaison et quelques déplacements; ils prirent alors des mesures appro-priées pour écarter ces risques. Le capitaine respecta à tous égards les indications du gardien de port. Si le capitaine ou l'armateur avaient fait d'autres recherches, il semble qu'il n'aurait pas obtenu d'autres renseigne-ments sur la nature de cette substance. Personne, à l'exception de savants spécialistes comme MM. Milton et Purdy, n'avait connaissance à cet époque de la possibilité de transformation de cette cargaison et je ne pense pas qu'il serait raisonnable, dans les circonstances de l'espèce, de penser qu'ils auraient pu et consulter ces personnes. Je ne crois pas que le capitaine ou l'armateur aient eu aucune raison de penser que la cargaison, telle qu'on la leur a remise, même avec son taux d'humidité, était dangereuse, compte tenu du fait que le Code canadien réglementait ce transport en recommandant simplement le montage de cloisons dans les cales, sous la direction de celui qu'ils étaient en droit de considérer comme un fonctionnaire compétent en ces matières, le gardien de port. En fait, on ne peut prétendre raisonnable-ment, dans ces circonstances, que le capitaine ou l'armateur avaient conclu ce contrat de transport en connaissance de cause, et pas davantage qu'en qualité de voituriers de fret, ils auraient connaître le danger inhérent au transport d'une telle cargaison, alors que la plupart des experts en transport maritime l'ignoraient. De fait, il a fallu une instruction judiciaire complète et le témoignage de savants hautement qualifiés pour découvrir que les dispositions prévues dans le Code ne convenaient pas au transport des produits concentrés d'un taux d'humidité supérieur à la limite permise pour le transport. En concluant ainsi, j'ai par ailleurs pris soigneusement en considération le fait que le voiturier savait que le chargement contenait au moins 14 p. cent d'humidité, ce qui représentait quelque 440 tonnes d'eau, que le Code canadien faisait mention d'un «point d'affaissement», qu'on avait placé des lattes sur les interstices entre les bardis, probablement pour empêcher le liquide de passer d'un côté du navire à l'autre, et qu'on avait dit au capi-taine que de l'eau pourrait apparaître en surface. Cependant, je ne peux m'empêcher de considérer que, malgré les données dont j'ai fait état, la caractéristique la plus importante de cette substance visqueuse, c'est-à-dire sa propriété de se déplacer en une masse compacte, était inconnue du voi-turier, et qu'il ne pouvait pas non plus, d'après ces données ou d'après les renseignements fournis par le chargeur, prévoir qu'une telle transformation pourrait se produire et rendre ce chargement dangereusement fluide. [Le Juge, après avoir passé les témoignages en revue, reprit en ces termes:] Dans ces circonstances, il ne m'est pas possible d'éviter la conclusion suivante: le capitaine ou l'armateur du navire ne connaissaient pas, et ne Pouvaient pas raisonnablement connaître le danger qu'impliquait le. transport de cette cargaison, puisqu'un tel danger n'était pas apparent ou manifeste, 92623-6
[1970] R.C.A. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 471 et qu'on ne le leur avait pas signalé. Ils n'ont été, en aucune façon, négligents, et n'ont pas manqué de diligence, en acceptant de charger cette cargaison alors que son taux d'humidité dépassait la limite permise pour le transport, même s'ils étaient responsables de l'arrimage convenable et de la livraison en bon état de la cargaison. Cette obligation du voiturier ne comporte pas, en fait, une obligation de résultat, mais signifie simplement que le voiturier ne sera pas négligent dans l'arrimage de la cargaison; la preuve révèle en l'espèce, qu'aucune négligence ne prévaut être imputée au voiturier, dans aucun domaine pertinent, et que la prétention de l'appelante, selon laquelle le voiturier n'avait respecté aucune de ses obligations contractuelles en vertu de la charte-partie, est dénuée de tout fondement. (Voir Union Castle v. Borderdale Shipping. 21) On ne peut cependant pas en dire autant de l'appelante. Tout d'abord, l'appelante, me semble-t-il, a manqué à ses obligations, en n'essayant pas, avant le chargement de cette cargaison, de l'assécher comme elle s'était engagée à le faire par la clause 49 22 de la charte-partie. Les preuves appor-tées révèlent qu'elle n'a fait absolument aucune tentative de remplir cet engagement. Par ailleurs, l'appelante n'a pas informé l'intimé du danger inhérent au transport de cette cargaison en haute mer, comme elle aurait , me semble-t-il, le faire. Si elle l'avait fait, on aurait pu prendre des pré-cautions plus minutieuses pour arrimer cette cargaison (la preuve ayant en fait révélé que le seul moyen possible, pour ce navire à cargaison sèche, de transporter en toute sécurité cette substance visqueuse était d'aménager des alvéoles dans les cales) ou bien l'intimé aurait refusé de la transporter, évitant ainsi des dommages et des frais inutiles. En ne renseignant pas l'in-timé sur ce danger, l'appelante, par l'omission de M. Shields, qu'elle avait déclaré être son agent, s'est rendue coupable d'un manquement à ses obli-gations23 , engageant aussi bien, à mon avis, sa responsabilité directe que déléguée, ce qui constitue une fin de non-recevoir et suffit à rejeter l'action de l'appelante et à recevoir la demande reconventionnelle de l'intimé. II me semble qu'il en irait même, si ce dernier ne pouvait se prévaloir de l'article 4 (6) du Cogsa, qui lui donne le droit de recouvrer tous les dommages et frais qui sont nés directement ou indirectement ou qui ont résulté de l'expé-dition de marchandises dangereuses dont le caractère n'avait pas été porté à sa connaissance; or, il ne fait aucun doute que telle était la situation en l'espèce. En fait, les obligations relatives à une cargaison dangereuse seraient les mêmes, à mon avis, en common law qu'en vertu de la règle particulière de l'article IV(r) du Cogsa (Voir Atlantic Oil Carriers v. British Petroleum 24); et en déchargeant cette cargaison dangereuse comme il l'a fait, l'intimé ne faisait qu'exercer soit un droit contractuel qu'il possédait en vertu de la charte-partie, soit un droit que lui conférait la loi. II me semble qu'il avait effectivement rempli toutes les conditions préalables à l'exercice de ce droit. II s'ensuit que cet appel est rejeté avec dépens. 21 [1919] 1 K.B. 613. 29 «L'affréteur essaiera de réduire le taux d'humidité de la cargaison en-deça du taux d'humidité maximum pour fins de transport; il y a de bonnes chances qu'il parvienne, mais il ne peut le garantir.. ° Depuis l'arrêt Lennord's Carrying Co. v. Asiatic Petroleum [1915] A.C. 705 (H.L.), il est certain qu'une corporation peut avoir une responsabilité primordiale ou directe aussi bien qu'une responsabilité déléguée. 24 [1957] 2 L1.L.R. 55, à la page 121. 92623-6}
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 473 LE JUGE CATTANACH (après avoir relaté les faits) :—Dans l'exposé des faits, déposé au nom de l'appelante, son avocat a énuméré comme suit les problèmes en appel: 1. Le juge de première instance a commis une erreur en concluant que la cargaison était une cargaison dangereuse à charger et à avoir à bord d'un navire. 2. Les dispositions de la Carriage of Goods By Sea Act des États-Unis ne justifient pas la renonciation à la traversée par le voiturier. 3. Les dispositions de la charte-partie rendant le voiturier responsable de la bonne disposition, ainsi que de l'arrimage convenable, de la livraison en bon état de la cargaison, et de la sécurité du navire» constituent une clause valide et exécutoire du contrat de transport. 4. Le juge de première instance a commis une erreur en concluant que la diligence raisonnable et la signification de bon état de navigabilité ne sont pas en cause en l'espèce et en ne concluant pas que le navire n'était pas en état de navi-gabilité à cause d'un manque de diligence raisonnable de la part du voiturier. 5. Le juge de première instance a commis une erreur en concluant que l'absence de bardis n'avait pas été la cause du danger réel à bord du navire défendeur. 6. En concluant que l'incertitude quant aux produits concentrés et le pro-blème des cargaisons mouvantes délient le voiturier de toute responsabilité étant donné les exigences du commerce et la jurisprudence de l'arrêt Brass v. Maitland, 119 E.R. 940. D'après ce que j'ai compris, la plaidoirie de l'avocat de l'appelante indi-quait fondamentalement que (1) le voiturier avait entrepris de transporter et de livrer la cargaison remise par l'affréteur, cargaison qui, remise pour le transport était telle que l'avait décrite le chargeur à l'affréteur et que le fait pour . l'affréteur d'avoir déchargé la cargaison .à Halifax et refusé de l'arrimer de nouveau puis de la transporter à sa destination finale, constituait une rupture du contrat de l'affréteur tel qu'incorporé dans la charte-partie; (2) que la cargaison, ainsi remise pour le transport n'était pas dangereuse au sens de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis; (3) qu'en raison du fait que le voiturier n'ait pas installé des bardis axiaux conformé-ment aux exigences minimales du Code canadien des concentrés, le navire n'était pas en bon état de navigabilité; (4) que le voiturier n'avait pas exercé une diligence raisonnable pour rendre le navire navigable et (5) qu'en raison de ce qui précède et des termes exprès de la charte-partie, le voiturier ne peut s'appuyer sur la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis pour déclarer qu'elle affecte ses droits et immunités. Par ailleurs, l'avocat de l'intimé a, d'après sa plaidoirie, prétendu que, sans que le voiturier le sache la cargaison était dangereuse, que le fait de ne pas avoir installé des bardis axiaux de la résistance minimale indiquée dans le Code canadien des concentrés n'était pas la cause du danger que le navire avait rencontré mais qu'il fallait plutôt en rechercher la cause dans la liquéfaction de la cargaison, qu'il n'y avait pas eu manque de diligence raisonnable de la part du voiturier pour rendre son navire navigable et que, conformément aux termes exprès de la charte-partie, le voiturier avait le droit de décharger la cargaison avant sa destination et que par conséquent il n'avait pas rompu son contrat. Le moment est venu dans le récit des faits de décrire la cargaison et ses propensions telles qu'elles ont été révélées par les témoignages apportés devant le savant juge de première instance.
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 475 [Le juge passa les témoignages en revue, et continua:] On n'a apporté aucune preuve sur la connaissance du Code canadien des concentrés. Le capitaine de l'Erwin Schroder n'en avait pas pris connaissance avant d'arriver à Halifax. Il est évident que le chargeur le connaissait un peu parce que l'article 49 de la charte-partie, qu'il avait rédigé lui-même, le mentionnait. Il n'a aucun effet juridique parce qu'il ne s'agit pas d'une législation déléguée découlant d'une loi d'habitation, la Loi sur la marine marchande du Canada. J'interpréterais donc le code comme étant une série de directives ministérielles adressées au gardien de port. Puisque la dernière question de cette affaire, doit être tranchée à mon avis, par interprétation de la charte-partie, il s'ensuit que les dispositions pertinentes doivent en être énoncées en détail. La charte-partie est datée du 9 novembre 1962. Sur l'imprimé type, la clause finale indique: Les clauses 28 à 51, annexées à la présente sont comprises de plein droit dans cette charte-partie. En réponse à la défense, la demanderesse, l'appelante en l'espèce, a plaidé que ces clauses n'étaient pas annexées et ne faisaient pas partie de la charte-partie. Cependant, au cours du procès, l'avocat de l'appelante a reconnu que les clauses 'de protection étaient annexées à la charte-partie, et en faisaient partie. La clause paramount des États-Unis, mentionnée dans la clause 51 de la charte-partie précise: [ante, p. 455] Il y avait un connaissement mais les parties en l'espèce acceptent l'hy-pothèse selon laquelle le connaissement était simplement un reçu de la cargaison et que le contrat entre les parties est incorporé à la charte-partie. Alors qu'on mentionne ce «connaissement» dans la clause paramount des États-Unis, Lord Reid dans l'affaire Adamastos Shipping Co. v. Anglo-Saxon Petroleum Co.25 déclare à la page 90: Pour donner à la clause paramount une signification ou un effet quelconque, il faut considérer l'expression =ce connaissement» comme une énonciation erronée de «cette charte-partie». L'arrêt Adamastos fait jurisprudence et confirme que les dispositions de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis, dans la mesure elles traitent des fonctions, obligations et immunités respectives de l'appelant et de l'intimé, sont aussi pleinement incorporées à la charte-partie que si elles y étaient inscrites en entier (voir Viscount Simonds à la page 79 et Lord Somerville à la page 98) . La Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis comporte l'article 4(6) que voici [ante, p. 437] L'article 3(1) impose au transporteur l'obligation primordiale de rendre le navire navigable. Si l'on découvre que le navire n'était pas en bon état de navigabilité au moment du chargement et que ce mauvais état de navi-gabilité a été la cause de l'accident, le voiturier doit alors, pour dégager 25 [1958] 1 LI. L.R. 73.
[1970] R.C.a. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 477 sa responsabilité, démontrer qu'il a exercé une diligence raisonnable pour rendre le navire navigable au moment pertinent. Voici l'article 3(1): [ante, p. 437] Les parties à la charte-partie avaient envisagé que la future cargaison remise au voiturier par le chargeur pourrait dépasser la limite d'humidité permise pour le transport et exiger ainsi l'installation de bardis axiaux. Cette éventualité était prévue à la clause 49 [ante, p. 453] et 32 de la charte-partie que voici [ante, p. 453] L'obligation des armateurs à l'égard de l'état du navire lorsqu'il est remis afin de recevoir la cargaison est précisée à la clause 35 de la charte-partie [ante, p. 453] Il ne fait aucun doute que le chargeur était, en raison du texte exprès de la clause 49 de la charte-partie en droit de remettre la cargaison avec sa teneur en humidité supérieure à la limite d'humidité permise pour le transport par le voiturier, sous réserve de l'installation de bardis axiaux dans le navire. La clause 49 prévoit qu'en pareil cas il faut installer les bardis «sous la surveillance et le contrôle du capitaine et des armateurs» qui «sont responsables de la bonne disposition, ainsi que de l'arrimage convenable et de la livraison en bon état de la cargaison, et de la sécurité du navire». Ce texte est entièrement conforme à l'obligation imposée au voiturier en vertu de l'article 3(2) de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis. Cependant, la charte-partie prévoit également qu'il faut installer la cloison axiale aux frais de l'affréteur et avec le matériel fourni par l'affréteur. Par ailleurs, l'affréteur a précisé à la clause 49 qu'il essaierait de réduire la teneur en humidité de la cargaison en deçà de la limite d'humidité permise pour le transport et a ajouté qu'il avait de bonnes chances d'y parvenir mais ne pouvait le garantir. En raison du temps disponible, ceci n'était qu'un voeu pieux et l'affréteur n'a fait aucun effort pour réduire la teneur en humidité. L'avocat de l'appelante a soutenu que la charte-partie en cause consti-tuait un accord spécial de transport d'une cargaison d'un caractère inhabituel étant donné les termes spéciaux de l'article 6 de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis qui précise [ante, p. 437] Bien qu'il y ait eu un connaissement en l'espèce, il semble qu'il n'ait pas été négociable et que les parties l'aient considéré comme un simple reçu de la cargaison mais que la charte-partie régissait les conditions du transport. Je ne vois pas comment cette transaction particulière peut être considérée comme l'objet d'un accord spécial pour permettre d'exonérer le voiturier de ses responsabilités et obligations en ce qui concerne la cargaison ou pour priver le voiturier de ses droits et immunités indiqués dans les articles précédents de la loi. Il me semble que ce contrat de transport a été conclu de la même manière que pour toute expédition commerciale ordinaire dos le cadre habituel du commerce. Bien que le directeur du service des mouve-ments de l'appelante ait pu avoir connaissance des propensions particulières du produit concentré minerai, il est certain que l'armateur ou le capitaine ne les connaissait pas de sorte qu'aucun consensus quant à la nature de la cargaison n'aurait pu justifier un accord spécial. C'est pourquoi, je conclus que l'article 6 ne s'applique pas et que le contrat de transport sera déterminé
11970] R.C.E. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 479 par les termes de la charte-partie dont font partie, pour autant qu'elles s'appliquent les dispositions de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis. Comme je l'ai précisé auparavant, il me semble que les articles importants de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis quant aux marchandises dangereuses sont incorporés à la charte-partie. Le savant juge de première instance a conclu que cette cargaison était dangereuse. Il a déclaré: I1 ne fait aucun doute pour moi que, d'après les témoignages qui m'ont été présentés, que le capitaine de l'Erwin Schroder était en droit de ne pas poursuivre la traversée avec cette cargaison à bord du navire défendeur. Il traversait l'Atlantique nord, à un moment des orages étaient tels que je doute fort qu'il ait pu atteindre sa destination et il est probable que le destin du navire aurait pris fin dans les profondeurs de l'Atlantique nord avant d'atteindre sa destination. Le capitaine dudit Erwin Schroder avait donc le droit, à mon avis, de retourner à Halifax ou à un autre port qui aurait pu être plus avantageux pour lui, pour sauver ce navire. Il a ensuite déclaré: II ne fait aucun doute pour moi qu'une cargaison de cette nature, comportant ces caractéristiques, est une cargaison dangereuse à avoir à bord d'un navire. Je conclus que la cargaison du navire défendeur, chargée à Newcastle comme nous l'avons indiqué précédemment, était une cargaison dangereuse pour ce navire. Les événements qui se sont produits à bord du navire l'ont à mon avis démontré. L'avocat de l'appelante a soutenu que cette conclusion du juge de pre-mière instance était erronnée. D'après ses arguments, j'ai compris qu'il prétendait que la cargaison remise était une cargaison de concentrés de minerai comportant une teneur en humidité supérieure à la limite d'humidité permise pour le transport dans le cas d'un arrimage normal et sujet à des déplacements. La charte-partie prévoyait expressément cette possibilité à la clause 49. Il a prétendu que la conclusion du savant juge de première instance sur le caractère dangereux de la cargaison n'était pas prise, en référence à la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis. Je ne comprends pas comment on peut dire que le savant juge de première instance n'a pas con-sidéré la cargaison dangereuse au sens de ce terme dans le contexte de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis. Il avait déclaré: ... brièvement, il me semble qu'il faut décider tout d'abord si la cargaison en cause était d'une nature ou d'un caractère dangereux et déterminer ensuite quelles sont les responsabilités des chargeurs, du voiturier, et du capitaine et qui a la charge de la preuve lorsque cette cargaison était d'une nature ou d'un carac-tère dangereux. Ce texte démontre clairement qu'il pensait à l'article 4 (6) de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis d'autant plus que c'est sur des dispositions que l'intimé avait cherché à s'appuyer pour justifier le déchargement de la cargaison et l'abandon de la traversée. Les premiers mots de l'article 4 (6) sont «Les marchandises de nature inflammable, explosive ou dangereuse». Une jurisprudence abondante in-dique qu'il ne faut pas interpréter le terme «dangereux» comme étant de la
[1970]" R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 481 même nature que les termes «inflammable, explosive». Je lirai donc les termes comme étant «inflammable, explosive ou dangereuse d'une autre façon». Les preuves apportées au savant juge de première instance établissaient d'une manière décisive à mon avis que le concentré de minerai possédait, en plus de la possibilité de se déplacer, la capacité de se liquéfier sous un certain taux d'humidité et sous l'effet de forces coercives. Il s'agissait d'une caractéristique spéciale, non apparente au voiturier et qui créait un danger extérieur à ceux qu'il aurait prévoir et contre lesquels il aurait pu se prémunir. L'affaire Micada Compassia Naviera S.A. v. Texim 28 portant sur le transport de concentrés tranchée après le jugement en question, illustre le progrès des connaissances en matière de concentrés depuis 1962, lorsque s'est produite la présente affaire, à 1968. Dans cette affaire, la charte-partie contenait une clause sur les «marchandises dangereuses». Le capitaine avait exprimé des doutes à l'affréteur sur la teneur en humidité du minerai mais avait reçu l'assurance de l'affréteur que cette teneur se situait entre 4 et 5 p. 100. Le capitaine a entrepris la traversée sans les bardis qu'il aurait installer si la teneur en humidité avait dépassé 7 p. 100. Au cours de la traversée, la cargaison s'est lignifiée et le capitaine a trouvé un port les bardis ont été installés. L'armateur a réclamé les dommages-intérêts qui en ont découlé. L'affaire a tout d'abord été arbitrée, et l'un des arbitres a déclaré: Un capitaine prudent n'arrimerait pas en connaissance de cause une cargaison de concentrés de fer d'une teneur en humidité supérieure à 7 p. 100 sans installer des bardis et ne chargerait pas en connaissance de cause, dans ces circonstances, une cargaison de . concentrés de minerai de fer comportant une teneur en humidité supérieure à 11 p. 100. En appel devant le juge Donaldson, ce dernier a approuvé la conclusion précédente et a poursuivi en déclarant: La raison en est, pour ceux qui ont siégé dans cette cour, que les produits con-centrés de minerai de fer sont connus sous le nom de cargaison thixotropique. Ces cargaisons ont la caractéristique, bien que paraissant sèches au moment du charge-ment, de se liquéfier, sous l'effet de vibrations, si leur teneur en humidité est supérieure au taux critique. Non seulement elles se liquéfient, mais l'eau a ten-dance à remonter en surface ce qui cause deux dangers: le navire est exposé aux effets de l'eau libre et il est impossible de pomper l'eau par les bouchains. On a prétendu dans l'arrêt Micada (voir ci-dessus) que le concentré ne pouvait être considéré comme dangereux parce qu'il n'apparaissait sur au-cune liste, règlement ou code de marchandises dangereuses. L'arbitre a déclaré: Le capitaine ne connaissait pas et ne pouvait pas raisonnablement connaître la nature dangereuse de la cargaison au moment du chargement. Le juge Donaldson a déclaré à cet égard: Que ce soit à tort ou à raison, il me semble qu'il faut considérer ces marchandises comme dangereuses. Le danger consistait en ce que la cargaison n'était pas ce qu'elle paraissait être. D'après ces conclusions des faits, le capitaine, lui avait apporté ce qu'on pourrait décrire comme une cargaison stable et on lui avait offert 20 [1968] 2 LL L.R. 57.
[1970] R.C.A. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 483 comme telle une cargaison libellée «cargaison stable». En fait, nous savons maintenant qu'il s'agissait au moins en partie d'une cargaison instable et qu'il n'aurait pas fallu du tout la charger. En un mot, ce qu'on lui a offert était un loup déguisé en brebis et rien ne pouvait l'avertir que la cargaison était tout à fait et fondamentalement différente de ce qu'elle semblait être. Dans ces circon-stances, il me semble que la cargaison était dangereuse sans qu'il soit nécessaire d'en discuter plus longuement. Il est clair pour moi que les témoignages en l'espèce ont établi de ma-nière irréfutable que la cargaison s'était lignifiée, que le capitaine n'était pas au courant de cette propension caractéristique et ne pouvait s'attendre à le savoir; par conséquent, les conclusions du savant juge de première instance d'après lesquelles la cargaison était dangereuse, sont tout à fait justifiées; je pense qu'il a conclu de la sorte en ayant à l'esprit les dispositions de l'article 4 (6) de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis. L'avocat de l'appelante a, par la suite, soutenu que le navire n'était pas prêt à recevoir la cargaison dans les conditions normales de navigabilité puisque les cales n'avaient pas été correctement balayées, nettoyées et sé-chées, que les bouchains n'avaient pas été rendus imperméables aux infiltra-tions de la cargaison et qu'on n'avait pas prévu de crépines satisfaisantes. Les témoignages ne confirment pas toutes ces affirmations. Les cales du navire avaient été nettoyées au cours de la traversée des Caraibes à Newcastle. M. Peters, représentant de l'affréteur, avait examiné le navire à son arrivée et avait assisté à son chargement. Il a déclaré de manière catégorique que le bateau était en état de recevoir la cargaison. En ce qui concerne l'affirmation selon laquelle les bouchains n'auraient pas été à l'abri des fuites de la cargaison, il semble que le voiturier ne pou-vait pas faire plus que ce qu'il avait déjà fait. Le but était de laisser entrer l'eau dans les bouchains tout en maintenant les particules de concentré à l'extérieur. Tant que la cargaison est restée à l'état solide les installations ont été suffisantes. Quand la cargaison s'est lignifiée, éventualité que le capitaine ne soupçonnait pas et dont le chargeur ne l'avait pas informé, les particules de concentré emportées ont traversé la toile de jute recouvrant les bouchains au point de les obstruer créant ainsi un danger supplémentaire pour le bateau. A mon avis, les témoignages ont établi que les précautions prises étaient suffisantes dans la mesure des connaissances du capitaine sur les propen-sions de la cargaison. Je ne pense pas que les affirmations prétendant que l'équipage n'était pas expérimenté et n'était pas qualifié soient de quelque importance. Il est vrai que le concentré de cuivre était une cargaison qui ne leur était pas familière mais cela n'affecte en rien la qualité des manoeuvres du capitaine et de son équipage. En réponse à l'une de mes questions, l'avocat de l'appelante a reconnu immédiatement que l'on n'avait pas mis en cause les manoeuvres lorsque le bateau s'est trouvé en danger et que l'équipage s'en est aperçu alors qu'il se trouvait en haute mer, avant de modifier l'itinéraire du navire sur Halifax. De même je n'accorde que peu d'importance à la suggestion selon laquelle les barrots d'accès auraient dûs être construits de manière à permettre l'accès
[1970] R.C.E. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 485 et le nettoyage des bouchains. Les témoignages démontrent clairement que la construction du navire avec des bouchains le long des flancs du bateau rendaient la construction de ces barrots d'accès inutiles sauf dans la mesure cela permettait à un homme de pouvoir nettoyer la première travée seulement, le reste des trente autres travées ne pouvaient être nettoyées. Plusieurs témoins ont reconnu que ces barrots d'accès n'auraient été d'aucune utilité pratique. La principale accusation de l'avocat de l'appelante sur l'état de naviga-bilité du navire portait surtout sur le fait de ne pas avoir installé de bardis d'une résistance minimale comme le prévoyait le Code canadien des con-centrés. Il ne fait aucun doute que les bardis étaient par endroit d'une longueur supérieure à celle qu'exigeait le Code. Cependant, comme je l'ai déjà souligné, j'interpréterai le code comme constituant un ensemble de directives du ministère dont dépend le gardien de port. Les bardis doivent être construits et installés à la satisfaction du gardien de port. C'est à lui que revenait la décision finale. La clause 49 de la charte-partie prévoit que lorsque l'humidité de la cargaison est supérieure à la limite d'humidité permise pour le transport, les bardis doivent être installés conformément aux instructions du gardien de port. Ceci a été fait. Je suis porté à penser, que vu les circonstances de l'espèce, le capitaine avait pour responsabilité de satisfaire le gardien de port, ce qu'il a fait. Je ne pense pas que le capitaine l'ait tait négligemment mais plutôt qu'il a exercé une diligence raisonnable. Je ne crois pas qu'il ait manqué à ses obligations envers le gardien de port mais plutôt qu'il a agi d'après les conseils et les directives de celui-ci qui était pour le capitaine la personne la mieux informée. En l'espèce, le voiturier s'appuie sur l'immunité de l'article 4 (6) de la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis selon laquelle, lorsque des marchandises de nature dangereuse sont transportées et qu'il n'a pas acceptées en connaissance de leur nature et de leurs caractéristiques (fait qu'en l'espèce les témoignages démontrent de manière irréfutable), il peut les décharger (comme il l'a fait) . Cependant, l'article 3 (1) de la loi constitue une obligation primordiale. Si elle n'est pas remplie et si le fait de ne pas la remplir provoque des dommages, les immunités de l'article 4 (6) tombent. C'est ce que peut répondre le voiturier en démontrant qu'il exerçait une diligence nécessaire pour mettre le navire en bon état de navigabilité. L'avocat de l'appelante a soutenu que le juge de première instance s'était trompé en concluant que la diligence raisonnable et le sens de l'expression, bon état de navigabilité n'étaient pas en cause en l'espèce. Le juge Pottier a déclaré en substance: Beaucoup de choses ont été dites au sujet de la diligence raisonnable et de la signification de l'expression, bon état de navigabilité. Je crois qu'il s'agit de questions qui ne sont pas soulevées en l'espèce. Il déclarait plus loin: ... La cargaison en question s'est déplacée à babord et rien dans le Code canadien des concentrés n'aurait pu l'empêcher. Les dispositions dudit Code n'ont pas été suivies à la lettre, dans la mesure la cale n° 1 n'était pas arrimée, l'espace entre les étamperches fixés aux barrots mobiles aurait dépassé huit pieds et les bardis n'étaient pas exactement de l'épaisseur voulue. Quelques bardis étaient cassés. Toutes ces déficiences, cependant, n'ont pas été la cause réelle du danger à bord du navire défendeur. 92623-7
[1970] R.C.É. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 487 Le juge de première instance était bien au courant des questions de diligence raisonnable et de bon état de navigabilité; sa première remarque citée ci-dessus doit être envisagée dans le contexte de l'ensemble de ses motifs du jugement. A mon avis, ce qu'il veut dire c'est que, même si le bateau n'était pas en bon état de navigabilité vu l'installation de bardis axiaus de résistance moindre que celle prescrite par le Code canadien des concentrés, ce facteur n'a pas été la cause du dommage. Il a conclu en particulier que même si le code avait été méticuleusement suivi en ce qui concerne les dimensions des bardis, cela n'aurait pas empêché cette cargaison d'un type particulier de se déplacer et de s'entasser comme elle l'a fait. En résumé, il a conclu que le mauvais état de navigabilité n'était pas la cause des dommages et a par conséquent déclaré que le mauvais état de navigabilité et la diligence raisonnable n'étaient pas mis en cause; je pense qu'il a ainsi conclu pour ce motif mais aussi au motif que le capitaine n'avait pas exercé toute la diligence nécessaire pour rendre le navire navigable. L'avocat du demandeur a soutenu que l'appelante, par l'intermédiaire de son directeur du service des mouvements, M. Shields, savait que la cargaison pouvait devenir fluide et par mettre en danger le navire et la vie de son équipage. M. Shields était le directeur du service des mouvements de l'appelante. C'est lui qui a négocié et signé la charte-partie au nom de l'appelante. Il était membre et co-auteur d'une publication éditée en 1959 par le National Cargo Bureau à la demande du U.S. Coast Guard dans laquelle on mentionne le fait que, dans certaines circonstances, les concen-trés deviennent dangereusement fluides. Il n'a pas averti le défendeur de cette propension de la cargaison avant le chargement mais a, par la suite, essayé de persuader le capitaine de réanimer et de poursuivre la traversée après Halifax. A mon avis, il a été démontré de manière probante que ni le capitaine ni l'armateur ne savaient que ce concentré de minerai pouvait se liquifier. Tout ce qu'on leur avait dit c'était que si la teneur en humidité était supé-rieure à un certain pourcentage, il fallait installer des bardis axiaus et qu'il pourrait y avoir de l'eau libre à la surface de la cargaison. De plus, je pense également que les témoignages ont établi que le capi-taine n'avait pas à sa disposition les moyens de connaître la nature de cette cargaison. En tout cas, il est clair que le voiturier n'a pas accepté la cargaison en connaissance de sa nature et de ses caractéristiques au sens des termes de l'article 4 (6) de la Carriage of Goods by Sea Act. Je pense que du point de vue juridique, avoir les moyens de connaître n'équivaut pas à «connaître» à moins que la nature de la cargaison soit universellement connue ou qu'après examen, la nature dangereuse en soit évidente et apparente. Lord Campbell déclarait dans l'arrêt Brass v. Maitland27, à la page 946: Le simple fait d'alléguer les «moyens de connaître» n'aurait pas, à mon avis, été suffisant comme cela aurait pu l'être en faisant appel à des chimistes qualifiés et en recourant à des recherches tout à fait incompatibles avec la pratique ordinaire des entreprises commerciales. 2,119 E.R. 940. 92623-7}
[1970] R.C.A. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 489 Si le chargeur est au courant du caractère dangereux de la cargaison, il est clair, d'après la jurisprudence, qu'il doit en informer le voiturier. Je me demande s'il a été apporté un témoignage direct plutôt qu'élaboré une hypothèse sur la connaissance de la nature dangereuse de la cargaison par Shields et, même si ce témoignage a réellement été déposé, on peut se demander si les connaissances de Shields pouvaient être attribuées à l'appelante. Étant donné ma position en l'espèce, il ne m'est pas nécessaire de résoudre ce point. Dans l'arrêt Brass v. Maitland (voir ci-dessus), la cour a jugé à l'unani-mité que le chargeur avait l'obligation d'avertir le voiturier de tout danger inhérent à la cargaison. La majorité de la cour a estimé que cette obligation était absolue même si le chargeur lui-même ignorait ce danger. La décision majoritaire a été rendue par Lord Campbell avec l'opinion concurrente du juge Wightman. Crompton a soutenu que l'obligation n'était pas absolue et que le chargeur ne pouvait communiquer ce qu'il ne connaissait pas lui-même. Les textes faisant autorité sont d'un avis contraire. Scrutton appuie l'opinion de la majorité alors que Carver appuie l'opinion de la minorité. Dans l'arrêt Burley v. Stepney Borough Council28, la cour mentionnait les décisions contradictoires de l'arrêt Brass v. Maitland (voir ci-dessus) et passait en revue les derniers arrêts ayant adopté l'une ou l'autre opinion et concluait qu'il existe une garantie implicite que les marchandises à transporter doivent l'être en toute sécurité. Le juge Hallett déclarait aux pages 293 et 294: ... Tout d'abord, il soutient qu'il existe une condition implicite dans le con-trat conclu entre les parties, que le refus d'être déplacéet je cite l'alinéa 3 de l'exposé de demandene devrait pas comprendre ce qui est dangereux, explosif ou susceptible de combustion spontanée; et cette affirmation m'a obligé à considérer un nombre considérable d'arrêts car au moins depuis l'arrêt Brass v. Maitland (1856) 6 E. & B. 470, on a douté et discuté de l'étendue de la responsabilité d'une personne qui livre quelque chose à transporter qui se révèle dangereuse. Il y avait, à cet égard, l'opinion de la majorité soutenue par le juge en chef Lord Campbell et par le juge Wightman dans l'arrêt Brass v. Maitland et il y avait l'opinion de la minorité soutenue par le juge Crompton. Depuis il y a eu de nombreux arrêts od le problème a été discuté comme les arrêts: Acatos v. Burns 3 Ex. D. 282; Bamfield v. Goole and Sheffield Transport Company, Ltd., [1910] 2 K.B. 94; Mitchell, Cotts & Co. v. Steel Brothers & Co., Ltd., [1916] 2 K.B. 610; Great Northern Railway Company v. L. E. P. Transport and Depository, Ltd., [1922] 2 K.B. 742; et Transoceanica Societa Italiana di Navigazione v. H. S. Shipton & Sons, [1923] 1 K.B. 31. Les divergences d'opinions sur l'étendue de la responsabilité se rencontrent aussi dans la doctrine car on trouve un point de vue dans «Scrutton on Charter-parties' article 31 et un autre dans cCarver on Carriage of Goods by Sea' aux articles 278 et 279; ces divergences ont été citées dans «Salmond on Torts» 10e édition page 566. Dans l'ensemble, la jurisprudence est à mon avis en faveur de l'opinion selon laquelle il existe une garantie implicite de la sécurité des marchandises à transporter et ceci sans qu'il soit besoin de se demander si la personne livrant les marchandises à transporter a connaissance du danger et si la personne à qui elles 28 (1947) 80 LI. L.R. 289.
[1970] R.C.E. HEATH STEEL MINES LTD v. LERWIN SCHRODER» 491 sont remises est obligée en common law ou par la loi, de les transporter; cepen-dant, je ne pense pas que cette doctrine puisse être convenablement étendue à une affaire de ce genre, si l'on considère à la fois la nature de l'accord commercial conclu entre ces parties et les termes mêmes du contrat écrit passé entre elles. Dans l'arrêt Atlantic Oil Carriers, Ltd. v. British Petroleum Co., (The (Atlantic Duchess») 29, il a été conclu, en raison du texte de la charte-partie, que la clause «Paramount» n'y était pas incorporée. Le juge Pearson a déclaré à la page 121: Je suis cependant porté à croire que l'article IV, r. 6 ne faisait pas partie du contrat de transport conclu entre les demanderesses et les défenderesses. Cette question est devenue un problème secondaire car il est apparu que l'obligation relative à une cargaison dangereuse était fondamentallement la même qu'elle découle de la common law en vertu d'une condition implicite ou qu'elle découle des dispositions de l'article N, r. 6. Quels qu'en soient les fondements, je conclus qu'il n'y a pas manquement à l'obligation. En l'espèce, j'estime que l'article 4 (6) fait partie de la charte-partie mais, même si ce n'était pas le cas, l'obligation du chargeur envers le voi-turier est de toutes façons la même, c'est-à-dire que le chargeur s'engage implicitement à ne pas expédier une cargaison dont l'armateur ne pourrait malgré une attention et une diligence raisonnables, en connaître la nature dangereuse, à moins qu'il en soit informée; le chargeur est, par conséquent, responsable envers toute personne qui serait blessée par l'expédition de marchandises dont la nature dangereuse n'a pas été dévoilée. En l'espèce, le chargeur n'a averti personne de la propension de la car-gaison à devenir fluide. Le voiturier savait seulement que la cargaison avait tendance à se déplacer ce dont il s'est prémuni et ce qui est tout à fait différent de la liquéfaction. En accord avec les conclusions du juge de première instance, je conviens que, ce qui a mis le navire en danger, c'est la nature dangereuse de la cargaison, nature dont le capitaine n'avait pas connaissance et que con-formément à sa propension, la cargaison s'est liquifiée. A mon avis, les témoignages ont confirmé largement ces conclusions. J'ajouterai que d'après les témoignages, je serais aussi prêt à conclure que le capitaine avait exerçé la diligence raisonnable pour rendre le navire navigable. C'est pourquoi, avec le juge de première instance je reconnais que le capitaine était en droit de diriger le navire sur Halifax pour y trouver refuge, de décharger la cargaison et de refuser de la réarrimer et de poursuivre le voyage. Plusieurs témoins ont déclaré, et je suis d'accord avec eux, qu'il aurait été extrêmement dangereux de charger une cargaison humide (comme l'était la cargaison) sur un navire à cargaison sèche (comme l'était le navire). C'est pourquoi je rejette l'appel avec dépens. 26 [1957] 2 LL L.R. 55.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.